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02/05/2014 | FRANCE | N°12/22739

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 2, 02 mai 2014, 12/22739


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2



ARRÊT DU 02 MAI 2014



(n° 2014- , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/22739



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 octobre 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/12780





APPELANTE



Madame [X] [M]

[Adresse 2]

[Localité 1]



Représentée par Me Jean-Loup PEYTAV

I, avocat au barreau de PARIS, toque : B1106

Assistée par Maître Richard HARROSCH, avocat au barreau de PARIS, toque G176





INTIMÉE



Madame [S] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représentée par...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2

ARRÊT DU 02 MAI 2014

(n° 2014- , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/22739

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 octobre 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/12780

APPELANTE

Madame [X] [M]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Jean-Loup PEYTAVI, avocat au barreau de PARIS, toque : B1106

Assistée par Maître Richard HARROSCH, avocat au barreau de PARIS, toque G176

INTIMÉE

Madame [S] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515

Assistée par Me Aude ABOUKHATER, de la SELARL CABINET BOULAY, avocat au barreau de PARIS, toque : D7478

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 mars 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Marie-Sophie RICHARD, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de procédure civile.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Anne VIDAL, Présidente de Chambre

Madame Françoise MARTINI, Conseillère

Madame Marie-Sophie RICHARD, Conseillère

Greffier, lors des débats : Monsieur François LE FEVRE

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Anne VIDAL, Présidente et par Guillaume LE FORESTIER, Greffier.

-------------------

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES:

Le 19 septembre 2000 un contrat de partenariat exclusif a été signé entre Mme [X] [M] styliste et la société ART JAM société chargée de développer les carrières artistiques gérée par Mme [S] [Y]. La société ART JAM a fait l'objet d'une liquidation judiciaire ouverte le 11 mai 2004 et clôturée pour insuffisance d'actif le 23 novembre 2006. Le contrat prévoyait que les sommes encaissées par la société pour le travail fourni par Mme [M] devaient lui être rétrocédées déduction faite des 20% prélevés pour l'assistance de la société mais aucune somme n'a été rétrocédée à Mme [M] avant la liquidation judiciaire de la société ART JAM, Mme [M] n'ayant pas accompli les démarches lui permettant d'accéder au statut de travailleur indépendant. Mme [S] [Y] s'est engagée dans trois lettres à régler les honoraires dûs par la société ART JAM à Mme [M]. Dans la première lettre adressée le 12 septembre 2005 à la mère de Mme [M] elle s'engageait en sa qualité de gérante de la société ART JAM à verser la somme de 1 100 euros par mois, demandant à Mme [M] d'effectuer les démarches permettant son immatriculation URSSAF indispensable pour effectuer les versements, la seconde en date du 5 juin 2006 rédigée dans les mêmes termes que la première précisait que la somme de 27 913 euros était due au titre de l'année 2000 et la troisième en date du 3 août 2006 prévoyait des versements à hauteur de 500 euros par mois. Mme [M] qui a perçu la somme de 2 500 euros a sollicité devant le tribunal de grande instance de Paris la condamnation de Mme [Y] à lui payer la somme de 150 000 euros. Ayant perçu la somme complémentaire de 2 800 euros, elle a réduit sa demande à la somme de 147 200 euros.

Par jugement en date du 29 octobre 2012 le tribunal de grande instance de Paris a débouté les parties de l'ensemble de leurs demandes en retenant que Mme [M] n'avait jamais accompli les démarches pour justifier de sa qualité de travailleur indépendant, que le montant de la dette reconnue par Mme [Y] n'était pas déterminé ni justifié, aucune somme n'ayant au surplus été déclarée à la liquidation de la société ART JAM et que l'abus de droit permettant de faire droit à la demande reconventionnelle en dommages-intérêts formée par Mme [Y] n'était pas démontré.

Mme [M] a interjeté appel de cette décision et dans ses conclusions notifiées le 15 novembre 2013 elle demande à la cour d'infirmer le jugement et de condamner Mme [Y] à lui payer la somme de 147 200 euros outre intérêts à compter de la reconnaissance de dette du 3 août 2006 et celle de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient qu'elle justifie par la production de ses factures du montant de sa créance et de la dette que Mme [Y] s'est engagée personnellement à régler aux termes de trois reconnaissances de dette et de ses aveux dans le cadre de l'enquête pénale et que l'intimée ne peut opposer valablement une absence de communication de pièces simultanément aux conclusions non plus que l'existence d'une cause illicite aux reconnaissances de dette en l'absence de déclaration de sa créance au passif de la société ART JAM, Mme [Y] ayant au surplus commencé à rembourser sa dette.

Dans ses conclusions notifiées le 30 décembre 2013 Mme [Y] demande à la cour de déclarer les conclusions de Mme [M] en date des 16 octobre et 15 novembre 2013 irrecevables comme tardives puisque signifiées plus de deux mois après son appel incident et de rejeter les pièces produites non simultanément aux conclusions, d'infirmer partiellement le jugement en ce qu'il a reconnu une obligation civile à sa charge et l'a déboutée de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour préjudice moral et de condamner Mme [M] à lui verser la somme de 20 000 euros de ce chef outre la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, subsidiairement de constater que Mme [M] ne sollicite pas l'infirmation du jugement non critiqué, de la déclarer mal fondée en son appel et de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [M] de l'ensemble de ses demandes.

Elle soutient sur le fond que les rétrocessions de rémunérations n'ont pas été effectuées car Mme [M] n'a jamais accompli les démarches pour justifier de sa qualité de travailleur indépendant régulièrement inscrite à l'URSSAF et n'a pas déclaré sa créance à la liquidation de la société régulièrement publiée, que Mme [M] qui a échoué dans ses poursuites pénales et devant la juridiction prud'homale a finalement assigné l'intimée devant la juridiction civile à tort puisqu'il n'existe pas d'obligation naturelle qui reposerait sur une cause illicite s'agissant d'une dette éteinte pour n'avoir pas été déclarée dans les délais prévus, les dispositions de l'article L 621-46 ancien du code de commerce alors en vigueur relatives à l'extinction de la créance non déclarée dans les délais étant d'ordre public et aucune obligation n'imposant au gérant d'avertir les créanciers de l'ouverture de la procédure de liquidation dès lors que les jugements sont publiés au BODACC, qu'il n'y a pas davantage de preuve de la créance alléguée, l'aveu extra judiciaire ne pouvant constituer la preuve d'une obligation pour laquelle un écrit est exigé selon l'article 1355 du code civil, que l'abus du droit d'agir en justice justifie les dommages-intérêts réclamés puisqu'à la suite du classement sans suite de la plainte d'octobre 2007, Mme [M] s'est constituée partie civile le 26 février 2008 alors que l'action publique était prescrite depuis le 12 mai 2007, qu'elle a également engagé le 21 avril 2011 une action devant le conseil de prud'homes dont elle a été déboutée le 3 novembre 2011, Mme [Y] n'ayant pas la qualité d'employeur de Mme [M] ce que celle-ci ne pouvait ignorer, qu'enfin la preuve du montant de la créance réclamée, laquelle n'est pas exigible car sous condition de l'inscription comme travailleur indépendant, n'est toujours pas rapportée.

MOTIFS DE LA DÉCISION:

Sur la recevabilité des conclusions de l'appelante postérieures à l'appel incident de Mme [Y] et la recevabilité des pièces communiquées par Mme [M]:

Considérant que les conclusions récapitulatives de Mme [M] notifiées le 15 novembre 2013 doivent être déclarées recevables sauf en ce que répondant tardivement aux conclusions adverses contenant appel incident elles sont relatives à l'existence d'une cause illicite aux reconnaissances de dette en l'absence de déclaration de sa créance au passif de la société ART JAM;

Considérant que les pièces dont il est demandé qu'elles soient écartées des débats en raison de leur production tardive n'ont pas été communiquées simultanément aux premières écritures de l'appelante en date du 11 mars 2013 mais l'ont été postérieurement le 15 novembre 2013; qu'il n'est pas contesté par l'intimée que ces pièces à l'exception de la pièce n° 8 avaient été produites en première instance;

que la cour relève que la communication de pièces effectuée le 15 novembre 2013 soit plus de trois mois avant la clôture de l'affaire qui concerne à l'exception de l'une d'entre elles des pièces déjà produites en première instance ne constitue pas une atteinte au principe du contradictoire, Mme [Y] ayant eu la possibilité de les examiner pendant un délai suffisant; qu'il n'y a pas lieu dès lors d'écarter des débats les pièces 1 à 8 produites par Mme [M];

