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14/03/2013 | FRANCE | N°11/05877

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 14 mars 2013, 11/05877


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 14 Mars 2013

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/05877 - CM



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Mai 2011 par le conseil de prud'hommes de VILLENEUVE SAINT GEORGES section commerce RG n° 09/00005



APPELANTE

Madame [G] [A] épouse [N]

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparant en personne, assistée de Me Philippe

TREF, avocat au barreau de VAL DE MARNE, toque : PC 57 substitué par Me Catherine LOUINET, avocat au barreau de VAL DE MARNE, toque : PC 215



INTIMEE

SARL MIDEX

[Adresse 2]

[A...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 14 Mars 2013

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/05877 - CM

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Mai 2011 par le conseil de prud'hommes de VILLENEUVE SAINT GEORGES section commerce RG n° 09/00005

APPELANTE

Madame [G] [A] épouse [N]

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparant en personne, assistée de Me Philippe TREF, avocat au barreau de VAL DE MARNE, toque : PC 57 substitué par Me Catherine LOUINET, avocat au barreau de VAL DE MARNE, toque : PC 215

INTIMEE

SARL MIDEX

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Marc JOBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : C0912

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Février 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine MÉTADIEU, Présidente

Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère

Madame Marie-Antoinette COLAS, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Mme Catherine METADIEU, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

[G] [A] épouse [N] a été engagée à compter du 2 novembre 2000 par la S.AR.L Midex, en qualité d'opératrice de saisie informatique, selon un contrat de travail à durée indéterminée.

Les relations entre les parties étaient régies par la convention collective des transports routiers et auxiliaires de transport.

Après l'avoir convoquée le 13 janvier 2009 pour le 21 janvier à un entretien préalable à un éventuel licenciement, la S.AR.L Midex a notifié à [G] [A] son licenciement pour motif économique par lettre recommandée datée du 3 février 2009.

Estimant que la S.AR.L Midex n'avait pas respecté à son égard le principe «à travail égal salaire égal», [G] [A] a, le 6 janvier 2009, saisi le conseil de prud'hommes de Villeneuve Saint Georges afin d'obtenir divers rappels de salaires, primes, congés payés ainsi que des dommages-intérêts, outre la remise d'un bulletin de paie conforme.

Par jugement en date du 6 mai 2011, le conseil de prud'hommes, en sa formation de départage, a débouté [G] [A] de l'intégralité de ses demandes, a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et a condamné [G] [A] épouse [N] aux dépens.

Appelante de cette décision [G] [A] épouse [N] demande à la cour de l'infirmer et de :

- condamner la S.AR.L Midex à lui verser les sommes de :

' 20 627,40 € de rappel de salaires au titre des années 2004 à 2009,

' 2 062,74 € de congés payés afférents,

' 1 500 € de dommages-intérêts pour non-règlement des salaires dus,

' 1 087,10 € de prime d'ancienneté 2007,

' 1 294,40 € de prime de gratification 2007,

' 238,15 € de congés payés afférents à ces deux primes,

' 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

avec intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la demande,

- ordonner la remise des documents sociaux conformes sous astreinte de 30 € par jour de retard.

La S.AR.L Midex conclut à la confirmation du jugement déféré, au débouté de [G] [A] et à sa condamnation au paiement de la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour l'exposé des faits, prétentions et moyens des parties, aux conclusions respectives des parties déposées à l'audience, visées par le greffier et soutenues oralement.

MOTIVATION

En application du principe «à travail égal, salaire égal», énoncé par les articles L.2261-22-II-4, L.2771-1-8 et L.3221-2 du code du travail, l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés pour autant que ceux-ci sont placés dans une situation identique.

Il appartient au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, et il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs et matériellement vérifiables justifiant cette différence.

