Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 5
ARRÊT DU 28 MAI 2013
(n° , 10 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/22209
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Février 2004 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2002056144
APPELANTES
-Maître [D] [B] ès qualité de mandataire ad hoc de la Société SCS GESTION
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Marie-Elisabeth DUTTLINGER de la SCP DUTTLINGER FAIVRE avocat au barreau de PARIS, toque : P0005
INTIMÉS
-SA AXA FRANCE IARD, venant aux droits de la SA AXA ASSURANCES IARD, elle même venant aux droits de la SA AXA COURTAGE IARD, venant aux droits de la Cie UAP
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE-BENETREAU-JUMEL avocat postulant, barreau de PARIS, toque : K0111
assistée de Me Sylvie RODAS de la SELARL RODAS DEL RIO NERAUDAU avocat plaidant, barreau de PARIS, toque : R126
PARTIE INTERVENANTE :
-SA MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Marie-Elisabeth DUTTLINGER de la SCP DUTTLINGER FAIVRE avocat au barreau de PARIS, toque : P0005
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 9 avril 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Dominique REYGNER, présidente de chambre
Monsieur Christian BYK, conseiller
Monsieur Michel CHALACHIN, conseiller
qui en ont délibéré.
Rapport a été fait par Monsieur Michel CHALACHIN, conseiller, en application de l'article 785 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Carole MEUNIER
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Dominique REYGNER, présidente et par Mme Carole MEUNIER, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise.
* * * * * * *
La société SOL CONSEIL SONDAGE, devenue SCS GESTION, avait souscrit deux contrats d'assurance auprès de la société UAP, devenue AXA FRANCE IARD : un contrat 'responsabilité décennale' et un contrat 'responsabilité civile dans l'ingénierie du bâtiment et du génie civil'.
En 1990 et 1991, elle a réalisé deux séries de sondages pour le compte du Conseil Régional d'[Localité 1] dans le cadre de la construction d'un lycée.
Des désordres étant apparus après la réception du bâtiment, le GAN, assureur du Conseil Régional, a assigné en référé-expertise les différents constructeurs, dont la société SCS GESTION et son assureur, par acte du 12 octobre 1995, devant le tribunal de grande instance de Nanterre.
Cette juridiction a désigné M. [Y] en qualité d'expert par ordonnance du 16 octobre 1995.
Puis le GAN a assigné au fond les sociétés SCS GESTION et VERITAS devant le tribunal administratif de Versailles par requête du 20 mars 1996 et leurs assureurs respectifs (AXA pour SCS GESTION et MMA pour VERITAS) devant le tribunal de grande instance de Paris par acte du 27 mars 1996.
En 2001, le Conseil Régional d'[Localité 1] a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise afin d'obtenir à son tour la désignation d'un expert.
M. [Y] a été désigné par cette juridiction le 14 juin 2001.
Par ordonnance du 12 décembre 2001, le juge des référés du tribunal de grande instance de Nanterre a également désigné cet expert afin de rendre ses opérations opposables à la société AXA.
Par jugement du 8 décembre 2003, le tribunal administratif de Versailles a condamné les sociétés SCS GESTION et VERITAS solidairement à payer au GAN la somme de 4.915.333,12 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 mars 1996 et capitalisation des intérêts.
Ce jugement a été confirmé par la cour administrative d'appel de Versailles le 27 juin 2006.
La procédure engagée devant le tribunal de grande instance de Paris contre les assureurs a fait l'objet d'une péremption, pour n'avoir pas été rétablie après sursis à statuer dans les deux ans ayant suivi le prononcé de l'arrêt du 27 juin 2006.
Parallèlement à ces instances, la société SCS GESTION a assigné son assureur devant le tribunal de commerce de Paris, par acte du 11 août 2000, afin d'être garantie des condamnations qui seraient prononcées à son encontre.
Par jugement du 4 février 2004, cette juridiction a :
- débouté la société AXA de ses demandes relatives à la péremption de l'instance et à la prescription de l'action,
- dit que la société AXA, dans l'hypothèse d'une responsabilité établie de la société SCS GESTION dans les désordres du lycée [1], serait tenue à garantir son assurée dans le cadre de la responsabilité décennale à hauteur de 1,5 millions d'euros, sous réserve des revalorisations indiciaires,
- dit que la société AXA, dans l'hypothèse d'une responsabilité civile de la société SCS GESTION établie à l'occasion de ce sinistre, serait tenue de garantir son assurée dans la limite contractuelle définie dans les conditions particulières du contrat signé entre les parties,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- condamné la société AXA au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société SCS GESTION a fait l'objet d'une liquidation judiciaire le 21 juin 2004 et, par déclaration du 2 février 2006, son liquidateur, Maître [F], a interjeté appel du jugement.
L'affaire a fait l'objet d'un retrait du rôle le 15 janvier 2008, puis a été rétablie le 26 novembre 2008.
La société MMA IARD, assureur de la société VERITAS, est intervenue volontairement à la présente instance par conclusions du 29 novembre 2010.
Par ordonnance sur incident du 4 juin 2012, le magistrat chargé de la mise en état a rejeté l'exception de péremption d'instance qui avait été soulevée par la société AXA.
Par dernières conclusions signifiées le 3 septembre 2012, Maître [D] [B], agissant en qualité de mandataire ad hoc de la société SCS GESTION, demande à la cour de :
- rejeter les exceptions de procédure invoquées par la société AXA, tant en première instance qu'en appel,
- lui donner acte de ce que son appel porte sur l'étendue des garanties dues par AXA à la société SCS GESTION,
- dire que la société AXA est tenue à garantir la société SCS GESTION au titre des garanties souscrites par cette dernière, applicables au sinistre affectant le lycée [1], objet d'une procédure introduite par le GAN devant le tribunal administratif de Versailles,
- faire application des clauses contractuelles telles que rappelées dans ses conclusions, notamment en ce qui concerne l'avenant du 20 décembre 1989, ainsi que la réactualisation des garanties,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a admis le principe de la garantie due à la société SCS GESTION,
- condamner la société AXA à relever et garantir la société SCS GESTION de toutes les condamnations en principal, intérêts, frais et accessoires prononcées à son encontre par la cour administrative d'appel de Versailles suivant arrêt du 27 juin 2006,
- condamner en conséquence la société AXA au paiement des sommes dues en vertu de cet arrêt,
à titre subsidiaire,
- constater qu'en l'état, compte tenu du jugement rendu le 21 juin 2004 par le tribunal de commerce de Paris, aucune condamnation ne saurait être prononcée à l'encontre de la société SCS GESTION, ni directement, ni indirectement par le biais de Me [B],
- condamner la société AXA à garantir la société SCS GESTION des condamnations prononcées à son encontre, à concurrence de la somme de 30 millions de francs, soit 4.573.470,50 euros, revalorisée selon ses engagements contractuels ou tout autre qui lui serait substitué, à compter de janvier 1984,
en toute hypothèse,
- débouter la société AXA de toutes ses demandes,
- la condamner au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions signifiées le 21 mars 2013, la société MMA IARD demande à la cour de :
- lui donner acte de son intervention volontaire, en qualité de subrogée,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré non fondées les exceptions de procédure opposées en première instance à Me [F], liquidateur de la société SCS GESTION,
- confirmer le jugement en ce qu'il a admis le principe de la garantie due par AXA à la société SCS GESTION,
- l'infirmer en ce qu'il a restreint l'étendue des garanties,
- condamner la société AXA à relever et garantir la société SCS GESTION de toutes condamnations en principal, intérêts, frais et accessoires prononcées contre elle par arrêt du 27 juin 2006,
- ce faisant, condamner la société AXA au paiement de la somme de 3.146.626,19 euros, outre intérêts légaux à compter du 29 juin 2004, en compensation du préjudice important subi par les MMA qui n'a pu disposer des fonds correspondants durant toute cette période,
- subsidiairement, fixer le point de départ des intérêts au 29 novembre 2010, date de ses conclusions d'intervention volontaire,
- condamner la société AXA au paiement de la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions signifiées le 28 décembre 2012, la société AXA demande à la cour de :
- déclarer l'instance poursuivie devant le tribunal de commerce périmée, aucune diligence procédurale n'ayant été accomplie pendant plus de deux ans à compter de la délivrance de l'exploit introductif d'instance,
- déclarer la société SCS GESTION irrecevable en ses demandes, la mission de Me [B] ayant pris fin le 30 septembre 2012,
- déclarer l'action prescrite, plus de quatre ans s'étant écoulés entre le recours du GAN (12 octobre 1995) et l'introduction de l'instance devant le tribunal de commerce,
- dire qu'aucune condamnation ne pouvait être prononcée à l'encontre d'une société en liquidation judiciaire et, qu'en tout état de cause, cette condamnation ne pouvait être exécutée,
- limiter la condamnation à garantie à la somme de 93.028,56 euros qui avait été réglée par Me [F] aux MMA,
- infirmer le jugement et prononcer sa mise hors de cause,
- très subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu'il a limité le montant de la garantie à 1,5 millions d'euros avec revalorisation,
- dire que la franchise contractuelle est opposable à l'assurée,
- dire que le second contrat est inapplicable en l'espèce, et, en tout état de cause, lui donner acte des limites de ladite police, qui comprend un plafond de 3 millions de francs par année et par sinistre, et une franchise opposable à toute partie,
- dire la société MMA irrecevable dans son intervention volontaire et juger son action prescrite,
- condamner Me [B] et les MMA à lui verser, chacune, la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 mars 2013.
MOTIFS
Considérant qu'il convient d'observer, à titre liminaire, que le mandat de Me [B] a été prorogé rétroactivement, par ordonnance du Président du tribunal de commerce de Paris du 28 janvier 2013, jusqu'à l'issue de la présente procédure l'opposant à la société AXA ;
Que celui-ci est donc recevable en ses demandes devant la cour ;
Sur la péremption de l'instance introduite devant le tribunal de commerce.
Considérant que la société AXA soutient qu'aucune diligence procédurale n'a été accomplie par la société SCS GESTION entre le 11 août 2000 (date de l'assignation) et le 16 octobre 2002 (date des conclusions de reprise d'instance) ; elle reproche au tribunal d'avoir jugé que la péremption avait été interrompue par l'assignation en référé délivrée le 16 novembre 2001 par la société SCS GESTION à la société AXA afin de lui rendre communes les opérations d'expertise menées par Mr [Y] ; elle affirme que l'action en référé qui avait été engagée par la Région [Localité 1] en 2001 devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise n'avait pas de lien de dépendance direct et certain avec l'action qui avait été engagée par le GAN en 1995, et qui avait justifié l'appel en garantie introduit par la société SCS GESTION contre son assureur devant le tribunal de commerce ; elle ajoute qu'il n'existe pas de lien direct et nécessaire entre l'instance principale de référé-expertise et l'instance en garantie, ni entre une instance en référé et une instance au fond ; enfin, elle affirme que ni la décision de radiation du 29 mars 2001, ni la demande de rétablissement du 5 juillet 2002, n'ont eu pour effet d'interrompre la péremption ;
Considérant que la société SCS GESTION répond que le sort de son appel en garantie était directement lié au résultat de l'expertise qui était en cours ; elle demande donc la confirmation du jugement sur ce point ; elle ajoute que sa demande de rétablissement de l'affaire après radiation était suffisamment explicite pour signifier son intention de poursuivre la procédure devant le tribunal de commerce ;
Considérant que les MMA s'associent à la réponse de la société SCS GESTION ;
Considérant qu'aux termes de l'article 386 du code de procédure civile, l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ;
Que la péremption d'une instance peut être interrompue par les actes intervenus dans une instance différente lorsqu'il existe entre les deux procédures un lien de dépendance directe et nécessaire ;
Considérant que, en l'espèce, M. [Y] avait été désigné en qualité d'expert par ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Nanterre, en date du 16 octobre 1995, suite à l'assignation délivrée par le GAN, assureur du Conseil Régional d'[Localité 1] ;
Que la Région [Localité 1], qui n'était pas officiellement partie à cette expertise, a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en 2001 afin que les opérations d'expertise lui soient opposables ;
Que la nouvelle expertise ordonnée par cette dernière juridiction le 14 juin 2001 était purement formelle, M. [Y] ayant été désigné par le juge administratif et ayant poursuivi la mission qui lui avait été confiée par le juge judiciaire en 1995 ;
Qu'il a d'ailleurs rendu le même rapport au juge administratif et au juge judiciaire ;
Considérant qu'il existait donc un lien de dépendance directe et nécessaire entre la procédure de référé-expertise engagée par la Région d'[Localité 1] et l'appel en garantie introduit devant le tribunal de commerce par la société SCS GESTION contre son assureur le 11 août 2000, puisque cet appel en garantie était justifié par la procédure dont faisait l'objet la société SCS GESTION et qui risquait de déboucher sur sa condamnation ;
Que les opérations d'expertise devaient permettre à la juridiction administrative, saisie au fond, de déterminer notamment si la société SCS GESTION était, au moins partiellement, responsable des désordres subis par le lycée construit à la demande de la Région [Localité 1] ;
Que l'appel en garantie dirigé contre la société AXA était directement lié à cette instance au fond, laquelle était directement liée à l'expertise confiée à M. [Y] ;
Considérant, dès lors, qu'en assignant la société AXA devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Nanterre par acte du 16 novembre 2001 afin de lui rendre opposable la seconde expertise confiée à M. [Y], la société SCS GESTION a interrompu la péremption de l'instance au fond qu'elle avait engagée à l'encontre de son assureur devant le tribunal de commerce le 11 août 2000 ;
Que, par conséquent, le délai de péremption n'était pas expiré lorsque la société SCS GESTION a conclu le 16 octobre 2002 ;
Sur la prescription de l'action.
Considérant que la société AXA soutient que l'action de son assurée était prescrite sur le fondement de l'article L.114-1 du code des assurances, car la société SCS GESTION avait été assignée en référé-expertise par le GAN le 12 octobre 1995 ; elle affirme qu'elle avait participé aux opérations d'expertise dans son seul intérêt, sans diriger le procès pour son assurée, et qu'elle n'avait donc pas renoncé au bénéfice de la prescription ;
Considérant que la société SCS GESTION répond que, dans un premier temps, son assureur avait dirigé le procès en faisant bénéficier son assurée de l'assistance de son avocat, et qu'elle n'avait choisi un autre avocat qu'après avoir reçu la lettre du 14 décembre 1998 dans laquelle la société AXA émettait des doutes sur l'étendue de sa garantie, cette lettre s'analysant d'ailleurs en une renonciation à se prévaloir de la prescription ;
Considérant que les MMA s'associent à cette réponse ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.113-17 du code des assurances, l'assureur qui prend la direction d'un procès intenté à l'assuré est censé aussi renoncer à toutes les exceptions dont il avait connaissance lorsqu'il a pris la direction du procès ;
Considérant qu'en l'espèce, il ressort du rapport partiel déposé par M. [Y] le 14 septembre 2001 devant le tribunal de grande instance de Nanterre que la société SCS GESTION était initialement représentée par le même avocat que son assureur, Me [U], au cours des opérations d'expertise ;
Que cet avocat a déposé de nombreux dires, accompagnés de notes techniques, destinés à opposer des arguments aux réclamations formulées par le GAN à l'encontre de la société SCS GESTION ;
Que cet avocat a ainsi, durant plusieurs années, défendu les intérêts de l'assurée dans la procédure qui l'opposait au GAN ;
Considérant qu'en participant ainsi activement aux opérations d'expertise sans émettre la moindre réserve, la société AXA a renoncé à se prévaloir de la prescription de l'appel en garantie dirigé contre elle ;
Considérant, par ailleurs, que le rapport partiel du 14 septembre 2001 mentionne, en page 13, que Me [I] s'est manifesté auprès de l'expert en décembre 1999 au soutien des intérêts de la société SCS GESTION ;
Que la société AXA ne démontre pas que cet avocat serait intervenu plus tôt en faveur de l'appelante ;
Qu'il en résulte que, dans la mesure où l'assureur a cessé d'assumer la direction du procès en décembre 1999, l'action engagée contre lui devant le tribunal de commerce le 11 août 2000, soit moins de deux ans plus tard, n'était pas prescrite ;
Sur la nature et le quantum des demandes.
