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22/01/2013 | FRANCE | N°10/13350

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 5, 22 janvier 2013, 10/13350


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 5



ARRET DU 22 JANVIER 2013



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/13350



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mai 2010 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2008077257





APPELANTES (et intimées)



- S.A.S. LTDL exerçant sous le nom commercial AIR TRANSIT INTERNATIONAL

prise en

la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Localité 6]



représentée par Me Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE - OLIVIER avocat postulant, barreau de PARIS, toque : L...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 5

ARRET DU 22 JANVIER 2013

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/13350

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mai 2010 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2008077257

APPELANTES (et intimées)

- S.A.S. LTDL exerçant sous le nom commercial AIR TRANSIT INTERNATIONAL

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Localité 6]

représentée par Me Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE - OLIVIER avocat postulant, barreau de PARIS, toque : L0029

assistée de Me Bérangère DESREZ de la SCP FAMCHON ET ASSOCIES, avocat plaidant, barreau de PARIS, toque R 128

- SAS LLYOD'S FRANCE mandataire Général en France des souscripteurs du LLYODS DE LONDRE

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 4]

[Localité 5]

représentée par Me Jean-Loup PEYTAVI avocat postulant, barreau de PARIS, toque : B1106

assistée de Me Eric TEISSERENC avocat plaidant, barreau de PARIS, toque : D1609

INTIMEES

- S.A. COVEA RISKS

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 8]

représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L 0034

représentée par Me Jacques HUILLIER de la AARPI LEFEBVRE & ASSOCIES avocat au barreau de PARIS, toque : D1226 postulant

-SA GROUPAMA TRANSPORTS

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 7]

représentée par Me Patrice MONIN de la SCP MONIN - D'AURIAC avocat postulant, barreau de PARIS, toque : J071

assistée de Me Nicolas MULLER avocat plaidant, barreau de PARIS, toque : A0139

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 3 décembre 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Dominique REYGNER, présidente de chambre et Monsieur Michel CHALACHIN, conseiller, chargés d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Dominique REYGNER, présidente,

Monsieur Christian BYK, conseiller,

Monsieur Michel CHALACHIN, conseiller.

Greffier, lors des débats : Mme Carole MEUNIER

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Dominique REYGNER, présidente, et par Carole MEUNIER, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise.

* * * * * *

En octobre 2007, la société JUST ART, exerçant sous le nom commercial de Galerie LC, a confié à la société Art Transit International LTDL l'acheminement à destination du Mexique d'une sculpture d'[R] [T] dénommé 'Vénus Bleue' 1962/1982, d'une valeur de 80 000 euros, qui, ayant été endommagée au cours du transport, a été refusée par son acquéreur et réacheminée à [Localité 16].

Les Souscripteurs du LLOYD'S de LONDRES ont fait procéder, après expertise amiable, à la restauration de l'oeuvre puis à sa vente 'en sauvetage' le 22 avril 2008 pour la somme de 18 000 euros à Monsieur [K], gérant du Cabinet INFORMATION ET ASSURANCES, courtier de la société JUST ART.

Ils ont par ailleurs indemnisé leur assurée, la société JUST ART, à hauteur de 80 000 euros suivant quittance subrogative du 14 janvier 2008.

Par acte d'huissier du 1er octobre 2008, la SAS LLOYD'S FRANCE, mandataire général en France des Souscripteurs du LLOYD'S de LONDRES, a assigné la société LTDL devant le tribunal de commerce de Paris aux fins principalement de la voir condamner à lui payer la somme de 72 935,62 euros.

La société LTDL a, par actes d'huissier des 18 et 22 juin 2009, assigné en garantie ses assureurs, les sociétés COVEA RISKS et GROUPAMA TRANSPORT.

Par jugement rendu le14 mai 2010, le tribunal a :

- débouté la société LTDL de ses demandes dirigées contre la société COVEA RISKS et la société GROUPAMA TRANSPORT et l'a condamnée à payer à chacune d'elles la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné la société LTDL à verser à la société LLOYD'S FRANCE les sommes de 10 935,65 euros et 14 000 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation et anatocisme, outre celle de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la société LTDL aux dépens.

