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04/02/2014 | FRANCE | N°10/25392

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 5, 04 février 2014, 10/25392


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS









COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 5



ARRÊT DU 04 FÉVRIER 2014



(n° , 15 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/25392



Décision déférée à la Cour : Sur renvoi après Cassation par Arrêt de la Cour de Cassation du 09 Septembre 2010 ayant cassé en toutes ses dispositions l'arrêt de la Cour d'appel de PARIS du 29 Janvier 2009 - (RG n° 03/15464).

Suite Ã

  Arrêt de la Cour d'Appel de Paris du 1er Juillet 2005 sur appel du Jugement du Tribunal de Grande Instance de PARIS du 30 Avril 2003 - (RG n° 00/7550).







DEMANDEURS A...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 5

ARRÊT DU 04 FÉVRIER 2014

(n° , 15 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/25392

Décision déférée à la Cour : Sur renvoi après Cassation par Arrêt de la Cour de Cassation du 09 Septembre 2010 ayant cassé en toutes ses dispositions l'arrêt de la Cour d'appel de PARIS du 29 Janvier 2009 - (RG n° 03/15464).

Suite à Arrêt de la Cour d'Appel de Paris du 1er Juillet 2005 sur appel du Jugement du Tribunal de Grande Instance de PARIS du 30 Avril 2003 - (RG n° 00/7550).

DEMANDEURS A LA SAISINE

Madame [S], [ZU] [C] venant aux droits de Madame [W] [T] (décédée) en qualité d'héritière

[Adresse 1]

[Localité 5].

Monsieur [A] [E]

[Adresse 10]

[Localité 3].

Monsieur [PX], [L] [T] venant aux droits de Madame [W] [T] (décédée) en sa qualité d'héritier

[Adresse 3]

[Localité 7].

Monsieur [P] [I]

[Adresse 9]

[Adresse 4]

[Localité 2].

Madame [Y] [I]

[Adresse 9]

[Adresse 4]

[Localité 2].

Madame [O] [I]

[Adresse 7]

[Localité 2].

Madame [B] [X], intervenante volontaire et comme telle demanderesse à la saisine.

[Adresse 7]

[Localité 2].

Monsieur [M] [X]

[Adresse 7]

[Localité 2].

Madame [DH] [D] veuve [I] agissant tant en sa qualité d'héritière d'[V] [I] qu'en son nom personnel

[Adresse 8]

[Localité 1].

Madame [U] [J]

[Adresse 5]

[Adresse 6]

[Localité 4].

Monsieur [M] [T]

[Adresse 11]

[Localité 6].

Monsieur [JN] [I] agissant en sa qualité d'héritier d'[V] [I]

[Adresse 8]

[Localité 1].

Monsieur [F] [I] agissant en sa qualité d'héritier d'[V] [I]

[Adresse 8]

[Localité 1].

Représentés par Me Jean-loup PEYTAVI, avocat au barreau de PARIS, toque : B1106

Assistés de Me Nicolas LECOQ VALLON de la SCP LECOQ VALLON & FERON-POLONI, avocat au barreau de PARIS, toque L0187.

DÉFENDERESSE A LA SAISINE

AVIVA VIE SA prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 8].

Représentée par Me Bernard VATIER de l'Association VATIER & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque P0082.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 Décembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre, entendue en son rapport,

Monsieur Christian BYK, Conseiller

Madame Muriel GONAND, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Joëlle BOREL

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, présidente et par Madame Aouali BENNABI, greffier présente lors du prononcé.

Entre le 25 mai et le 27 juin 1997, les consorts [E] et [I] ont souscrit un contrat d'assurance vie en unité de compte multi-supports« SELECTI VALEURS CROISSANCE » assorti à leur profit d'une clause d'arbitrage à cous connu auprès de la compagnie ABEILLE VIE, devenue AVIVA VIE.

Le 17 juin 1998, la compagnie d'assurance leur a proposé de signer un avenant au contrat supprimant la clause d'arbitrage à cours connu que comportait ce contrat.

Estimant que la modification à plusieurs reprises de la liste des supports éligibles avait dénaturé le contrat, ils ont assigné la société Abeille Vie devant le Tribunal de grande instance de PARIS qui ,par jugement du 30 avril 2003, a dit que la société Abeille Vie a manqué à ses obligations contractuelles et, avant dire droit sur les préjudices subis par les souscripteurs, a ordonné une mesure d'expertise aux fins de fournir tous les éléments techniques et de fait permettant au tribunal d'évaluer le préjudice subi du fait de la perte de chance de procéder à des arbitrages en faveur des supports retirés de la liste des supports éligibles en novembre 1997 et juillet 1998.

Par arrêt du 1er juillet 2005, la Cour d'appel de céans a confirmé le jugement en ce qu'il a retenu la faute de l'assureur, dit que [Q], [K], [GM] et [G] [E] n'ont pas subi de préjudice pour le passé, sursis à statuer sur le préjudice subi par les autres intimés, modifié la mission de l'expert en lui demandant de fournir tous les éléments techniques permettant de déterminer le nombre minimum et la liste des supports que la compagnie devra rétablir afin que les principales caractéristiques des unités de comptes choisies par les intimés lors de la souscription des contrats subsistent et pour que la clause d'arbitrage à cours connu retrouve son efficacité, telle qu'elle était prévue à l'origine des contrats et de fournir tous éléments permettant de déterminer la perte de chance de n'avoir pas pu arbitrer qui a été subie par les consorts [E] et [I] à partir du 1er janvier 1998 jusqu'au jugement entrepris, en tenant compte des habitudes d'arbitrages de chaque souscripteur.

Par arrêt du 22 février 2007, le pourvoi formé contre cette décision était rejeté.

Le 7 février 2008, l'expert, Monsieur [N], a déposé son rapport d'expertise.

