Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 2
ARRET DU 19 SEPTEMBRE 2014
(n° 2014- , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/03162
Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Janvier 2012 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2009067325
APPELANT
Monsieur [H] [M]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représenté par Me Dominique OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069
Assistée de Me Charles ROUSSELOT, avocat au barreau de PARIS, toque : P 525
INTIMÉES
SA SAAB AUTOMOBILE AKTIEBOLAG prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 2]
[Localité 3]
Défaillante. Régulièrement assignée.
SAS [Localité 5] AUTOMOBILES prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Lisa GAMBERI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1533 substituant Me Henri-Joseph CARDONA, avocat au barreau de PARIS, toque : D1533
SAS GENERAL MOTORS FRANCE prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 4]
Représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044
Assistée de Me Sophie BEAUCHET, avocat au barreau de PARIS, toque : L118 substituant Me Yann LE DOUARIN de la SELARL GAFTARNIK - LE DOUARIN & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L0118
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Juin 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Françoise MARTINI, conseillère, chargée d'instruire le dossier.
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du code de procédure civile.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Anne VIDAL, présidente de chambre
Madame Françoise MARTINI, conseillère
Madame Marie-Sophie RICHARD, conseillère
Greffier, lors des débats : Monsieur Guillaume LE FORESTIER
ARRÊT :
- par défaut,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Anne VIDAL, présidente de chambre et par Monsieur Guillaume LE FORESTIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
****
Courant 2007, M. [M] a acquis auprès de la société [Localité 5] automobiles un véhicule neuf de marque Saab modèle 9-3 Sport Hatch 1.9 TID 150cv série anniversaire à boîte automatique. Se plaignant d'un manque de puissance du véhicule, il a introduit les 8 et 15 octobre 2009 une action en résolution de la vente et restitution du prix devant le tribunal de commerce de Paris dirigée contre les sociétés [Localité 5] automobiles, Automobiles Paris Etoile et General motors France. Une expertise a été ordonnée par jugement du 27 mai 2010, confiée à M. [Q], qui a déposé son rapport le 7 février 2011. Le 29 juin 2011, M. [M] s'est désisté de ses demandes à l'égard de la société Automobiles Paris Etoile. La société de droit suédois Saab automobile aktiebolag est intervenue volontairement à l'instance le 28 septembre 2011.
Par jugement du 19 janvier 2012, le tribunal de commerce Paris a condamné la société Saab automobile aktiebolag à procéder à la remise en état de marche du véhicule préconisée par l'expert en changeant l'ensemble mototracteur avec ses calculateurs associés, a dit qu'elle devait régler à M. [M] la somme de 3 222 euros en remboursement des frais d'expertise, a débouté M. [M] de ses demandes de remboursement des dépenses d'entretien du véhicule (changement de pneus, vidange, plaquettes de freins) et de frais irrépétibles, a débouté la société [Localité 5] automobiles et la société General motors France de leurs demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile, et a ordonné l'exécution provisoire. Le tribunal a retenu du rapport de l'expert qu'il y avait un manque de puissance à bas régime mais non un manque de puissance réelle, que le comportement de la Saab de M. [M] n'était pas propre à ce véhicule, qu'aucun organe responsable n'avait été identifié et que le changement préconisé était une solution techniquement satisfaisante.
