Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 2
ARRET DU 07 JUIN 2013
(n° 155, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/04062.
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 14 Février 2013 - Conseiller de la mise en état de PARIS Pôle 5 Chambre 2 - RG n° 12/13072.
DEMANDEUR AU DÉFÉRÉ :
Monsieur [T] [E]
demeurant [Adresse 1],
représenté par la SELARL REINHART MARVILLE TORRE en la personne de Maître Philippe TORRE, avocat au barreau de PARIS, toque : K0030,
assisté de Maître Marc SUSINI, plaidant pour la SELARL REINHART MARVILLE TORRE, avocat au barreau de PARIS, toque : K0030.
DÉFENDERESSE AU DÉFÉRÉ :
SA [E] FRANCE
prise en la personne de ses représentants légaux,
ayant son siège social [Adresse 2],
représentée par Maître Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090,
assistée de Maître Georges Louis HARANG plaidant pour le Cabinet HOCHE, avocat au barreau de PARIS, toque K 0061.
DÉFENDERESSE AU DÉFÉRÉ :
SA EDF ENERGIES NOUVELLES REPARTIES (EDF-ENR)
prise en la personne de ses représentants légaux,
ayant son siège social [Adresse 3],
représentée par Maître Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090.
assistée de Maître Catherine OTTAWAY plaidant pour le Cabinet HOCHE, avocat au barreau de PARIS, toque K 0061.
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 18 avril 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Marie-Christine AIMAR, présidente,
Madame Edith SUDRE, conseillère,
Madame Pascale BEAUDONNET, conseillère,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur Truc Lam NGUYEN.
ARRET :
Contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Christine AIMAR, présidente, et par Monsieur Truc Lam NGUYEN, greffier présent lors du prononcé.
Par acte d'huissier en date du 23 février 2010 Monsieur [T] [E], titulaire de brevets cédés à la société [E] France alors détenue par la société EDF ENERGIES NOUVELLES REPARTIES, ci-après EDF ENR, a fait assigner ces deux sociétés en réparation du préjudice subi dans le cadre de l'exécution d'un contrat de cession de brevets étrangers dénommés 'Plenum Climat' et 'Gestion Air Neuf' .
Par jugement rendu le 25 mai 2012 le tribunal de grande instance de PARIS a, en substance, débouté les parties de leurs prétentions respectives.
Monsieur [T] [E] a interjeté appel de cette décision le 12 juillet 2012.
Maître Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de Paris déclarant occuper pour les deux sociétés intimées, a signifié le 31 juillet 2012 sa constitution à la SCP d'avocats représentant l'appelant par huissier audiencier.
Monsieur [E] a notifié ses conclusions d'appel à Maîtres [P] [G] et Catherine OTTAWAY, avocats des sociétés intimées en première instance, le 12 octobre 2012, puis le 31 octobre 2012 à Maître FLAURAUD.
Par conclusions d'incident notifiées le 6 décembre 2012 et le 30 janvier 2013 la société EDF ENR a invoqué , en substance, au visa des articles 411, 412, 671 et suivants, 901 et 908 du code de procédure civile, l'irrégularité des conclusions d'appel et, en conséquence, la caducité de l'appel.
Les intimées ont conclu au fond le 11 décembre 2012.
Par ordonnance en date du 14 février 2013, le conseiller de la mise en état, considérant que les conclusions d'appel notifiées aux avocats plaidants étaient irrégulières, que leur notification à l'avocat constitué avait un caractère tardif et qu'il n'existait pas d'élément permettant de considérer que la sanction encourue était manifestement disproportionnée, a prononcé la caducité de la déclaration d'appel de Monsieur [T] [E] enregistrée le 12 juillet 2012 et rejeté les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Monsieur [T] [E] a déféré à la Cour cette ordonnance le 28 février 2013 en application de l'article 916 du Code de Procédure Civile sollicitant sa réformation en faisant valoir que le prononcé de la caducité de la déclaration d'appel du 12 juillet 2012 revêtirait un caractère disproportionné et le priverait du droit de faire valoir ses moyens de fait et de droit en appel en violation des dispositions de l'article 6 §1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme.
Par dernières écritures signifiées le 29 mars 2013 la société [E] FRANCE d'une part, la société EDF ENR d'autre part, entendent voir confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 14 février en ce qu'elle a prononcé la caducité de l'appel de Monsieur [T] [E] enregistré le 12 juillet 2012, débouter Monsieur [E] de l'ensemble de ses demandes et condamner ce dernier à payer à chacune d'elles la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile outre les dépens, dont distraction au profit de leur conseil.
