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05/12/2012 | FRANCE | N°12/09927

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2- chambre 1, 05 décembre 2012, 12/09927


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 5 DECEMBRE 2012
(no 309, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 09927
Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Mai 2012- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 11/ 18488

APPELANTE

SCI IMMOBILIERE JCL agissant poursuites et diligences de son gérant domicilié en cette qualité audit siège 6/ 14 rue de Leibnitz 75018 PARIS

représentée et assistée de la SCP RIBAUT (Me Vincen

t RIBAUT) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0051) et de la SCP AYACHE SALAMA et ASSOCIES (Me Michel ...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 5 DECEMBRE 2012
(no 309, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 09927
Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Mai 2012- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 11/ 18488

APPELANTE

SCI IMMOBILIERE JCL agissant poursuites et diligences de son gérant domicilié en cette qualité audit siège 6/ 14 rue de Leibnitz 75018 PARIS

représentée et assistée de la SCP RIBAUT (Me Vincent RIBAUT) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0051) et de la SCP AYACHE SALAMA et ASSOCIES (Me Michel AYACHE) (avocats au barreau de PARIS, toque : P0334)
INTIMES
Monsieur Philippe X...exerçant la profession d'administrateur judiciaire ...78000 VERSAILLES

SCP C... et X...SCP d'administrateurs Judiciaires, agissant poursuites et diligences de son gérant domicilié en cette qualité audit siège ...78000 VERSAILLES

représentés et assistés de la SCP Jeanne BAECHLIN (Me Jeanne BAECHLIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0034) et de Me Philippe HERVE-ASS FABRE GUEUGNOT SAVARY (Me Jean-Pierre FABRE) (avocats au barreau de PARIS, toque : R044)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 17 octobre 2012, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Jacques BICHARD, Président Madame Marguerite-Marie MARION, Conseiller Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN

ARRET :

- contradictoire-rendu publiquement en l'empêchement du président par Madame Marguerite-Marie MARION, Conseiller-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé en l'empêchement du président par Madame Marguerite-Marie MARION, Conseiller et par Madame Noëlle KLEIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

******************

La SCI IMMOBILIERE JCL est propriétaire d'un bâtiment industriel sis zone industrielle de Thize à Besançon qui a été occupé jusqu'au 31 décembre 2003 par la société ALTEC et dont la propriété lui a été contestée par la société OXILIA. Dans le cadre de ce litige, par ordonnance rendue le 4 novembre 2004 le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Besançon a désigné Maître Philippe X...qui exerçait les fonctions d'administrateur judiciaire de la société ALTEC, mise en redressement judiciaire, en qualité d'administrateur provisoire dudit bâtiment industriel avec mission de l'assurer contre les risques de vol et d'incendie, de conclure le cas échéant un contrat d'occupation précaire au prix du marché avec toute personne intéressée et de séquestrer auprès de la CARPA, le montant de l'indemnité d'occupation précaire, déduction faite des charges d'assurance, des frais de conservation de l'immeuble et de ceux de son administration.

La mission de Maître X...a pris fin à la suite de l'arrêt rendu le 28 octobre 2009 par la cour d'appel de Besançon qui a définitivement consacré le droit de propriété de la La SCI IMMOBILIERE JCL sur le bâtiment dont s'agit.
A la requête de la SCI IMMOBILIERE JCL, le juge des référés du tribunal de grande instance de Besançon a, par ordonnance du 22 juin 2010, désigné M. Patrick Y...en qualité d'expert avec essentiellement pour mission de rechercher l'état du bâtiment lorsque Maître Philippe X...a pris ses fonctions d'administrateur provisoire, de décrire les dégradations commises et les éventuelles réparations nécessaires à sa réfection.
L'expert judiciaire ayant accompli sa mission, c'est dans ces circonstances que la SCI IMMOBILIERE JCL a assigné en déclaration de responsabilité et d'indemnisation de son préjudice Maître Philippe X...et la société civile professionnelle C... X...devant le tribunal de grande instance de Paris dont le jugement rendu le 2 mai 2012 est déféré à la cour.
***
Vu le jugement entrepris qui, avec exécution provisoire, a :- condamné la société civile professionnelle C... X...à payer à la SCI IMMOBILIERE JCL la somme de 400 000 euros en réparation de son préjudice matériel et l'a débouté du surplus de sa demande,- dit sans objet la demande d'expertise,- condamné la société civile professionnelle C... X...à payer à la SCI IMMOBILIERE JCL la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu la déclaration d'appel déposée le 31 mai 2012 Maître Philippe X...et la société civile professionnelle C... X....
Vu les dernières conclusions déposées le :
1er octobre 2012 par Maître Philippe X...et la société civile professionnelle C... X...qui demandent à la cour de :- réformer le jugement déféré,- statuer à nouveau et : * débouter la SCI IMMOBILIERE JCL de ses demandes, * subsidiairement ordonner une contre expertise pour chiffrer les travaux éventuellement nécessaires à une remise en état, * condamner la SCI IMMOBILIERE JCL à lui verser la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

