La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/12/2012 | FRANCE | N°11/17354

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 05 décembre 2012, 11/17354


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 3 - Chambre 1



ARRÊT DU 05 DÉCEMBRE 2012



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/17354



Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Octobre 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/04117





APPELANTE



S.A.R.L. FUN MOD

agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice domic

ilié en cette qualité audit siège

[Adresse 16]

[Localité 17]



Représentée par la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocats au barreau de PARIS, toque : A0980, postulant

assistée de Me C...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRÊT DU 05 DÉCEMBRE 2012

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/17354

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Octobre 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/04117

APPELANTE

S.A.R.L. FUN MOD

agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 16]

[Localité 17]

Représentée par la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocats au barreau de PARIS, toque : A0980, postulant

assistée de Me Catherine DU VERDIER DE GENOUILLAC , avocat au barreau de PARIS, toque : C 1004, plaidant

INTIMÉS

1°) Monsieur [H] [L]

[Adresse 6]

[Localité 11]

2°) Madame [Z] [J] [C] [L] épouse [X]

[Adresse 14]

[Localité 12]

3°) Mademoiselle [B] [J] [E] [L]

[Adresse 6]

[Localité 11]

Représentés par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avocats au barreau de PARIS, toque : L0044, postulant

assistés de Me Laure SAGET du cabinet REGNAULT, avocat au barreau de PARIS,

toque : R197, plaidant

4°) Madame [S] [N] veuve [D]

[Adresse 3]

[Localité 10]

Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111, postulant

assistée de Me Francis JURKEVITCH, avocat au barreau de PARIS, toque : B0734, plaidant

5°) Monsieur [K] [N]

[Adresse 2]

[Adresse 1] (SUISSE)

défaillant

6°) Madame [F] [G] épouse [N]

[Adresse 13]

[Localité 15]

Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111, postulant

assistée de Me Francis JURKEVITCH, avocat au barreau de PARIS, toque : B0734, plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 31octobre 2012, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Pascal CHAUVIN, président,

Madame Nathalie AUROY, conseiller

Madame Monique MAUMUS, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier :

lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Marie-France MEGNIEN

ARRÊT :

- par défaut

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Pascal CHAUVIN, président, et par Madame Marie-France MEGNIEN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

Par acte authentique reçu le 1er avril 1965, [M] [Y] veuve [N] a consenti une donation-partage à ses quatre enfants, [K], [R], [O] et [A] [V].

Aux termes de cet acte, elle a notamment donné :

- à [O] [N] veuve [L] :

* la nue-propriété des 575/1100èmes indivis d'un immeuble de rapport situé [Adresse 16] et cadastré section R n° [Cadastre 7] et [Cadastre 8], évaluée à 575 000 francs,

- à [A] [V] [N] :

* la nue-propriété des 525/1100èmes indivis du même immeuble, évaluée à 525 000 francs,

* la nue-propriété 'uniquement des éléments incorporels d'un fonds de commerce industriel d'achat et vente de machines outils exploité à [Adresse 16], [...] comprenant la clientèle, l'achalandage, le nom commercial à l'exclusion de tout matériel et de tout stock de marchandises', étant stipulé que 'la donatrice s'oblige dès maintenant à consentir à l'attributaire de ce lot un bail gérance dont les conditions et prix seront arrêtés directement entre elle et l'attributaire et elle déclare dès maintenant qu'elle a les conditions requises pour consentir ce bail gérance du fonds soumis à usufruit'.

[M] [Y] veuve [N] est décédée le [Date décès 5] 1974.

[O] [N] veuve [L] est décédée le [Date décès 4] 1975, en laissant pour lui succéder ses trois enfants, M. [H] [L], Mme [Z] [L] épouse [X] et Mlle [B] [L].

Par acte du 31 janvier 1984, [A] [V] [N] et les héritiers de [O] [L] ont établi un règlement de copropriété portant sur la partie de l'immeuble cadastrée section R n° [Cadastre 7] et divisée à cette occasion en trois lots, dont le premier a été vendu par la suite.

[A] [V] [N] est décédé le [Date décès 9] 2000, en laissant pour lui succéder son épouse, Mme [F] [G], et leurs deux enfants, M. [K] [N] et Mme [S] [N] épouse [D].