Considérant que la société AXA soutient que la cour administrative d'appel ne pouvait pas prononcer une condamnation à l'encontre de la société SCS GESTION, qui était alors en liquidation judiciaire ; le cas échéant, elle demande que sa garantie soit limitée à la somme de 93.028,56 euros qui a été versée par Me [F] aux MMA suite à sa déclaration de créance ;
Considérant que la société SCS GESTION répond que Me [F] a dû admettre la créance déclarée par les MMA suite aux condamnations prononcées par la cour administrative d'appel dans son arrêt du 27 juin 2006 ; elle rappelle que la part de ces condamnations qui lui était imputable s'élevait à la somme principale de 2.457.666,56 euros, correspondant à 50 % des sommes allouées au GAN ;
Considérant, sur le premier point, qu'il n'appartient pas à la cour de céans de remettre en cause la décision de la cour administrative d'appel de Versailles, qui est désormais définitive, et qui fixe de manière immuable les droits du GAN à l'égard de la société SCS GESTION ;
Considérant, sur le second point, que le recours en garantie exercé par l'appelante porte non sur les sommes effectivement versées aux MMA, mais sur la créance du GAN à l'égard de la société SCS GESTION, telle qu'elle résulte du jugement du 8 décembre 2003, confirmé par arrêt du 27 juin 2006, soit la somme de 2.457.666,56 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 26 mars 1996 ;
Que le juge-commissaire de la procédure de liquidation ouverte contre l'appelante a d'ailleurs admis la créance des MMA, qui ont dû régler la totalité des sommes dues au GAN, à la somme de 3.178.859,01 euros, qui est sans commune mesure avec la somme qui a pu être remboursée aux MMA par Me [F] ;
Que la garantie de la société AXA ne saurait donc être limitée à la somme de 93.028,56 euros ;
Sur l'application des contrats d'assurance souscrits par la société SCS GESTION dans le cadre du présent litige.
Considérant que la société AXA rappelle que la société SCS GESTION avait reçu deux commandes de sondages, l'une de l'Etablissement Public d'Aménagement (EPA), maître d'ouvrage, l'autre de la société RAZEL, dont elle était le sous-traitant, et affirme que la seconde mission relevait de la garantie 'police unique chantier' souscrite auprès du GAN ; elle en conclut que l'appelante doit être déboutée de ses demandes, au motif que la juridiction administrative n'a pas analysé ces deux missions ni les contrats applicables à chacune ;
Que la société SCS GESTION répond que ses deux missions lui avaient été confiées par l'EPA et relevaient bien de la garantie décennale ;
Considérant que, comme il a été dit précédemment, il n'appartient pas à la cour de céans de remettre en cause les décisions prises par les juridictions administratives, qui sont désormais définitives ;
Que ces juridictions ont jugé que la société SCS GESTION était responsable, avec la société VERITAS, des désordres subis par le lycée, sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil, et ce sans distinction entre les deux missions qu'elle avait reçues ;
Que, par ailleurs, dans la mesure où seule la garantie décennale de l'appelante a été mise en cause par le tribunal administratif, le seul contrat pouvant être invoqué par l'assurée à l'appui de son appel en garantie est le contrat 'responsabilité décennale' ;
Que le premier moyen invoqué par la société AXA pour refuser sa garantie n'est donc pas fondé ;
Considérant que la société AXA soutient ensuite que certains désordres étaient apparents lors de la réception de l'ouvrage, si bien que la garantie décennale ne pouvait s'appliquer en l'espèce ;
Que la société SCS GESTION répond que le maître d'ouvrage ne pouvait avoir conscience de l'ampleur des désordres au moment de la réception ;
Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise que les bâtiments ont fait l'objet de deux procès-verbaux de réception, les 31 août 1992 et 30 août 1993 ;
Que, si l'expert a noté que des soulèvements de dallages avaient commencé à se manifester au début de l'année 1993, la plupart des désordres qu'il a décrits sont apparus dans le courant de l'année 1994 et ont donné lieu à une déclaration de sinistre à la fin de l'année 1994 ;
Que le maître d'ouvrage ne pouvait donc avoir conscience, à la date du second procès-verbal de réception, du fait que la solidité de l'ouvrage était compromise ;
Que, par ailleurs, la société AXA ne peut plus remettre en cause les décisions des juridictions administratives, qui ont retenu que la responsabilité de la société SCS GESTION était engagée sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil ;
Que le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a dit que la société AXA était tenue à garantir son assurée dans le cadre de la responsabilité décennale ;
Considérant qu'à titre subsidiaire, la société AXA demande la confirmation du jugement en ce qu'il a dit que le contrat couvrant la garantie décennale était plafonné à 1,5 millions d'euros, avec valorisation, et sollicite l'application de la franchise égale à 15 % du coût du sinistre ;
Que la société SCS GESTION répond que l'assurance couvrant la garantie décennale est obligatoire et ne peut être soumise à un plafonnement ; elle demande donc à être garantie de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre ; à titre subsidiaire, dans le cas où la cour ne retiendrait pas la garantie décennale, elle demande l'application de la garantie 'dommages exceptionnels', qui prévoit un plafond de garantie de 30 millions de francs, soit 4.573.470,50 euros ; enfin, elle sollicite l'application de la revalorisation prévue au contrat ;
Considérant que, à la date des sondages effectués par la société SCS GESTION, les clauses types applicables aux contrats d'assurance de responsabilité pour les travaux de bâtiment, figurant à l'annexe 1 de l'article A.243-1 du code des assurances dans sa version alors applicable, précisaient que ces contrats garantissaient le paiement des travaux de réparation de l'ouvrage, et ne prévoyaient pas, en ce qui concerne le coût de ces travaux, de limitation de garantie ;
Qu'aucune stipulation du contrat d'assurance portant sur la garantie décennale ne pouvait avoir pour effet d'amoindrir, de manière quelconque, le contenu de cette garantie obligatoire ;
Que, dès lors, les clauses du contrat souscrit par la société SCS GESTION auprès de la société AXA imposant un plafond de garantie et une franchise étaient, à la date des travaux, illicites ;
Considérant, dès lors, que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a dit que la garantie de l'intimée ne pouvait excéder le plafond contractuel de 1,5 millions d'euros ;
Considérant que la société AXA soutient encore que le second contrat, qui couvrait la responsabilité civile de l'assurée en vertu du droit commun, est inapplicable en l'espèce, puisque la responsabilité de la société SCS GESTION s'est trouvée engagée sur un fondement contractuel ; subsidiairement, elle rappelle que ce contrat est limité à 3 millions de francs par année et par sinistre, soit 457.347,05 euros, plus revalorisation ;
Considérant qu'il est vrai que le contrat 'responsabilité civile dans l'ingénierie du bâtiment et du génie civil' n'a pas à s'appliquer en l'espèce, puisque la condamnation prononcée par les juridictions administratives avait pour seul fondement la responsabilité décennale de l'appelante ;
Sur l'intervention volontaire de la société MMA IARD.