SUR CE,
Considérant que Monsieur [T] [E] ne conteste pas avoir notifié ses conclusions d'appel à l'avocat constitué pour le compte des sociétés [E] FRANCE et ENR le 31 octobre 2012 soit au delà du délai de trois mois à compter de sa déclaration d'appel prévu par l'article 908 du Code de Procédure Civile mais fait valoir que le prononcé de la caducité de l'appel du 12 juillet 2012 a pour conséquence, au regard des dispositions des articles 528 et 538 du Code de Procédure Civile, de le priver de la possibilité de réitérer sa déclaration d'appel et d'exercer de manière effective un recours à l'encontre du jugement du 25 mai 2012 qui lui était défavorable, et d'exposer à la Cour ses moyens de fait et de droit ;
Qu'il ajoute que la sanction prévue par les articles 908 et 911 du Code de Procédure Civile ne revêt aucun caractère automatique et que son prononcé dans la présente instance apparaît, contrairement à ce qu'a retenu le conseiller de la mise en état, excessif et disproportionné, la bonne administration de la justice voulue par les textes en cause, n'ayant pas ici été affectée ; que l'obligation faite au conseiller de la mise en état d'entendre les parties a pour corollaire la possibilité d'apprécier l'opportunité de la sanction qui ne peut être prononcée sans qu'il soit tenu compte des circonstances et que les dispositions de l'article 6 § 1 de la Convention Européenne des droits de l'Homme garantissent à toute personne le droit à ce que sa cause soit entendue équitablement ;
Qu'il poursuit en indiquant qu'il a régularisé ses conclusions le 12 octobre 2012, tant par le biais du RPVA que par le dépôt au greffe, et que malgré la notification de ses conclusions à l'avocat constitué des sociétés [E] FRANCE et EDF ENR le 31 octobre suivant, ces dernières ont, conformément aux dispositions de l'article 909 du Code de Procédure Civile, régularisé leurs conclusions d'intimées et d'appel incident dans le délai de deux mois, soit le 11 décembre 2012, de sorte que ni la célérité ni la sécurité juridique n'ont été remises en cause nonobstant l'irrégularité de la notification de ses conclusions d'appelant à l'avocat constitué pour le compte des intimées, et que la caducité de la déclaration d'appel apparaît dès lors excessive et disproportionnée ;
Considérant que les sociétés [E] FRANCE et EDF ENR qui rappellent que la signification des conclusions de Monsieur [E] intervenue le 12 octobre 2012 n'a pas été faite à leur avocat constitué, font valoir quant à elles que la signification de leurs conclusions au fond dans le délai de deux mois qui leur était imparti ne saurait couvrir l'irrégularité des conclusions de Monsieur [E], que l'absence de grief n'est pas retenue pour couvrir cette irrégularité en cause d'appel, que les nouvelles dispositions procédurales s'appliquent à tous et que Monsieur [E], qui a fait le choix de signifier ses conclusions au fond le dernier jour du délai de trois mois, ne justifie d'aucun obstacle extérieur pouvant expliquer son irrégularité de procédure ;
Considérant ceci exposé, que selon l'article 908 du code de procédure civile, l'appelant dispose, à peine de caducité de la déclaration d'appel relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel pour conclure ;
Que l'article 911 du même code dispose que les conclusions sont notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour ;
Qu'en l'espèce il est constant que Monsieur [T] [E] n'a pas notifié ses conclusions d'appel à l'avocat constitué pour les sociétés [E] FRANCE et EDF ENR dans le délai de trois mois de sa déclaration d'appel intervenue le 12 juillet 2012 ;
Que l'article 911-1 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ne donne pas pouvoir au conseiller de la mise en état de tenir compte d'un juste motif, au demeurant non démontré en l'espèce, seul l'avocat constitué disposant d'un mandat de représentation en justice d'une partie qui emporte pouvoir et devoir d'accomplir au nom de celle-ci les actes de procédure ;
Que la réforme de la procédure d'appel avec représentation obligatoire en matière civile, réalisée par le décret du 9 décembre 2009, encadrant la procédure dans des délais stricts sanctionnés d'office pour chacune des parties au litige, n'est pas contraire au droit au procès équitable garanti par l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni au principe de proportionnalité entre le but poursuivi et les moyens mis en oeuvre, dès lors que l'automaticité des sanctions est la condition nécessaire de l'effectivité de la réforme ;
Qu'étant ajouté qu'il ne peut être reproché aux sociétés intimées d'avoir conclu au fond dans le délai de l'article 909 du Code de Procédure Civile, faute de quoi elles auraient encouru la sanction d'irrecevabilité relevée d'office prévue par ce texte, il en résulte que la sanction de l'irrecevabilité des conclusions tardives d'appel était encourue et devait être prononcée d'office par le conseiller de la mise en état, conformément aux dispositions de l'article 911-1 alinéa 2 du code précité ;
Que dès lors l'ordonnance du 14 février 2013 doit être confirmée en toutes ses dispositions ;
Considérant qu'aucune considération d'équité ne justifie l'application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile au présent litige.
PAR CES MOTIFS :
Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 14 février 2013, en ce que, constatant la tardiveté de la notification des conclusions d'appel de Monsieur [T] [E] à l'avocat constitué des sociétés [E] FRANCE et EDF ENERGIES NOUVELLES, elle a notamment prononcé la caducité de la déclaration d'appel de Monsieur [T] [E] enregistrée le 12 juillet 2012.
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamne Monsieur [T] [E] aux dépens afférents à la présente procédure de déféré qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
Le greffier,Le Président,