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03/07/2013 | FRANCE | N°11/20201

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2- chambre 1, 03 juillet 2013, 11/20201


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 3 JUILLET 2013
(no 223, 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 20201
Décision déférée à la Cour : Jugement du 5 octobre 2011- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 10/ 03715

APPELANTS

Madame Susan Ann Y...épouse Z...(dont l'état civil sera précisé ultérieurement) ... 23500 FELLETIN

Monsieur Brian Z......23200 AUBUSSON

représentés et assistés de Me Pascale FLAURAU

D (avocat au barreau de PARIS, toque : K0090) et de Me Marie PEYREGA (avocat au barreau de PARIS, toque : K0061)...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 3 JUILLET 2013
(no 223, 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 20201
Décision déférée à la Cour : Jugement du 5 octobre 2011- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 10/ 03715

APPELANTS

Madame Susan Ann Y...épouse Z...(dont l'état civil sera précisé ultérieurement) ... 23500 FELLETIN

Monsieur Brian Z......23200 AUBUSSON

représentés et assistés de Me Pascale FLAURAUD (avocat au barreau de PARIS, toque : K0090) et de Me Marie PEYREGA (avocat au barreau de PARIS, toque : K0061)
INTIME
Monsieur L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ÉTAT Bâtiment CONDORCET 6 rue Louise Weiss 75013 PARIS FRANCE

représenté et assisté de Me Frédéric BURET (avocat au barreau de PARIS, toque : D1998) et de Me Carole PASCAREL (avocat au barreau de PARIS, toque : B0953)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 mai 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jacques BICHARD, Président Madame Marguerite-Marie MARION, Conseiller Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN

MINISTERE PUBLIC à l'audience Monsieur Fabien BONAN, avocat général, a développé les conclusions écrites.

ARRET :- contradictoire-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé par M. Jacques BICHARD, président et par Mme Noëlle KLEIN, greffier à qui la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

***
Estimant que l'Etat avait engagé sa responsabilité dans le déroulement d'une procédure pénale dont il a fait l'objet, Monsieur Brian Z...et Madame Susan Ann Y...épouse Z...ont fait assigner " l'Agent Judiciaire du Trésor " devant le Tribunal de grande instance de Paris par exploit d'huissier de Justice du 22 février 2010 en réparation de leur préjudice ;
Par jugement contradictoire du 5 octobre 2011, le Tribunal de grande instance de PARIS :- " 1) Rejette Monsieur Brian Z...et Madame Susan Ann Y...en toute leur action ; ",- " 2) Les condamne aux dépens ; ",- " 3) Déboute pour le surplus. " ;

Par déclaration du 10 novembre 2011, Monsieur Brian Z...a interjeté appel de ce jugement ;
L'affaire a été enregistrée au Greffe de la Cour sous le no RG 11-20201 ;
Par déclaration du 17 novembre 2011, Madame Susan Ann Y...épouse Z...a interjeté appel de ce jugement ;
L'affaire a été enregistrée au Greffe de la Cour sous le no RG 11-20601 ;
Par ordonnance du 18 février 2013, le Conseiller de la mise en état a prononcé la jonction de la procédure enregistrée sous le no RG 11-20601 avec la présente procédure enregistrée sous le no RG 11-20201 ;
Dans leurs dernières conclusions déposées le 31 mai 2012 dans chacun des dossiers avant jonction, Monsieur Brian Z...et Madame Susan Ann Y...épouse Z...demandent à la Cour, au visa des articles L 781-1 et suivants (l'article L 141-1) du Code de l'organisation judiciaire, des articles 6 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme, de :- réformer la décision du Tribunal de grande instance en toutes ses dispositions,- dire que les services de la justice ont fait preuve d'un fonctionnement défectueux à l'égard de Monsieur Brian Z...et de Madame Susan Ann Y...,- condamner " l'Agent Judiciaire du Trésor " à payer à Madame Susan Ann Y...la somme de 150 000 ¿ à titre de dommages-intérêts,- condamner l'Agent Judiciaire du Trésor " à payer à Monsieur Brian Z...la somme de 300 000 ¿ à titre de dommages-intérêts en réparations de son préjudice moral et de son préjudice économique, Subsidiairement, avant dire droit sur ce point,- ordonner une expertise afin de déterminer le préjudice professionnel, économique découlant du dysfonctionnement critiqué et allouer en ce cas une provision,- débouter Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor de toutes autres demandes, fins et conclusions,- condamner l'Agent Judiciaire du Trésor à payer à Monsieur Brian Z...et à Madame Susan Ann Y...épouse Z...la somme de 3 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,- condamner le même aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

