La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/10/2013 | FRANCE | N°12/18793

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 31 octobre 2013, 12/18793


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 8



ARRET DU 31 OCTOBRE 2013



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/18793



Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 octobre 2012 - Juge de l'exécution d'EVRY - RG n° 11/08200



APPELANTE



CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représ

entée par la SELARL CARBONNIER LAMAZE RASLE ET ASSOCIES en la personne de Me Fanny DESCLOZEAUX, avocats au barreau de PARIS (toque : P0298)

Assistée de la SCP ROSENFELD en la personne de Me Fall PARAIS...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 8

ARRET DU 31 OCTOBRE 2013

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/18793

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 octobre 2012 - Juge de l'exécution d'EVRY - RG n° 11/08200

APPELANTE

CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par la SELARL CARBONNIER LAMAZE RASLE ET ASSOCIES en la personne de Me Fanny DESCLOZEAUX, avocats au barreau de PARIS (toque : P0298)

Assistée de la SCP ROSENFELD en la personne de Me Fall PARAISO, avocats au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Monsieur [O] [R]

et

Madame [J] [P] épouse [R]

[Adresse 3]

[Localité 3]

Représenté par la SCP LAGOURGUE - OLIVIER en la personne de Me Charles-Hubert OLIVIER, avocats au barreau de PARIS (toque : L0029)

Représenté par Me Bertrand CAYOL, avocat au barreau de PARIS (toque : C0140)

Monsieur [W] [S]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté par SCP Jeanne BAECHLIN en la personne de Me Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS (toque : L0034)

SCP MARIAN DUVAL ORMEZZANO MANDRAN

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par SCP Jeanne BAECHLIN en la personne de Me Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS (toque : L0034)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 Septembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Alain CHAUVET, Président

Madame Martine FOREST-HORNECKER, Conseillère

Madame Hélène SARBOURG, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Emilie GUICHARD

ARRET CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile

- signé par Monsieur Alain CHAUVET, président et par Madame Emilie GUICHARD, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par jugement du 2 octobre 2012, auquel la Cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le juge de l'exécution du Tribunal de grande instance d'EVRY a :

- prononcé la jonction des procédures enrôlées sous les numéros 11/08200 et 12/03001,

- dit que l'acte authentique reçu le 5 mai 2003 par Maître [S], notaire associé à VIENNE, par lequel la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST a consenti aux époux [R] un prêt immobilier MODULIMMO de 149 950 euros pour leur permettre d'acquérir en état futur d'achèvement un ensemble immobilier situé à [Localité 6] n'est pas un titre exécutoire au sens de l'article 3 de la loi du 9 juillet 1991 et ne vaut que comme écritures privées au sens de l'article 1318 du code civil,

- en conséquence annulé la saisie attribution pratiquée à l'encontre des époux [R] par la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST (CCM) le 25 août 2011 entre les mains du GROUPE PIERRE ET VACANCE en exécution de cet acte établi par Maître [W] [S] notaire à VIENNE en date du 5 mai 2003,

- ordonné la mainlevée de la saisie conservatoire pratiquée à l'encontre des époux [R] le 9 février 2012 en vertu de la grosse en forme exécutoire d'une ordonnance aux fins de saisie conservatoire rendue par Madame le juge de l'exécution près le tribunal de grande instance d'EVRY le 24 janvier 2012, aux frais exclusifs de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST,

- rejeté toute autre demande,

- condamné la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST (CCM) à verser aux époux [R] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST a relevé appel du jugement par déclaration reçue au greffe de la Cour le 19 octobre 2012.

Vu les dernières conclusions en date du 12 février 2013 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments, par lesquelles la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST, appelante, demande à la Cour de :

- débouter Monsieur et Madame [R] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- constater qu'ils ne remettent pas en cause la validité de leur titre de propriété passé avec la même procuration et dans les mêmes conditions,

- faire sommation aux consorts [R] de communiquer leur état réel d'endettement avec la date des encours et de verser aux débats sa déclaration d'impôts et avis d'imposition depuis l'octroi du prêt accordé parle le CREDIT MUTUEL,

- réformer la décision de première instance en toutes ses dispositions,

- entendre les notaires en leurs explications,

- condamner tous succombants au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL CARBONNIER, LAMAZE, RASLE & ASSOCIES.