[G] [A] fait valoir que par courrier en date du 21 octobre 2008, invoquant le principe «à travail égal salaire égal», elle s'est étonnée d'occuper la même fonction que Madame [T] embauchée en 1997 et de percevoir un salaire inférieur, que la S.AR.L Midex lui a répondu le 10 novembre suivant en indiquant qu'il n'y avait aucune discrimination entre elles deux et que la différence de rémunération se justifiait par des éléments objectifs, qu'elle a fait l'objet d'un avertissement une semaine avant le début de la procédure de licenciement économique dans le but selon elle de la discréditer et de la déstabiliser.

Elle souligne le fait que Madame [T] et elle assuraient le même travail, avec les mêmes tâches et les mêmes horaires et qu'en l'absence d'évaluation annuelle, l'employeur ne dispose pas d'élément objectif lui permettant d'affirmer que sa collègue aurait été plus performante qu'elle.

La S.AR.L Midex réplique que Madame [T] était plus expérimentée que [G] [A], qu'elle était plus autonome et responsable, que le travail de [G] [A] était bien plus lent que celui de Madame [T] et de moindre qualité, ce qui justifiait la différence dénoncée par l'appelante.

[G] [A] verse aux débats ses bulletins de salaires et ceux de Madame [T].

Selon les bulletins de paie de chacune d'elles,

- [G] [A] avait une ancienneté remontant au 2 novembre 2000, occupait un emploi de saisie, qualification «employé», niveau 1 coefficient 160, percevait un salaire de 1 485,05 €,

- Madame [T], engagée le 1er mars 1997, occupait le même emploi, avait les mêmes qualification et coefficient (160), son salaire étant fixé à la somme de 1 727,57 €.

[G] [A] communique également une attestation émanant de Madame [T] indiquant qu'elles effectuaient toutes deux les mêmes tâches, y compris celle consistant à former les nouvelles opératrices de saisie, ce que confirment Mesdames [U] et [N].

Madame [T] atteste en ces termes :

'J'ai été embauchée en mars 1997 comme opératrice de saisie pour saisir des bordereaux de différents clients pour diverses destinations. Ce poste ne nécessite aucun diplôme juste la connaissance du clavier. Celui-ci n'a pas évolué ni subi de changement depuis mon arrivée dans la société ni d'avoir bénéficié d'aucune promotion.

Finalement la formation des employés amenés à nous aider ou de nouveaux embauchés est incombé sur Mme [N] et moi-même suivant notre disponibilité.

Je n'ai aucune responsabilité d'une entreprise ni le statut de formatrice du personnel et que je n'ai pas assuré la formation de Mme [N], c'est Mlle [R] qui l'a assuré. Nous avons exactement le même travail et nous assurons les mêmes tâches avec les mêmes horaires(Mme [N] et moi-même)'.

La S.AR.L Midex, quant à elle, communique des attestations de cadres de la société qui dénoncent la lenteur de [G] [A].

Monsieur [I], responsable tri expéditions évoque de manière non circonstanciée la lenteur et les erreurs de saisie commises par [G] [A].

Monsieur [X], comptable de la société, affirme que la différence constatée entre [G] [A] et Madame [T] est justifiée par l'incapacité de la première d'entre elles à terminer son travail et à l'effectuer correctement.

Or ce témoignage est contredit par l'attestation de Madame [S], également opératrice de saisie, dont les propos ne sont pas expressément remis en cause notamment en ce qui concerne le lieu de travail de ce témoin, et la fréquence limitée de ses passages, une fois par semaine, dans la société.

Cette dernière précise en effet :

'Concernant l'attestation de Monsieur [X] [Y], il est impossible qu'il ait pu constater ni même apprécier le travail des salariés car il est juste le comptable de la société et qu'il ne se rendait dans les locaux de la société, dans des bureaux à part, une seule journée par semaine à savoir le mercredi''.

S'agissant du témoignage de Madame [J] [B], responsable des opératrices qui atteste de la différence de qualité et de rapidité de travail entre les deux salariées, Madame [S] ajoute :

' ... Les témoignages de la partie adverse attestent d'une différence objective qui tiendrait à la qualité et notamment la rapidité d'exécution du travail de Mme [N] [G].