Par arrêt du 29 janvier 2009, la Cour a condamné la société AVIVA VIE à indemniser les souscripteurs et a enjoint à la société AVIVA VIE de rétablir sur les contrats des intimés, à l'exception de celui de Monsieur [V] [I], certains supports.

Par arrêt du 9 septembre 2010, la Cour de cassation a déclaré irrecevable le pourvoi formé contre l'arrêt du 1er juillet 2005 et cassé l'arrêt du 29 janvier 2009, qui avait limité l'indemnisation des consorts [I] et [E] à la seule période comprise entre le 1er janvier 1998 et le 30 avril 2003, condamnant la société AVIVA VIE au versement de la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens.

Par déclaration de saisine après cassation remise au greffe de la Cour le 10 décembre 2010, les consorts [I] et [E] ont saisi la Cour d'appel de céans.

Par conclusions du 26 juin 2013, Madame [B] [X] a entendu intervenir volontairement à l'instance.

Par ordonnance du 3 juillet 2013, le magistrat de la mise en état, saisi d'un incident soulevé par la société AVIVA, a déclaré nulle la déclaration de saisine faite au nom de [Q] et [K] [E], celle de Madame [W] [T], ainsi que celle faite par Mesdames [GM] et [G] [E], et constaté que la demande concernant la déclaration de saisine faite au nom de Madame [B] [X] est devenue sans objet.

Par ordonnance du 28 octobre 2013, le magistrat chargé de la mise en état a déclaré la demande de péremption d'instance opposée par la SA AVIVA VIE à la déclaration de saisine de Madame [S] [T] épouse [C] et Monsieur [PX] [T], héritiers de Madame [W] [T], mal fondée.

Dans ses dernières conclusions, signifiées le 7 novembre 2013, la société AVIVA VIE poursuit l'infirmation de l'ordonnance du magistrat de la mise en état et demande à la Cour de déclarer irrecevables les demandes en restitution de supports présentées par les consorts [I], déclarer irrecevables les demandes d'indemnisation pour perte de chance présentée par les héritiers d'[V] [E] et de [W] [T] pour la période postérieure au décès de leur auteur, prononcer la nullité du rapport d'expertise de Monsieur [N], dire n'y avoir lieu à remplacer des supports actions retirés de l'éligibilité à l'arbitrage à cours connu, déclarer irrecevables les demandes en restitution à l'éligibilité à l'arbitrage du cours connu des supports AMERICAN GROWTH, PAYS ÉMERGENTS, FONDS OR, VICTOIRE FRANCE, FINABEILLE, VICTOIRE GARANTIE, VICTOIRE PERFORMANCE, VICTOIRE PROGRESSION 2, VICTORIEL, VICTOIRE INTER-OBLIGATIONS, VICTOIRE IMMO I, lui donner acte de l'offre d'indemnisation qu'elle consent pour les sommes suivantes:

-[M] [X] : 1845 €

- [B] [X]:12 897 €

-[V] [I]:6182 €

-[Y] [I]: 617 €

-[P] [I] : 31 978 €

-[O] [I] : 31 344 €

-[DH] [I] :6182 €

-[R] [J] :614 €

-[M] [T] :16 719 €

-[W] [T]:16 719 €,

et la déclarer satisfactoire, encore plus subsidiairement, désigner un nouvel expert et condamner les Consorts [E] aux dépens.

Par dernières conclusions, signifiées le 15 novembre 2013, les consorts [I] et [E] sollicitent le rejet des conclusions de la société AVIVA VIE en date du 25 juin 2013 et du 7 novembre 2013 et demandent à la Cour de juger recevable l'action aux fins d'indemnisation des ayants droit de Monsieur [V] [I] et celle de [B] [X], juger irrecevable la demande d'infirmation de l'ordonnance, rendue le 28 octobre 2013 par le conseiller de la mise en état, en tout état de cause, juger recevable l'action des consorts [T], et, à titre principal, condamner la société AVIVA VIE à leur verser, au titre du préjudice subi, à compter du 1er janvier 1998 jusqu'au 30 décembre 2005 les sommes suivantes , outre les intérêts au taux légal à compter du 4 mai 2011:

-Madame [Y] [I]: 36 129 €

-Madame [O] [I] : 1 744 597 €

-Monsieur [P] [I] : 1740 142 €

-Monsieur [A] [E] : 791 226 €

-Madame [DH] [I] née [D]: 341 801 €

-Monsieur [M] [T], Madame [S] [T] épouse [C] et Monsieur [PX] [T], héritiers de Madame [W] [T] : 492 017 €

-Monsieur [M] [X] :103 447 €

-Monsieur [M] [T] : 492 017 €

-Mademoiselle [B] [X]: 56 699 €

- Madame [U] [J] : 5193 €

-Monsieur [JN] [I], Monsieur [F] [I] et Madame [DH] [D] en leur qualité d'ayant droit d'[V] [I] décédé :283 683 €,

Sommes qui devront être créditées sur les contrats 'SELECTIVALEURS CROISSANCE' dont ils restent souscripteurs dans les unités de compte y apparaissant au jour de l'arrêt à intervenir, en tout état de cause, condamner la compagnie d'assurance à réintégrer sous astreinte définitive de 5.000 euros par jour de retard, les supports Américan Growth,(à remplacer par Aviva Investors American Equity Fund B), Pays Emergents,(Aviva Investors Emerging Markets Equity Income Fund) Fonds Or (Gold Share Fund), Victoire France (Aviva Valeurs françaises), Finabeille, Victoire Garantie (Aviva Garantie), Victoire Performance (Aviva Performance), Victoire Progression II, Victoriel (Aviva Multigestion), Victoire Interobligations (Aviva interoblig), Victoire Immo I sur leurs contrats et la condamner à leur verser la somme de 50.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Ces conclusions sont expressément visées pour complet exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.

Par conclusions signifiées le 18 novembre 2013, la SA AVIVA VIE demandait à la Cour de rejeter des débats les conclusions n° 5 après renvoi des consorts [E] ainsi que les pièces n° 69 à 73 communiquées le 15 novembre 2013.

Par conclusions signifiées le 21 novembre 2013, les consorts [E] -[I] demandaient à la Cour de rejeter la demande de la SA AVIVA tendant au rejet des conclusions et des pièces.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur L'incident de procédure et la demande de rejet des conclusions de la société AVIVA VIE du 25 juin 2013 et 7 novembre 2013.

Considérant que la SA AVIVA VIE demande à la Cour de rejeter des débats les conclusions n° 5 après renvoi signifiées par les consorts [E] le 15 novembre 2013 ainsi que les pièces n° 69 à 73 communiquées le même jour, que les consorts [E] [I] s'opposent à cette demande ;

Considérant que les conclusions signifiées le 15 novembre 2013 par les consorts [E] [I] ne constituent d'une part qu'une réplique aux dernières conclusions signifiées par la SA AVIVA le 7 novembre 2013 qui contenaient une demande nouvelle afférente à l'infirmation de l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 28 octobre 2013, qu'elles sont donc à ce titre justifiées par le respect du contradictoire, qu'elles ne contiennent d'autre part qu'une analyse critique complémentaire de l'arrêt rendu par la cour le 9 avril 2013, connu de l'assureur qui était partie à la procédure, sans moyen ni prétention nouvelle ;

Considérant que s'agissant des pièces 69 à 73, il s'avère qu'il s'agit de pièces connues de l'assureur puisqu'elles sont issues de procédures qui opposent d'autre assurés à la société AVIVA VIE défendue par le même conseil qui sont produites uniquement pour expliciter des moyens antérieurement développés ;

Considérant en conséquence qu'aucune atteinte n'ayant été portée au respect du contradictoire ni aux droits de la défense, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de rejet de ces pièces et conclusions ;

Considérant qu'aux termes de leurs conclusions au fond, les consorts [E] [I] sollicitent le rejet des conclusions de la SA AVIVA VIE signifiées le 25 juin 2013 et 7 novembre 2013, qu'il ne sera pas droit à cette demande puisque les consorts [E] [I] ont été en mesure de répondre à ces écritures par leurs dernières écritures signifiées le 15 novembre 2013 et qu'aucune atteinte n'a, en conséquence, été portée ni au respect du contradictoire ni aux droits de la défense ;

Sur la prescription de l'action de [Q] et [K] [E] et la demande concernant [GM] et [G] [E].

Considérant que par ordonnance du 3 juillet 2013, le magistrat chargé de la mise en état a déclaré nulle la déclaration de saisine faite le 10 décembre 2010 par Monsieur [A] [E] au nom de ses enfants alors que ceux-ci étaient majeurs depuis les 11 août 2002 et 17 février 2004, qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la péremption de l'instance les concernant ou sur la prescription de leur action dès lors qu'il est constant que [Q] et [K] [E] n'ont pas régularisé la procédure car elles ne sont en fait plus parties à l'instance depuis l'arrêt du 1er juillet 2005, Monsieur [A] [E] intervenant à titre personnel pour son propre contrat ;

Considérant qu'aux termes de l'ordonnance du 3 juillet 2013, le magistrat chargé de la mise en état a également déclaré irrecevable comme se heurtant au principe de l'autorité de la chose jugée la déclaration de saisine faite au nom de [GM] [E] et [G] [E], que la demande de la SA AVIVA VIE à ce titre est sans objet alors qu'elles ne sont plus parties à la procédure et qu'elles n'ont, en toutes hypothèses, régularisé aucune saisine après la décision du magistrat chargé de la mise en état ;

Sur la péremption d'instance des consorts [T]

Considérant que par ordonnance du magistrat chargé de la mise en état en date du 3 juillet 2013, la déclaration da saisine du 10 décembre 2010 faite au nom de Madame [W] [T] a été annulée au motif que celle-ci était décédée le [Date décès 2] 2010, que cette décision n'est pas contestée, que Madame [S] [T] épouse [C] et, Monsieur [PX] [T], héritiers de Madame [W] [T] ont alors saisi la Cour par déclaration du 8 juillet 2013 ;

Considérant que par ordonnance du 28 octobre 2013, le magistrat chargé de la mise en état a débouté la SA AVIVA de sa demande tendant à voir constater la péremption de l'instance engagée par les consorts [T] dont la déclaration a été faite plus de deux ans après l'arrêt de la Cour de cassation ;

Considérant que dépourvue de l'autorité de la chose jugée en application des article 775 et 914 alinéa 2 du code de procédure civile puisqu'elle n'a pas mis fin à l'instance et qu'elle ne fait pas partie des décisions visées par le deuxième de ces textes, la péremption de l'instance peut être remise en cause devant le juge du fond ;

Considérant qu'en application de l'article 386 du code de procédure civile l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ;

Mais considérant que l'acte interruptif du délai de péremption peut intervenir dans une instance différente dès lors que les deux instances se rattachent entre elles par un lien de dépendance direct et nécessaire ;

Considérant qu'il existait un lien de dépendance directe et nécessaire entre l'instance enrôlée sous le numéro 10/25392 et l'instance enrôlée sous le numéro 13/13857 puisqu'il s'agissait en fait de la même procédure qui faisait suite à l'arrêt de la cour de cassation du 9 septembre 2010 et que l'instance 13/13857 concernait la déclaration faite par les consorts [T] le 8 juillet 2013 pour régulariser la procédure suite à l'annulation de la déclaration d'appel faite au nom de leur mère ;

Considérant que les consorts [T] étaient intervenus volontairement dans l'affaire ouverte sous le numéro 10/ 25392 par conclusions du 4 mai 2011 puis avaient conclu au fond le 10 juillet 2012 ; qu'ils avaient ainsi accompli des diligences et manifesté leur intention de poursuivre l'instance qui avait été initiée par leur mère, dans le délai de deux ans ayant suivi l'arrêt de la Cour de cassation, que la demande de péremption n'est pas fondée et doit être rejetée ;

Sur la demande d'annulation du rapport d'expertise

Considérant que la société AVIVA VIE soutient que le rapport d'expertise doit être annulé, reprochant à l'expert, tout d'abord, de n'avoir pas respecté la mission qui lui était impartie, en s'abstenant d'analyser les caractéristiques des supports choisis lors de la souscription, de prendre en compte la pratique réelle d'arbitrage avant le retrait des supports et en prenant en compte des supports qui ne sont pas contractuels, d'avoir, ensuite, méconnu les termes du contrat en prenant en compte les supports VICTOIRE IMMO 1 et FINABEILLE COURT TERME et en excluant l'application de la clause des 5% et, enfin, de n'avoir pas pris en compte les éléments précis de contestation de la méthode communiqués par elle et d'avoir manqué au principe de la contradiction et fait preuve de partialité par la non transmission des données et des formules de calcul retenues et par la mise en place d'une méthode en dehors de toutes initiatives des demandeurs à l'instance ;

Considérant que les consorts [I] et [E] répondent que cette demande n'est pas justifiée, dès lors que l'expert a respecté la mission qui lui a été donnée, que les stipulations du contrat ont été respectées, y compris la clause des 5%, que les éléments de contestation communiqués par la compagnie d'assurance ont été pris en compte, sans, notamment, qu'une quelconque confusion entre l'évaluation de la perte de chance et celle d'un manque à gagner théorique ait été opérée, et que le principe de la contradiction a été respecté, les travaux de l'expert ayant fait l'objet d'un débat entre les parties tout au long de l'expertise ;

Considérant s'agissant du respect par l'expert de la mission qui lui était impartie, qu' il résulte du rapport que Monsieur [N] a répondu tant au premier point de sa mission qui était ainsi libellée 'fournir tous éléments techniques permettant de déterminer le nombre minimum et la liste des supports que la compagnie devra rétablir afin que les principales caractéristiques des unités de compte choisies par les intimés lors de la souscription des contrats subsistent et pour que la clause d'arbitrage à cours connu retrouve son efficacité, telle qu'elle était prévue à l'origine des contrats', en proposant onze supports sur les seize supports qui apparaissaient dans les documents émis par ABEILLE VIE, sans contrevenir aux dispositions de l'article 238 du code de procédure civile, en prenant en compte selon ses propres termes, dans les onze supports retenus, les trois plus volatiles et en exposant que les fonds retirés de la liste étaient ceux dont la corrélation avec le marché des actions était la plus forte alors que ceux qui avaient été maintenus étaient ceux qui avaient une orientation de gestion privilégiant le marché obligataire ou monétaire ce qui démontre qu'il avait procédé à l'analyse des caractéristiques des supports, qu'en réalité les griefs articulés par la société AVIVA à ce titre constituent des critiques de fond du travail de l'expert auquel elle reproche de ne pas l'avoir suivie dans son analyse concernant la liste des supports qui pouvaient être retenus pour répondre au premier point de la mission et à partir de laquelle l'expert a proposé une évaluation du préjudice ;

Considérant de même que l'expert a répondu au second point de sa mission en proposant l'évaluation de la perte de chance subie par chacun des assurés selon une méthode, expliquée pages 24 et 25 de son rapport, prenant en compte le comportement arbitragiste des différents assurés sur la période effective de leurs arbitrages et l'application de la clause des 5% en considérant que celle-ci n'ayant pas trouvé application il n'y avait pas lieu de tenir compte de son incidence éventuelle sur les calculs, que là encore les griefs de la société AVIVA relèvent de critiques de fond qui ont fait l'objet de cinq dires et notamment des dires récapitulatifs des 7 et 29 janvier 2008, auquel était joint le rapport privé de Monsieur [H], auxquels l'expert a répondu ;

Considérant par ailleurs que s'agissant de la présentation par l'expert de sa méthode pour évaluer la perte de chance, il ressort du rapport que l'expert a adressé une note le 7 juillet 2006 préconisant sa méthode pour évaluer le préjudice, qu'il a expliqué celle-ci dans un pré-rapport adressé aux parties le 15 janvier 2007, que cette méthode a ensuite été discutée lors de trois réunions d'expertise et a fait l'objet de propositions d'amendements chiffrés dans les derniers dires des parties, dont ceux des 7 et 29 janvier 2008 de la société AVIVA auxquels l'expert a répondu, qu'il ne peut être reproché en conséquence à l'expert aucun manquement au principe du contradictoire à ce titre ; qu'il ne peut de même lui être reproché à un manquement à son obligation d'impartialité par la mise en place d'une méthode en dehors de toutes initiatives des demandeurs à l'instance alors qu'il n'a fait qu'accomplir sa mission en proposant une méthode de calcul du préjudice quelqu'aient été les initiatives des parties ;

Considérant enfin que s'agissant de la non transmission des fichiers de calcul Excel, il apparaît que l'expert a exposé dans son rapport la méthode théorique de calcul du préjudice des souscripteurs, qu'il a adressé par voie de courriel l'application détaillée de sa méthode pour tous les demandeurs qui était le résultat arithmétique de la méthode théorique exposée, qu'il a ensuite transmis ses fichiers d'abord en format PDF puis sous format Excel, que le fait qu'il n'ait pas transmis les fichiers de calcul Excel ne constitue pas de sa part une violation du principe du contradictoire ou un manquement à son obligation d'impartialité dans la mesure où il s'agit seulement du moyen technique utilisé par l'expert pour le calcul du préjudice selon une méthode et des formules dont les détails ont été contradictoirement exposés et dont les résultats ont été soumis à la discussion contradictoire des parties avant le dépôt du rapport ;

Considérant que l'expertise n'est, dès lors, entachée d'aucune irrégularité justifiant son annulation, que la société AVIVA VIE sera déboutée de sa demande à ce titre ;

Sur la demande de restitution des supports

Considérant que la société AVIVA soutient que la demande est irrecevable tant en ce qu'elle est fondée sur les supports Américan Growth, Pays Emergents, Fonds Or, Victoire France qu'en ce qu'elle a pour objet la revendication desdits supports, comme étant prescrite sur le fondement de l'article L114-1 du code des assurances, dans la mesure où aucune demande n'a été formée concernant ces supports avant le 22 août 2000 alors que les consort [E] ont été informés par lettre du 17 juin 1998 de ce que la liste des supports avait été modifiée à compter du 1er janvier 1998 et qu'ils l'ont assignée le 21 août 1998 pour demander que l'assureur soit tenu de 'respecter les termes du contrat initial en maintenant le support ' actions françaises' prévu audit contrat' ;

Considérant que la société AVIVA soutient encore que la demande de restitution des supports des supports Américan Growth, Pays Emergents, Fonds Or, Victoire France, Finabeille, Victoire Garantie, Victoire performance, Victoire progression 2, Victoriel, Victoire inter-obligations est irrecevable comme étant prescrite dans la mesure où elle n'a été formée que par conclusions du 6 juin 2008 soit plus de dix ans après la date du 1er janvier 2008 retenue par l'arrêt de la cour du 1er juillet 2005 ;

Considérant que les consorts [E] [I] rétorquent que cette prétention est vaine dès lors que les supports comportent des actions françaises à l'exception du fonds Or et Américain Growth, que l'arrêt du 1er juillet 2005 a déjà statué sur les moyens de prescription soulevé par l'assureur et subsidiairement que la prescription biennale est inapplicable en l'espèce dans la mesure où elle est incorrectement stipulée faute de mentions des causes interruptives prévues l'article L 114-1 du code des assurances ;

Considérant qu'aucune autorité de la chose jugée ne peut être tirée de l'arrêt du 1er juillet 2005 dans lequel la cour n'a pas statué sur des moyens de prescription ;

Considérant qu'aux termes des dispositions générales du contrat SELECTIVALEURS CROISSANCE, il était précisé sous l'article 'clause de prescription' : 'aucune action ou réclamation concernant le contrat ne pourra être intentée au delà de deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance ou de sa connaissance en cas de sinistre. Lorsque le bénéficiaire n'est pas le souscripteur, ce délai de souscription est porté à 10 ans. La prescription est notamment interrompue par l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception adressée par l'une des parties à l'autre' ; qu'alors que cette clause ne rappelle que partiellement les dispositions légales et réglementaires relatives au point de départ et aux causes interruptives de la prescription biennale, en violation de l'article R112-1 du code des assurances, il y a lieu de considérer que la prescription biennale de l'article L114-1 du code des assurances est inopposable aux assurés et que la demande concernant les supports Américan Growth, Pays Emergents, Fonds Or et Victoire France Finabeille, Victoire Garantie, Victoire performance, Victoire progression 2, Victoriel, Victoire inter-obligations est recevable comme n'étant pas prescrite ;

Considérant que la société AVIVA soutient que la demande de restitution des support présentée par [JN] [I], [F] [I] et [DH] [I] pour le compte de leur auteur [V] [I] et celle présentée par [PX] [T] et [S] [C] pour le compte de Madame [W] [T] est irrecevable, du fait du décès de [V] [I] et de [W] [T], qui empêche la réalisation d'un quelconque arbitrage sur les contrats souscrits par les défunts ;

Considérant que si les héritiers de Monsieur [V] [I] et ceux de Madame [T] sont recevables à demander la réparation du préjudice subi par leur auteur à la suite de la disparition des supports spéculatifs, du fait de la perte de chance de n'avoir pas pu avoir arbitrer, jusqu'à leur décès, ils ne sont pas recevables à demander la restitution des supports puisque du fait du décès de leur auteur qui met fin au contrat, celui-ci ne peut plus donner lieu à arbitrage ;

Considérant que l'expert estime que les supports éligibles du contrat SELECTIVALEURS CROISSANCE étaient , au deuxième semestre 1996, au nombre de 16 selon le documents intitulé 'les supports VICTOIRE', deuxième semestre 1996, ou au nombre de 13 selon la fiche des mouvements sur contrat, le document intitulé ' les supports VICTOIRE' indiquant que les Fonds de croissance américain, les Fonds des pays émergents et les fonds or étaient disponibles dans le contrat SELECTIVALEURS CROISSANCE, que tant pour permettre à la clause d'arbitrage à court connu de retrouver son efficacité que pour proposer l'évaluation de la perte de chance subie par les souscripteurs, l'expert a retenu les supports Américan Growth, Pays Emergents, Fonds Or, Victoire France, Finabeille, Victoire Garantie, Victoire Performance, Victoire Progression II, Victoriel, Victoire Interobligations et Victoire Immo I ;

Considérant que la société AVIVA soutient que pour statuer sur l'ensemble des demandes des souscripteurs, il convient de ne tenir compte que des supports figurant sur la liste de mouvement à la date de souscription des contrats dans laquelle ne figuraient pas le Fonds de croissance Américain, le Fonds Or et le fonds de Pays Emergents ; qu'elle conteste également l'analyse de l'expert qui ne s'est pas attaché à prendre en considération la volatilité connue par les parties à la date de souscription des contrats ;

Considérant que les consorts [I] [E] rétorquent que l'expert a, à juste titre, retenu des supports qui figuraient sur la liste établie au 2ème semestre 1996 et au 1er semestre 1997et s'est attaché à déterminer la compositions des supports avant de déterminer les supports qui devaient être restitués pour redonner à la clause de cours connu son efficacité d'origine ;

Considérant que les consorts [I]- [E] ont souscrit le contrat d'assurance vie 'SELECTIVALEURS CROISSANCE' entre le 25 mai et le 15 juin 1997;

Considérant que le document intitulé 'fiche des mouvements sur contrat' d'avril 1997 ne contient que treize supports, que toutefois, alors que les conditions générales font mention de ce que 'la liste et le nombre de supports sont susceptibles d'évoluer', il est également produit aux débats une liste intitulée ' les supports 'Victoire' deuxième semestre 1996" et une autre liste 'les supports premier semestre 1997" qui portent l'une et l'autre le logo 'ABEILLE VIE' sur lesquelles aucune mention d'un caractère non contractuel n'est précisée et aux termes desquelles les Fonds de croissance américain, Pays Emergents et Fonds Or sont précisés comme étant éligibles au contrat 'SELECTIVALEURS CROISSANCE' ;

Considérant que ces deux documents démontrent que la liste figurant sur la fiche des mouvements a été complétée par les trois fonds litigieux sur lesquels les souscripteurs pouvaient arbitrer puisque ces supports étaient éligibles au contrat 'SELECTIVALEURS CROISSANCE au moment de sa souscription par les consorts [I]- [E];

Considérant que l'expert a exposé, ce qui avait d'ailleurs été retenu par la cour, dans son arrêt du 1er juillet 2005 pour caractériser le caractère abusif du retrait effectué par l'assureur, que les fonds retirés de la liste étaient ceux dont la corrélation avec le marché des actions était la plus forte et que ceux qui étaient maintenus étaient ceux qui avaient une orientation de gestion privilégiant la marché obligataire ou monétaire ;

Considérant que la société AVIVA prétend qu'en l'absence d'une collectivité d'assurés, la restitution des supports volatils est impossible sauf à dénaturer le contrat en faveur des seuls appelants ce qui contrevient à l'ordre public en application de l'article 1964 du code civil ;

Mais considérant qu'alors que l'exécution d'un contrat d'assurance vie dont les clauses sont licites n'est pas assimilable à un jeu de sorte que la société AVIVA VIE ne peut invoquer une atteinte à l'ordre public sur le fondement de l'article 1164 du code civil, la restitution des supports qui étaient proposés à l'arbitrage des souscripteurs ou de supports équivalents n'est pas impossible, qu'elle est au contraire nécessaire pour permettre à la clause d'arbitrage à cours connu de retrouver son efficacité ;

Considérant que suivant en cela l'avis de l'expert, il convient d'ordonner la restitution des onze supports qu'il retient, comprenant les trois supports les plus volatiles, à savoir les Fonds de croissance américain, Pays Emergents et Fonds Or ;

Considérant que les parties produisent aux débats (pièce 14 Aviva et pièce 71 des consorts [I] [E]) le rapport de Monsieur [Z], dans une affaire similaire, aux termes duquel l'expert a déterminé les nouveaux noms des supports ou en cas de disparition de certains d'entre eux, les supports de remplacement ou équivalents pouvant être retenus, que la société AVIVA VIE ne présente aucune observation sur les modifications sollicitées qui concernent pour l'essentiel de simple changement de nom qu'elle ne contestait pas lors des opérations d'expertise, que s'agissant du support Victoire France, il convient, suivant en cela l'expert, de dire qu'il sera remplacé par Aviva Valeurs Françaises qui reflète l'importance initiale de Victoire France et constitue en conséquence un support équivalent ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu d'assortir la condamnation d'une astreinte ;

Sur les demandes d'indemnisation de la perte de chance

Considérant que la société AVIVA demande à la cour d'écarter les conclusions de l'expert en reprochant à celui-ci de ne pas avoir recherché les caractéristiques des unités de compte choisies par les intimés, d'être parti du postulat que les supports volatiles ou spéculatifs avaient été supprimés pour créer un portefeuille optimum, en déniant à la compagnie la possibilité de changer ou supprimer certains supports ainsi que le lui permettaient les clauses du contrat, d'avoir pris en compte des supports autres que ceux éligibles à l'arbitrage lors de la souscription du contrat, de ne pas avoir pris en compte la pratique réelle des souscripteurs qui était limitée aux allers-retours entre le support Victoire garantie et le support Victoire France et d'avoir pris en compte le support Victoire Immo 1 pour lequel les arbitrages ne sont autorisés qu'à la date anniversaire du contrat et Finabeille court terme pour lequel seuls les arbitrages sortants sont autorisés ;

Qu'elle reproche également à l'expert d'avoir refusé d'appliquer la clause des 5% après avoir choisi les supports les plus volatiles pour la création de son portefeuille optimum ce qui ce qui dénature le contrat en le transformant en martingale dont la cause se heurte en droit à l'ordre public de l'article 1964 du code civil et d'avoir proposé l'évaluation d'un préjudice théorique et non l'évaluation d'une perte de chance ;

Qu'elle fait état de la différence importante existant entre les conclusions de Monsieur [N] qui conduit à retenir une rentabilité de 362 fois la mise de départ pour une période de 8 ans alors que le calcul fait par monsieur [Z],autre expert désigné par les juridictions dans des litiges similaires, conduit à retenir une rentabilité égale à 3 fois la provision mathématique sur une période de 10 ans ;

Qu'elle conclut que son offre d'indemnisation est satisfaisante dans la mesure où elle conduit à assurer un rendement de plus de 11% sur 15 ans qui doit être comparé à celui du CAC 40 qui s'est élevé à 0,78% par an sur la période du 1er janvier 1998 au 31 décembre 2012 ou avec le taux le plus performant des contrats d'assurance-vie sur la même période, le contrat AFER qui s'est élevé en moyenne à 4,76% par an sur la même période ;

Considérant que les consorts [I] et [E] font valoir que leur préjudice doit concerner la période courant entre le 1er janvier 1998 et le 30 avril 2003, mais aussi celle du 30 avril 2003 au 30 décembre 2005, date à laquelle se sont arrêtées les opérations d'expertise, qu'ils exposent que l'expert a bien procédé à l'évaluation d'une perte de chance en intégrant l'efficacité de la clause d'arbitrage à cours connu ainsi que leur pratique arbitrale , qu'ils ajoutent que l'expert n'avait pas retenu des gains maximaux, puisqu'il avait écarté des hypothèses conduisant à l'évaluation du préjudice à des montants supérieurs que l'expert avait bien intégré la clause des 5% mais également les arbitrages des tiers par un système de pondération ;