Le 1er janvier 1992 (acte non produit), il avait donné le fonds de commerce en location-gérance à la société d'exploitation des anciens établissements [K] [N], dont son fils était associé majoritaire.

Par acte du 30 avril 2001, enregistré le 7 décembre 2004, ses héritiers ont réitéré ce contrat pour une durée de sept années, à compter du 1er janvier 2001 jusqu'au 31 décembre 2007, au profit de la même société, étant précisé que le fonds de commerce concédé en location-gérance est qualifié de fonds de commerce d''achat et vente de machines outils, d'articles de maroquinerie, d'accessoires de mode, de prêt-à-porter et de chaussures', comprenant les éléments suivants :

* la clientèle et l'achalandage ,

* le droit à l'usage des locaux dans lesquels est exploité le fonds de commerce,

* le matériel et le mobilier commercial servant à l'exploitation du fonds,

et ce, moyennant le paiement d'une redevance annuelle de 60 000 francs et avec stipulation d'une option d'achat au prix de 500 000 francs.

Le 22 février 2005, la société d'exploitation des anciens établissements [K] [N] a cédé, pour le prix de un euro, à la société Fun Mod, représentée par sa gérante, Mme [W] [T] épouse [U], l'intégralité de ses droits et obligations résultant du contrat de location-gérance du 30 avril 2001.

Le même jour, les héritiers de [A] [V] [N] ont vendu à la société Fun Mod le fonds de commerce d''achat et vente de machines-outils, d'articles de maroquinerie, d'accessoires de mode, de prêt-à-porter et de chaussures' pour le prix de 76 225 euros, dont 500 euros pour les seuls éléments corporels, en ce compris 'le droit à l'usage des locaux dans lesquels ledit fonds de commerce est exploité, ainsi que 'l'agencement, les installations et la matériel servant à l'exploitation dudit fonds de commerce, y compris le mobilier commercial'.

Par actes des 1er, 6, 13 et 21 février 2006, M. [H] [L], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de curateur de Mlle [B] [L], Mme [Z] [X] et Mme [B] [L] (les consorts [L]) ont fait assigner Mme [G] veuve [N], M. [K] [N] et Mme [S] [D] (les consorts [N]), ainsi que la société Fun Mod, devant le tribunal de grande instance de Paris, en ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision ayant existé entre [O] [N] veuve [L] et [A] [V] [N] et portant sur l'immeuble situé à [Localité 17], en licitation de cet immeuble et en expulsion de la société Fun Mod.

Par jugement du 19 octobre 2009, le tribunal a, pour l'essentiel :

- dit que l'immeuble d'[Localité 17] appartient en indivision aux consorts [L] pour 575/1100èmes et aux consorts [N] pour 525/1100èmes,

- ordonné qu'aux requête, poursuites et diligences des consorts [L], en présence des consorts [N] ou ceux-ci dûment appelés, il soit, par le président de la chambre interdépartementale des notaires de Paris, avec faculté de délégation, procédé aux opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision,

- commis le président du tribunal, avec faculté de délégation, aux fins de faire rapport sur l'homologation de l'état liquidatif s'il y a lieu,

- préalablement à ces opérations et afin d'y parvenir, commis M. [P] [I] en qualité d'expert, avec mission notamment de :

* déterminer la valeur vénale des lieux,

* rechercher s'ils sont ou non commodément partageables en nature, eu égard aux droits respectifs des parties, au besoin par division en locaux de propriété privative avec institution d'un régime de copropriété des parties communes,

* dans l'affirmative, composer, en vue du tirage au sort entre les coïndivisaires, autant de lots que nécessaire de valeur égale ou sensiblement égale, pouvant être compensée par des soultes en argent aussi réduites que possible,

* dans la négative, proposer des lots et mises à prix les plus avantageux en vue de la licitation et préciser notamment s'il paraît plus avantageux de vendre l'immeuble en un seul lot ou au contraire en plusieurs lots,

* dans l'un et l'autre cas, établir tous les états de division qui apparaîtront nécessaires et tous règlements de copropriété conformes aux lois et règlements en vigueur,

* donner son avis sur le montant des indemnités qui pourraient être dues en application de l'article 815-9 du code civil,

* déterminer et évaluer les charges afférentes au bien indivis, en distinguant, si nécessaire, celles relatives à l'exploitation du fonds de commerce,

* déterminer et évaluer les impenses effectuées par les consorts [N] sur le bien indivis,

- dit que la cession d'un droit à l'usage des locaux dans lesquels est exploité le fonds de commerce, ainsi que la vente des éléments incorporels [en réalité, les éléments corporels
1: Note de la cour.