Par déclaration du 28 juin 2010, la société LLOYD'S FRANCE a interjeté appel de cette décision.

Par déclaration du même jour, la société LTDL a elle-même interjeté appel de cette décision à l'encontre des seules sociétés LLOYD'S FRANCE et GROUPAMA TRANSPORT, appel limité aux dispositions du jugement la déboutant de ses demandes dirigées contre la société GROUPAMA TRANSPORT et la condamnant à payer à celle-ci la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par conclusions du 22 juillet 2010, elle s'est désistée de son appel à l'encontre de la société LLOYD'S FRANCE et par ordonnance du 20 septembre suivant, le magistrat de la mise en état a constaté l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la cour concernant cet appel.

Les deux procédures d'appel ont été jointes par ordonnance du magistrat de la mise en état du 3 janvier 2011.

Dans ses dernières conclusions du 12 novembre 2012, la société LLOYDS FRANCE demande à la cour de lui donner acte de ce qu'elle se désiste de son appel à l'égard de la société GROUPAMA TRANSPORT et de condamner in solidum ou bien la première à défaut de la seconde la société LTDL et la société COVEA RISKS au paiement de la somme de 72 935,62 euros avec intérêts au taux légal à compter de la date de la citation et capitalisation par application de l'article 1154 du Code civil et de celle de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions du 22 octobre 2012, la société LTDL prie la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a réduit le montant de l'indemnisation réclamée par la société LLOYD'S FRANCE au titre de la dépréciation de la sculpture et en ce qu'il l'a déclarée recevable dans son appel en garantie contre son assureur, la société GROUPAMA TRANSPORT,

Infirmant le jugement pour le surplus et y ajoutant

- à titre principal, débouter la société GROUPAMA de sa demande de mise hors de cause,

- à titre subsidiaire, débouter la société LLOYD'S FRANCE de ses demandes,

- à titre infiniment subsidiaire, la juger bien fondée à opposer à la société LLOYD'S FRANCE sa limitation de responsabilité prévue à l'article 7 de ses conditions générales de vente,

- débouter les sociétés LLOYD'S FRANCE et GROUPAMA TRANSPORT de leur demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et condamner la société LLOYD'S FRANCE en tous les dépens d'appel.

Suivant dernières conclusions du 5 janvier 2012, la société GROUPAMA TRANSPORT demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, débouter la société LTDL de ses demandes à son encontre, l'en débouter, ordonner sa mise hors de cause et condamner la société LTDL à lui payer une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par uniques conclusions du 19 novembre 2012, la société COVEA RISKS prie la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et la mettre hors de cause, subsidiairement juger que le préjudice invoqué par la société LLOYD'S FRANCE n'est pas établi, très subsidiairement juger qu'elle ne saurait être tenue que dans les limites contractuelles de sa police, et condamner la société LLOYD'S FRANCE à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 novembre 2012.

Par conclusions du 30 novembre 2012, la société LLOYD'S FRANCE demande la révocation de cette ordonnance afin que les écritures et pièces qu'elle a signifiées le 26 novembre 2012 soient recevables et subsidiairement, de rejeter les conclusions signifiées le 19 novembre 2012 par la société COVEA RISKS.

Ces conclusions sont expressément visées pour complet exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.

SUR CE, LA COUR,

Sur l'incident de procédure

Considérant que la société COVEA RISKS a conclu pour la première fois le 19 novembre 2012, date de clôture fixée dans le calendrier porté à la connaissance des parties le 3 janvier 2012, sans justifier d'aucun motif légitime ;

Considérant que la demande de révocation de l'ordonnance de clôture formée par la société LLOYD'S FRANCE à seule fin de répondre à ces conclusions de dernière heure ne constitue pas une cause grave s'étant révélée après que cette ordonnance ait été rendue, comme exigé par l'article 784 du Code de procédure civile ; qu'il y a donc lieu de la rejeter ;

