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02/07/2014 | FRANCE | N°13/12121

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 02 juillet 2014, 13/12121


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 3 - Chambre 1



ARRÊT DU 02 JUILLET 2014



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/12121



Décision déférée à la Cour : Sur renvoi après cassation, par arrêt prononcé le 27 février 2013 par la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation, d'un arrêt prononcé le 18 novembre 2010 par la Cour d'appel de VERSAILLES, sur appel d'un jugement r

endu le25 mai 2007 par le Tribunal de grande instance de NANTERRE





DEMANDERESSES A LA SAISINE





1°) Madame [G] [V] épouse [Y]

née le [Date naissance 4] ...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRÊT DU 02 JUILLET 2014

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/12121

Décision déférée à la Cour : Sur renvoi après cassation, par arrêt prononcé le 27 février 2013 par la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation, d'un arrêt prononcé le 18 novembre 2010 par la Cour d'appel de VERSAILLES, sur appel d'un jugement rendu le25 mai 2007 par le Tribunal de grande instance de NANTERRE

DEMANDERESSES A LA SAISINE

1°) Madame [G] [V] épouse [Y]

née le [Date naissance 4] 1946 à [Localité 3]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

2°) Madame [A] [V] épouse [S]

née le [Date naissance 3] 1945 à [Localité 3]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

3°) Madame [SL] [V] épouse [L]

née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 3]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

4°) Madame [N] [V] épouse [JM]

née le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 3]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentées par Me Sylvie CHARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0079, postulant

assistées de Me Muguette ZIRAH RADUSZYNSKI, avocat au barreau de PARIS,

toque : C1032, plaidant

DÉFENDEURS A LA SAISINE

1°) Monsieur [K] [V]

né le [Date naissance 5] 1950 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté et assisté de Me Emmanuel JARRY de le SELARL GICQUEL ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1463

2°) Monsieur [W] [QU]

Mandataire Judiciaire es qualité d'Administrateur de la succession Françoise LEVERRIER-RAVIER

[Adresse 3]

[Adresse 3]

défaillant

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 03 juin 2014, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Dominique REYGNER, président,

Madame Nathalie AUROY, conseiller

Madame Monique MAUMUS, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier :

lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Marie-France MEGNIEN

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Dominique REYGNER, président, et par Madame Marie-France MEGNIEN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

[H] [Q], veuve [D], est décédée le [Date décès 1] 1968, laissant pour lui succéder ses quatre enfants :

- Madame [H] [D], épouse [O],

- Monsieur [I] [D],

- Madame [Z] [D], divorcée [P],

- [X] [D], épouse [V].

Il dépend de l'actif de sa succession un immeuble situé au [Adresse 2], hôtel particulier, divisé en quatre lots, correspondant respectivement au rez-de-chaussée, et aux 1er, 2ème et 3ème étages de l'immeuble.

Par acte sous seing privé du 20 mars 1957, [H] [Q] avait consenti à sa fille [X] [D] et à son mari, [U] [V], un bail selon les dispositions de la loi du 1er septembre 1948 portant sur les lots n°2 et 3 de l'immeuble ( premier et deuxième étages de l'hôtel particulier), bail prorogé le 2 février 1967.

Par ordonnance de référé en date du 19 octobre 2001,

Maître [T] [J] a été désigné en qualité d'administrateur provisoire

de la succession de [H] [Q].

Par ordonnance du 28 mai 2003, Maître [R] [F] a été désigné en remplacement de Maître [J] et sa mission est toujours en cours.

[X] [V] est décédée le [Date décès 3] 1993 et son époux, [U] [V], le [Date décès 2] 2000.

Viennent à la succession de [X] [V], leurs cinq enfants:

- M. [K] [V],

- Mme [G] [V], épouse [Y],

- Mme [SL] [V], épouse [L],

- Mme [N] [V], épouse [JM],

- Mme [A] [V], épouse [S].