M. [M] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 15 octobre 2012 intimant les sociétés [Localité 5] automobiles et General motors France. A la demande de la cour, il a appelé en la cause la société Saab automobile aktiebolag le 21 novembre 2013.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 14 mai 2014, il demande in limine litis d'écarter la pièce n°3 produite par la société [Localité 5] automobiles consistant en un bon de commande, expliquant que le prix mentionné ne correspond pas à celui auquel il a acquis le véhicule et porte une signature qui n'est pas la sienne, ou d'ordonner une mesure de vérification d'écriture et de surseoir à statuer. A défaut, il demande au visa des articles 1153, 1154, 1641, 1644 et 1645 du code civil et 10 du décret 96-1080 du 12 décembre 1996 d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions, de refuser l'intervention de la société Saab automobile aktiebolag pour défaut d'intérêt à agir, de prononcer la résolution de la vente du véhicule au titre de la garantie des vices cachés, de condamner in solidum la société [Localité 5] automobile et la société General motors France à lui restituer la somme de 39 673 euros au titre du prix de vente avec intérêts légaux capitalisés à compter du 7 juillet 2009 contre restitution par lui-même du véhicule qu'elles devront venir chercher à leurs frais à toute adresse en France métropolitaine qu'il leur communiquera dans les huit jours suivant le prononcé de l'arrêt, ceci sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de l'arrêt dont la cour se réservera la liquidation, et de désigner aux frais exclusifs d'[Localité 5] automobile et de General motors France un huissier de justice chargé d'organiser le rendez-vous de restitution du véhicule, d'y assister et d'en dresser procès-verbal. Il demande en outre de les condamner in solidum à lui rembourser les frais d'expertise de 3 222 euros, les frais de changement d'alternateur, contrôle technique, changement des disques et plaquettes de freins d'un montant de 1 312,59 euros, les frais de location d'un véhicule de remplacement pour 2 244 euros, les frais d'huissier à la charge du créancier en cas de recours à un tel huissier pour l'exécution des condamnations pécuniaires à intervenir, à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.
Il fait valoir que le véhicule livré le 23 mai 2007 n'a jamais donné satisfaction, qu'une faiblesse à l'accélération à bas régime est rapidement apparue, qu'il l'a signalée dès la première révision à son garagiste la société Automobiles Paris Etoile, que le service clientèle du fabricant n'a proposé aucune solution satisfaisante, qu'il a donc dû solliciter la résolution de la vente, mais que le tribunal de commerce a statué extra petita en condamnant à des réparations jamais demandées une partie dont il avait contesté l'intervention volontaire, que la résolution doit être prononcée au regard de la dangerosité du véhicule qui le rend impropre à son usage comme le confirment deux accidents survenus en 2009, et que les défendeurs ne peuvent utilement contester le prix de vente dont il justifie.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 13 mai 2014, la société [Localité 5] automobile demande de débouter M. [M] de toutes ses demandes, de confirmer le jugement et de le condamner à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. Elle soutient que le rapport de l'expert n'a pas retenu l'existence d'un vice caché, que l'utilisation par M. [M] n'a pas été rendue impossible puisqu'il a parcouru 74 000 km avec le véhicule, que le prix de vente est de 33 072 euros comme l'atteste la facture déduction faite de la remise accordée, et que l'obligation de sécurité incombe au fabricant et non au vendeur qui n'a pas en outre été chargé de l'entretien.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 20 mai 2014, la société General motors France demande de réformer le jugement, de dire que M. [M] ne rapporte pas la preuve d'un vice caché qui affecterait son véhicule et subsidiairement que ses demandes ne sont justifiées ni dans leur principe ni dans leur montant, les désordres allégués n'ayant pas été de nature à priver l'appelant d'un usage normal et quotidien de son véhicule, en conséquence de le débouter de l'intégralité de ses demandes et de le condamner à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
L'appelant a fait signifier sa déclaration d'appel et ses conclusions le 21 novembre 2013 dans les formes de l'article 659 du code de procédure civile à la société Saab automobile aktiebolag qui n'a pas constitué avocat.
Présent à l'audience de plaidoirie, M. [M] a remis un spécimen de sa signature qui a été versé au dossier de la cour.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La vérification d'écriture ne s'impose en application de l'article 287 du code de procédure civile que si le juge ne peut statuer sans tenir compte de l'écrit contesté. La communication par la société [Localité 5] automobiles du «bon de commande de véhicule neuf» au prix de 33 072 euros(pièce n° 3) dont l'appelant dénie la signature n'a pas d'autre finalité que de réfuter le prix dont la restitution est revendiquée à hauteur de 39 673 euros. L'objet de la commande n'est pas lui-même discuté et porte bien sur le véhicule Saab modèle 9-3 Sport Hatch 1.9 TID 150cv série anniversaire livré le 23 mai 2007 et ses options (peinture, boîte automatique, toit ouvrant, commande de la boîte de vitesse au volant). Le prix du véhicule et des options détaillé sur le bon de commande daté du 7 mars 2007 et le duplicata de la facture émise le 14 mai 2007 par la société [Localité 5] automobiles est identique à celui mentionné sur le document «proforma» daté du 18 avril 2007 communiqué par l'appelant, lequel s'abstient pour sa part de verser au dossier les documents contractuels en sa possession. Dans son calcul, il entend en réalité intégrer à tort au total de 30 000 euros TTC porté sur le document «proforma» l'intégralité d'un poste «remise/reprise» de 8 087,79 euros HT ou 9 673 euros TTC au lieu du seul montant de la reprise, tandis que le poste «remises» est quant à lui dûment déduit des documents communiqués par le vendeur. En tout état de cause, la restitution sollicitée et la détermination de son montant supposent la résolution préalable de la vente recherchée par M. [M].
