Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRÊT DU 21 MAI 2014
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/03629
Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Février 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/03778
APPELANTS
1°) Madame [V] [W] épouse [A]
née le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 3] (MAROC)
[Adresse 2]
[Localité 1]
2°) Monsieur [P] [W]
né le [Date naissance 3] 1948 à [Localité 3] (MAROC)
[Adresse 3]
[Localité 6] (CANADA)
Représentés par Me Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029, postulant
assistés de Me Carole BORGHINI, avocat au barreau de NICE, plaidant
INTIMÉE
Madame [Z] [G] veuve [W]
née le [Date naissance 1] 1931 à [Localité 2]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée et assistée de Me Yves VIVIEZ DE CHATTELARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C1259
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 02 avril 2014, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Dominique REYGNER, président,
Madame Nathalie AUROY, conseiller
Madame Monique MAUMUS, conseiller
qui en ont délibéré
Greffier :
lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Marie-France MEGNIEN
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Dominique REYGNER, président, et par Madame Marie-France MEGNIEN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* *
[X] [W] est décédé le [Date décès 1] 2010 laissant pour lui succéder , M. [P] [W] et Mme [V] [W] épouse [A], ses deux enfants issus de son union avec [Y] [B], prédécédée, et Mme [Z] [G] veuve [W], son épouse en secondes noces avec laquelle il s'était marié le [Date mariage 1] 1977 sous le régime de la séparation de biens.
Au cours du mariage, par acte du 20 janvier 1988, Mme [Z] [G] veuve [W] a acquis un bien immobilier situé [Adresse 1] .
M. [P] [W] et Mme [V] [W] épouse [A] ayant saisi le tribunal de grande instance de Paris par assignation du 6 février 2012 afin de voir ordonner l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [X] [W], soutenant que le bien immobilier dont Mme [Z] [G] veuve [W] est propriétaire [Adresse 1] avait été financé par leur père et que devait être rapportée à la masse successorale la valeur du bien immobilier acquis à hauteur de 96,45 % en tenant compte des apports réalisés, et qu'il s'agissait d'une donation déguisée constituant un recel successoral, le tribunal, par jugement du 6 février 2013, les a déboutés de l'ensemble de leurs demandes et les a condamnés aux dépens, déboutant Mme [G] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [W] et Mme [A] ont interjeté appel de ce jugement par déclaration du 22 février 2013.
Dans leurs dernières conclusions du 5 mars 2014, ils demandent à la cour de :
- réformer le jugement du tribunal de grande instance en date du 6 février 2013,
- statuant à nouveau,
vu les articles 720, 843, 1469 al 2 et 778 du code civil,
vu l'acte notarié en date du 20 janvier 1988,
vu les pièces produites aux débats,
- ordonner l'ouverture de la succession de [X] [W],
- constater que le bien immobilier de Mme [G] veuve [W] a été financé par [X] [W],
- constater que Mme [W] née [G] n'a pas pu financer l'emprunt au vu de sa situation financière en l'état des pièces communiquées par elle,
- constater que le moyen retenu par le tribunal de première instance consistant à dire que le financement constitue une contribution aux charges du mariage n'a pas été soutenu par la défenderesse de telle sorte qu'il n'a pas été débattu au contradictoire,
- dire et juger que ce moyen retenu par le tribunal est irrecevable, et ne saurait être retenu également par la cour, Mme [W] née [G] n'ayant jamais soutenu cet argument,
- dire et juger que sera rapportée à la masse successorale la valeur du bien immobilier acquis à hauteur de 96,45% en tenant compte des apports réalisés,
- dire et juger que ce rapport intervient en l'état d'une donation déguisée,
- dire et juger que Mme [G] veuve [W] a réalisé un recel successoral,
- dire et juger en conséquence que Mme [G] veuve [W] se retrouve acceptant la succession, et exclue de tout droit au titre du bien acquis frauduleusement,
- en conséquence,
- à titre principal :
- dire et juger que le bien immobilier leur sera attribué à hauteur de 96,45% à raison de
moitié de ladite proportion pour chacun,
- pour les besoins de la publication de l'acte, il est ici précisé :
état civil du propriétaire, Mme [Z] [H] [G], sans profession,
divorcée en premières noces de M. [O] [K], et épouse en secondes noces de M. [J] [L] [F] [W], demeurant à [Adresse 1], de nationalité française, née à [Localité 2] le [Date naissance 1] 1931, mariée sous le régime de la séparation de biens aux termes de son contrat de mariage reçu par Me [N], notaire à [Localité 5] (06) le [Date mariage 1] 1977 préalable à leur union célébrée à la mairie de [Localité 4] (Var) le 13 juillet 1977 ; ledit régime non modifié depuis.
Désignation du bien : des parties d'immeuble dépendant d'un ensemble immobilier
sis à [Adresse 1], comprenant un bâtiment en façade sur la rue de Birague, élevé sur sous-sol de rez-de-chaussée et de six étages, courette derrière le bâtiment avec constructions annexes accolées au bâtiment en façade, le tout d'une contenance de 106 m2, cadastré section A0 numéro [Cadastre 1] Lieudit « [Localité 7] » pour 1 are 06 centiares, étant rappelé que l'ensemble immobilier a fait l'objet d'un règlement de copropriété établi suivant acte reçu par Me [D], notaire à Paris, le 30 avril 1975 dont une expédition a été publiée au 1er bureau des hypothèques de Paris, le 23 mai 1975 volume 1524 numéro 16, modifié aux termes d'un acte reçu par Me [D], notaire à Paris, le 9 décembre 1976, publié au premier bureau des hypothèques de Paris, les 24 novembre 1977 et 12 janvier 1978 volume 2406 numéro 14 ; A nouveau modifié aux termes d'un acte reçu par Me [D], Notaire à [Localité 2] le 10 août 1967 dont une expédition a été publiée au premier bureau des hypothèques de [Localité 2] les 24 novembre 1977 et 12 janvier 1978 volume 2406 numéro 15.
Désignation particulière :
lot numéro 175 au deuxième étage, un logement, et les 583/10.000 èmes des parties communes générales de l'ensemble immobilier,
lot numéro 176 : au deuxième étage, un logement, et les 726/10.000 èmes des
parties communes générales de l'ensemble immobilier,
étant ici précisé que ces deux lots forment un seul logement composé de : entrée,
séjour, une chambre, une salle de bains, avec water closet,
lot 101 : bâtiment unique entre le troisième et quatrième étage, un débarras. Et les
39/10.000 èmes des parties communes générales de l'ensemble immobilier,
Origine de propriété : le bien a été acquis par Mme [G] épouse [W] aux termes d'un acte reçu par Me [M], notaire à [Localité 2], le 20 janvier 1988 publié au premier bureau des hypothèques de [Localité 2] le 03/03/1988 volume 1988P n° 1646
- à titre subsidiaire :
- condamner Mme [G] veuve [W] à leur payer par moitié à chacun la somme de 1 109 175 euros en principal,
- en tout état de cause condamner Madame [Z] [G] veuve [W] à leur payer la somme de 25 000 euros par an au titre de l'indemnité d'occupation depuis la date de décès de [X] [W],
- débouter Mme [G] veuve [W] de toutes ses demandes infondées,
- subsidiairement, ils ne s'opposent pas à une mesure d'expertise en vue d'évaluer le bien dont s'agit,
- à titre plus infiniment subsidiaire,
- renvoyer les parties devant le notaire qui réalisera l'instruction du dossier en recueillant les relevés bancaires et les relevés de la caisse de retraite aux fins de reconstituer la masse successorale et de déterminer les droits des parties,
- condamner Mme [G] veuve [W] à leur payer 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens.
Par ordonnance du conseiller de la mise en état du 17 décembre 2013, les conclusions de Mme [Z] [W] ont été déclarées irrecevables.
SUR CE, LA COUR,
Considérant que Mme [Z] [W] a acquis le 20 janvier 1988 les lots 175 176, étant ici précisé que ces deux lots forment un seul logement, ainsi que le lot 101 correspondant à un débarras, au prix de 750 000 francs, financé par un prêt de 747 500 francs, remboursable en 180 échéances mensuelles de 8 751,23 francs chacune, par prélèvement du compte 40824 V dont Mme [Z] [W] était titulaire selon les mentions de l'acte d'acquisition, celle-ci étant assurée pour 100 % du capital emprunté et [X] [W] se portant caution solidaire ;
Considérant que M. [W] et Mme [A] soulignent que l'acte de prêt prévoyait une stipulation particulière rédigée comme suit : ' Les stipulations figurant aux conditions générales dont il est question ci-après, notamment à l'article 8 et ayant trait à l'assurance décès-incapacité ne sont pas applicables au présent prêt, la caution ayant délégué en faveur du Crédit lyonnais le bénéfice d'une assurance personnelle souscrite auprès des Assurances Mobilières et Immobilière à hauteur de F 360 000 (54 881,65 euros) valable un an au nom de M. [W] [X]' ;
Qu'ils estiment que cette clause particulière impliquait l'investissement personnel de leur père dans l'opération d'emprunt ; que celui-ci avait des revenus de retraités (sic) en tant qu'officier supérieur de la légion étrangère et de cadre commercial et que le compte était un compte joint appartenant aux époux [W] ; que dès lors que ce compte-joint était abondé par leur père puisqu'il était seul à avoir des revenus permettant un tel remboursement, il s'agit d'une donation déguisée qui doit être rapportée à la succession ; que par application de la règle du profit subsistant, ce sont 96,45 % du prix qui reviennent à la succession de [X] [W] dont Mme [Z] [W] doit être évincée eu égard aux dissimulations volontaires de sa situation au détriment des héritiers réservataires ;
Considérant qu'en première instance, au vu des conclusions de Mme [Z] [W] produites par les appelants, il apparaît que celle-ci avait fait état de la vente d'un bien propre pour un prix de 150 000 francs le 17 mars 1987 et argué de ce qu'elle n'était pas dépourvue de tous revenus pour rembourser le prêt pour l'acquisition du bien qui constituait en outre le logement familial, de sorte que son époux bénéficiait d'un logement gratuit ;
Considérant que sous le régime de la séparation de biens, le bien appartient à celui des époux dont le titre établit la propriété sans égard à son financement ;
Considérant que les appelants fondent leur action sur l'existence d'une donation déguisée du fait du financement quasi total de ce bien par leur père et font grief au tribunal d'avoir introduit le moyen relatif à la contribution aux charges du mariage ;
Considérant toutefois que M. [W] et Mme [A], sur lesquels pèsent la charge de la démonstration de la donation déguisée dont ils se prévalent, ne fournissent aucun élément sur les revenus de [X] [W], se limitant à indiquer qu'il était retraité de la légion étrangère et ancien cadre commercial, le seul fait qu'il se porte caution de l'emprunt étant insuffisant pour apporter la preuve de la donation alléguée ;
Qu'en outre, sans qu'il puisse être fait grief aux premiers juges de soulever non contradictoirement le moyen fondé sur la contribution aux charges du mariage, il s'avère, s'agissant de simples faits non contestés qui sont dans le débat, que la mise à disposition du bien personnel de l'épouse pour servir de logement au ménage, doit entrer en compte dans l'examen des rapports pécuniaires des époux, étant précisé que le prêt venant à échéance le 26 janvier 2003, [X] [W], a, en tout état de cause, profité pendant sept ans, d'un logement à titre gratuit ;
Considérant, en l'espèce, que la donation déguisée n'est pas démontrée en l'absence de tout élément chiffré sur les revenus de [X] [W] et eu égard à l'avantage retiré par ce dernier du fait de la mise à disposition du bien litigieux utilisé comme logement de la famille ;
Considérant, en conséquence, que le jugement qui a débouté M. [W] et Mme [A] de l'ensemble de leurs demandes fondées sur l'existence d'une donation déguisée doit être confirmé ;
Considérant qu'en l'absence de tout élément d'information sur l'existence de biens à partager, les appelants, en dehors de leur tentative d'obtenir directement les relevés du compte 40824 V auprès de la banque Lcl, ne justifiant d'aucune démarche ni même demande, pour obtenir la déclaration de succession qui a due être déposée, doivent être déboutés de leur demande d'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [X] [W], la décision des premiers juges étant également confirmée de ce chef ;
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement déféré,
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. [W] et Mme [A],
Les condamne aux dépens.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,