Par ordonnance sur requête rendue le 6 janvier 2005, le président du tribunal de grande instance de Nanterre a désigné Maître [W] [QU] en qualité de mandataire ad hoc de la succession de [X] [V], avec pour mission de :

« 1°/ représenter la succession de [X] [V] dans la liquidation de la succession de Madame [Q] Veuve [D] et notamment pour participer aux opérations de comptes, liquidation et partage de la succession [D] et autoriser la succession [D] à donner congé à [K] [V] de l'appartement qu'il occupe, précédemment occupé par son père de son vivant. (lot n°3)

2°/ au nom de la succession de [X] [V], demander l'expulsion de [K] [V] du lot n°2, attribué à [X] [V], et faire toute procédure de nature à obtenir, dans l'attente de son expulsion, le versement par [K] [V] d'une indemnité d'occupation. ».

Par jugement du 12 décembre 2007, le tribunal d'instance de Neuilly a, pour l'essentiel :

- déclaré recevable Maître [QU] et les consorts [O] et [V] en leur action en ce qu'elle appuie les prétentions de Maître [F],

- dit que M. [V] occupe les lieux en vertu d'un bail, mais qu'il ne peut être déterminé en l'état s'il est soumis à la loi du 1 er septembre 1948 ou à celle du 6 juillet 1989,

- désigné un expert judiciaire avec pour mission :

* de déterminer de quelle catégorie et éventuellement sous-catégorie relèvent les lieux occupés par [K] [V],

* de dire, s'ils relèvent des catégories exceptionnelles, I ou 2A (et si les demandeurs le souhaitent) quelle est leur valeur locative, autrement dit quel loyer (par référence à ceux habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables) pourrait être demandé à [K] [V] sur le fondement de la loi du 6 juillet 1989,

* de dire, s'ils ne relèvent pas de l'une de ces trois catégories (et si les demandeurs le souhaitent) quel serait le montant du loyer légal (en vertu notamment de l'article 27 de la loi du 1er septembre 1948), après avoir établi un décompte de surface corrigée,

* de faire, de façon générale, toutes constatations et propositions utiles au règlement du litige.

[K] [V] a interjeté appel de ce jugement et par arrêt en date du 25 juin 2009, la cour d'appel de Versailles, a, pour l'essentiel :

- dit que M. [V] ne bénéficie personnellement d'aucun droit au bail sur les lots n°2 et 3 de l'immeuble sis [Adresse 2] ;

- dit qu'il devra en conséquence libérer les lieux dans un délai de 2 mois à compter du commandement qui lui sera délivré et qu'à défaut il pourra être procédé à son expulsion et à l'évacuation du mobilier dans les conditions prévues par la loi 91-650 du 9 juillet 1991 et au besoin avec l'assistance de la force publique ;

- dit que Me [QU], ès-qualités, est recevable en sa demande tendant à voir condamner M. [V] au paiement d'une indemnité d'occupation ;

- condamné M. [V] à payer à Me [F], ès-qualités, une indemnité d'occupation mensuelle d'un montant de 2.000 euros à compter du 1er mars 2000 et jusqu'à la libération effective des lieux et dit en conséquence que M. [V] versera à Me [F], ès-qualités, la somme de 220 000 euros pour les indemnités dues de mars 2000 à avril 2009 compris ;

- débouté M. [V] de sa demande de condamnation de Me [F], ès-qualités, à lui payer 15 000 euros de dommages et intérêts.

M. [V] ayant formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cet arrêt du 25 juin 2009, qui a été exécuté, la Cour de cassation par arrêt du 18 septembre 2013, a dit y avoir lieu à surseoir à statuer, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, en attendant la décision définitive de la cour d'appel de Paris sur la demande d'attribution préférentielle du bail de M. [V].

Par jugement en date du 25 mai 2007, le tribunal de grande instance de Nanterre, saisi par Mmes [V] par acte d'huissier des 13 et 16 avril 2004, Me [QU] étant intervenu volontairement à l'instance, a :

- déclaré irrecevable la demande de ce dernier en expulsion de M. [V],

- ordonné l'attribution préférentielle au profit de M. [V] du droit au bail relatif aux lots 2 et 3 de l'état descriptif de division de l'immeuble du [Adresse 2] et dépendant de l'indivision successorale de [H] [Q] Veuve [D],

- rejeté tous autres chefs de demandes,

- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Mmes [V] ayant interjeté appel de ce jugement, par arrêt du 18 novembre 2010, la cour d'appel de Versailles l'a infirmé et statuant à nouveau, a, pour l'essentiel, débouté M. [V] de sa demande d'attribution préférentielle ainsi que de toute autre demande et l'a condamné à verser aux appelantes une somme de 5 000 euros en réparation de leur préjudice moral ainsi que 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre celle de 2 000 € sur ce même fondement au profit de Me [QU].