Considérant, en revanche, qu'en concluant pour la première fois le jour même de l'ordonnance de clôture, la société COVEA RISKS a mis la société LLOYD'S FRANCE dans l'impossibilité totale de prendre connaissance de ses prétentions et moyens et d'y répondre ; que cette violation du principe de la contradiction et des droits de la défense doit être sanctionnée par le rejet des débats des écritures en cause et de la pièce communiquée le même jour ;

Sur le désistement d'appel de la société LLOYD'S FRANCE à l'égard de la société GROUPAMA TRANSPORT

Considérant que la société GROUPAMA TRANSPORT ne s'opposant pas au désistement d'appel de la société LLOYD'S FRANCE à son égard, il convient de constater l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la cour dans leurs rapports ;

Sur la demande de la société LLOYD'S FRANCE à l'encontre de la société LTDL

Considérant qu'au soutien de son appel, la société LLOYD'S FRANCE fait valoir que les premiers juges ont à tort réduit la valeur d'origine de l'oeuvre pour diminuer ensuite le préjudice indemnisable opposable au tiers responsable en violation du principe du contradictoire et en méconnaissance de celui en vertu duquel, en matière contractuelle, le créancier doit être indemnisé de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé, et que le prix obtenu en sauvetage est tout à fait raisonnable au regard de l'évaluation faite par l'expert [V] dans l'hypothèse d'une vente aux enchères, qui présentait des difficultés tenant à l'aléa d'une telle entreprise et au caractère disproportionné de la commission de vente due sur une pièce de relativement faible valeur, la personne de l'acquéreur étant indifférente dès lors que le prix de sauvetage se situait dans la fourchette justifiée ;

Qu'elle ajoute que l'obligation de réparation de la société LTDL n'a pas lieu d'être limitée, cette société ne rapportant pas la preuve que les conditions générales de vente dont elle se prévaut étaient connues et acceptées par la société JUST ART au moment de la conclusion du contrat, et l'origine des dommages résidant dans l'emballage inapproprié de la sculpture, prestation autonome ne relevant pas du régime juridique du contrat de commission ; qu'à titre subsidiaire, elle affirme qu'en confiant l'emballage de l'oeuvre d'art à un préposé non qualifié, la société LTDL a commis une faute inexcusable au sens de l'article L. 133-8 du code de commerce ;

Considérant que la société LTDL soutient que le préjudice allégué par la société LLYOD'S FRANCE à hauteur de 72 935,62 euros n'est pas établi ; que si elle admet les frais de restauration de l'oeuvre, d'un montant de 7 176 euros, elle conteste devoir la somme de 62 000 euros réclamée au titre de la dépréciation de la sculpture, non démontrée puisque l'oeuvre a été parfaitement restaurée dans les règles de l'art et volontairement vendue en sauvetage à un prix délibérément fixé à moins du quart de son prix initial, de surcroît au courtier de la société JUST ART, alors qu'elle aurait pu l'être pour une valeur bien supérieure aux enchères, ainsi que les frais d'une expertise conduite exclusivement à sa charge ;

Qu'elle fait encore valoir que le sinistre ayant pour origine exclusive l'emballage inapproprié de la sculpture par l'un de ses employés, la société GROUPAMA TRANSPORT lui doit sa garantie, mais que si la cour retenait le bénéfice des limitations de garantie invoqué par cet assureur, elle entend alors se prévaloir à l'encontre du LLOYD'S de la limitation de responsabilité prévue à l'article 7 de ses conditions générales de vente, aucune faute lourde de sa part n'étant démontrée ;

Considérant que la société LLOYD'S FRANCE agit à l'encontre de la société LTDL en vertu de l'article L. 121-12 du Code des assurances, par subrogation dans les droits et actions de la société JUST ART, indemnisée par son assureur, les Souscripteurs du LLOYD'S de LONDRES, à hauteur de la somme de 80 000 euros selon quittance subrogative du 14 janvier 2008 ; que son action est fondée sur la responsabilité contractuelle prévue par les articles 1146 et suivants du Code civil ;