17 septembre 2012 par la SCI IMMOBILIERE JCL qui demande à la cour de :- confirmer le jugement déféré sauf sur le montant des dommages intérêts qui lui ont été accordés et de lui allouer à ce titre la somme de 3 847 800 euros sauf à parfaire, outre celle de 17 040, 48 euros et une indemnité de 20 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,- débouter Maître Philippe X...et la société civile professionnelle C... X...de leurs demandes.

SUR QUOI LA COUR

Considérant que la SCI IMMOBILIERE JCL expose que Maître Philippe X...n'a pas " déployé d'effort significatif " pour louer son bâtiment ou trouver un acquéreur, ainsi que sa mission le prévoyait ; que cependant c'est par des motifs pertinents que la cour adopte, que le tribunal a écarté ce grief ;

Considérant que la SCI IMMOBILIERE JCL soutient également que Maître Philippe X...dont elle précise qu'il connaissait parfaitement l'état de son immeuble puisqu'ayant été désigné en juin 2002 en qualité d'administrateur judiciaire de la société ALTEC, a failli à sa mission en se désintéressant de l'administration et de la sauvegarde du bâtiment qui a été vandalisé et dégradé, en omettant d'effectuer les déclarations de sinistres auprès des assureurs, en s'abstenant d'attirer son attention sur les supposées difficultés financières qu'il aurait rencontrées pour entretenir le bien ;
Considérant que certes de façon pertinente Maître Philippe X...précise que la société ALTEC a quitté le bâtiment le 31 décembre 2003 alors qu'il n'a été investi de sa mission d'administrateur que le 4 novembre 2004, soit 11 mois plus tard et que durant cette période il appartenait à la SCI IMMOBILIERE JCL ou à la société OXILIA qui revendiquait alors la propriété du bien, de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la protection de celui-ci ;
que néanmoins à compter de novembre 2004 cette mission lui a entièrement incombé ;
qu'entre novembre 2005 et décembre 2009 il a perçu au titre des frais de gestion, la somme globale de 136 000 euros, sous forme de 4 versements opérés le 21 novembre 2005 à hauteur de 35 000 euros, le 12 juin 2006 à hauteur de 36 000 euros, en février 2008 à hauteur de 30 000 euros et le 15 avril 2009 à hauteur de 35 000 euros, étant par ailleurs relevé que le compte gestion présentait en décembre 2009 un solde créditeur d'un montant de 17 040, 48 euros ;
Considérant que la seule comparaison de l'état des lieux dressé le 16 décembre 2004, par Maître Z..., huissier de justice qui a relevé que le bâtiment était tout au plus en mauvais état mais exempt d'actes de vandalisme avec les constatations faites par Maître A..., huissier de justice, fin 2009 et début 2010 puis par l'expert judiciaire, démontrent que durant le mandat de Maître Philippe X...l'immeuble a été vandalisé et a été remis à la SCI IMMOBILIERE JCL dans un grand état de délabrement et de dégradation ;
que la SCI IMMOBILIERE JCL rappelle à cet effet que dans son rapport d'expertise M. Patrick Y...note que " sauf preuve contraire Maître X...qui connaissait précisément l'état du bâtiment depuis 2002 en tant qu'administrateur d'Altec, s'est désintéressé de la gestion du bâtiment, le laissant à l'abandon et ne prenant pas toutes les précautions nécessaires contre les intrusions successives qui ont abouti, par vol et/ ou vandalisme, à l'état très dégradé que l'on connaît aujourd'hui. Maître X...(......) n'a pris aucune mesure pour éviter les dégradations dûment constatées lors des opérations d'expertise, ni contracté d'assurance contre le risque de vol et d'incendie " ;