M. [V] s'est pourvu en cassation à l'encontre de cette décision, faisant grief à l'arrêt d'avoir écarté sa demande d'attribution préférentielle du droit au bail en retenant un moyen dont les parties n'avait pas débattu, tiré de la rupture d'égalité entre co-indivisaires que créerait cette attribution.

Par arrêt du 27 février 2013, la Cour de cassation a censuré la Cour d'appel sur le moyen proposé, en considérant, au visa des articles 7 et 16 du code de procédure civile, que la Cour aurait dû inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen relevé d'office et a renvoyé les parties devant la cour d'appel de PARIS.

Mme [G] [V], épouse [Y], Mme [A] [V], épouse [S], Mme [SL] [V], épouse [L] et Mme [N] [V], épouse [JM] ont saisi la cour et dans leurs dernières conclusions du 28 mai 2014 demandent de :

- déclarer recevables et bien fondées leurs demandes,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nanterre le 25

mai 2007,

- en conséquence,

* sur l'attribution préférentielle,

- constater que M. [V] ne remplit pas les conditions posées par l'article 832

du code civil pour bénéficier de l'attribution préférentielle,

- constater en outre que l'attribution préférentielle favoriserait de façon injustifiée M. [V] au détriment des appelantes, qui se verront privées de la faculté de négocier une indemnité d'éviction, contrairement à ce dernier,

- constater enfin que l'attribution préférentielle va constituer un obstacle à la cession de l'immeuble au meilleur prix,

- en conséquence,

- infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné l'attribution du droit au bail des lots n°2 et 3 au bénéfice de M. [V],

* sur leur demande d'indemnisation,

- constater que M. [V] occupe seul les lots n°2 et 3 de l'immeuble situé [Adresse 2], et crée une rupture d'égalité entre les co-indivisaires,

- constater l'atteinte à leurs droits en qualité d'indivisaires,

- constater l'existence de préjudices indéniables subis par elles,

- constater le bien-fondé de la demande d'indemnisation dans son principe et dans son montant,

- en conséquence,

- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnisation formulée par elles,

- condamner M. [V] à leur payer une somme symbolique de un euro à chacune en réparation du préjudice qu'elles subissent,

- en tout état de cause,

- condamner M. [V] à payer à chacune d'elles la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le

recouvrement sera assuré conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 30 mai 2014, M. [V] demande à la cour de :

- dire que l'existence d'un bail venant au profit de l'indivision [V] constituée de

Mesdames [V] et lui, est reconnue par l'ensemble des héritiers [V] et n'est plus utilement contestable,

- dire que, s'il n'avait pas déclaré, à tort, ses revenus pour l'année 1999 au centre des Impôts de [Localité 2], il n'en est pas moins vrai que les très nombreuses pièces et documents communiqués, parmi lesquelles notamment et pas exclusivement ses deux contrats de travail signés en 1991, la lettre du Centre des Impôts de [Localité 1] du 2 octobre 2001 et l'avis d'imposition sur le revenu au titre de l'année 2000,démontrent bien qu'au moment des décès de sa mère le [Date décès 3] 1993 et de son père le [Date décès 2] 2000 le lieu de sa résidence habituelle et effective, où se situait le centre de ses intérêts matériels et professionnels, se trouvait bien jusqu'au 1er avril 2011, date de son éviction forcée, dans l'appartement des premier et deuxième étages (lots n°2 et 3) de l'immeuble indivis [D] sis [Adresse 2],

- dire qu'il satisfait à toutes les conditions légales pour se voir accorder l'attribution préférentielle à son profit exclusif du droit au bail à usage d'habitation de

l'appartement des premier et deuxième étages, lots 2 et 3 de l'état descriptif de division de l'immeuble sis [Adresse 2],

- dire que Mesdames [V] ont reconnu sa solvabilité,

- constater qu'il demande à la cour cette attribution préférentielle du

droit au bail pour des raisons affectives et qu'il ne veut pas négocier d'indemnité d'éviction,