Considérant qu'il est établi par le pré-rapport d'expertise amiable de la société ELEX du 26 décembre 2007, effectuée en présence notamment d'un représentant de la société LTDL, que la sculpture d'[R] [T] dont cette dernière s'était vue confier l'expédition au Mexique par la société JUST ART a été retrouvée après déballage entièrement couverte d'abrasion de pigmentation, rendant impossible toute restauration ponctuelle, et que l'emballage (caisse bois, calage de mousse, caisse intermédiaire, papier bulle puis papier cristal) est seul responsable du dommage ;

Que la société LTDL reconnaît du reste que le dommage a pour cause exclusive l'emballage inapproprié de l'oeuvre par l'un de ses employés, et ne conteste pas le principe de sa responsabilité ;

Considérant que selon l'article 1149 du Code civil, 'les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé' ;

Considérant que le préjudice subi par la société JUST ART correspond à la différence entre le prix convenu entre elle et son client et donc au gain qu'elle devait tirer de la vente, peu important que ce prix ait pu être surévalué au regard de la valeur réelle de l'oeuvre sur le marché de l'art de l'époque, déduction faite de la valeur à laquelle celle-ci pouvait être revendue après sa restauration ;

Considérant qu'il ressort des pièces versées aux débats que la société JUST ART avait vendu l'oeuvre à Monsieur [B] au prix de 80 000 euros suivant facture du 6 juillet 2007 et qu'à la suite du sinistre, elle a consenti à son client un avoir de même montant le 14 janvier 2008 ; que la valeur de 80 000 euros correspond aux capitaux garantis dans la police d'assurance des marchandises transportées par voie aérienne qu'elle avait souscrite le 3 octobre 2007 auprès des Souscripteurs du LLOYD'S de LONDRES pour garantir l'acheminement de l'oeuvre au Mexique, à la valeur déclarée dans le bon d'enlèvement et la facture de transport de la société LTDL ainsi qu'à l'indemnité que son assureur lui a versée le 14 janvier 2008 ; que cette valeur, qui reflète l'accord du vendeur et de l'acquéreur, ne peut donc être remise en cause ;

Considérant que la restauration totale de l'oeuvre effectuée par Monsieur [X], unique restaurateur habilité par l'ayant droit de l'artiste, a permis la délivrance le 14 avril 2008 d'une nouvelle attestation d'authenticité remplaçant le certificat originel par Monsieur [S], expert, certifiant la provenance de l'oeuvre, mais qui n'a pas pour autant redonné à celle-ci sa valeur d'origine, ainsi qu'il résulte des rapports concordants sur ce point de la société ELEX et de Monsieur [V] ;

Considérant en effet que selon le rapport définitif d'ELEX et le procès-verbal d'évaluation des dommages joint, déposé le 26 mai 2008 après rendez-vous du 20 février 2008 en présence notamment de la société LTDL, la valeur de revente de l'oeuvre après restauration pouvait être évaluée à la somme maximum de 25 000 euros ;

Que Monsieur [V], expert en oeuvres d'art missionné par l'assureur pour estimer la valeur résiduelle de la sculpture restaurée, indique dans son rapport du 11 juillet 2009 que l'intégrité de l'oeuvre a été atteinte, lui faisant perdre en grande partie sa valeur artistique, qu'en conséquence, si celle-ci devait être présentée aux enchères, son estimation se situerait entre 45 et 50 % des résultats d'adjudication de pièces similaires, et qu'en 2008, les résultats d'adjudications, pour des pièces similaires, tant en France qu'à l'étranger, se situant entre 34 000 euros et 55 000 euros (source Artprice), l'adjudication pourrait être comprise entre 20 000 et 23 000 euros soit, déduction faite des frais à la charge du vendeur de l'ordre de 15 %, un reliquat de 17 000 à 20 000 euros ;

Considérant que cette évaluation n'est pas utilement contestée par la société LTDL, qui ne produit aucun avis d'homme de l'art contraire mais se contente de se référer à des ventes publiques des années 1995 à 2000, trop anciennes pour permettre une comparaison probante, et à des ventes publiques des 25 et 26 novembre 2009 lors desquelles des sculptures 'Venus Bleue' d'[R] [T] de volume similaire à l'oeuvre en litige, mais non restaurées, ont été vendues aux prix respectifs de 30 107 euros et 45 000 euros, ce qui rejoint en réalité l'avis de Monsieur [V] ;

Considérant, en revanche, que le choix fait par l'assureur, subrogé dans les droits de son assurée, de céder l'oeuvre de gré à gré 'en sauvetage' pour une somme de 18 000 euros se situant dans la fourchette basse de l'estimation de son expert, au gérant de la société INFORMATION ET ASSURANCE, courtier de la société JUST ART par l'entremise duquel la police d'assurance avait été conclue, n'était pas de nature à assurer la revente de la sculpture à son meilleur prix, au mépris des droits du débiteur ;

Qu'il y a lieu, dans ces conditions, et au regard de l'ensemble des éléments analysés ci-dessus, de retenir que l'oeuvre restaurée avait une valeur de revente de 20 000 euros, soit un différentiel avec le prix auquel la société JUST ART l'avait vendue de 60 000 euros ;

Considérant que le dommage causé consécutivement à la faute contractuelle commise par la société LTDL comprend également le coût de restauration totale de l'oeuvre, de 7 176 euros TTC, ainsi que les frais de l'expertise indispensable à l'évaluation dudit dommage, effectuée au contradictoire de cette société, et dont le montant justifié par factures s'élève à 3 759,62 euros ;

Considérant que l'ensemble des préjudices subis peut ainsi être fixé à la somme de (60 000 euros + 7 176 euros + 3 759,62 euros) 70 935,62 euros ;

Considérant que quelle que soit l'issue de son recours en garantie à l'encontre de la société GROUPAMA TRANSPORT, la société LTDL ne peut opposer à la société LLOYD'S FRANCE, subrogée dans les droits de la société JUST ART, la clause limitative de responsabilité figurant à l'article 7 de ce qu'elle prétend être ses conditions générales de vente, dès lors qu'elle ne démontre pas que le document qu'elle produit, comportant lesdites conditions au recto d'une feuille volante dont le verso est vierge de toute mention, sur lequel ne figurent ni date, ni signature, ni tampon, ont été portées à la connaissance de la société JUST ART et acceptées par elle lors de la conclusion du contrat de transport ;

Considérant, en conséquence, qu'il convient, réformant le jugement entrepris du chef de la condamnation prononcée à l'encontre de la société LTDL, de condamner celle-ci à payer à la société LLOYD'S FRANCE la somme de 70 935,62 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 1er octobre 2008 valant mise en demeure, et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code civil ;

Sur la demande de la société LLOYD'S FRANCE à l'encontre de la société COVEA RISKS

Considérant que la société LLOYD'S FRANCE, exerçant en cause d'appel une action directe contre la société COVEA RISKS, soutient que cet assureur, qui couvre la responsabilité civile à laquelle est exposée la société LTDL au titre de son activité d'emballage et de conditionnement, lui est due ;

Mais considérant qu'il ressort du Titre II - A -1 du contrat d'assurance responsabilité civile 'Tout sauf' souscrit par la société LTDL auprès de la société COVEA RISKS, versé aux débats par la société LLOYD'S FRANCE, que la société COVEA RISKS garantit notamment les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile que l'assuré peut encourir du fait des dommages corporels, matériels et immatériels causés à autrui et imputables à l'activité déclarée de son entreprise sous réserve de diverses exclusions dont celle stipulée au point 16) tenant aux dommages subis par les biens confiés à l'assuré 'transportés, sauf à l'intérieur des locaux ou chantiers dont l'assuré a l'usage d'une façon permanente et qui sont continuellement affectés à l'exploitation de l'entreprise' ;

Que cette clause d'exclusion vise les activités de transport et de logistique de la société LTDL, qui reconnaît elle-même dans ses écritures avoir souscrit à ce titre un autre contrat d'assurance auprès de la société GROUPAMA TRANSPORT, et ne sollicite plus la garantie de la société COVEA RISKS ;

Qu'il est établi par l'expertise d'ELEX que la sculpture en litige a été endommagée exclusivement par son emballage, et non par son transport à l'intérieur des locaux de la société LTDL ;

Que le sinistre n'entre donc pas dans le champ de la garantie de la société COVEA RISKS ;

Que la demande de la société LLOYD'S FRANCE à l'encontre de cet assureur doit dès lors être rejetée ;

Sur la demande de la société LTDL à l'encontre de la société GROUPAMA TRANSPORT

Considérant que la société LTDL sollicite la garantie de la société GROUPAMA TRANSPORT au titre du contrat d'assurance 'GLOBAL TRANS' souscrit auprès de cet assureur garantissant notamment sa responsabilité civile en cas de préjudice matériel subi par ses clients en conséquence de l'inexécution ou de la mauvaise exécution de ses obligations contractuelles du fait de ses activités de transport et de logistique, comprenant notamment l'emballage et le conditionnement ;

Mais considérant que comme le fait à juste titre valoir la société GROUPAMA TRANSPORT, l'article 3.5 des conditions particulières du contrat stipule pour les opérations couvertes au titre de la logistique un capital maximum garanti pour les pertes ou dommages matériels aux marchandises confiées de 14 euros par kilogramme de poids brut de marchandises manquantes ou avariées, soit, la sculpture d'[R] [T] endommagée pesant 44 kilos, une somme de 616 euros, inférieure à la franchise contractuelle de 1 500 euros prévue à l'article 3.6 ; que sa garantie n'est donc pas due ;

Que c'est par conséquent à juste titre que le jugement entrepris a débouté la société LTDL de sa demande à l'encontre de la société GROUPAMA TRANSPORT ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Considérant que la société LTDL, qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel, à l'exception de ceux afférents à l'instance éteinte du fait du désistement d'appel de la société LLOYD'S FRANCE à l'égard de la société GROUPAMA TRANSPORT et de l'appel de la société LLOYD'S FRANCE à l'encontre de la société COVEA RISKS ;

Que la solution du litige conduit, en équité, à condamner, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, au titre de leurs frais irrépétibles d'appel, la société LTDL à payer la somme de 3 000 euros à la société LLOYD'S FRANCE et celle de 1 500 euros à la société GROUPAMA TRANSPORT, toutes autres demandes de ce chef étant rejetées.

PAR CES MOTIFS

Dit n'y avoir lieu à révocation de l'ordonnance de clôture rendue le 19 novembre 2012,

Rejette des débats les conclusions signifiées par la société COVEA RISKS le 19 novembre 2012,

Donne acte à la société LLOYD'S FRANCE de ce qu'elle se désiste de son appel à l'égard de la société GROUPAMA TRANSPORT,

Constate en conséquence l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la cour en ce qui concerne cet appel,

Confirme le jugement entrepris, sauf sur le montant de la condamnation prononcée à l'encontre de la société Art Transit International LTDL à l'encontre de la société LLOYD'S FRANCE,

Infirmant de ce chef et statuant à nouveau,

Condamne la société Art Transit International LTDL à payer à la société LLOYD'S FRANCE la somme de 70 935,62 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 1er octobre 2008 et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code civil,

Condamne la société Art Transit International LTDL à payer, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile :

- la somme de 3 000 euros à la société LLOYD'S FRANCE,

- la somme de 1 500 euros à la société GROUPAMA TRANSPORT,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la société LLOYD'S FRANCE aux frais de l'instance éteinte à l'égard de la société GROUPAMA TRANSPORT et de son appel à l'encontre de la société COVEA RISKS,

Condamne la société Art Transit International LTDL aux autres dépens d'appel, lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 10/13350
Date de la décision : 22/01/2013

Références :

Cour d'appel de Paris C5, arrêt n°10/13350 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-01-22;10.13350 ?
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