] du fonds de commerce, intervenus par acte du 22 février 2005 au profit de la société Fun Mod, sont inopposables aux consorts [L],

- sursis à statuer sur les autres chefs de demandes, notamment sur la demande de licitation de l'immeuble, celle tendant au paiement d'une indemnité d'occupation ou d'une provision sur cette indemnité, ainsi que sur celle tendant à l'expulsion de la société Fun Mod,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- ordonné l'emploi des dépens en frais généraux de partage,

- dit qu'ils seront supportés par les coïndivisaires dans la proportion de leurs parts dans l'indivision et pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par les avocats qui en ont fait la demande.

Par ordonnance du 25 mai 2011, le juge de l'expropriation du tribunal de grande instance de Bobigny a déclaré expropriée, immédiatement pour cause d'utilité publique et au profit de la Sem [Localité 22] Commune Développement, la parcelle cadastrée section R n° [Cadastre 8] (la parcelle cadastrée section R n° [Cadastre 7] n'étant pas concernée par l'ordonnance).

Par déclaration du 27 septembre 2011, la société Fun Mod a interjeté appel du jugement du 19 octobre 2009.

Par ordonnance du 29 mai 2012, le magistrat chargé de la mise

en état a débouté les consorts [L] de leurs demandes tendant à ce que la désignation de M. [I] soit assortie de l'exécution provisoire, que la mission de l'expert soit modifiée afin de tenir compte de la décision du 25 mai 2011 et que les consorts [N] soient condamnés à leur payer une indemnité provisionnelle d'un montant de 300 000 euros à valoir sur l'indemnité d'occupation due pour la période comprise entre 2001 et 2010.

Dans ses dernières conclusions déposées le 15 octobre 2012, la société Fun Mod demande à la cour de :

- la recevoir en son appel,

- la déclarer bien fondée à soutenir que les consorts [N], en lui vendant leur fonds de commerce, le 22 février 2005, lui ont cédé tous les droits de jouissance sur les locaux cadastrés section R n° [Cadastre 7] et [Cadastre 8], ces droits étant opposables aux consorts [L],

- juger que la reconnaissance de ses droits opposables aux consorts [L] est un élément essentiel de la situation des parties en présence dans le litige et que, dans ces conditions, le jugement déféré, qui a estimé devoir statuer négativement sur ce point et faire en sorte que la procédure se poursuive, est infirmé en toutes ses dispositions,

- débouter les consorts [L] de toutes leurs demandes, particulièrement mal fondées, et les condamner aux entiers dépens, comprenant notamment les frais d'expertise, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans leurs conclusions déposées le 27 septembre 2012, les consorts [L] demandent à la cour de :

- recevoir la société Fun Mod en son appel,

- la déclarer mal fondée,

- la débouter de toutes ses demandes,

- confirmer le jugement déféré, notamment en ce qu'il a dit que la cession d'un droit à l'usage des locaux dans lesquels est exploité le fonds de commerce, ainsi que la vente des éléments incorporels du fonds de commerce, intervenus par acte du 22 février 2005 au profit de la société Fun Mod, leur sont inopposables,

- débouter Mmes [N] et [D] de leurs demandes tendant à voir dire que les consorts [N] sont propriétaires de l'intégralité de l'immeuble indivis et qu'elles sont propriétaires d'un bail commercial sur les biens,

- déclarer recevable leur appel incident,

- condamner in solidum les consorts [N] au paiement d'une somme de 1 609 107 euros au titre de l'indemnité d'occupation du 1er mai 2001 au 31 décembre 2010, ladite somme étant à parfaire au titre des indemnités d'occupation continuant à courir à compter du 1er janvier 2011,

- ordonner la licitation des lots n° 2 et 3 (d'une surface respective de 35 et 45 m²) de l'état descriptif de division de l'immeuble sis [Adresse 16] et cadastré section R n° [Cadastre 7], les dits lots étant vendus libres de toute occupation, à la barre du tribunal de grande instance de Paris, sur la mise à prix de 150 000 euros,

- dire que toute décote qui serait appliquée sur les biens expropriés sera à la charge exclusive des consorts [N],

- condamner in solidum la société Fun Mod et les consorts [N] au paiement d'une somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les consorts [N] aux entiers dépens comprenant notamment les frais d'expertise, avec bénéfice de l'article 699 du même code.