Tout d'abord ayant travaillé aux côtés de mes deux collègues j'atteste que Mme [T] et Mme [N] avaient les même qualités et rapidité d'exécution de leurs tâches. L'affirmation de Mme [B] [J] rapportant que je ne supportais plus les erreurs de Mme est un mensonge... Enfin concernant l'activité de l'entreprise, le nombre de colis reçus chaque jour est aléatoire très variable les périodes de noël étant la période pendant laquelle il y a le plus de travail. Les colis arrivent chaque matin, les bordereaux saisis le plus rapidement possible pour ne pas rater les vols qui sont prévus le matin. Or Mme [Z] [T] et Mme [N] [G] pratiquaient des horaires alternés ce qui leur permettaient de quitter plus tôt une semaine sur deux' Les allégations sur la lenteur supposée de Mme [N] [G] sont en contradiction avec la pratique des horaires alternés. Si Mme [N] avait été plus lente et moins compétente la direction n'aurait pas permis ce système d'horaires décalés au risque de louper les vols et que les marchandise ne puisse pas partir le matin.

La quantité de colis étant très variable si la lenteur de Mme [N] avait été avérée seule, Mme [T] aurait assuré les vols du matin, pour ne prendre aucun risque'.

Force est de constater que la S.AR.L Midex ne conteste pas l'organisation de travail ci-dessus décrite.

Or la S.AR.L Midex n'invoque pas et encore moins ne démontre que des colis n'ont pu partir du fait d'un quelconque retard imputable à [G] [A].

Elle ne justifie pas plus de plaintes de clients.

Dès lors, la prétendue médiocrité du travail accompli par [G] [A] est insuffisante à apporter la preuve que l'inégalité de traitement dont elle a été victime repose sur un critère objectif tenant à la différence du travail fourni.

Il convient donc d'infirmer le jugement entrepris et de faire droit à la demande de rappels de salaires et congés payés afférents formée par l'appelante et dont les modalités de calcul ne sont pas remises en cause par l'employeur.

La différence de traitement subie par [G] [A] lui a de plus nécessairement occasionné un préjudice qui sera justement réparé par l'allocation de la somme de 1 000 € de dommages-intérêts.

Il y a lieu en outre de condamner la S.AR.L Midex à lui verser le montant pro rata temporis des primes d'ancienneté et de gratification, prévues toutes deux par la convention collective des transports aériens appliquée par la S.AR.L Midex à compter du mois d'avril 2007, à savoir :

- 1 087,10 € pour la première outre 108,71 € de congés payés afférents

- 1 290,40 € pour la seconde outre 129,04 € de congés payés afférents.

La S.AR.L Midex devra enfin remettre à [G] [A] des bulletins de salaires et une attestation destinée à Pôle Emploi conformes au présent arrêt, cette dernière étant déboutée de sa demande d'astreinte qu'aucune circonstance particulière ne justifie.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

L'équité commande qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de [G] [A] et de lui accorder la somme de 2 000 € qu'elle réclame à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré

Statuant à nouveau

Condamne la S.AR.L Midex à payer à [G] [A] les sommes de :

- 20 627,40 € de rappel de salaires au titre des années 2004 à 2009

- 2 062,74 € de congés payés afférents

- 1 000 € de dommages-intérêts

- 1 087,10 € de prime d'ancienneté 2007

- 108,71 € de congés payés afférents

- 1 294,40 € de prime de gratification 2007

- 129,44 € de congés payés afférents

les dites sommes avec intérêts au taux légal à compter de la convocation de la S.AR.L Midex devant le bureau de conciliation

- 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonne à la S.AR.L Midex de remettre à [G] [A] des bulletins de salaires et une attestation destinée à Pôle Emploi conformes au présent arrêt

Condamne la S.AR.L Midex aux entiers dépens.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 11/05877
Date de la décision : 14/03/2013

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°11/05877 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-03-14;11.05877 ?
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