L'appel en intervention forcée de la société Saab automobile aktiebolag devant la cour ne peut être déclarée irrecevable alors que l'appel tend à l'infirmation du jugement entré en voie de condamnation à son encontre et qu'elle est donc directement intéressée par les dispositions critiquées.
Saisi d'une demande de résolution de la vente dirigée contre la société [Localité 5] automobiles, le tribunal, lié par les prétentions des parties en application des articles 4 et 5 du code de procédure civile, ne pouvait prononcer comme il l'a fait une remise en état du véhicule à la charge de la société de droit suédois Saab automobile aktiebolag considérée comme venant aux droits du fabricant, la société General motors France. Le jugement devra donc être infirmé.
Selon l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. Dans son rapport déposé le 4 février 2011, l'expert a observé que le comportement du véhicule était «exagérément creux» en dessous de 2 000 tours/minute, le moteur ne répondant que très lentement, induisant avec une boîte de vitesse automatique des temps moyens de redémarrage à pleine charge de 2,5 secondes en moyenne pour atteindre le régime moteur de 2 000 tours/minute. Il a toutefois ajouté que ses investigations n'avaient pas permis d'identifier de dysfonctionnement d'un organe particulier du véhicule au regard de ses caractéristiques de construction, et a procédé à un essai sur un véhicule comparable ayant la même motorisation l'ayant conduit à constater un comportement identique lié à la conception du véhicule. Il a estimé que ce manque de puissance à bas régime était un défaut de comportement «inacceptable» dans certaines conditions, comme un redémarrage dans un rond point ou un lancement sur la bretelle de raccordement d'une voie rapide, mais a précisé en réponse à un dire du conseil de General motors que ce comportement était «gênant» dans les circonstances où il fallait accélérer énergiquement et «préoccupant» en ce sens que le conducteur devait «prévoir» la manoeuvre, ajoutant que celui-ci pouvait tenir compte puisque le comportement était identifié et constant. Le manque de puissance ainsi constaté à bas régime a donc trait à la performance du moteur, sans procéder d'un vice de construction ni rendre le véhicule inapte à une circulation normale. Au demeurant, M. [M], qui indique avoir ressenti immédiatement le manque de puissance, a utilisé le véhicule sans difficulté pendant un an et parcouru 20 850 kms avant de mentionner l'inconvénient lors de la première révision le 6 juin 2008. Les accidents qu'il invoque concernent, selon les constats amiables dressés les 6 et 12 février 2009, des collisions survenues par refus de priorité imputé au conducteur adverse circulant sur le boulevard périphérique parisien au moment où lui-même s'y engageait, et non en raison d'un comportement objectivement inadapté de son propre véhicule. La preuve d'un vice caché au sens des dispositions précitées n'étant pas rapportée, M. [M] sera débouté de toutes ses demandes.
Il est équitable de compenser les frais non compris dans les dépens que les sociétés [Localité 5] automobiles et General motors France ont été contraintes d'exposer, chacune à hauteur de 2 000 euros.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement et par défaut,
Infirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,
Et statuant à nouveau,
Déboute M. [M] de toutes ses demandes,
Le condamne aux dépens de première instance et d'appel, avec droit de recouvrement direct dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile, et à verser à la société [Localité 5] automobiles et à la société General motors France la somme de 2 000 euros chacune en application de l'article 700 du même code.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT