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15/05/2013 | FRANCE | N°12/13535

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2- chambre 1, 15 mai 2013, 12/13535


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 15 MAI 2013
(no 171, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 13535
Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Juin 2012- Cour d'Appel de PARIS-RG no 11/ 04753

APPELANT

Monsieur Jean-François X... membre de la SCP Y...X... Z..., Notaires ...75018 PARIS 18

représenté et assisté de la SCP RONZEAU et ASSOCIES (Me Thomas RONZEAU) (avocats au barreau de PARIS, toque : P0499) et de Me C

hristiane ROBERTO (avocat au barreau de PARIS, toque : P 499)
INTIMEE
Madame Brigitte A......78170 L...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 15 MAI 2013
(no 171, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 13535
Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Juin 2012- Cour d'Appel de PARIS-RG no 11/ 04753

APPELANT

Monsieur Jean-François X... membre de la SCP Y...X... Z..., Notaires ...75018 PARIS 18

représenté et assisté de la SCP RONZEAU et ASSOCIES (Me Thomas RONZEAU) (avocats au barreau de PARIS, toque : P0499) et de Me Christiane ROBERTO (avocat au barreau de PARIS, toque : P 499)
INTIMEE
Madame Brigitte A......78170 LA CELLE SAINT CLOUD

représentée et assistée de la AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d'Avocats (Me Sandra OHANA) (avocats au barreau de PARIS, toque : C1050) et de Me Caroline DUCHESNE (avocat au barreau de PARIS, toque : B0816) substituant Me TAMEGNON HAZOUME (avocat au barreau de PARIS, toque : D 60)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 mars 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jacques BICHARD, Président Madame Marguerite-Marie MARION, Conseiller Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN

ARRET :
- contradictoire
-rendu publiquement par Monsieur Jacques BICHARD, président
-signé par Monsieur Jacques BICHARD, président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier présent lors du prononcé.
***
Considérant qu'il avait engagé sa responsabilité civile professionnelle dans l'exécution d'un legs ayant entraîné un redressement fiscal à son détriment, Madame Brigitte A...a fait assigner Monsieur Jean-François X..., notaire au sein de la S. C. P. Y...-X...-Z...en réparation de son préjudice devant le Tribunal de grande instance de Paris par exploit du d'huissier de Justice du 14 mars 2011 ;
Par jugement contradictoire du 27 juin 2012, le Tribunal de grande instance de Paris a :- condamné Maître Jean-François X... à payer à Madame Brigitte A...la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts et débouté la demanderesse du surplus de sa demande,- condamné Maître X... à régler à la demanderesse une somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,- ordonné l'exécution provisoire,- condamné Maître X... aux dépens ;

Par déclaration du 18 juillet 2012, Monsieur Jean-François X... a interjeté appel de ce jugement ;
Par ordonnance du 20 novembre 2012, le Conseiller de la mise en état a :- débouté Madame Brigitte A...de son incident aux fins de nullité de la déclaration d'appel formée par Maître Jean-François X... en date du 18 juillet 2012,- condamné Madame Brigitte A...à verser à Maître Jean-François X... la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Dans ses dernières conclusions en cause d'appel déposées le 12 décembre 2012, Monsieur Jean-François X..., demande à la Cour, au visa de l'article 1382 du Code civil, de :- infirmer le jugement déféré, Statuant à nouveau,- débouter Madame Brigitte A...de son appel incident,- débouter Madame Brigitte A...de l'ensemble de ses demandes formulées l'encontre de Maître Jean-François X...,- condamner Madame Brigitte A...à payer à Maître Jean-François X... la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,- condamner Madame Brigitte A...aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel ;

Dans ses seules conclusions déposées 7 novembre 2012, Madame Brigitte A..., appelante incidente, demande à la Cour, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, de :- condamner Maître Jean-François X... à payer à Madame Brigitte A...la somme de 29 722 € à titre de dommages-intérêts suite à la déclaration de succession fautive effectuée par ses soins,- condamner Maître Jean-François X... à payer à Madame Brigitte A...la somme de 15 000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral fondé sur les mises en demeure, les avis de recouvrement et les avis à tiers détenteur reçu de l'Administration fiscale et qui ont généré à son égard un trouble dans ses conditions d'existence,- condamner Maître Jean-François X... à payer à Madame Brigitte A...la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,- condamner Maître Jean-François X... aux entiers dépens ;