Considérant que l'arrêt de la cour du 1er juillet 2005 a définitivement consacré la faute commise par la société AVIVA VIE en retenant que celle-ci avait fait une application abusive de la clause lui permettant de changer ou supprimer certains supports et avait dénaturé unilatéralement la spécificité du contrat en modifiant substantiellement le caractère éligible des supports et en supprimant les supports spéculatifs pour les remplacer par des supports obligataires ;

Considérant que la gravité de la faute est sans influence sur le montant de l'indemnité nécessaire pour compenser le dommage subi qui doit être calculé en fonction de la seule valeur de ce dommage, qu'en outre l'exécution d'un contrat d'assurance vie dont les clauses sont licites n'est pas assimilable à un jeu de sorte que la société AVIVA VIE ne peut invoquer une atteinte à l'ordre public sur le fondement de l'article 1164 du code civil ;

Considérant qu'alors que la cour ne peut statuer que dans les limites des demandes qui lui sont présentées, il convient d'évaluer la perte de chance des consorts [I]- [E] de réaliser des plus values supérieures à celles qu'ils ont obtenues du 1er janvier 1998 au 30 décembre 2005, étant précisé que dans ses propositions, l'expert a limité le calcul concernant Monsieur [V] [I] au 30 décembre 2004 pour tenir compte de son décès au [Date décès 1] 2005 et que le décès de Madame [T] est sans influence sur le préjudice subi puisqu'il est intervenu le [Date décès 2] 2010 soit postérieurement au terme de la période d'indemnisation prise en compte;

Considérant qu'en cas de perte de chance, la réparation du dommage ne peut qu'être partielle et doit être mesurée à la chance perdue sans pouvoir être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée, l'office du juge consistant à apprécier le bien fondé du préjudice allégué par la victime et de déterminer la fraction correspondant à la perte de chance d'éviter ce préjudice ;

Considérant qu'il a déjà été répondu par la cour ci-dessus sur le caractère contractuel des supports retenus par l'expert dans son analyse, que de même, c'est à juste titre que l'expert a retenu, tant pour proposer les supports à restituer que pour le calcul du préjudice, des supports spéculatifs puisque ce sont ceux-ci qui présentent un intérêt pour l'application de la clause d'arbitrage à cours connu ;

Considérant que la méthode de l'expert judiciaire, pour déterminer la perte de chance, a consisté à reconstituer pour la période postérieure au 1er janvier 1998 ce qu'aurait été le portefeuille optimal des consorts [I] [E] si ceux-ci avaient pu réaliser tous les arbitrages souhaités, que l'expert a exposé que ce portefeuille se construisait en souscrivant 100 le même jour que le demandeur et en décidant, chaque semaine s'il devait y avoir arbitrage, qu'il y avait arbitrage si l'évolution dans la semaine d'un support, incluant les frais d'arbitrage, était supérieur à l'évolution du support du portefeuille et que si plusieurs supports présentaient cette évolution, l'arbitrage portait sur le support ayant connu l'évolution la plus forte, que l'expert a ensuite comparé le portefeuille optimal à la stratégie des demandeurs pour établir un ratio d'efficacité de la stratégie d'arbitrage afin de déterminer la valeur corrigée du portefeuille à la fin de l'année 2005, qu'à partir de la formule mathématique élaborée sur ces bases, l'expert a défini la différence existant entre la valeur de rachat et la valeur corrigée à la fin de l'année 2005, ou fin 2004 pour Monsieur [V] [I], ce qui constitue, selon lui, l'estimation de la perte de chance ;

Considérant que le fait que l'expert ait pris en compte dans son analyse des supports dont les conditions d'accès sont limitées à savoir le support Victoire Immo 1 et le support Finabeille ne remet pas en cause ses calculs compte tenu de la possibilité de remplacement du support Finabeille par le support Victoriel, sans aucune influence sur le calcul, et de l'influence marginal du support Immo1;

Considérant par contre que si les consorts [I] [E] pouvaient légitimement se tourner vers l'ensemble des supports dont la Cour a dit qu'ils étaient éligibles au contrat souscrit, il apparaît que l'expert surévalue la prise en compte de la pratique d'arbitrage des consorts [I] [E], antérieure à la suppression des supports et son efficacité en considérant que ceux-ci auraient presque toujours profité des meilleures opportunités d'arbitrage ce qui ne ressort pas de leurs pratiques antérieures ;

Considérant que si l'expert ne s'est pas affranchi de la clause des 5 %, il a considéré qu'il n'y avait pas lieu que cette clause s'applique car elle n'avait pas été appliquée aux consorts [I] [E] en 1997, avant la suppression des supports, et qu'elle n'aurait pas eu à s'appliquer en se fondant sur un comportement inchangé des souscripteurs ;

Mais considérant que le modèle élaboré par l'expert pour déterminer le préjudice ne prend pas suffisamment en considération le rôle modérateur sur la clause d'arbitrage à cours connu contractuellement joué par la clause des 5%, le déclenchement du seuil des 5 % se trouvant subordonné aux seules demandes d'arbitrage des consorts [I] [E], sans tenir compte de l'impact qu'aurait eu le comportement d'arbitrage de l'ensemble des souscripteurs de contrats à cours connu et de la part relative des demandes d'arbitrage des consorts [I] [E] dans cet ensemble si les supports les plus dynamiques n'avaient pas été rendus inéligibles en 1998 ;

Considérant que si l'expert a fourni à la cour, comme il en avait mission, les éléments permettant de déterminer la perte de chance subie par les souscripteurs, ses calculs aboutissent en réalité à l'évaluation de gains maximaux qu'une gestion quasi optimale des portefeuilles aurait procuré aux souscripteurs ;