Vu les dernières conclusions en date du 14 janvier 2013 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de leurs moyens et arguments, par lesquelles Monsieur [O] [R] et Madame [J] [P] épouse [R], intimés, demandent à la Cour de :

- in limine litis : confirmer que la contestation formée par les consorts [R] est régulière en la forme, conformément aux dispositions de l'article 66 du décret du 31 juillet 1992,

à titre principal :

' sur la saisie attribution en date du 25 août 2011

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il ordonne la mainlevée de la mesure de saisie attribution en date du 25 août 2011,

- débouter la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- en conséquence : confirmer la mainlevée immédiate de la saisie attribution pratiquée au préjudice des consorts [R] le 25 août 2012,

- en tant que de besoin : ordonner à la CCM ETANG DE BERRE EST de faire procéder à ses frais et sans délai à la mainlevée immédiate de la saisie attribution pratiquée au préjudice de Monsieur et Madame [R] faute de caractère exécutoire du titre allégué au soutien de la mesure d'exécution,

- en tant que de besoin : dire et juger que faute pour la CCM ETANG DE BERRE EST d'avoir procédé à la mainlevée dans le délai de 8 jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir, Monsieur et Madame [R] auront la faculté d'y faire procéder par tout huissier territorialement compétent de leur choix, aux frais exclusifs de la CCM ETANG DE BERRE EST,

- donner acte de ce que les consorts [R] se réservent la faculté d'engager une procédure en inscription de faux sur le titre sur lequel la CCM ETANG DE BERRE EST persiste à agir,

à titre subsidiaire, si par extraordinaire la Cour d'appel de céans venait à remettre en cause le fondement de la décision dont appel :

- dire et juger que la saisie pratiquée au préjudice des consorts [R] est nulle et de nul effet faute de présentation du titre exécutoire, conformément à l'article 502 du code de procédure civile,

- en conséquence : ordonner la mainlevée immédiate de la saisie attribution pratiquée au préjudice des consorts [R] le 25 août 2011,

- en tant que de besoin : ordonner à la CCM ETANG DE BERRE EST de faire procéder à ses frais et sans délai à la mainlevée immédiate de la saisie attribution pratiquée au préjudice de Monsieur et Madame [R] faute de caractère exécutoire du titre allégué au soutien de la mesure d'exécution,

- en tant que de besoin : dire et juger que faute pour la CCM ETANG DE BERRE EST d'avoir procédé à la mainlevée dans le délai de 8 jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir, Monsieur et Madame [R] auront la faculté d'y faire procéder par tout huissier territorialement compétent de leur choix, aux frais exclusifs de la CCM ETANG DE BERRE EST,

à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la Cour d'appel de céans venait à remettre en cause le fondement du jugement dont appel et devait ne pas retenir l'irrégularité de la mesure de saisie faute de respect de l'article 502 du code de procédure civile :

- dire et juger que l'acte ne vaut pas titre exécutoire faute pour la banque de justifier du respect des dispositions de la Loi Scrivener relative au délai de rétractation (article L 312-10 du code de la consommation),

- en conséquence : ordonner la mainlevée immédiate de la saisie attribution pratiquée au préjudice des consorts [R] le 25 août 2011,

- en tant que de besoin : ordonner à la CCM ETANG DE BERRE EST de faire procéder à ses frais et sans délai à la mainlevée immédiate de la saisie attribution pratiquée le 25 août 2011 au préjudice de Monsieur et Madame [R] faute de caractère exécutoire du titre allégué au soutien de la mesure d'exécution,

- en tant que de besoin : dire et juger que faute pour la CCM ETANG DE BERRE EST d'avoir procédé à la mainlevée dans le délai de 8 jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir, Monsieur et Madame [R] auront la faculté d'y faire procéder par tout huissier territorialement compétent de leur choix, aux frais exclusifs de la CCM ETANG DE BERRE EST,

' sur la saisie conservatoire en date du 2 février 2012

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il ordonne la mainlevée de la mesure de saisie conservatoire en date du 9 février 2012 faute de circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance,

- débouter la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

Ce faisant :

- dire et juger que la créance invoquée par la CCM ETANG DE BERRE EST n'est pas fondée en son principe,

- dire et juger que la CCM ETANG DE BERRE EST ne justifie d'aucune circonstance susceptible de menacer le recouvrement de sa créance,

en conséquence :

- dire et juger que les conditions nécessaires à la procédure de saisie conservatoire pratiquée par la CCM ETANG DE BERRE EST au préjudice de Monsieur et Madame [R] ne sont pas réunies,

- débouter la CCM ETANG DE BERRE EST de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- ordonner la mainlevée immédiate de la mesure pratiquée au préjudice de Monsieur et Madame [R] aux frais exclusifs de l'appelant,

' en tout état de cause :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il déboute les consorts [R] de leurs demandes indemnitaires,

et statuant à nouveau :

- condamner la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST à payer à Monsieur [R] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST à payer à Madame [R] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts,

Ce faisant :

- condamner la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST à payer à Monsieur [R] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST à payer à Madame [R] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST aux entiers dépens en ce compris les frais de mainlevée de la mesure litigieuse.

Vu les dernières conclusions du 12 février 2013 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de leurs moyens et arguments, par lesquelles la SCP MEYMARIAN-DUVAL-ORMEZZANO-MANDRAN venant aux droits de la SCP ROYOL et Monsieur [W] [S], intimés, demandent à la Cour de :

- réformer le jugement rendu par le juge de l'exécution près le tribunal de grande instance d'EVRY,

à titre principal :

- ordonner le sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale devant le magistrat instructeur près le tribunal de grande instance de MARSEILLE,

à titre subsidiaire :

- dire et juger que le juge de l'exécution n'est pas compétent pour connaître des allégations de faux en écritures publiques à l'encontre des actes notariés,

- dire et juger que le juge de l'exécution n'est pas compétent pour connaître des contestations portant sur la minute des actes de prêt du 5 mai 2003, qu'il n'a compétence que pour connaître de la régularité de la procédure de saisie attribution et des conditions de régularité de la délivrance de la copie exécutoire,

encore plus subsidiairement :

- dire et juger que les critiques formées par les époux [R] à l'encontre tant de l'acte de vente que de l'acte de prêt du 5 mai 2003 mais également de la copie exécutoire délivrée au profit de la société CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST sont mal fondées,

- dire et juger que les actes notariés régularisés par Maître [S] sont valables et doivent produire leurs pleins et entiers effets jusqu'à inscription de faux,

- dire et juger en tout état de cause, qu'aucune sanction ne saurait être prononcée et susceptible de remettre en cause le caractère exécutoire de l'acte authentique de prêt du 5 mai 2003,

en conséquence :

- statuer ce que droit quant au litige opposant la société CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST aux époux [R],

- débouter la Société CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST de l'intégralité de ses prétentions,

- condamner la Société CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST à verser à Maître [S] et à la SCP notariale une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la SCP JEANNE BAECHLIN conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

MOTIFS

Considérant que par actes authentiques reçus les 10 décembre 2002 et 5 mai 2003 respectivement par Maître [K] [Y] notaire associé à AIX EN PROVENCE et Maître [W] [S], notaire associé à VIENNE, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST a consenti aux époux [R] deux prêts immobiliers :

- le premier d'un montant de 196 659 euros pour leur permettre d'acquérir un appartement en l'état futur d'achèvement situé à [Localité 4] lieu dit [Localité 5],

-le second d'un montant de 149 950 euros pour leur permettre d'acquérir un bien situé à [Localité 6] lieu dit Les Verchères ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que les emprunteurs ont cessé le remboursement des échéances et que la déchéance du terme est intervenue le 6 octobre 2009 pour les deux prêts ;

Considérant qu'en exécution d'une copie exécutoire de l'acte du 5 mai 2003, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST a fait pratiquer le 25 août 2011 une saisie-attribution entre les mains de la banque CREDIT DU NORD en paiement de la somme totale de 123 258,91 euros en principal, intérêts et frais ;

Considérant par ailleurs, qu'autorisée par une ordonnance du juge de l'exécution du Tribunal de grande instance d'EVRY du 24 janvier 2012, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST a fait procéder le 9 février 2012 à une saisie conservatoire entre les mains de la SAS PARK AND SUITES à MONTPELLIER pour garantie du paiement de la somme de 182 539,12 euros en principal correspondant aux sommes dues au titre du prêt du 10 décembre 2012 ;

Sur la demande de sursis à statuer

Considérant que la procédure pénale en cours au tribunal de grande instance de MARSEILLE ne fait pas obstacle au jugement de la présente affaire, l'article 4 du Code de Procédure Pénale ne s'appliquant pas aux procédure d'exécution ; qu'en outre l'acte notarié n'est pas argué de faux par les époux [R] qui n'en demandent pas non plus la nullité ;

Considérant qu'il convient donc de rejeter les demandes formées de ce chef par Monsieur et Madame [R] ;

Sur la compétence du juge de l'exécution

Considérant qu'aux termes de l'article L 213-6 du Code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion des mesures d'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ;

Qu'ainsi, le juge de l'exécution tient du dit article une compétence de pleine juridiction pour apprécier la portée et la validité des actes authentiques formalisant un titre exécutoire même si elle touche au fond du droit, ce qui est le cas en l'espèce des mesures pratiquées par la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST ;

Sur la contestation des saisies et la validité du titre exécutoire

' sur la recevabilité de la contestation de la saisie attribution

Considérant que la saisie attribution a été dénoncée aux époux [R] le 1er septembre 2011 ;

Que les intéressés ont saisi le Juge de l'exécution du Tribunal de grande instance d'EVRY par acte du 30 septembre 2011 ;

Considérant que les intimés justifient par la production de la pièce 53 (lettre RAR à la SCP d'huissiers et avis d'envoi de la lettre RAR adressée à l'huissier poursuivant), avoir informé le 30 septembre 2011 la SCP CALIPPE ET CORBEAUX huissiers de justice associés qui a procédé à la saisie, de la délivrance d'une assignation devant le juge de l'exécution du lieu du domicile du demandeur ;

Que le moyen soulevé de ce chef sera rejeté ;

' sur la régularité des actes notariés

- validité de la procuration et de la représentation des emprunteurs

Considérant que l'acte du 10 décembre 2002 mentionne que l'emprunteur est représenté par Madame [Z] [A] clerc de notaire ' en vertu des pouvoirs qu'ils lui ont conférés aux termes d'une procuration reçue par Maître [B] [T] , notaire soussigné à ISSY LES MOULINEAUX (Hauts de Seine), le 3 octobre 2002 dont le brevet original est demeuré annexé à l'acte de vente en état futur d'achèvement dressé ce jour par le notaire soussigné' ;

Considérant que l'acte du 5 mai 2003 mentionne que l'emprunteur est représenté par Madame [M] [H] clerc de notaire  'en vertu des pouvoirs qu'ils lui ont conférés aux termes d'une procuration reçue par Maître [B] [T] , notaire soussigné à ISSY LES MOULINEAUX (Hauts de Seine), le 3 octobre 2002 dont le brevet original est annexé à un acte aux présentes minutes en date de ce jour' ;

Considérant que la nullité d'un contrat pour défaut de pouvoir de représentation d'un contractant est une nullité relative qui ne peut être invoquée que par l'intéressé et est susceptible d'être couverte par confirmation ;

Considérant par ailleurs selon l'article 8 du décret n °71-941 du 26 novembre 1971 dans sa rédaction applicable à l'époque de la signature des actes, que les procurations doivent être annexées à l'acte à moins qu'elles ne soient déposées aux minutes du notaire rédacteur de l'acte ; que dans ce cas il est fait mention dans l'acte du dépôt de la procuration au rang des minutes ; qu'il résulte par ailleurs de la combinaison des articles 23 du décret susmentionné et de l'article 1318 du Code Civil, que l'inobservation de ces obligations ne fait pas perdre à l'acte son caractère authentique, partant son caractère exécutoire ;

Considérant que le fait que la procuration signée par Monsieur et Madame [R] ne soit pas annexée aux actes n'affecte donc en rien le caractère exécutoire de l'acte de prêt ;

Considérant enfin que les époux [R] qui ont disposé des fonds prêtés pour acquérir les biens financés, remboursé pendant plusieurs années les échéances des prêts et donc exécuté les actes pendant plusieurs années, n'en poursuivent pas la nullité et ne s'inscrivent pas en faux contre ces actes ni contre la procuration authentique qu'ils ont donnée ;

Qu'ils ont ainsi ratifié de manière claire et non équivoque le mandat qu'ils contestent aujourd'hui par l'exécution des contrats de prêt ; que les moyens soulevés de ce chef seront donc rejetés ;

- sur la demande de nullité de la saisie attribution pour violation de l'article 502 du Code de procédure civile

Considérant selon l'article 502 du Code de procédure civile que nul jugement nul acte ne peut être mis à exécution que sur présentation d'une expédition revêtue de la formule exécutoire, à moins que la loi n'en dispose autrement.