L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 février 2012 ;
CELA ETANT EXPOSE, LA COUR,
Considérant que Madame Brigitte A...(Madame A...), instituée légataire universelle par testament en date du 14 février 2001 de Madame Madeleine E...décédée à Paris le 4 janvier 2002, a saisi Maître Jean-François X... (Maître X...), notaire membre de la S. C. P. Y...-X...-Z..., afin de procéder au règlement de la succession comportant, notamment, un appartement de 3 pièces avec une terrasse et deux balcons au 3ème étage d'une copropriété, sis à CAGNES-sur-MER et un appartement de 3 pièces pour une superficie de 69 m ² sis ...à Paris (XVIIIème) ; que la valeur du premier bien a été fixée à la somme de 120 000 € sur la base d'une estimation d'une agence immobilière locale et celle du second bien à la somme de 135 000 € sur la base d'un constat d'huissier de Justice ; que cependant l'Administration fiscale a procédé à un redressement pour insuffisance de déclaration de valeur des biens en cause entraînant des droits de mutation supplémentaires de 77 183 € pour l'appartement parisien et de 54 010 € pour l'appartement de CAGNES-sur-MER et a émis un avis à tiers détenteur pour une somme totale de 139 225 € en principal, intérêts et pénalités ;
Que c'est dans ce contexte que Madame A...a saisi Tribunal de grande instance de Paris qui a rendu le jugement déféré à la Cour ;
SUR QUOI,
Considérant que Maître X..., reprenant devant la Cour ses prétentions et moyens de première instance, précise et affirme, s'agissant de l'appartement parisien, qu'il a alerté Madame A...sur l'insuffisance de l'évaluation au regard de l'Administration fiscale et, devant la persistance de sa position, l'a invitée à faire établir un constat par un huissier de Justice décrivant un état très dégradé au vu duquel et après ses recherches sur sa base de données la confirmant, il a porté l'estimation initiale dans la déclaration de succession ;
Considérant que Madame A..., reprenant devant la Cour ses prétentions et moyens de première instance, reproche à Maître X... de se défausser sur elle en affirmant qu'elle aurait eu un rôle directeur dans l'établissement de la déclaration de succession ;
***
Considérant qu'au titre de son devoir de conseil, Maître X... était tenu d'informer Madame A...des incidences fiscales des éventuelles insuffisances dans la déclaration de succession qu'il devait établir ;
Considérant, s'agissant de l'appartement parisien, qu'en faisant état de son interrogation sur la valeur de l'estimation initialement produite et du conseil donné de faire procéder à un constat d'huissier de Justice sur l'état des lieux, Maître X... reconnaît qu'il lui appartenait d'alerter Madame A...sur les conséquences de fiscales pouvant en résulter ; que cependant, alors qu'il en la charge, il ne rapporte pas la preuve de la réalité des vérifications alléguées sur sa base de données ; qu'il sera observé également que contrairement à ses affirmations, il résulte du constat d'huissier que l'appartement n'était pas fortement dégradé mais présentait une vétusté nécessitant seulement des travaux de remise en état (peinture, électricité, etc....) pour un montant de 19 300 € TTC (pièces no 4, appelant) sans atteinte au gros oeuvre comme Maître X... pouvait le constater puisqu'il a fait l'avance de cette somme sur le compte de la succession (pièce no 19, Madame A...) et qu'il a établi le bail de location emportant une réduction du loyer en raison de la prise en charge des travaux par le locataire (pièce no 5, p. 8, appelant) ;
Considérant, s'agissant de l'appartement de CAGNES-sur-MER, qu'en se limitant à une seule attestation d'une agence immobilière locale, Maître X..., pourtant alerté par les difficultés rencontrées dans l'estimation de l'appartement parisien, ne rapporte pas davantage la preuve lui incombant d'avoir utilement informé Madame A..., peu important les deux courriers de ladite agence cités par ailleurs dès lors que, largement postérieurs à la déclaration de succession, ils ne font état que de la présence successive de deux locataires ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Maître X..., en n'accomplissant pas son devoir de conseil, tant pour l'appartement parisien que pour celui de CAGNES-sur-MER, a commis une faute engageant sa responsabilité civile professionnelle faisant perdre à Madame A...une chance d'éviter un redressement fiscal quels que soient par ailleurs, les manquements éventuellement imputables à l'avocat ayant rédigé pour l'Administration fiscale la réclamation relative à l'appartement parisien ;
Considérant qu'à ce titre, Madame A...sollicite la somme de 29 772 € suite aux pénalités restant à sa charge à l'issue de ses réclamations partiellement reçues pour chacun des biens immobiliers ;
Considérant que c'est à tort que Maître X... estime que la somme réclamée ne saurait constituer un préjudice susceptible de recevoir indemnisation de sa part, même au titre d'une perte de chance, au motif qu'il s'agit en réalité d'intérêts de retard qui ne sont pas indemnisables et doivent rester à la charge de l'intéressée ;
Qu'en effet, si l'avis à tiers détenteur (ATD) du 16 décembre 2005 qualifie d'intérêts de retard la somme de 15 683 € pour l'appartement parisien, la mise en demeure du 9 octobre 2010 retient cette somme sous la qualification de pénalités tout comme l'acceptation partielle de la réclamation de CAGNES-sur-MER et la mise en demeure du 4 octobre 2010 subséquente à propos de la somme de 14 039 € (pièces no 3, 7, 9 et 13, Madame A...) ; que le total, soit 29 722 € (hors frais d'hypothèque de 83 €) figure sur le bordereau de situation fiscale du 21 mars 2011 qui précise que les intérêts de retard (26 526 € à cette date) seront réclamés après le paiement des droits dûs (pièce no 16, idem) ; qu'enfin, c'est sous la même qualification de pénalités que cette somme de 29 722 € figure dans le commandement aux fins de saisie immobilière signifié le 19 octobre 2011 à Madame A...;
Que cependant, la réparation d'une perte de chance devant se mesurer à la chance perdue et ne pouvant être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée, la perte de chance éprouvée par Madame A...sera évaluée à la somme de 22 000 € ;
Considérant qu'il est résulté de ces deux procédures de redressement un trouble spécifique pour Madame A...résultant des tracas et démarches multiples qui ont été nécessaires ; qu'il lui sera alloué la somme de 3 000 € au titre de son préjudice moral ; ***

Considérant que l'équité commande de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile dans les termes du dispositif du présent arrêt ;
Considérant que Maître X... succombant en son appel, devra en supporter les dépens ;
PAR CES MOTIFS,
CONFIRME le jugement en ce qu'il a statué sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens,
L'INFIRME pour le surplus,
STATUANT À NOUVEAU dans cette limite et y ajoutant,
CONDAMNE Monsieur Jean-François X... à verser à Madame Brigitte A...la somme de :-25 000 € à titre de dommages-intérêts,-3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

REJETTE toutes autres demandes des parties,
CONDAMNE Monsieur Jean-François X... au paiement des dépens avec admission de l'avocat concerné au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2- chambre 1
Numéro d'arrêt : 12/13535
Date de la décision : 15/05/2013
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2013-05-15;12.13535 ?
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