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04/12/2013 | FRANCE | N°12/03810

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2- chambre 1, 04 décembre 2013, 12/03810


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2- Chambre 1

ARRET DU 4 DECEMBRE 2013

(no 358, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 03810

Décision déférée à la Cour :
jugement du 1er février 2012- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 10/ 13364

APPELANTES

Société PRESTAFORMA
98 bis, boulevard de la Tour Maubourg
75007 PARIS

Représentée par Me Caroline REGNIER-AUBERT de la SCP REGNIER-BEQUET-MOISAN, avocat

au barreau de PARIS, toque : L0050
Assistée de Me Carla di FAZIO-PERRIN (Selarl RACINE avocats au barreau de PARIS, toque : L 30...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2- Chambre 1

ARRET DU 4 DECEMBRE 2013

(no 358, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 03810

Décision déférée à la Cour :
jugement du 1er février 2012- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 10/ 13364

APPELANTES

Société PRESTAFORMA
98 bis, boulevard de la Tour Maubourg
75007 PARIS

Représentée par Me Caroline REGNIER-AUBERT de la SCP REGNIER-BEQUET-MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050
Assistée de Me Carla di FAZIO-PERRIN (Selarl RACINE avocats au barreau de PARIS, toque : L 301)

SCP KARSENTI-PERES agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux y domiciliés en cette qualité.
14, rue Notre Dame des Victoires
75002 PARIS

Représentée par Me Dominique OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069
Assistée de Me Gérard VANCHET (SCP LYONNET DU MOUTIER VANCHET avocats au barreau de PARIS toque : P 190)

Société CABINET D'AVOCATS MORGAN LEWIS ET BOCKIUS société (LLP) de droit américain, pise en sa succursale en France, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux
68, rue du Faubourg Saint Honoré
75008 PARIS

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034
Assistée de Me Jean-Pierre DUFFOUR (SCP DUFFOUR avocats au barreau de PARIS toque : P 470)

INTIMEE

SA MONTAIGNE FASHION GROUP agissant poursuites et diligences de son Directeur Général ou tout représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège et assistée par la SCP Y... X... en la personne de Maître Y... demeurant... ès qualités de Commissaire à l'exécution du plan
3, place des Vosges
75004 PARIS

Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125
Assistée de Me Michel PIALOUX (SCP M. PIALOUX M. AUSSEDAT avocats au barreau de PARIS toque : P 136)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 25 septembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jacques BICHARD, Président
Madame Marguerite-Marie MARION, Conseiller
Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN

ARRET :

- contradictoire

-rendu publiquement par Monsieur Jacques BICHARD, président

-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jacques BICHARD, président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par jugement contradictoire du 1er février 2012, le Tribunal de grande instance de Paris a :
- déclaré la société PRESTAFORMA, le Cabinet MORGAN LEWIS et BOCKIUS ainsi que la S. C. P. DANIELE KARSENTI-PERES, responsables in solidum des conséquences dommageables du défaut d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés des locaux exploités 182, boulevard Saint Germain à Paris VIIème, à la date de sa demande de renouvellement du bail notifié le 5 mars 2007,
- dit que dans leur rapport entre eux, les défendeurs supporteront la charge des condamnations à hauteur de 30 % pour la société PRESTAFORMA, de 40 % pour le Cabinet d'avocats MORGAN LEWIS et BOCKIUS, et de 30 % pour la S. C. P. DANIELE KARSENTI-PERES,
Avant dire droit sur la demande de dommages-intérêts,
- ordonné une expertise confiée à Monsieur Jean-Pierre Z...,
- dit que la demande de paiement des sommes de 216, 09 ¿ TTC et de 114, 43 ¿ TTC, réclamées par la S. C. P. DANIELE KARSENTI-PERES est sans objet,
- condamné in solidum les défendeurs aux dépens exposés ce jour,
Et, les autres chefs de réclamation demeurant réservés, a :
- ordonné l'exécution provisoire sauf en ce qui concerne les dépens ;
- débouté pour le surplus, plus ample ou contraire ;

Par déclaration du 28 février 2012, la S. C. P. DANIELE KARSENTI-PERES a interjeté appel de ce jugement ;