- dire que ni Mesdames [V], ni Maître [QU], administrateur de la succession [V], n'apportent de preuve tangible qu'il serait l'unique bénéficiaire d'une indemnité d'éviction, ni d'une indemnisation pour quitter les locaux litigieux,

- dire que ni Mesdames [V], ni Maître [QU], ne démontrent que l'attribution préférentielle à lui seul du droit au bail de l'appartement litigieux entraînera une rupture d'égalité entre les héritiers [V],

- confirmer en conséquence le jugement du 25 mai 2007 en ce qu'il a ordonné l'attribution préférentielle à son profit exclusif du droit au bail à usage d'habitation de l'appartement des premier et deuxième étages, lots 2 et 3 de l'état descriptif de division de l'immeuble sis [Adresse 2], dépendant de l'indivision successorale de [M] dite [H] [Q] veuve [D], consenti le 20 mars 1957 par [M] dite [H] [Q] veuve [D], sa grand-mère, à Monsieur et Madame [U] [V], ses parents, à effet du [Date décès 2] 2000,

- dire que Mesdames [V] n'ont subi aucun préjudice, ni en tant que membre de la succession [V] qui n'est pas propriétaire à ce jour du lot n°2 de l'immeuble indivis [D], ni en tant que membre de la succession [D] qui en la personne de Maître [R] [F], administrateur de l'immeuble indivis [D], reçoit bien chaque trimestre de lui seul le montant du loyer contractuel dû par l'indivision [V],

- confirmer en conséquence le jugement du 25 mai 2007 en ce qu'il a débouté Mesdames [V] de leur demande d'indemnisation,

- débouter Mesdames [V] et Maître [QU], administrateur de la succession [V] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- en toute hypothèse,

- dire qu'en contestant en 2008 devant la 1ère Chambre 1ère Section de la cour d'appel de Versailles l'existence d'un bail venant au profit de l'indivision [V], puis en reconnaissant en 2009 l'existence d'un tel bail devant la 1ère Chambre 2ème Section de cette même Cour, Mesdames [V] lui ont causé des préjudices moral et financier considérables,

- condamner en conséquence conjointement et solidairement Mesdames [V] à lui payer la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice moral subi,

- condamner conjointement et solidairement chacune des appelantes à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Maître [QU], solidairement avec Mesdames [V], à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages,

- condamner Maître [QU], solidairement avec Mesdames [V], à lui payer la somme de 5 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner conjointement et solidairement les appelantes et Maître [QU] aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans des conclusions de procédure du 2 juin 2014, Mmes [V] demandent à la cour de rejeter des débats les conclusions signifiées le 30 mai 2014 par M. [V].

Dans des conclusions de procédure du 3 juin 2014, M. [V] demande à la cour de :

- dire n'y avoir lieu à écarter des débats ses conclusions du 30 mai 2014,

- subsidiairement,

- écarter des débats les conclusions des appelantes du 28 mai 2014.

Me [QU] assigné par acte d'huissier du 18 février 2014 délivré à Mme [B], employée qui a accepté de recevoir l'acte, n'a pas constitué avocat.

SUR CE, LA COUR,

sur la procédure

Considérant que Mmes [V] ont déposé le 17 juin 2013 une déclaration de saisine après renvoi de l'affaire devant la présente cour par la Cour de cassation; qu'elles ont conclu le 30 janvier 2014 ; que M. [V] a conclu le 6 mai 2014 ; que l'ordonnance de clôture prévue pour être prononcée le 20 mai 2014 a été repoussée au 3 juin 2014 ; que les demanderesses à la saisine ont alors à nouveau conclu le 28 mai 2014 et que M. [V] a lui-même à nouveau conclu le 30 mai 2014 ;

Considérant que les écritures respectives des parties déposées avant l'ordonnance de clôture ne comportant ni moyens, ni prétentions nouvelles, leur rejet n'est pas justifié de sorte que la cour statue sur les dernières conclusions susvisées ;

sur le fond

Considérant que par acte sous seing privé du 20 mars 1957, [H] [Q] Veuve [D] a consenti un bail à sa fille [X]

