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17/12/2013 | FRANCE | N°07/10983

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 5, 17 décembre 2013, 07/10983


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 5



ARRET DU 17 DECEMBRE 2013



(n° 354, 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 07/10983



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Juin 2007 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 05/11316.





APPELANT



Monsieur [Z] [I]

[Adresse 2]

[Localité 2].



Représenté par Me O

livier BERNABE, avocat de la SCP BERNABE, au barreau de PARIS, toque : B0753.

Assisté de Me Hélène FERON-POLONI, avocat au barreau de PARIS, toque L0187.





INTIMEE



LA GENERALI VIE SA anciennement déno...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 5

ARRET DU 17 DECEMBRE 2013

(n° 354, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/10983

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Juin 2007 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 05/11316.

APPELANT

Monsieur [Z] [I]

[Adresse 2]

[Localité 2].

Représenté par Me Olivier BERNABE, avocat de la SCP BERNABE, au barreau de PARIS, toque : B0753.

Assisté de Me Hélène FERON-POLONI, avocat au barreau de PARIS, toque L0187.

INTIMEE

LA GENERALI VIE SA anciennement dénommée la SA LA FEDERATION CONTINENTALE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social sis

[Adresse 1]

[Localité 1].

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018.

Assistée de Me Olivia RISPAL CHATELLE de la SCP LEMONNIER- DELION- GAYMARD - RISPAL, avocat au barreau de PARIS, toque P0516.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 Novembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre

Monsieur Christian BYK, Conseiller

Monsieur Michel CHALACHIN, Conseiller, entendu en son rapport

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Joëlle BOREL

ARRET :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, présidente et par Madame Joëlle BOREL, greffière présente lors du prononcé.

Le 7 février 1995, Mr et Mme [I] ont contracté deux prêts in fine auprès de la SOCIETE GENERALE, remboursables au terme de dix ans en ce qui concerne le capital, les intérêts étant payés mensuellement.

Pour garantir le remboursement de ces prêts, Mr [Z] [I] a adhéré aux contrats d'assurance décès, invalidité, incapacité souscrits par la banque auprès de la société LA FEDERATION CONTINENTALE, devenue GENERALI VIE.

Le 6 juin 2000, Mr [I] a informé l'assureur de ce qu'il était en arrêt de travail depuis le 16 avril 2000.

L'assureur a pris en charge le sinistre, à l'expiration du délai de franchise de 90 jours, du 15 juin 2000 au 7 juillet 2002 au titre de la garantie incapacité temporaire totale de travail, puis du 8 juillet 2002 au 7 avril 2005, terme du prêt, au taux de 36,47/66ème, au titre de la garantie invalidité permanente partielle.

Mr [I] a été classé en invalidité de deuxième catégorie par la CPAM à compter du 1er février 2003.

La société GRAS SAVOYE, courtier de la SOCIETE GENERALE, a informé l'assureur de ce qu'elle avait réglé par erreur, le 7 avril 2005, le capital restant dû par

Mr [I] en fin de prêt, alors que seul le remboursement des intérêts était susceptible d'être garanti ;

Par acte du 25 octobre 2005, la société GENERALI VIE a assigné Mr [I] devant le tribunal de grande instance de Créteil afin d'obtenir le remboursement de la somme de 130.571,43 euros qui lui avait été indûment versée.

Devant le tribunal, Mr [I] s'est opposé à la demande de l'assureur et lui a réclamé, à titre reconventionnel, la prise en charge de la totalité des échéances du prêt au titre de la garantie invalidité.

Par jugement du 12 juin 2007, le tribunal a condamné Mr [I] à payer la somme de 130.571,43 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2005, et l'a débouté de toutes ses demandes.

Mr [I] a interjeté appel du jugement par déclaration du 22 juin 2007.

Par arrêt du 18 janvier 2011, la cour de céans a infirmé le jugement en toutes ses dispositions, a déclaré inopposable à Mr [I] la clause des deux contrats d'assurance souscrits le 7 février 1995, a dit que l'assureur était tenu de le garantir, outre des intérêts des deux prêts, du capital de ces prêts, et ce dans la limite du taux d'invalidité permanente partielle devant être déterminé après expertise, et a désigné le docteur [M] afin de donner son avis sur ce taux d'invalidité.