Dans leurs dernières conclusions déposées le 15 octobre 2012, Mmes [N] et [D] demandent à la cour de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,

- juger que l'ensemble immobilier appartient à Mme [N] et ses deux enfants, Mme [D] et M. [N], venant tous aux droits d'[A] [V] [N], et que les consorts [L] sont irrecevables et non fondés en leur action,

- subsidiairement, juger que [A] [V] [N] était titulaire d'un bail commercial verbal sur ces locaux depuis le 1er avril 1965,

- avant dire droit sur les conséquences à en tirer, désigner tel expert qu'il plaira à la cour à l'effet de chiffrer le valeur commerciale du droit au bail dont bénéficiait [A] [V] [N],

- sur les demandes des consorts [L],

- pour le cas où la cour déciderait d'user de son droit d'évocation, les mettre en mesure de conclure,

- à titre très subsidiaire,

- surseoir à statuer dans l'attente du rapport d'expertise à intervenir,

- à titre plus subsidiaire,

- débouter les consorts [L] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- en cas de condamnation à payer une indemnité d'occupation aux consorts [L], condamner la société Fun Mode à leur payer la somme de 1 351 981,29 euros sauf à parfaire,

- condamner les parties succombantes au paiement d'une somme de 5 000 euros à chacune d'elles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, avec bénéfice de l'article 699 du même code.

Régulièrement assigné, M. [K] [N] n'a pas constitué avocat.

SUR CE, LA COUR,

- sur la propriété de l'ensemble immobilier

Considérant que Mmes [N] et [D] ne peuvent sérieusement soutenir qu'elles-mêmes et M. [K] [N] ont acquis la propriété de l'ensemble immobilier par prescription acquisitive entre le 1er avril 1965 et le 30 mars 1995, dès lors que, dans l'acte de règlement de copropriété établi le 31 janvier 1984, il est expressément mentionné que [A] [V] [N] et les consorts [L] sont 'propriétaires conjointement et indivisément' de l'ensemble immobilier, de sorte que les conditions prévues à l'article 2229 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 17 juin 2008 et applicable en la cause, ne sont pas réunies ; que le jugement déféré doit être confirmé de ce chef ;

- sur l'opposabilité des actes du 22 février 2005 aux consorts [L]

Considérant qu'il résulte de l'acte du 1er avril 1965 que [M] [N] a donné à [A] [V] [N], outre la nue-propriété des 525/1100èmes indivis de l'immeuble situé [Adresse 16], la nue-propriété des éléments incorporels d'un fonds de commerce industriel d'achat et vente de machines outils exploité dans l'immeuble, à savoir la clientèle, l'achalandage et le nom commercial, à l'exclusion du matériel et du stock de marchandises et donc des éléments corporels du fonds ;

Que, si [M] [N] s'est obligée à consentir à [A] [V] [N] un 'bail gérance', ce dont il se déduit de plus fort que le droit au bail n'était pas inclus dans la donation-partage, force est de constater que la preuve de la conclusion effective d'un tel 'bail gérance', fût-il verbal, n'est rapportée par aucun élément, de sorte que, si [A] [V] [N] a usé des locaux commerciaux, c'est en qualité d'indivisaire et non de locataire ;

Considérant qu'à la suite du décès de [M] [N], [A] [V] [N] est devenu propriétaire indivis de l'ensemble immobilier et propriétaire des éléments incorporels du fonds de commerce d'achat et vente de machines outils, en ce compris la clientèle, l'achalandage et le nom commercial, à l'exclusion du droit au bail et des éléments corporels ;