[D] et à son mari, [U] [V] selon les dispositions de la loi du 1er septembre 1948 portant sur les lots n°2 et 3 de l'immeuble, c'est à dire les premier et deuxième étages de l'hôtel particulier ;

Qu'aux termes de deux testaments olographes en date des 23 décembre 1955 et 15 mars 1961, [H] [D] a institué légataire à titre particulier

des lots n°2 et n°3 de l'immeuble situé au [Adresse 2], sa fille [X] [V] ;

Considérant que les appelantes exposent que dans le cadre des opérations de partage et de liquidation de la succession de [H] [D], [X] [V] a renoncé à l'attribution préférentielle du second étage, sans renoncer au legs de ce lot n°3 et a obtenu l'attribution préférentielle du lot n°2 ( l'appartement du premier étage) par arrêt de la cour d'appel de Versailles en date du 12 septembre 1989, et également aux termes d'un autre arrêt de la cour d'appel de Versailles du 25 mai 1992 ; que par jugement du 24 février 2000, rectifié le 28 septembre 2000, le tribunal de grande instance de Nanterre a rappelé que la succession de [X] [V] bénéficiait de l'attribution préférentielle du lot n°2 de l'immeuble, qui s'était transmise à ses héritiers à la suite de son décès ; que ce même jugement a constaté que le bail conclu au profit des époux [V] en 1957 s'était poursuivi, car [U] [V] en était bénéficiaire, tout comme son épouse et nonobstant l'attribution préférentielle du lot n°2 car celle-ci n'entraîne la propriété du bien qu'au jour du partage, et qu'il s'agit seulement d'une promesse d'allotissement pour la succession [V], le bail s'étant également poursuivi concernant le lot 3 ;

Considérant qu'en application de l'article 832 du code civil, le conjoint survivant ou tout héritier copropriétaire peut demander l'attribution préférentielle par voie de partage, à charge de soulte s'il y a lieu, de la propriété ou du droit au bail du local qui lui sert effectivement d'habitation, s'il y avait sa résidence à l'époque du décès ;

Considérant que cette attribution préférentielle impose des conditions relatives à la résidence de celui qui prétend en bénéficier mais n'est pas de droit, le juge devant apprécier s'il convient ou non de l'accorder, en fonction des intérêts

en présence ;

Considérant que c'est par des motifs exacts et pertinents, que la cour adopte, que les premiers juges ont dit qu'il résultait de l'ensemble des éléments produits par M. [V] qu'il avait sa résidence au moment du décès de son père, le [Date décès 2] 2000, dans les lieux litigieux ;

Qu'il suffit d'ajouter que le fait invoqué par les appelantes que M. [V] n'était pas fiscalement imposable à [Localité 2] au moment du décès de son père et qu'il n'a payé que le cinquième de la taxe d'habitation alors que selon elles, s'il habitait sur place au moment de ce décès, comme il le prétend, il aurait pris à sa seule charge cette taxe d'habitation, ne sont pas susceptibles de remettre valablement en cause la réalité de l'établissement de l'intimé dans les lieux dès lors que le domicile fiscal est un élément parmi d'autres pour établir la réalité d'une résidence mais n'est pas à lui seul déterminant et que la prise en charge de la taxe d'habitation par l'indivision plutôt que par l'occupant est indifférente quant aux droits de ce dernier sur les lieux ;

Considérant, en ce qui concerne l'examen des intérêts en présence, que les appelantes exposent, d'une part, que M. [V] possède des biens propres, et n'est donc pas dans une situation si difficile qu'il le prétend, et d'autre part, que l'octroi à son profit de l'attribution préférentielle du droit au bail viendrait créer une rupture d'égalité entre les indivisaires d'autant plus qu'il ne justifie pas d'un intérêt prédominant sur celui de ses s'urs à bénéficier de cette attribution préférentielle ; que même s'il décidait éventuellement de ne pas exercer la faculté que lui donnerait l'attribution du droit au bail de négocier une indemnité d'éviction, il n'en resterait pas moins que de façon certaine, l'attribution préférentielle du bail à son profit va les priver de la possibilité d'obtenir pour elles-mêmes cette indemnité d'éviction et que le maintien dans les lieux de leur frère va empêcher une valorisation optimale du bien immobilier, composé non seulement du lot n°2, mais également des lots n°1,3 et 4 sur lesquels elles ont des droits indivis en leur qualité d'héritier de leur grand-mère [H] [Q] ;