Considérant que ce texte, inclus dans le titre XV du code de procédure civile : L'EXECUTION DU JUGEMENT, et dans son chapitre I : Conditions générales de l'exécution, constitue un préalable à toute exécution, et s'applique donc à l'ensemble des personnes participant à la procédure d'exécution et en particulier au créancier poursuivant et à l'huissier, l'article L.111-2 du Code des procédures civiles d'exécution autorisant la mise en 'uvre d'une mesure d'exécution forcée au "créancier muni d'un titre exécutoire" et l'article R.141-1 du même code évoquant " la remise d'un titre à l'huissier de justice en vue de son exécution" ;

Qu'ainsi cet article, s'il invite l'huissier à vérifier que le titre qu'il lui est demandé de mettre à exécution est revêtu de la formule exécutoire, n'exige nullement qu'il y ait présentation matérielle du dit titre au débiteur ;

Qu'en effet les articles L.211-1 et R.211-1 du Code des procédures civiles d'exécution n'exigent, pour la validité de la saisie-attribution, que l'énonciation du titre exécutoire en vertu duquel la mesure est pratiquée, ce qui exclut toute présentation du titre lui-même, étant encore précisé qu'il s'agit en l'espèce de la copie exécutoire d'un acte auquel les débiteurs ont été parties, dont ils ne requièrent pas la nullité et qu'ils ont exécuté pendant plusieurs années ;

Considérant par ailleurs que le procès verbal de saisie attribution du 25 août 2011 énonce le titre et comporte les mentions prévues par ce texte, ainsi qu'un décompte distinct des sommes réclamées en principal frais et intérêts échus, ce que ne dénient pas les débiteurs ;

Que le moyen soulevé de ce chef sera rejeté ;

' sur la régularité des actes au regard des dispositions de l'article L.312-10 du Code de la consommation (loi SCRIVENER)

Considérant qu'aux termes de l'acte du 10 décembre 2002 l'emprunteur confirme avoir reçu l'offre préalable par voie postale et l'avoir acceptée le 14 octobre 2002 par courrier adressé au notaire ;

Que l'acte mentionne également : « le notaire atteste avoir reçu l'acceptation par voie postale. Le prêt obéit aux dispositions de l'offre préalable de prêt immobilier reçue et acceptée par l'emprunteur et, s'il y a lieu, par les cautions. Cette offre est reproduite au chapitre 1 du présent acte hypothécaire, ce que reconnaissent l'emprunteur et s'il y a lieu, les cautions » ;

Considérant qu'aux termes de l'acte du 5 mai 2003 l'emprunteur confirme :

- avoir reçu l'offre préalable de prêt par voie postale et l'avoir acceptée le 14 octobre 2002 ;

- qu'à l'offre était annexé le tableau d'amortissement indiquant la décomposition en capital et intérêts pour chaque échéance.

Que l'acte mentionne également : « le notaire atteste avoir reçu l'acceptation par voie postale. Le prêt obéit aux dispositions de l'offre préalable de prêt immobilier reçue et acceptée par l'emprunteur. Cette offre demeurera ci-jointe et annexée aux présentes avec lesquelles elle ne forme qu'un tout. » ;

Considérant que Monsieur et Madame [R] font valoir en substance qu'à la date de la procuration (3 octobre 2002) le délai de réflexion de dix jours de l'article L.312-10 du Code de la Consommation n'était pas écoulé, que le notaire a constaté une acceptation qui n'existe pas et qu'il existe un problème de concordance des dates et de respect des dispositions relatives au délai de réflexion ;

Considérant, s'agissant de l'acte du 10 décembre 2002, selon les pièces communiquées (accusé de réception de l'offre et lettre d'acceptation de l'offre) que les époux [R] attestent avoir reçu le 3 octobre 2002 l'offre de prêt d'un montant de 196 659 euros ; qu'ils ont accepté cette offre le 14 octobre 2002 et l'ont adressée par voie postale à la société le même jour, soit à l'expiration du délai prévu par le texte susmentionné ;

Considérant, s'agissant de l'acte du 5 mai 2003, selon les pièces communiquées (accusé de réception de l'offre et lettre d'acceptation de l'offre) que les époux [R] attestent avoir reçu le 3 octobre 2002 l'offre de prêt d'un montant de 149 950 euros ; qu'ils ont accepté cette offre le 14 octobre 2002 et l'ont adressée par voie postale à la société le même jour, soit à l'expiration du délai prévu par le texte susmentionné, de sorte que les prescriptions légales ont été respectées pour les deux prêts, ce qui conduit au rejet des allégations des intimés sur ce point ;

Considérant par ailleurs que le fait de donner procuration au notaire pour passer un acte de prêt, avant l'expiration du délai de réflexion de dix jours, ne constitue pas une infraction à la loi dite SCRIVENER, cette procuration pouvant être rétractée avant la passation des actes qui est en l'espèce largement postérieure, puisque celle-ci a eu lieu les 10 décembre 2002 et 5 mai 2003 ; que le moyen soulevé de ce chef sera rejeté ;

Considérant selon l'article L.211-1 du Code des procédures civiles d'exécution que tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent ;

Considérant que les époux [R] ne contestent pas ne pas avoir remboursé le prêt litigieux ni d'ailleurs le décompte de créance produit par la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST ;

Considérant que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST était donc fondée à pratiquer la mesure d'exécution aujourd'hui contestée en vertu de l'acte notarié de prêt sur le fondement du texte précité ;

Sur la validité de la saisie conservatoire

Considérant selon l'article L.511-1 du Code des procédures civiles d'exécution que toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur sans commandement préalable , si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement, ces deux conditions étant cumulatives ;

' sur le principe apparent de créance

Considérant que la Banque se prévaut et dispose de la copie exécutoire d'un acte notarié reçu le 10 décembre 2002 par Maître [Y] ; que cet acte n'a pas fait l'objet d'une annulation, ni d'une procédure en inscription de faux ;

Considérant que Monsieur et Madame [R] qui l'ont exécuté pendant plusieurs années, ne contestent pas que les fonds objets du prêt leur ont été remis, que des mensualités échues n'ont pas été réglées et que, conformément aux dispositions du contrat de prêt, la déchéance du terme a été prononcée rendant exigible l'ensemble des sommes dues ;

Considérant ainsi que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST dispose d'une créance apparaissant fondée dans son principe à l'encontre de Monsieur et Madame [R] et ce pour sûreté de la somme de 182 539,12 euros  telle qu'arrêtée par l'ordonnance du 24 janvier 2012 ; que la première condition de l'article L.511-1 du Code des procédures civiles d'exécution est donc remplie ;

' sur les circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance

Considérant qu'il résulte des pièces communiquées que Monsieur et Madame [R] ont souscrit toujours dans le cadre d'opérations de défiscalisation plusieurs autres prêts auprès de divers établissements bancaires ;

Considérant que selon l'assignation au fond qu'ils ont fait délivrer le 10 mars 2011 devant le Tribunal de grande instance de MARSEILLE, ils déclarent être endettés pour la somme totale de 1 400 867 euros en principal outre les intérêts et se trouver dans l'incapacité de faire face aux remboursement des prêts, les loyers perçus ne permettant pas de couvrir les échéances ; qu'il en résulte une situation de surendettement eu égard aux revenus qu'ils déclarent ;

Considérant au surplus qu'il n'est pas sérieusement contesté que les biens litigieux qui ont été acquis dans le cadre d'une opération de défiscalisation subissent du fait de ce statut particulier une décote très importante et ne sont pas négociables à leur valeur déclarée et ce d'autant que le statut fiscal adopté par Monsieur et Madame [R] (loueur de meublé professionnel) restreint encore les possibilités de vente ;

Considérant que les garanties conventionnelles consenties par l'emprunteur (garantie de privilège de prêteur de deniers et inscription d'hypothèque sur le bien financé) sont manifestement insuffisantes pour garantir la créance de l'appelante, la circonstance que cette dernière bénéficie déjà d'une inscription d'hypothèque judiciaire sur un immeuble leur appartenant à [Adresse 4], n'étant pas de nature à modifier cette appréciation ;

Considérant que ces constatations caractérisent suffisamment des circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance ;

Considérant que le jugement déféré doit être infirmé en toutes ses dispositions et Monsieur et Madame [R] déboutés de l'ensemble de leurs demandes, sans qu'il y ait lieu de faire droit à la demande de communication de pièces formulée par l'appelante, celle-ci n'étant pas nécessaire à la solution du litige ;

Considérant que Monsieur et Madame [R] qui succombent supporteront les dépens de première instance et d'appel et indemniseront l'appelante des frais exposés dans la cause à concurrence de la somme de 1 500 euros, les autres parties étant déboutées de leurs demandes sur ce fondement ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement

INFIRME le jugement déféré ;

Statuant à nouveau,

DÉBOUTE Monsieur [O] [R] et Madame [J] [P] épouse [R] de leur demande de mainlevée des saisies pratiquées à leur encontre les 25 août 2011 et 9 février 2012 par la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST ;

CONDAMNE Monsieur [O] [R] et Madame [J] [P] épouse [R] à payer à la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNE Monsieur [O] [R] et Madame [J] [P] épouse [R] aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés selon les modalités de l'article 699 du Code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 12/18793
Date de la décision : 31/10/2013

Références :

Cour d'appel de Paris G8, arrêt n°12/18793 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-10-31;12.18793 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award