Considérant qu'alors que la perte de chance doit être appréciée en tenant compte des habitudes des souscripteurs en fréquence et en efficacité et du déclenchement possible de la clause des 5%, il convient de fixer au quart des montants déterminés par l'expert judiciaire la perte de chance subie par les consorts [I] [E] pour la période du 1er janvier 1998 au 31 décembre 2005, sauf pour monsieur [V] [I], pour lequel le préjudice est arrêté au 31 décembre 2004, ainsi que l'a précisé l'expert, soit les sommes suivantes :

- Madame [Y] [I] : la somme de 9032,25 €

- Madame [O] [I] : la somme de 436 149,25 €

- Monsieur [P] [I] : la somme de 435 035,50 €

- Monsieur [A] [E]: la somme de 197 806,50 €

- Madame [DH] [I] née [D] : la somme de 85 450,25 €

- Monsieur [PX] [T] et Madame [S] [C] , en qualité d'héritiers de Madame [W] [T] , décédée : la somme de 123 004,25 €

- Monsieur [M] [X] : la somme de 25 861,75 €

- Monsieur [M] [T] : la somme de 123 004,25 €

- Mademoiselle [B] [X] : la somme de 14 174,75 €

- Madame [U] [J] : la somme de 1298,25 €

- Monsieur [JN] [I], Monsieur [F] [I] et Madame [DH] [D] en leur qualité d'ayant droits de Monsieur [V] [I] la somme de

70 920,75 €.

Considérant que ces sommes revêtant le caractère de dommages et intérêts n'ont pas lieu d'être créditées dans les unités de compte dont les consorts [I] [E] restent titulaires mais doivent leur être versées directement et doivent porter intérêts au taux légal à compter de la présente décision qui en fixe le montant ;

Considérant que la société AVIVA VIE qui succombe pour l'essentiel supportera la totalité des dépens comprenant les frais d'expertise, qu'elle sera par ailleurs condamnée à payer aux consorts [I] [E] [T] [X] FONTAT la somme totale de 20 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition de la décision au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,

Déboute la SA AVIVA de sa demande de rejet des débats des conclusions signifiées et des pièces 69 à 73 communiquées le 15 novembre 2013 par les consorts [E] [I] ;

Déboute les consorts [E] [I] de leur demande de rejet des débats des conclusions signifiées par la SA AVIVA VIE les 25 juin 2013 et 7 novembre 2013 ;

Déclare sans objet les demandes de la SA AVIVA VIE concernant [Q], [K], [GM] et [G] [E] ;

Déboute la SA AVIVA VIE de sa demande de péremption d' instance à l'encontre de Madame [S] [T] épouse [C] et de Monsieur [PX] [T] ;

Déboute la société AVIVA VIE de sa demande tendant à voir prononcer la nullité du rapport d'expertise de Monsieur [N] ;

Rejette l'exception de prescription concernant la demande de rétablissement des supports Américan Growth, Pays Emergents, Fonds Or,Victoire France, Finabeille, Victoire Garantie, Victoire performance, Victoire progression 2, Victoriel, Victoire inter-obligations ;

Condamne la société AVIVA VIE à réintégrer sur les contrats 'SELECTIVALEURS CROISSANCE' des consorts [I]-[E], à l'exception de celui d'[V] [I], décédé le [Date décès 1] 2005 et de celui de [W] [T], décédée le [Date décès 2] 2010 les supports suivants :

- Américan Growth, à remplacer par Aviva Investors American Equity Fund B,

- Pays Emergents, à remplacer par Aviva Investors Emerging Markets Equity Income Fund

- Fonds Or, à remplacer par Gold Share Fund,

- Victoire France à remplacer par Aviva Valeurs françaises,

- Finabeille,

- Victoire Garantie à remplacer par Aviva Garantie,

- Victoire Performance à remplacer par Aviva Performance,

- Victoire Progression II,

- Victoriel à remplacer par Aviva Multigestion,

- Victoire Interobligations à remplacer par Aviva interoblig,

- Victoire Immo I.

Déclare Messieurs [JN] [I], [F] [I] et Madame [DH] [D] épouse [I], agissant en qualité d'héritiers d'[V] [I], etles consorts [T] [C] irrecevables en leur demande de réintégration des supports sur les contrats de leur auteur décédé ;

Condamne la société AVIVA VIE à payer, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, au titre du préjudice de perte de chance subi du 1er janvier 1998 au 31 décembre 2005, sauf pour les héritiers d'[V] [I] dont le préjudice est limité au 31 décembre 2004 à :

- Madame [Y] [I] : la somme de 9032,25 €,

- Madame [O] [I] : la somme de 436 149,25 €,

- Monsieur [P] [I] : la somme de 435 035,50 €,

- Monsieur [A] [E] : la somme de 197 806,50 €,

- Madame [DH] [I] née [D] : la somme de 85 450,25 €,

- Monsieur [PX] [T] et Madame [S] [C], en qualité d'héritiers de Madame [W] [T], décédée : la somme de 123 004,25 €,

- Monsieur [M] [X] : la somme de 25 861,75 €,

- Monsieur [M] [T] : la somme de 123 004,25 €,

- Mademoiselle [B] [X] : la somme de 14 174,75 €,

- Madame [U] [J] : la somme de 1298,25 €,

- Monsieur [JN] [I], Monsieur [F] [I] et Madame [DH] [D] en leur qualité d'ayant droits de Monsieur [V] [I] la somme de

70 920,75 €.

Condamne la société AVIVA VIE à payer aux consorts [I] [E] [T] [X] [J] la somme totale de 20 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société AVIVA VIE aux entiers dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 10/25392
Date de la décision : 04/02/2014

Références :

Cour d'appel de Paris C5, arrêt n°10/25392 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-02-04;10.25392 ?
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