Dans ses dernières conclusions déposées le 6 avril 2012 dans chacun des dossiers avant jonction, le 7 juin 2005, l'AGENT JUDICIAIRE DU TRÉSOR " (actuellement dénommé Agent Judiciaire de l'Etat), demande à la Cour, au visa de l'article L 141-1 du Code de l'organisation judiciaire et des articles 6 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme, de :- juger que les époux Z...sont irrecevables à critiquer les actes et décisions entre le 14 novembre 2001 et le 19 juin 203, de la mise en examen de Monsieur Z..., Subsidiairement, A titre liminaire,- se déclarer incompétent pour statuer sur la demande d'effacement des renseignements relatifs à Monsieur Z..., Sur le fond,- confirmer en conséquence le jugement entrepris, Très subsidiairement,- rejeter les demandes formées au titre de la réparation des préjudices,- constater que les actes de vandalisme et les reproches allégués à l'encontre de la presse ne sauraient relever de la responsabilité de l'Etat,- rejeter la demande d'expertise, En tout état de cause,- rejeter la demande formée sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,- condamner Monsieur et Madame Z...aux dépens ;

Par conclusions régulièrement signifiées à chacune des parties, le Ministère Public conclut à la confirmation de la décision déférée,
L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 avril 2013 ;
CELA ETANT EXPOSE, LA COUR,
Considérant qu'il résulte des écritures et des pièces versées au dossier que Monsieur Brian Z...et Madame Susan Ann Y...épouse Z...(les époux Z...ou Monsieur et Madame Z...), de nationalité britannique, résident en France dans le département de la Creuse depuis 1980, le mari exerçant une activité de marchand de biens ;
Que le 14 novembre 2001, les époux G...ont déposé plainte à l'encontre de Monsieur Brian Z...(Monsieur Z...) à la gendarmerie de LE GRAND BOURG en indiquant que, suite à une annonce parue dans la presse britannique, ils avaient pris contact avec ce dernier en mars 2001 pour se porter acquéreurs du château de SAINT PIERRE DE FURSAC à CHABANNE (Creuse) dont il se disait propriétaire ou comme réalisant la vente, qu'un compromis de vente a été signé le 21 avril 2001, que la vente a été régularisée par acte dressé le 30 août 2001 par Maître Jean-Michel H..., notaire à BONNAT, en présence de Monsieur Z...servant d'interprète (pièce no 1 des appelants, scellé no 1) ; qu'ils ont indiqué que celui-ci s'est présenté le 7 septembre 2001 à leur résidence pour demander et obtenir le paiement de la somme de 20 000. en contre-partie de son intervention et celle de 250 000 francs pour des travaux de rénovation qu'il aurait effectués, que s'étant renseignés auprès de services administratifs, ils se sont aperçu que Monsieur Z...n'était ni immatriculé ni déclaré quant à son activité ;
Qu'une enquête préliminaire a été ouverte le même jour ; que Monsieur Z..., entendu le 3 décembre 2001 par les services de gendarmerie, a expliqué avoir d'abord envisagé d'acheter ce château puis avoir finalement traité la vente pour le compte d'une agence immobilière dont deux employés ont été entendus les 7 janvier et 7 février 2002 ;
Qu'à l'issue d'investigations complémentaires, une information contre X... a été ouverte des chefs d'escroquerie et de travail dissimulé sur réquisitoire introductif du Procureur de la République de GUERET en date du 20 août 2002 dans le cadre de laquelle il apparaissait que Monsieur Z...agissait soit pour son compte (27 compromis de vente) soit comme représentant d'un acquéreur désigné ou en vue d'une substitution d'acquéreur (8 compromis de vente), soit comme représentant de sa société GOLD CREST DEVELOPMENT GB Limited " la société GCD Ldt, (2 compromis de vente) et qu'en tout état de cause, il apparaissait dans 37 transactions immobilières traitées par l'enseigne CENTURY 21 de GUERET ;
Que le 19 juin 2003, Monsieur Z...a fait l'objet d'un interrogatoire de première comparution (IPC) et d'une mise en examen par le juge d'instruction puis placé sous contrôle judiciaire par ordonnance du 26 septembre 2003 confirmée par arrêt du 27 novembre 2003 y ajoutant le versement d'une caution de 15 000 € ; que le pourvoi de Monsieur Z...a fait l'objet d'une non-admission par arrêt du 11 février 2004 ;
Qu'au cours de l'instruction, le Juge d'instruction a lancé des commissions rogatoires, a procédé à des auditions et confrontations, désigné et remplacé en tant que de besoin des experts, a refusé par ordonnance des demandes d'investigations supplémentaires et déclaré irrecevables des demandes d'annulation d'actes confirmée par le Président de la Chambre de l'instruction ;
Que, alors qu'il apparaissait qu'il avait été condamné par arrêt du 6 mai 2004 rendu par la Cour d'appel de BOURGES à une peine d'un mois d'emprisonnement avec sursis et 1 500 ¿ d'amende pour escroquerie commise fin 1999 dans le département de l'Indre (infirmant le jugement du 3 septembre 2003 l'ayant condamné à la peine de 6 mois d'emprisonnement avec sursis), Monsieur Z...a fait l'objet de nouvelles mises en examen sur le fondement de deux réquisitoires supplétifs du 15 novembre 2004 et 5 avril 2006 pour des faits, commis sur la période de 2000 au 10 novembre 2005, d'escroquerie par fausse qualité de négociateur habilité ou d'artisan, de dissimulation d'activité par défaut de déclaration aux organismes de protection sociale et à l'administration fiscale, de faux, d'exercice de la profession d'agent immobilier sans carte professionnelle, de manipulation irrégulière de fonds dans le cadre d'opérations immobilières et d'exercice de travail illégal ;
Qu'il a été placé en détention provisoire le 8 juin 2006 en raison du non-respect de son contrôle judiciaire, confirmé par arrêt du 16 juin 2006 avant d'être mis en liberté sous contrôle judiciaire avec maintien de la même interdiction d'exercer une activité en relation avec des achats, ventes et restauration d'immeubles par arrêt du 10 août 2006, sur justification d'une domiciliation effective ;
Que sur réquisitoire définitif du 4 octobre 2006, l'ordonnance de renvoi devant le Tribunal correctionnel en date du 28 novembre 2006 a fait l'objet d'un appel déclaré irrecevable par arrêt du 2 février 2007 ;
Que par jugement du 25 octobre 2007, le Tribunal correctionnel de GUERET a :- relaxé Monsieur Z...des faits d'usage de la fausse qualité d'entrepreneur du bâtiment,- déclaré Monsieur Z...coupable d'exercice de la profession d'agent immobilier sans carte professionnelle, de maniement de fonds pour une opération immobilière sans carte professionnelle, d'escroquerie et d'exercice d'un travail dissimulé,- condamné Monsieur Z...à la peine de 6 mois d'emprisonnement dont 4 mois avec sursis et mise à l'épreuve durant 2 ans ;

Que, sur son appel, la Cour d'appel de LIMOGES, par arrêt du 30 avril 2008, a infirmé ce jugement et relaxé Monsieur Z...des fins de la poursuite ;
Que c'est dans ce contexte que Monsieur Z...a saisi Tribunal de grande instance de Paris qui a rendu le jugement déféré à la Cour ;
SUR QUOI,
Considérant que l'Agent Judiciaire de l'Etat (anciennement dénommé l'Agent Judiciaire du Trésor) soulève l'irrecevabilité de l'action des époux Z...avant la date du 19 juin 2003 faute d'avoir la qualité d'usagers du service public de la Justice et de victime par ricochet dès lors que la plainte du 14 novembre 2001 a nécessité une enquête préliminaire pour vérifier les faits dénoncés et que le réquisitoire introductif a été ouvert contre X... ;
Mais considérant que Monsieur Z...a été directement visé par l'enquête et la procédure pénale subséquente et qu'il a donc acquis la qualité d'usager du service public de la Justice au sens de l'article L 141 du Code de l'organisation judiciaire à compter de son audition par les gendarmes le 3 décembre 2001 ainsi que Madame Z..., par ricochet ;
Qu'en conséquence Monsieur et Madame Z...sont recevables en leur action à compter de cette date ; ***

Considérant qu'aux termes de l'article L141-1 du Code de l'organisation judiciaire eau (COJ), anciennement L 781 du COJ " L'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service de la justice. Sauf dispositions particulières, cette responsabilité n'est engagée que par une faute lourde ou un déni de justice. " ;
- sur le déni de justice du fait du délai non raisonnable de la procédure
Considérant que le déni de justice doit s'entendre plus largement que le refus de répondre aux requêtes ou la négligence à juger une affaire en état de l'être en englobant également tout manquement de l'Etat à son devoir de protection juridique de l'individu, notamment le justiciable en droit de voir statuer sur ses prétentions dans un délai raisonnable conformément aux dispositions de l'article 6 de la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (la CEDH), mais que toutefois ce délai doit s'apprécier en fonction des circonstances propres à chaque affaire en prenant en considération la nature de celle-ci, son degré de complexité ainsi que le comportement des parties dans la procédure dont s'agit ;
Considérant que Monsieur Z...fait valoir que ce déni, abstraction faite de la date de restitution de la caution et de sa demande d'effacement des divers fichiers et bases de données personnelles, résulte des 6 ans et 5 mois qui se sont écoulés entre la plainte déposée le 14 novembre 2001 et l'arrêt de relaxe rendu le 30 avril 2008 par la Cour d'appel de Limoges ; qu'il relève que 1 an et 6 mois se sont écoulés entre son audition par les gendarmes le 3 décembre 2001 et sa mise en examen le 19 juin 2003, plus de 2 mois pour sa mise sous contrôle judiciaire le 26 septembre 2003, 9 mois pour la première confrontation le 26 mai 2004, 6 mois pour le premier réquisitoire supplétif du 15 novembre 2004, 1 an 1/ 2 pour le second réquisitoire supplétif du 5 avril 2006, 2 mois pour son audition aux fins de révocation du contrôle judiciaire le 8 juin 2006, 1 an entre l'ordonnance de renvoi du 28 novembre 2006 et le jugement du 27 octobre 2007, 6 mois entre ce jugement et l'arrêt de la Cour d'appel rendu le 30 avril 2008, enfin 7 mois pour obtenir la restitution de la caution imposée dans le cadre du contrôle judiciaire ;
Considérant cependant qu'il y a lieu de relever qu'il ne peut être valablement reproché au Juge d'instruction, d'une part, alors que le réquisitoire introductif était du 20 août 2002, d'avoir attendu le résultat de plusieurs commissions rogatoires lancées le 25 septembre 2002 prorogée le 19 novembre 2002 et le 31 janvier 2003 avant d'envisager puis de procéder à la mise en examen de Monsieur Z...le 19 juin 2003, d'autre part, de ne pas avoir soumis celui-ci immédiatement à un contrôle judiciaire et avoir tardé à révoquer son contrôle judiciaire, observation faite que ce dernier reproche est également contradictoire avec le fait de soutenir par ailleurs que ce contrôle judiciaire n'était pas justifié ;
Qu'en outre, il n'est pas contesté que le Juge d'instruction a statué, en rejetant la première et en déclarant irrecevable la seconde, sur la demande d'investigations supplémentaires et d'annulation d'acte présentée le 9 juillet 2004, qu'il a été procédé :- à des auditions soit directement soit sur commissions rogatoires lancées en septembre 2002, janvier, juillet, septembre 2003, mai, juin 2004,- à des désignations d'expert, voire à leur remplacement compte tenu de refus (janvier, septembre 2003, décembre 2004),- au lancement de nouvelles commissions rogatoires (juin 2003, avril, mai 2004), ayant nécessité plusieurs prorogations de délais (avril, juillet, octobre, décembre 2005),- à une confrontation avec les parties civiles le 15 avril 2004,- à l'audition de Monsieur Z...le 26 mai 2004 sur mandat d'amener pour qu'il s'explique sur le non-respect du contrôle judiciaire (défaut de versement de la caution),- à de nouvelles mises en examen de Monsieur Z...sur le fondement de deux réquisitoires supplétifs des 15 novembre 2004 et 5 avril 2006 pour des faits, commis sur la période de 2000 au 10 novembre 2005, d'escroquerie par fausse qualité de négociateur habilité ou d'artisan, de dissimulation d'activité par défaut de déclaration aux organismes de protection sociale et à l'administration fiscale, de faux, d'exercice de la profession d'agent immobilier sans carte professionnelle, de manipulation irrégulière de fonds dans le cadre d'opérations immobilières et d'exercice de travail illégal, observation faite qu'il est apparu alors qu'il avait été condamné par arrêt du 6 mai 2004 rendu par la Cour d'appel de BOURGES à une peine d'un mois d'emprisonnement avec sursis et 1 500 € d'amende pour escroquerie commise fin 1999 dans le département de l'Indre (infirmant le jugement du 3 septembre 2003 l'ayant condamné à la peine de 6 mois d'emprisonnement avec sursis),- à une nouvelle audition de Monsieur Z...le 8 juin 2006 sur le non-respect de son contrôle judiciaire (poursuite de son activité de négoce immobilier), ce qui a provoqué son placement sous mandat de dépôt le même jour, puis sa mise en liberté sous contrôle judiciaire le 10 août 2006 sur justification d'une domiciliation effective,- à l'ordonnance de renvoi le 28 novembre 2006 devant le Tribunal correctionnel suite au réquisitoire définitif du 4 octobre 2006, ordonnance frappée d'appel par Monsieur Z...ce qui explique que le Tribunal correctionnel de GUERET n'a rendu son jugement que le 25 octobre 2007, observation faite que la Cour de Limoges a statué sur son appel moins de 6 mois plus tard ;

Qu'il résulte de ce qui précède que l'affaire, qui a révélé une réelle complexité ayant nécessité des expertises, de multiples auditions sur commissions rogatoires, l'examen de nombreuses pièces relatives à des ventes immobilières, s'est déroulée de manière continue et régulière sans être inutilement rallongée par des périodes d'inertie, sa durée de traitement ayant été inévitablement augmentée par les recours fréquents exercés par Monsieur Z..., ce qui était parfaitement son droit ; qu'en effet, celui-ci a fait appel :- de l'ordonnance de placement sous contrôle judiciaire du 26 septembre 2003 qui a été confirmée par arrêt du 27 novembre 2003 y ajoutant le versement d'une caution de 15 000 €, observation faite que son pourvoi a fait l'objet d'une non-admission par arrêt du 11 février 2004 ;- de l'ordonnance de refus d'investigations supplémentaires et d'irrecevabilité de sa demande de nullité d'acte ; que le Président de la chambre de l'instruction a dit n'y avoir lieu à appel par arrêt du 30 août 2004,- de l'ordonnance du 8 juin 2006 révoquant son contrôle judiciaire et le plaçant en détention provisoire, confirmée par arrêt du 16 juin 2006 ;- de l'ordonnance du 28 novembre 2006 le renvoyant devant le Tribunal correctionnel, appel déclaré irrecevable par arrêt du 2 février 2007 ;

- sur les fautes lourdes du service public de la Justice
Considérant que constitue une faute lourde l'acte qui révèle une erreur manifeste et grossière d'appréciation des éléments de droit ou de fait soumis et qui procède d'un comportement anormalement déficient, erreur caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir sa mission dont il est investi et qui doit s'apprécier non au regard des événements postérieurement survenus et non prévisibles à la date de la décision, mais dans le contexte soumis au juge ;
Que si, prises séparément, aucune des éventuelles négligences relevées ne s'analyse en une faute lourde, le fonctionnement défectueux du service de la justice peut résulter de l'addition de celles-ci et ainsi caractériser une faute lourde de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; Considérant que Monsieur Z...estime que les fautes lourdes résultent de l'absence d'un interprète lors de diverses auditions, l'absence de l'avocat choisi lors de deux interrogatoires dont une confrontation interrompue inopportunément par le magistrat, la mise en détention sur de fausses affirmations, la diffusion des faits par la presse locale voire mondiale par l'intermédiaire du web, des demandes d'investigation restées lettres mortes, un climat général d'hostilité des intervenants judiciaires, des actes de vandalisme et des agressions physiques subis au cours de l'instruction, la participation du juge d'instruction à la procédure de redressement judiciaire de l'entreprise du mis en examen, la difficulté à récupérer la caution exigée dans le cadre du contrôle judiciaire, l'atteinte à la vie privée du fait des informations enregistrées sur des fiches et bases de données des services saisis de l'enquête ;

Considérant s'agissant de l'absence d'interprète, que Monsieur Z...est mal venu d'en faire état lors de son audition par les gendarmes dès lors que, se présentant spontanément, il a déclaré lui-même qu'il comprenait le français confirmant en cela son propre rôle d'interprète mentionné dans l'acte de vente litigieux comme indiqué dans l'énoncé des faits ; qu'en outre, il ne conteste pas la mention de son intervention à ce titre ou pour aider à la traduction dans les nombreuses opérations immobilières comme cela résulte, notamment, des promesses de ventes saisies (cf pièce no 1, cote A du dossier d'instruction, premier volume des pièces des appelants), observation faite qu'il est acquis qu'il a été néanmoins régulièrement assisté d'un interprète tout au long de l'instruction ;
Que s'il est exact que son conseil, Maître I..., était absent lors de la confrontation du 15 avril 2004 quoique régulièrement convoqué, il résulte du procès-verbal (PV) d'audition que celui-ci n'avait demandé aucun report de l'interrogatoire, que le Juge d'instruction a contacté le Bâtonnier qui a expliqué qu'il ne pouvait désigner un avocat d'office en présence d'un avocat constitué, qu'à la question " souhaitez-vous répondre à mes questions ? ", Monsieur Z...a répondu au magistrat instructeur : " oui mais je veux un avocat " et a effectivement répondu sans réticence à toutes les questions, que c'est seulement en cours d'audition qu'une télécopie de Maître I...demandant le report de la confrontation a été communiquée au magistrat instructeur et qu'à part cet épisode, il n'est nullement mentionné une quelconque interruption de la confrontation, qu'enfin, il n'apparaît pas que Monsieur Z...ait demandé ultérieurement l'annulation de cette confrontation ;
Que de la même manière, Monsieur Z...n'est pas fondé à reprocher l'absence de son avocat lors de son audition du 8 juin 2006 relative à une nouvelle mise en examen et au non-respect de son contrôle judiciaire dès lors qu'il résulte de ce PV qu'il a lui même déclaré au Juge d'instruction qu'il n'était plus assisté de Maître I..., que le magistrat a sollicité la désignation d'un avocat d'office qui s'est présenté, a consulté le dossier, s'est entretenu avec l'intéressé et l'a assisté sans aucune réserve de Monsieur Z..., précision faite que l'acte se termine par la mention " La mise en examen vous permet de faire toute demande d'acte et toute demande de nullité " ce que l'appelant n'établit et ne propose pas d'établir avoir fait ;
Considérant que la mise en détention suite à la révocation de son contrôle judiciaire, ainsi que sa confirmation par la Chambre de l'instruction, résulte d'une appréciation souveraine circonstanciée, motivée en fait et en droit, conforme aux dispositions du Code de procédure pénale, tout comme l'arrêt du 10 août 2006 ayant remis Monsieur Z...en liberté en raison de circonstances nouvelles ; que, s'agissant de la comparution devant la Chambre de l'instruction, il appartenait à Monsieur Z..., conformément aux dispositions de l'article 199 alinéa 6 du Code de procédure pénale, de présenter une requête à cette fin concomitamment à sa déclaration d'appel ;
Considérant que Monsieur Z...ne peut soutenir que ses demandes d'investigations sont restées lettres mortes, dès lors qu'il ne démontre pas en avoir fait d'autre que celle du 9 juillet 2004 rejetée par ordonnance du Juge d'instruction et pour laquelle le Président de la Chambre de l'instruction a déclaré qu'il n'y avait pas lieu à appel dans un arrêt du 30 août 2004 ;

Considérant que Monsieur Z...ne peut, sans contradiction, dénoncer un climat général d'hostilité des intervenants judiciaires à son endroit et la participation du juge d'instruction à la procédure de redressement judiciaire de son entreprise et affirmer que le déroulement normal de la procédure devant naturellement le restituer dans ses droits le dispensait d'user de voies de recours ; qu'il lui appartenait donc de déposer une requête en suspicion légitime dans le premier cas et en récusation dans le second ;

Considérant, en ce qui concerne la diffusion des faits par la presse locale voire mondiale par l'intermédiaire du web, que Monsieur Z...n'apporte aucun élément permettant d'établir que cette diffusion, d'ailleurs non établie concernant le web, est imputable aux services judiciaires ; qu'en tout état de cause, il disposait de la possibilité de déposer plainte pour violation du secret de l'instruction en application des articles 226-13 et 226-14 du Code pénal, d'engager une procédure pour atteinte à la présomption d'innocence sur le fondement de l'article 9-1 du Code civil, outre la possibilité d'user des dispositions de la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse ;
Considérant que Monsieur Z...indique ne pas avoir eu de réponse à ses plaintes déposées suite à des actes de vandalisme (graffitis injurieux) et agression physique subis au cours de l'instruction mais que les récépissés de celles-ci mentionnent qu'il serait informé en cas d'éléments permettant de donner suite ; que par ailleurs, il avait la possibilité de renouveler ses plaintes avec constitution de partie civile entre les mains du Doyen des juges d'instruction, ce qu'il n'allègue pas avoir fait ;
Considérant que la difficulté à récupérer la caution exigée dans le cadre du contrôle judiciaire n'est pas imputable aux services judiciaires mais à Monsieur Z...qui a tardé à transmettre à la Régie d'avance et de recettes de la Cour d'appel qui les lui demandait, les documents nécessaires à cette restitution ;
Considérant que la demande d'effacement des données à caractère personnel enregistrées dans les fichiers (STIC) des services saisis de l'enquête relève de la compétence du Procureur de la République en application des dispositions de l'article 21 de la loi 2003-239 du 18 mars 2003, actuellement article 230-8 du Code de procédure pénale ; qu'il appartient donc à Monsieur Z...de saisir cette autorité judiciaire ;
*** Considérant qu'il résulte de ce qui précède, qu'en l'absence de toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir sa mission dont il est investi, Monsieur Z...ne peut qu'être débouté de sa demande en indemnisation et, par voie de conséquence, Madame Z...;

***
Considérant que succombant en leur appel, Monsieur et Madame Z...devront supporter les dépens ;
PAR CES MOTIFS
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,
CONDAMNE Monsieur Brian Z...et Madame Susan Ann Y...épouse Z...au paiement des dépens d'appel avec admission de l'avocat concerné au bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile. LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2- chambre 1
Numéro d'arrêt : 11/20201
Date de la décision : 03/07/2013
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2013-07-03;11.20201 ?
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