que certes les déclarations de cet expert doivent être relativisées dans la mesure où Maître X...verse aux débats une attestation du 11 février 2005 émanant de M. B..., agent général GAN et courtier en assurances, établissant que l'immeuble a été assuré auprès des Assurances Industrielles de Londres, le contrat d'assurance " Risques industriels " souscrit en 2005, ainsi que ses comptes de gestion faisant état du paiement des cotisations d'assurance et des frais de gardiennage de l'immeuble, encore que concernant ces derniers, il n'est pas établi qu'ils auraient été réglés au delà de la première moitié de l'année 2008 ;
qu'il demeure cependant que Maître Philippe X...ne peut rapporter la preuve, faute de produire les contrats souscrits, de l'étendue précise des obligations incombant aux sociétés de gardiennage ni, au demeurant des consignes de sécurité qu'il se devait de leur transmettre ;
que pendant les 5 ans de sa mission il ne démontre pas avoir établi un compte-rendu les concernant ;
que pas davantage il ne peut justifier de déclarations de sinistres faites aux compagnies d'assurance alors même que le bâtiment a subi d'importantes et fréquentes dégradations et que des indemnisations, dans les conditions de la police d'assurance, auraient pu être sollicitées ;
que Maître Philippe X...a ainsi fait preuve d'une carence fautive dans l'accomplissement de la mission d'administration et de gestion de l'immeuble qui lui a été confiée, sans qu'il puisse utilement faire état, comme cela a été précédemment relevé, de difficultés financières qui auraient perturbé l'accomplissement normal de celle-ci et qui seraient imputables à la SCI IMMOBILIERE JCL ou à la société OXILIA ;
que par sa faute il a ainsi fait perdre une chance réelle et sérieuse à la SCI IMMOBILIERE JCL de récupérer son bien dans un meilleur état de présentation que celui constaté par l'expert judiciaire ;
Considérant que le montant de l'indemnisation lui revenant au titre de cette perte de chance doit s'apprécier sur la base des constatations faites par M. Y...et de l'évaluation des remises en état qu'il a préconisées ;
qu'en effet la seule note d'expertise technique, établie de façon non contradictoire par le cabinet EQUAD, ne peut utilement remettre en cause les conclusions de l'expert alors que celui-ci a fait une analyse exhaustive des dégradations subies par le bâtiment qui présente une surface totale de 6000 m2, a expressément tenu compte de son état en 2003, avant le début de la mission de Maître X..., en retenant un abattement de l'ordre de 50 % du coût des remises en ordre qu'il a préconisées, certes sans avoir de devis mais alors même que ses compétences et ses connaissances lui permettent de proposer une estimation sérieuse ;
qu'il n'est par ailleurs pas démontré en quoi l'approche technique et financière du cabinet EQUAD serait plus appropriée et juste que celle de l'expert judiciaire ;
que l'argument tiré de la supposée disproportion qui existerait entre l'évaluation des travaux proposée par M. Y...et la valeur vénale du bien qui aurait été en 2007 de 720 000 euros et en 2008, en raison d'une offre d'achat faite par la société Les 3 J, de 950 000 euros, doit être relativisé ; que d'une part ces estimations sont sensiblement divergentes entre elles alors même que la plus élevée correspond à un état de dégradation plus avancée du bien ; que d'autre part la proposition de la société les 3 J s'inscrit dans une opération commerciale qui à ce titre, ne correspond pas nécessairement à la valeur réelle de l'immeuble ;

que dans ces conditions, partant de l'évaluation proposée par M. Y..., la perte de chance subie par la SCI IMMOBILIERE JCL sera fixée à la somme de 500 000 euros ;
Considérant que la demande de dommages intérêts complémentaires à hauteur de la somme de 17 040, 48 euros, représentant le solde créditeur du compte étude de Maître X..., formée par la SCI IMMOBILIERE JCL sera rejetée, faute pour celle-ci d'expliciter et de justifier d'un préjudice particulier, distinct de celui qui vient d'être réparé ;
Considérant que la solution du litige, en tenant compte de l'équité commande d'accorder à la SCI IMMOBILIERE JCL une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant de 5 000 euros ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la société civile professionnelle C... X...à payer à la SCI IMMOBILIERE JCL la somme de 400 000 euros en réparation de son préjudice matériel.
L'infirme dans cette limite,
Statuant à nouveau,
Condamne la société civile professionnelle C... X...et Maître Philippe X...à payer à la SCI IMMOBILIERE JCL la somme de 500 000 euros en réparation de son préjudice matériel.
Condamne la société civile professionnelle C... X...et Maître Philippe X...à payer à la SCI IMMOBILIERE JCL une indemnité de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Rejette toute autre demande.
Condamne la société civile professionnelle C... X...et Maître Philippe X...aux dépens dont distraction au profit de la SCP Alain Ribaut et Vincent Ribaud, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2- chambre 1
Numéro d'arrêt : 12/09927
Date de la décision : 05/12/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2012-12-05;12.09927 ?
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