Considérant que M. [V] rappelle qu'il a vécu dans cet appartement litigieux avec ses parents depuis l'âge de cinq ans de 1956 jusqu'à son mariage en juillet 1976, puis de nouveau de novembre 1979, date de la séparation avec sa femme, jusqu'à son départ en Angleterre en 1984, étant ajouté qu'au cours de cette dernière période à Londres, il rentrait dans l'appartement familial durant chaque fin de semaine, et enfin depuis 1991 à son retour de Londres, de manière

permanente, et qu'il est tout particulièrement attaché sentimentalement à ces lieux ; que son souhait est de retourner vivre pour des raisons affectives dans ces lieux où il a pratiquement toujours vécu jusqu'au 1 er avril 2011, jour de son éviction forcée ; que Mesdames [V] n'apportent devant la cour aucune preuve tangible contraire tendant à lui démontrer qu'il veut négocier de telles indemnités pour lui seul pour la simple raison qu'il n'en existe pas ;

Considérant qu'il convient de rappeler la description des lieux pour lesquels M. [V] revendique l'attribution préférentielle du droit au bail ;

Qu'ainsi, aux termes du rapport du18 octobre 2008 de M. [C] 'L'appartement [V] est composé de 2 étages, mais "sans escalier privatif". Pour passer du 1er étage au 2ème étage (et vice & versa) il faut passer par les "parties communes", c'est-à-dire l'escalier commun de l'immeuble' ; que selon le rapport du 13 mars 2009 de M. [E], expert judiciaire,"Le hall d'entrée de l'immeuble est peu spacieux (hall de 1.50 de large) et en mauvais état.

Il n'y a ni digicode, ni interphone, ni gardien, ni ascenseur" ; que ces lieux ne forment pas un tout. La partie jour est au 1er étage et la partie nuit au 2

ème étage. Pour passer de l'un à l'autre, il faut passer par les parties communes.

La distribution n'est pas fonctionnelle" ;

Considérant que les appelantes font valoir à juste titre qu'il résulte de la configuration des biens que la valorisation de l'ensemble immobilier sera beaucoup plus importante que celle des appartements pris individuellement ;

Considérant, en effet, que l'octroi de l'attribution préférentielle du droit au bail à M. [V] sur les 2ème et 3ème étage, serait de nature à paralyser le règlement de la succession de sa grand-mère comme de sa mère, ouvertes respectivement depuis 1968 et 1993 de sorte que si des considérations tenant à l'attachement sentimental de M. [V] auxdits lieux sont dignes d'intérêt, le souhait de ses soeurs de voir progresser le règlement de ces successions apparaît tout aussi digne d'attention et qu'en conséquence, l'examen des intérêts en présence impose de ne pas faire droit à sa demande d'attribution préférentielle ;

Que le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a ordonné l'attribution préférentielle au profit de M. [V] ;

Considérant que les appelantes arguent du comportement particulièrement égoïste de leur frère à l'origine d'une rupture d'égalité entre les indivisaires, rupture d'égalité fautive et de nature à engendrer un préjudice à leur égard et réclament à ce titre la somme de un euro à titre de dommages-intérêts ;

Considérant toutefois que la faute de l'intimé et le préjudice des appelantes n'étant pas suffisamment démontrés, elles doivent être déboutées de leur demande de ce chef ;

Considérant que la demande de dommages-intérêts formée par M. [V], eu égard au débouté de sa demande principale, n'est pas fondée et doit être rejetée ;

PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement du 25 mai 2007 du tribunal de grande instance de Nanterre sauf en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages-intérêts des parties,

Statuant à nouveau,

Rejette la demande d'attribution préférentielle du droit au bail à usage d'habitation de l'appartement des premier et deuxième étages, lots 2 et 3 de l'état descriptif de division de l'immeuble sis [Adresse 2] formée par M. [V],

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. [V], le condamne à payer à chacune des appelantes la somme de 1 500 €,

Accorde à l'avocat postulant des appelantes le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 13/12121
Date de la décision : 02/07/2014

Références :

Cour d'appel de Paris E1, arrêt n°13/12121 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-07-02;13.12121 ?
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