Considérant que, dès lors, en s'en tenant au seul acte du 30 avril 2001 en l'absence de production de l'acte du 1er janvier 1992, les consorts [N], héritiers de [A] [V] [N], n'ont pu valablement donner en location-gérance à la société d'exploitation des anciens établissements [K] [N], sans le consentement des consorts [L], leurs coïndivisaires, le fonds de commerce en ce qu'il comprenait 'le droit à l'usage des locaux dans lesquels est exploité le fonds de commerce', ainsi que 'le matériel et le mobilier commercial servant à l'exploitation du fonds', éléments qu'ils ne détenaient pas plus que leur auteur ;

Que, par voie de conséquence, la société d'exploitation des anciens établissements [K] [N] n'a pu valablement céder à la société Fun Mod le droit à usage des locaux, ainsi que le matériel et le mobilier commercial, au titre de ses droits et obligations résultant du contrat de location-gérance du 30 avril 2001 ;

Que, de même, les consorts [N] n'ont pu valablement vendre à la société Fun Mod, sans le consentement des consorts [L], leurs coïndivisaires, le fonds de commerce en ce qu'il comprenait 'le droit à l'usage des locaux dans lesquels ledit fonds de commerce est exploité, ainsi que 'l'agencement, les installations et la matériel servant à l'exploitation dudit fonds de commerce, y compris le mobilier commercial' ;

Considérant au surplus qu'il doit être relevé que ces actes ont porté sur un fonds de commerce d''achat et vente de machines outils, d'articles de maroquinerie, d'accessoires de mode, de prêt-à-porter et de chaussures', par conséquent sur un fonds dont l'activité a été sensiblement étendue, sans que l'autorisation des consorts [L], copropriétaires indivis de l'immeuble, n'ait été sollicitée, étant observé de surcroît qu'il ressort du procès-verbal de constat dressé les 20, 24 et 25 février 2003

à la requête des consorts [L] que le fonds était inexploité à cette époque ;

Considérant que, dans ces conditions, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que la cession d'un droit à l'usage des locaux dans lesquels est exploité le fonds de commerce, ainsi que, nonobstant la référence erronée aux éléments 'incorporels', la vente des éléments corporels du fonds de commerce, intervenus par acte du 22 février 2005 au profit de la société Fun Mod, étaient inopposables aux consorts [L] par application des dispositions de l'article 815-3 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006 et applicable en la cause ;

- sur l'évocation

Considérant qu'il résulte de l'article 568 du code de procédure civile que, lorsque la cour d'appel est saisie d'un jugement qui a ordonné une mesure d'instruction, elle peut évoquer les points non jugés si elle estime de bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive, après avoir ordonné elle-même, le cas échéant, une mesure d'instruction ;

Considérant en l'espèce que les consorts [L] demandent à la cour d'évoquer les questions relatives au paiement d'une indemnité d'occupation par les consorts [N] et à la licitation des lots n° 2 et 3 de l'ensemble immobilier ;

Considérant cependant que la cour relève qu'elle est saisie d'un jugement ayant notamment ordonné une mesure d'instruction qui n'a pas encore donné lieu au dépôt d'un rapport définitif et que tant la société Fun Mod que les consorts [N] n'ont pas conclu sur les points susceptibles d'évocation ;

Qu'en cet état, et étant rappelé que l'évocation a pour effet de supprimer la règle de principe du double degré de juridiction, la cour estime qu'il ne serait pas de bonne justice d'évoquer les points non jugés par le tribunal ;

PAR CES MOTIFS :

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré, sauf à préciser, rectifiant une erreur purement matérielle, que c'est la vente des éléments corporels du fonds de commerce au profit de la société Fun Mod et non celle de ses éléments incorporels qui est inopposable aux consorts [L],

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mmes [N] et [D], les condamne à verser aux consorts [L] la somme de 5 000 euros et condamne la société Fun Mod à verser aux consorts [L] la somme de 8 000 euros,

Rejette toutes autres demandes,

Partage les dépens par moitié entre, d'une part, la société Fun Mod, d'autre part, les consorts [N],

Accorde à l'avocat postulant des consorts [L] le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 11/17354
Date de la décision : 05/12/2012

Références :

Cour d'appel de Paris E1, arrêt n°11/17354 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-12-05;11.17354 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award