L'affaire a été enregistrée au Greffe sous le no RG 12-03810 ;
***

Par déclaration du 29 février 2012, le Cabinet d'avocats MORGAN LEWIS et BOCKIUS (MNP) a interjeté appel de ce jugement ;

L'affaire a été enregistrée au Greffe sous le no RG 12-03896 ;

Par ordonnance du 5 juillet 2012, le Conseiller de la mise en état a ordonné la jonction de cette procédure avec la présente procédure enregistrée sous le no RG 12-03810 ;
*

Par déclaration du 15 mars 2012, la société PRESTAFORMA S. A. S. a interjeté appel de ce jugement ;

L'affaire a été enregistrée au Greffe sous le no RG 12-04850 ;

Par ordonnance du 11 juin 2012, le Conseiller de la mise en état a ordonné la jonction de cette procédure avec la procédure enregistrée sous le no RG 12-03810 ;
***

Dans ses dernières conclusions en cause d'appel déposées et communiquées par la voie électronique le 4 septembre 2013, la S. C. P. DANIELE KARSENTI-PERES demande à la Cour de :
- infirmer le jugement déféré en tous points,
Statuant à nouveau,
- débouter la société MONTAIGNE FASHION GROUP de ses demandes,
- dire et juger qu'en toute hypothèse la société MONTAIGNE FASHION GROUP est seule à l'origine du préjudice dont elle se prévaut,
En conséquence,
- " débouter la société MONTAIGNE FASHION GROUP de l'intégralité de ses demandes " et notamment de sa demande d'évocation par application de l'article 568 du Code de procédure civile et de fixation subséquente de son préjudice
-débouter le Cabinet d'avocats MORGAN LEWIS et BOCKIUS de sa demande de garantie dirigée à l'encontre de la S. C. P. DANIELE KARSENTI-PERES,
- débouter la société PRESTAFORMA de sa demande de garantie dirigée à l'encontre de la S. C. P. DANIELE KARSENTI-PERES,
A titre subsidiaire,
- condamner in solidum la société PRESTAFORMA et le Cabinet d'avocats MORGAN LEWIS et BOCKIUS à garantir l'office d'huissier de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre en principal et frais,
- condamner MONTAIGNE FASHION GROUP à restituer les sommes qui lui ont été réglées au titre de l'exécution provisoire, savoir 1 333, 33 ¿,
- condamner in solidum tous succombants au paiement de la somme de 4 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner in solidum MONTAIGNE FASHION GROUP, MORGAN LEWIS et BOCKIUS et la société PRESTAFORMA aux entiers dépens ;

Dans ses dernières conclusions en cause d'appel déposées et communiquées par la voie électronique le 9 septembre 2013, la société PRESTAFORMA S. A. S. demande à la Cour de :
- la recevoir en son appel et la déclarer bien fondée,
- infirmer le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
A titre principal,
- débouter la société MONTAIGNE FASHION GROUP de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions formulées à son encontre,
A titre subsidiaire,
- dire que le préjudice indemnisable de la société MONTAIGNE FASHION GROUP ne pourrait être qu'une perte de chance de voir son bail renouvelé ou d'obtenir une indemnité d'éviction,
- rejeter la demande d'évocation de la société MONTAIGNE FASHION GROUP,
- condamner solidairement, ou l'un ou l'une à défaut de l'autre, le Cabinet MORGAN LEWIS et BOCKIUS et la S. C. P. DANIELE KARSENTI-PERES à relever et garantir la société PRESTAFORMA de toute condamnation, en principal, intérêts et frais, prononcées à son encontre au bénéfice de la société MONTAIGNE FASHION GROUP par la décision à intervenir ;
A titre très subsidiaire,
- rejeter la demande d'évocation de la société MONTAIGNE FASHION GROUP,
- à défaut, dire et juger que :
¿ le loyer du bail renouvelé aurait été déplafonné et qu'en conséquence la valeur du droit au bail de la société MONTAIGNE FASHION GROUP est nulle,
¿ le fonds de commerce était déficitaire,
¿ le montant de l'indemnité d'éviction se limite en conséquence aux indemnités accessoires,
En tout état de cause,
- rejeter toutes demandes formulées à l'encontre de la société PRESTAFORMA de garantie ou au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société MONTAIGNE FASHION GROUP au paiement de la somme de 1 200 ¿ en restitution du montant versé par la société PRESTAFORMA au titre de la condamnation sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile prononcée par les premiers juges,
- condamner solidairement, ou l'un ou l'une à défaut de l'autre, la société MONTAIGNE FASHION GROUP, le Cabinet MORGAN LEWIS et BOCKIUS et la S. C. P. DANIELE KARSENTI-PERES à payer à la société PRESTAFORMA la somme de 20 000 ¿ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner les mêmes aux entiers dépens ;

Dans ses dernières conclusions en cause d'appel déposées et communiquées par la voie électronique le 17 septembre 2013, le Cabinet d'avocats MORGAN LEWIS et BOCKIUS (MNP) demande à la Cour de :
- " Déclarer la SCP KARSENTI et la société PRESTAFORMA irrecevables en tout cas mal fondée en leurs appels dirigés contre le concluant, en confirmant le jugement entrepris en ce qu'il en les a déboutées de leur appel en garantie dirigée contre le Cabinet MORGAN LEWIS ",
Et statuant sur l'appel principal du Cabinet d'avocats MORGAN LEWIS et BOCKIUS
-le recevoir en son appel et le déclarer bien fondé,
- infirmer le jugement entrepris,
- débouter la société MONTAIGNE FASHION GROUP de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées contre le Cabinet MORGAN LEWIS et BOCKIUS,
Subsidiairement,
- déclarer irrecevable la demande d'évocation de la société MONTAIGNE FASHION GROUP,
Plus subsidiairement encore,
- dire et juger qu'elle n'a perdu aucune chance du fait des manquements par elle allégués,
- la débouter de ce chef de toutes ses demandes et conclusions,
Très subsidiairement,
- réduire la part mise à la charge du concluant à 10 %,
- condamner PRESTAFORMA et SCP KARSENTI en tous les dépens ;

Dans ses dernières conclusions en cause d'appel déposées et communiquées par la voie électronique le 16 septembre 2013, la société MONTAIGNE FASHION GROUP S. A. demande à la Cour de :
- déclare irrecevable, subsidiairement sans fondement, les trois appelants en leur appel,
- confirmer la décision entreprise en toutes es dispositions, sauf à préciser que du fait du décès de Monsieur Z..., l'expert désigné est Monsieur A...,
- débouter la société PRESTAFORMA, " la SCP KARSENTI, PERES et PERES, le Cabinet d'avocats MORGAN LEWIS et BOCKIUS de toutes leurs fins, demandes et conclusions ",
Vu l'article 568 du Code de procédure civile,
- donner à l'affaire une solution définitive en évoquant les points non jugés par les premiers juges,
Vu le rapport d'expertise en date du 22 février 2013,
- en homologuer les conclusions,
- condamner in solidum la société PRESTAFORMA, le Cabinet MORGAN LEWIS et BOCKIUS et la SCP KARSENTI-PERES, au paiement de la somme de 500 000 ¿ à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à l'intimée par leurs fautes conjuguées,
- dire et juger que la somme précitée portera avec intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2009, date de l'assignation introductive d'instance, subsidiairement du 1er février 2012, date du jugement ayant reconnu la responsabilité des appelantes,
- dire et juger que les intérêts échus depuis plus d'une année porteront eux-mêmes intérêts au taux légal en application de l'article 1154 du Code civil,
Ajoutant à la décision entreprise,
- condamner in solidum les trois sociétés appelantes au paiement d'une indemnité de 12 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner les appelants aux entiers dépens d'appel ;

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR,

Considérant que la société MONTAIGNE FASHION GROUP S. A. (la société MONTAIGNE FASHION GROUP), venant aux droits de la société REGINA RUBEN S. A., nouvelle appellation de la société REGINA RUBENS SERVICES, elle-même venant aux droits de la société TRADING PARTNERS INTERNATIONAL S. A., avait son siège social au 182, Boulevard Saint Germain à Paris, adresse à laquelle elle bénéficiait également d'un bail commercial de 9 ans à compter du 3 septembre 1998, selon acte sous seing privé signé le même jour avec la S. C. I. OONA ; que le transfert de son siège social a été décidé lors d'un Conseil d'administration qui s'est tenu le 3 mai 2006, les parties ne contestant pas que cette décision a été ratifiée par assemblée générale subséquente ;

Qu'elle s'est heurtée à un refus de la bailleresse de lui renouveler son bail faute d'être inscrite au Registre du commerce et des sociétés (RCS) et a découvert à cette occasion qu'elle avait été effectivement radiée à l'occasion de l'enregistrement de son changement de siège social ;

Que ce refus de renouvellement a été validé par un jugement du Tribunal de grande instance de Paris rendu le 10 juillet 2008 et confirmé par arrêt rendu le 7 octobre 2009 par la Cour d'appel de Paris en application desquels la société MONTAIGNE FASHION GROUP a fait l'objet d'une expulsion des locaux en cause en janvier 2009 ;

Qu'elle a alors fait assigner en responsabilité et en indemnisation, devant le Tribunal de commerce de Paris, la société PRESTAFORMA S. A. S., (PRESTAFORMA) ayant effectué les formalités de changement d'adresse du siège social, par exploit d'huissier de Justice du 3 mars 2009 ; que cette dernière a fait assigner en intervention forcée le Cabinet d'avocats MORGAN LEWIS et BOCKIUS (MNP), (Cabinet MORGAN-LEWIS-BOCKIUS) conseil de la société MONTAIGNE FASHION GROUP qui l'ayant mandatée ainsi que la S. C. P. DANIELE KARSENTI-PERES (SCP KARSENTI-PERES), huissier de Justice mandaté par ce même Cabinet d'avocats pour notifier la demande de renouvellement du bail litigieux ;

Que le Tribunal de commerce de Paris, après avoir procédé à la jonction de ces instances, s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de grande instance de Paris par jugement du 11 juin 2010 ;

Que c'est dans ce contexte qu'a été rendu le jugement soumis à la Cour ;

SUR QUOI,

Considérant que pour la compréhension de la discussion, il y a lieu d'examiner chronologiquement, en premier lieu, les responsabilités encourues par le Cabinet MORGAN LEWIS et BOCKIUS et PRESTAFORMA concernant la radiation du fonds de commerce sis au 182, boulevard Saint Germains, en second lieu, celles relatives aux conséquences de cette radiation et mettant en cause, outre le Cabinet MORGAN-LEWIS-BOCKIUS, la SCP KARSENTI-PERES, puis, successivement, le préjudice, le lien de causalité et les appels en garantie en découlant et par voie de conséquence l'évocation sollicitée par la société MONTAIGNE FASHION GROUP ;

- sur les responsabilités encourues à l'occasion du changement de siège social

Considérant que le Cabinet MORGAN-LEWIS-BOCKIUS, qui réfute toute faute de sa part, soutient qu'il a proposé à la société MONTAIGNE FASHION GROUP, qui a accepté, de s'adresser à PRESTAFORMA pour l'accomplissement des formalités litigieuses comme en atteste la facture de cette dernière directement libellée à l'ordre de la société MONTAIGNE FASHION GROUP formalisant ainsi une relation directe dans laquelle le Cabinet n'a pas voulu s'immiscer préférant que sa cliente bénéficie des services du spécialiste de ces questions qu'il n'était pas ; qu'il souligne que PRESTAFORMA, qui s'est abstenu d'en référer à son mandant avant de prendre l'initiative d'indiquer sur le formulaire " fermé " alors qu'il fallait cocher la case " établissement secondaire ", a commis une erreur qui engage sa responsabilité d'autant qu'elle se présente comme mandataire auprès du RCS pour effectuer les formalités juridiques en soulignant les contrôles qu'elle effectue dans l'accomplissement de ces diligences ; qu'enfin, il relève que l'assignation originaire de la société MONTAIGNE FASHION GROUP visait seulement PRESTAFORMA, et ce, sur un fondement contractuel et que c'est cette dernière qui l'a attrait en intervention forcée, avec les autres parties appelantes ;

Considérant que PRESTAFORMA, reprenant devant la Cour ses moyens de première instance, ajoute qu'étant seulement sous-mandataire, le Cabinet MORGAN-LEWIS-BOCKIUS, qui avait une obligation de surveillance à son égard, ne lui a pas transmis des informations décisives l'amenant naturellement à remplir le formulaire en commettant une erreur ; qu'elle reproche en outre à ce dernier de n'avoir relu ni le Kbis, ni le récépissé de l'acte de dépôt au Greffe ce qui aurait permis de remédier immédiatement à cette erreur ;

Considérant que le Cabinet MORGAN-LEWIS-BOCKIUS, qui ne peut se retrancher derrière le professionnalisme revendiqué par PRESTAFORMA pour se dispenser de ses obligations vis-à-vis de la société MONTAIGNE FASHION GROUP, sa cliente, notamment celle de s'assurer de la bonne exécution des formalités à réception de l'ensemble des pièces justifiant des démarches réalisées, envoyées par PRESTAFORMA, ne verse aux débats aucune pièce permettant d'établir sa proposition faite à la société MONTAIGNE FASHION GROUP, qui l'aurait acceptée, de s'adresser directement à PRESTAFORMA pour l'accomplissement des formalités litigieuses ;

Qu'en revanche, son courriel du 6 juin 2006 (pièce no 7, PRESTAFORMA) sur la base duquel PRESTAFORMA a procédé à la notification litigieuse est ainsi rédigé : " Veuillez trouver ci-joint une copie du bail pour la modification du siège social de la société Regina Rubens " (appellation antérieure de la société MONTAIGNE FASHION GROUP) ; que cette instruction est dénuée de toute ambiguïté ;

Qu'ainsi, la société MONTAIGNE FASHION GROUP n'ignorant pas ce sous-mandat, a pu recevoir directement la facture de PRESTAFORMA libellée à son nom et, ultérieurement, faire délivrer son assignation sur un fondement contractuel sans préjudice de la mise en cause ultérieure des autres parties ;

Qu'enfin, s'agissant de PRESTAFORMA, il y a lieu de relever que celle-ci ne conteste pas la réalité de son erreur ; que cependant, comme relevé à juste titre par le Tribunal et par des motifs pertinents que la Cour adopte, elle ne peut s'en exonérer en invoquant les fautes éventuellement commises par les autres professionnels ;

- sur les responsabilités encourues à l'occasion de la demande de renouvellement du bail

Considérant, l'absence de vérification tant par SCP KARSENTI-PERES que par le Cabinet MORGAN-LEWIS-BOCKIUS n'étant pas contestée, que les premiers Juges, par des énonciations appropriées qui répondent aux moyens des parties et que la Cour adopte, ont exactement apprécié les données du litige et les éléments de preuve qui leur étaient soumis et qu'ils en on tiré les justes conséquences juridiques en retenant une faute à l'encontre de l'une et de l'autre ;

Qu'il sera seulement ajouté, qu'en leur qualité de professionnels du droit, l'avocat et l'huissier de Justice, ne pouvaient ignorer les dispositions de l'article L 145-1 du Code de commerce selon lesquelles l'inscription au RCS pour un fonds de commerce effectivement exercé dans les lieux loués constitue une condition première et impérative pour bénéficier du statut de la propriété commerciale donc du droit au renouvellement du bail ;

Que, alors qu'elle tient de la loi la responsabilité de la rédaction de ses actes sauf lorsque ceux-ci ont été préparés par un autre officier ministériel, ce qu'elle n'allègue pas, que la SCP KARSENTI-PERES qui ne conteste pas avoir rédigé l'acte en cause, se devait de refuser la mission confiée ou demander des délais si elle estimait le délai trop court entre la saisine et la notification de l'acte défectueux ;

Que, pour sa part, le Cabinet MORGAN-LEWIS-BOCKIUS, avocat de la société MONTAIGNE FASHION GROUP à laquelle il devait diligence et conseil dans la défense de ses intérêts, se devait de vérifier que les conditions du renouvellement étaient bien réunies, d'autant qu'il n'est pas contesté que, découverte à ce moment, l'erreur commise par PRESTAFORMA pouvait encore être facilement réparée en réinscrivant l'adresse du fonds de commerce sur le RCS avant de notifier la demande de renouvellement ;