Sur le fond:

Considérant qu'en application des dispositions des articles 1326 et 1347 du code civil à défaut de respecter le formalisme du premier de ces articles l'engagement par lequel une partie s'engage à payer une somme d'argent à une autre partie doit être corroboré par des éléments extrinsèques;

Considérant qu'outre les trois lettres dont le contenu a été rappelé ci-dessus et qui ne répondent pas aux exigences de l'article 1326 du code civil, notamment quant au montant de la dette qui n'est pas mentionné, à l'exception de la seconde lettre du 5 juin 2006 où le montant ne figure qu'en chiffres, Mme [Y] a indiqué lors de son audition le 30 mars 2009 puis lors de la confrontation en date du 3 avril 2009 que l'argent rapporté par Mme [M] avait été versé sur les comptes de la société ART JAM en attente de la régularisation de sa situation administrative vis à vis de l'Urssaf et que l'argent 'était parti' dans la liquidation de la société, qu'elle a également accepté de rembourser Mme [M] à hauteur de 400 euros par mois sans cependant préciser le montant qu'elle reconnaissait devoir;

qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que Mme [Y] a accepté de rembourser à Mme [M] la dette de la société ART JAM au titre des honoraires non reversés par cette société dont elle était la gérante sans que le montant exact de cette dette soit défini tant lors des auditions des parties dans le cadre de la procédure pénale que dans les lettre échangées entre elles;

que si Mme [M] a indiqué lors de la confrontation des parties que ses honoraires s'élevaient à plus de 150 000 euros , la seule somme expressément reconnue par Mme [Y] résulte de la lettre du 5 juin 2006 qui mentionne une somme de 27 913 euros pour les honoraires de l'année 2000;

qu'en conséquence l'engagement de remboursement de Mme [Y] ne saurait excéder la somme de 27 913 euros en principal.

Considérant qu'en application des dispositions de l'article 1131 du code civil, l'obligation sans cause ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet;

que Mme [Y] soutient que son engagement personnel de régler la dette de la société ART JAM repose sur une cause illicite puisque la créance de Mme [M] à l'égard de la société ART JAM est éteinte à défaut de déclaration de cette créance par Mme [M] dans le cadre de la procédure collective de la société ART JAM;

qu'il n'est pas contesté par Mme [M] qu'elle n'a pas déclaré sa créance lors de la procédure de liquidation judiciaire de la société ART JAM;

qu'en vertu des dispositions des articles L 621-43 et L 621-46 du code de commerce dans leur rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 , applicable à la liquidation judiciaire de la société ART JAM ouverte en 2004, à défaut d'avoir été régulièrement déclarée la créance de Mme [M] à l'égard de la société ART JAM est éteinte;

qu'en outre le remboursement effectif de certaines sommes sur ses propres deniers n'est pas de nature à établir que Mme [Y] a expressément entendu prendre à sa charge des dettes de la société ART JAM qui se trouvaient éteintes faute d'avoir été régulièrement déclarées au passif de celle-ci;

qu'il en résulte que l'engagement de Mme [Y] de rembourser à Mme [M] les honoraires dus par la société ART JAM qui repose sur une fausse cause en raison de l'extinction de la créance de la société ART JAM doit être déclaré nul et non avenu;

Considérant que l'exercice d'une action en justice constitue un droit qui ne peut dégénérer en abus permettant l'octroi de dommages-intérêts qu'en cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol et que si Mme [M] a engagé plusieurs procédures en vain aux fins de récupérer ses honoraires perçus par la société ART JAM , force est de constater qu'il n'a pas été soutenu par l'intimée que ces honoraires avaient été payés par la société ART JAM;

que dès lors la seule multiplication des procédures et leur échec ne démontrent pas l'abus de droit dont la réparation est sollicitée;

Vu l'article 700 du code de procédure civile;

Vu l'article 696 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS:

Statuant publiquement, par décision contradictoire:

-Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

-Condamne Mme [X] [M] à payer à Mme [S] [Y] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-Condamne Mme [X] [M] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 12/22739
Date de la décision : 02/05/2014

Références :

Cour d'appel de Paris C2, arrêt n°12/22739 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-05-02;12.22739 ?
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