Par ordonnance du 7 mai 2012, le conseiller de la mise en état a débouté la société GENERALI VIE de sa demande de complément d'expertise quant à la date d'apparition de l'affection diabétique de Mr [I] et ses conséquences.

Le docteur [M] a déposé son rapport le 31 octobre 2012.

Par dernières conclusions du 24 octobre 2013, Mr [I] demande à la cour de débouter la société GENERALI VIE de ses demandes, de prendre acte de ce que les sommes déjà réglées par celle-ci correspondent bien à celles qu'elle devait prendre en charge au titre de sa garantie, et de condamner l'intimée au paiement des sommes de 20.000 euros en réparation de son préjudice moral et de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions du 28 octobre 2013, la société GENERALI VIE demande à la cour, sous divers constats, de dire que les deux adhésions au contrat d'assurance du 5 décembre 1994 sont nulles pour réticences et fausses déclarations intentionnelles, de condamner Mr [I] à lui restituer la somme de 169.859,71 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision à intervenir, de débouter l'appelant de l'intégralité de ses demandes, à titre subsidiaire, de dire que l'état de santé de Mr [I] est consolidé depuis le 19 octobre 2000 et de le condamner à lui restituer la somme de 17.576,75 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision à intervenir, en tout état de cause, de condamner Mr [I] au paiement de la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 octobre 2013.

MOTIFS

Sur la recevabilité de la demande de nullité des contrats d'assurance.

Considérant que la société GENERALI VIE invoque la nullité des contrats d'assurance pour fausse déclaration intentionnelle, au motif que l'expertise judiciaire a révélé que Mr [I] souffrait de diabète depuis 1992, soit avant son adhésion aux contrats; elle soutient que l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 18 janvier 2011 ne peut lui être opposée, car les réticences reprochées à l'appelant lui étaient inconnues jusqu'aux opérations d'expertise ; elle précise qu'elle ne sollicite pas la révision de l'arrêt rendu en 2011 ;

Considérant que Mr [I] répond que l'autorité de la chose jugée attachée à cet arrêt rend la demande de nullité irrecevable, et que le délai du recours en révision est expiré depuis le 8 septembre 2011, l'intimée ayant eu connaissance de ses antécédents médicaux le 8 juillet 2011 ;

Considérant qu'il convient d'observer, à titre liminaire, que la société GENERALI VIE ne demande pas la révision de l'arrêt du 18 janvier 2011, si bien que les arguments développés par Mr [I] à ce sujet sont inutiles ;

Considérant que l'intimée forme devant la cour une demande de nullité des contrats d'assurance fondée sur les dispositions de l'article L.113-8 du code des assurances, demande qui n'avait pas été soumise à l'appréciation du tribunal ni de la cour jusqu'à présent ;

Considérant que cette demande nouvelle se justifie par la révélation d'un fait au cours de l'instance d'appel, à savoir l'existence d'un diabète de type II qui avait été diagnostiqué en 1992, soit avant l'adhésion de Mr [I] aux contrats d'assurance ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1351 du code civil, l'autorité de la chose jugée ne joue qu'à l'égard d'une demande ayant le même objet que celle qui a été précédemment jugée ;

Considérant qu'en l'espèce, la demande de nullité des contrats d'assurance n'a pas le même objet que celle dont la cour était initialement saisie, et qui portait sur l'interprétation d'une clause contractuelle et sur l'étendue de la garantie due par l'assu-

reur ;

Considérant que la société GENERALI VIE ne pouvait saisir la cour d'une demande de nullité tant qu'elle ignorait que Mr [I] lui avait dissimulé des antécédents médicaux dont l'existence n'a été révélée que par la transmission de pièces dans le cadre de l'expertise judiciaire ordonnée par la cour ;

Qu'il ne peut donc lui être reproché d'avoir formé cette demande postérieurement à l'arrêt mixte rendu le 18 janvier 2011 ;

Considérant, par conséquent, que la demande nouvelle formée par l'intimée doit être jugée recevable, puisqu'elle ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt précité ;

Sur le fond

Considérant que Mr [I] n'invoque aucun argument de fond pour s'opposer à la demande de nullité des contrats d'assurance ;

Considérant que, aux termes de l'article L.113-2-2° du code des assurances, l'assuré doit répondre exactement aux questions posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l'assureur l'interroge lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l'assureur les risques qu'il prend en charge ;

Que, aux termes de l'article L.113-8 du même code, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre ;

Considérant qu'en l'espèce, Mr [I] avait répondu par la négative à la question n° 2 des formulaires de déclaration du risque qu'il avait remplis le 7 décembre 1994, et qui était ainsi rédigée : 'Etes-vous ou avez-vous été atteint d'une maladie grave...endocrinologique et nutritionnelle (diabète, hypercholestérolémie en particulier)...'';

Or considérant qu'un compte rendu d'hospitalisation du 14 novembre 1995, communiqué au cours des opérations d'expertise judiciaire, a révélé que son diabète avait été découvert en 1992, soit plusieurs mois avant son adhésion aux contrats d'assurance ;

Considérant que, le 7 décembre 1994, Mr [I], qui n'ignorait pas qu'il souffrait de diabète depuis au moins deux ans, ne pouvait pas répondre négativement à une question qui portait, de manière très précise, sur ce type d'affection ;

Qu'il ne s'explique d'ailleurs pas sur cette réticence à déclarer une telle maladie ;

Considérant que le caractère intentionnel de cette réticence ne fait aucun doute, Mr [I] ne pouvant ignorer la gravité de cette maladie, qui était d'ailleurs spécifiquement désignée comme 'maladie grave' dans la question n° 2 ;

Que son attention a été attirée sur les risques liés à une fausse déclaration intentionnelle qui étaient rappelés, de manière particulièrement visible, dans le questionnaire de santé, juste avant sa signature ;

Que son intention de dissimuler l'existence de cette maladie résulte encore du fait qu'il a menti aux trois médecins experts qui l'ont examiné à la demande de l'assureur en 2001, 2002 et 2004, en déclarant que son diabète avait été diagnostiqué au début du mois d'avril 2000 ou en 1999 ;

Qu'il avait manifestement conscience du fait d'avoir dissimulé une maladie grave à son assureur ;

Considérant, enfin, que l'appréciation du risque par l'assureur a été modifiée par cette réticence, le médecin conseil de celui-ci ayant attesté, le 8 novembre 2012, que la déclaration du diabète aurait entraîné une demande de renseignement complémentaire et, selon les informations contenues, une surprime de l'ordre de 75 % en décès/invalidité absolue et définitive et une surmortalité de 75 % en incapacité temporaire totale ;

Considérant, par conséquent, que les deux contrats d'assurance auxquels Mr [I] a adhéré le 7 décembre 1994 doivent être annulés sur le fondement des dispositions de l'article L.113-8 du code des assurances ;

Que l'appelant devra donc rembourser à l'assureur la somme de 169.859,71 euros qui lui a été versée au titre des contrats litigieux, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt ;

Considérant qu'il sera débouté de toutes ses demandes, qui avaient pour fondement les contrats annulés ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Considérant que l'équité commande d'allouer à l'intimée la somme de 1.500 euros

au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de débouter l'appelant de sa demande fondée sur ce texte ;

Sur les dépens et les frais d'expertise

Considérant que les dépens, comprenant les frais d'expertise judiciaire, doivent être mis à la charge de l'appelant, qui a succombé en ses demandes ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré ;

Et, statuant à nouveau, déclare la demande de nullité des contrats d'assurance recevable ;

Annule les contrats d'assurance auxquels Mr [I] a adhéré le 7 décembre

1994 ;

En conséquence, condamne Mr [I] à payer à la société GENERALI VIE la somme de 169.859,71 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Déboute Mr [I] de toutes ses demandes ;

Condamne Mr [I] à payer la somme de 1.500 euros à la société GENERALI VIE au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute Mr [I] de sa demande fondée sur ce texte ;

Condamne Mr [I] aux dépens de première instance et d'appel, qui comprendront les frais de l'expertise judiciaire, et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 07/10983
Date de la décision : 17/12/2013

Références :

Cour d'appel de Paris C5, arrêt n°07/10983 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-12-17;07.10983 ?
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