- sur le préjudice, le lien de causalité et les appels en garantie en découlant

Considérant, observation fait que la demande de renouvellement du bail manifeste la volonté de la société MONTAIGNE FASHION GROUP de conserver son établissement, que c'est avec raison que les premiers juges, relevant que ces trois professionnels du droit ne sauraient se prétendre exonérés de la responsabilité qu'ils encourent en prenant motif de la responsabilité des deux autres et d'une prétendue faute, non démontrée, de la société MONTAIGNE FASHION GROUP, retiennent que par les manquements commis, cause directe et certaine de la perte du fonds, PRESTAFORMA (erreur dans les formalités de changement de siège social), le Cabinet MORGAN-LEWIS-BOCKIUS et SCP KARSENTI-PERES (absence de vérification de l'inscription au RCS avant la signification de la demande de renouvellement du bail), ont concouru, chacun aux dommages allégués ;

Que le principe du préjudice étant acquis, c'est avec raison que les premiers juges ont retenu que chacun des co-obligés conserve une part de responsabilité dans la survenance du dommage et les a condamnés à supporter une charge définitive des condamnations dans les proportions de 30 % pour PRESTAFORMA, 40 % pour le Cabinet MORGAN-LEWIS-BOCKIUS et 30 % pour SCP KARSENTI-PERES, les intéressés n'apportant pas d'éléments nouveaux de nature à modifier cette répartition ;

- sur l'évocation

Considérant que la société MONTAIGNE FASHION GROUP, relevant que tous les chefs du jugement contesté ont été déférés à la Cour par les appels non limités des différentes parties, sollicite de la Cour de faire application des dispositions de l'article 568 du Code de procédure civile pour donner une solution définitive au litige en fixant son préjudice dès lors que l'expert désigné en première instance a déposé son rapport ;

Que le Cabinet MORGAN-LEWIS-BOCKIUS, PRESTAFORMA et SCP KARSENTI-PERES soutenant par ailleurs qu'il s'agit d'une perte de chance hypothétique, s'opposent ferment à cette évocation les privant d'un double degré de juridiction ;

Considérant que le Tribunal ayant retenu l'existence d'un préjudice certain en ce que les fautes commises ont eu pour conséquence directe de priver la société MONTAIGNE FASHION GROUP de son droit au renouvellement de son bail ou, de son corollaire, le paiement d'une indemnité d'éviction en cas de refus par le bailleur de renouveler celui-ci, suivi de son expulsion, a ordonné l'expertise en se réservant la discussion sur l'étendue du préjudice dont relève, notamment, la discussion sur la perte de chance invoquée ;

Que dès lors, il n'y a pas lieu à évocation et que les parties seront renvoyées devant les Juges de première instance pour voir statuer sur les préjudices de la société MONTAIGNE FASHION GROUP su
***

Considérant que le jugement déféré étant confirmé, les demandes de restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire de celui-ci, présentées par PRESTAFORMA et SCP KARSENTI-PERES sont sans objet ;

Considérant que la solution du litige, eu égard à l'équité, commande de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile dans les termes du dispositif du présent arrêt ;

Considérant que, succombant en leur appel, la SCP KARSENTI-PERES, le Cabinet MORGAN-LEWIS-BOCKIUS et PRESTAFORMA, devront en supporter les dépens ;

PAR CES MOTIFS,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

DIT n'y avoir lieu à évocation,

EN CONSÉQUENCE, renvoie les parties devant Tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir statuer sur les préjudices,

AJOUTANT,

CONDAMNE, in solidum, la société PRESTAFORMA S. A. S., le Cabinet d'avocats MORGAN-LEWIS-BOCKIUS (MNP) et la S. C. P. DANIELE KARSENTI-PERES à verser à la société MONTAIGNE FASHION GROUP S. A. la somme de 5 000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNE, in solidum, la société PRESTAFORMA S. A. S., le Cabinet d'avocats MORGAN-LEWIS-BOCKIUS (MNP) et la S. C. P. DANIELE KARSENTI-PERES au paiement des dépens avec admission des avocats concernés au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2- chambre 1
Numéro d'arrêt : 12/03810
Date de la décision : 04/12/2013
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2013-12-04;12.03810 ?
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