Considérant que la société AXA soutient que l'intervention volontaire des MMA est irrecevable, car elles sollicitent des condamnations personnelles qui n'avaient pas été soumises au tribunal ; elle ajoute que les MMA ne bénéficient d'aucune subrogation, car les recours entre des entreprises condamnées vis-à-vis du maître d'ouvrage ne peuvent avoir comme fondement que la responsabilité de droit commun applicable dans leurs rapports, soit en l'espèce l'article 1382 du code civil ;
Que les MMA répondent qu'elles ont un intérêt à agir, puisqu'elles ont dû régler les sommes mises à la charge de la société SCS GESTION, et que leur intervention présente un lien suffisant avec les demandes qui avaient été soumises au tribunal de commerce ; elles rappellent que leur créance a été admise par le juge-commissaire au passif de la liquidation de la société SCS GESTION à hauteur de la somme de 3.178.859,01 euros ; elles précisent qu'elles agissent sur le fondement de la répétition de l'indu et des articles 1213 et 1214 du code civil ;
Considérant que si, en application de l'article 554 du code civil, peuvent intervenir en cause d'appel, dès lors qu'elles y ont intérêt, les personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance, c'est à la condition que l'intervention se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant et ne conduise pas à soumettre à la cour un litige nouveau n'ayant pas subi l'épreuve du premier degré de juridiction ;
Considérant qu'en l'espèce, les MMA demandent le paiement de la moitié des sommes qu'elle a dû régler au GAN, en se fondant sur son droit à recours contre les autres responsables des désordres causés à l'ouvrage ;
Que ce recours n'a pas le même fondement juridique que la demande de garantie formée par la société SCS GESTION contre son assureur, cette dernière demande étant fondée sur le contrat d'assurance, alors que le recours exercé contre les autres responsables des désordres se fonde sur la responsabilité de droit commun applicable dans les rapports entre les constructeurs, soit en l'occurrence sur la responsabilité quasi délictuelle ;
Que, surtout, l'éventuelle condamnation au profit des MMA aurait pour effet de priver la masse des créanciers de la société SCS GESTION de leur droit au recouvrement de leur créance, l'intervenante réclamant le paiement de la totalité des sommes dues par la société AXA à son assurée ;
Que cette demande de condamnation personnelle ne se rattache pas à la demande de l'appelante par un lien suffisant et est donc irrecevable en cause d'appel ;
Sur l'article 700 du code de procédure civile.
Considérant que l'équité commande d'allouer à Me [B], en sa qualité de mandataire ad hoc de la société SCS GESTION, la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et de débouter les autres parties de leurs demandes respectives fondées sur ce texte ;
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Déclare l'appel de la société SCS GESTION, représentée par son mandataire ad hoc Me [B], recevable ;
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société AXA FRANCE IARD de ses demandes relatives à la péremption de l'instance et à la prescription de l'action, et en ce qu'il dit que la société AXA FRANCE IARD devait garantir la société SCS GESTION dans le cadre de la responsabilité décennale ;
L'infirme en ce qu'il a dit que la garantie de la société AXA FRANCE IARD au titre de la responsabilité décennale devait être limitée à 1,5 millions d'euros et, statuant à nouveau sur ce point, dit que la société AXA FRANCE IARD ne peut opposer à son assurée aucune limitation de garantie ;
En conséquence, condamne la société AXA FRANCE IARD à garantir la société SCS GESTION, représentée par son mandataire ad hoc Me [B], des condamnations prononcées à son encontre par la cour administrative d'appel de Versailles dans son arrêt du 27 juin 2006, et donc à lui payer la somme de 2.457.666,56 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 mars 1996 et capitalisation de ces intérêts ;
Déboute la société AXA FRANCE IARD de toutes ses demandes ;
Déclare la société MMA irrecevable en son intervention volontaire ;
Condamne la société AXA FRANCE IARD à payer à la société SCS GESTION, représentée par Me [B], la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les sociétés AXA et MMA de leurs demandes respectives fondées sur ce texte ;
Condamne la société AXA FRANCE IARD aux dépens de la procédure d'appel et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE