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16/11/2012 | FRANCE | N°10/19711

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 2, 16 novembre 2012, 10/19711


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 2



ARRÊT DU 16 NOVEMBRE 2012



(n° 2012- , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/19711



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mai 2010 -Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG n° 09/00581



PARTIES INTERVENANTES VOLONTAIRES ET COMME TELLES APPELANTES:



Madame [M] [V]

es-qualité d'ayant droit

de Monsieur [L] [F] [X] [V], décédé le [Date décès 1]



Madame [I] [V] [Y]

es-qualité d'ayant droit de Monsieur [L] [F] [X] [V], décédé le [Date décès 1]



représentées par la SCP LET...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2

ARRÊT DU 16 NOVEMBRE 2012

(n° 2012- , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/19711

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mai 2010 -Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG n° 09/00581

PARTIES INTERVENANTES VOLONTAIRES ET COMME TELLES APPELANTES:

Madame [M] [V]

es-qualité d'ayant droit de Monsieur [L] [F] [X] [V], décédé le [Date décès 1]

Madame [I] [V] [Y]

es-qualité d'ayant droit de Monsieur [L] [F] [X] [V], décédé le [Date décès 1]

représentées par la SCP LETU- ITTAH -PIGNOT-ASSOCIES (Me Jean-Jacques LETU) (avocats au barreau de PARIS, toque : P0120)

assistées de Maître Patrice ITTAH, avocat au barreau de PARIS, toque P 120, plaidant pour la SCP LETU-ITTAH-PIGNOT ET ASSOCIES

INTIMÉE:

S.A.S. CLINEA, représentant LA CLINIQUE [6]

prise en la personne de ses représentants légaux.

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS (Maître Frédéric INGOLD avocat au barreau de PARIS, toque : B1055)

assistée de Maître Clarence SAUTERON, avocat au barreau de PARIS, toque C 1311

COMPOSITION DE LA COUR :

Madame Marie-Sophie RICHARD ayant été préalablement entendue en son rapport dans les conditions de l'article 785 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Octobre 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Anne VIDAL, Président de chambre

Françoise MARTINI, Conseillère

Marie-Sophie RICHARD, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Guénaëlle PRIGENT

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Anne VIDAL, Présidente et par Guénaëlle PRIGENT, Greffier.

***

[L] [V], né le [Date naissance 3] 1926, a été amené le 14 octobre 2007 au service des urgences de l'hôpital [7] où il a passé un scanner révélant la survenue d'un AVC hémorragique.

Il a été transféré le lendemain à la Clinique [6] pour la prise en charge de cet AVC.

En état de choc et dans un moment de confusion il a fugué de cet établissement la nuit, a été retrouvé blessé à la jambe et au front et transféré aux urgences de l'hôpital de [Localité 9], avant de réintégrer la clinique [6] en fin de journée.

Il a ensuite été transféré à l'hôpital [7] le 17 octobre et y est demeuré jusqu'au 31 octobre 2007.

Le 5 décembre 2008, [L] [V] a assigné la clinique en réparation de son préjudice sur le fondement de l'article 1147 du code civil et de l'article L 1142-1 du code de la santé publique pour défaut de surveillance fautif de l'établissement de santé.

Par jugement du 28 mai 2010, le tribunal de grande instance d'Evry a :

-Débouté [L] [V] de ses demandes en retenant que l'établissement de santé, tenu en sa qualité d'établissement de soins à une obligation de sécurité de moyens au regard de l'état des patients qu'il héberge, n'avait pas commis de manquement à son obligation de sécurité et de surveillance,

-Condamné [L] [V] à payer à la société CLINEA la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

[L] [V] qui a interjeté appel de cette décision par déclaration du 7/10/2010 est décédé le [Date décès 1] 2012 .

Son épouse et sa fille qui ont présenté des conclusions d'intervention volontaire le 4 avril 2012 demandent à la cour d'infirmer le jugement et de:

-Constater que la clinique [6] aux droits de laquelle vient la société CLINEA a commis une faute caractérisée par un défaut de surveillance du patient lors de son hospitalisation dans l'établissement les 15,16 et 17 octobre 2007,

-Déclarer la clinique [6] aux droits de laquelle vient la société CLINEA responsable des conséquences dommageables subies par M [V],

-Condamner la société CLINEA à payer à Mme [M] [V] et à Mme [I] [V], es qualité d'ayants droit, la somme de 8 000 euros au titre de la réparation du préjudice subi par [L] [V] et la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Elles soutiennent que:

- [L] [V] hospitalisé à la suite d'un AVC le 15 octobre 2007 à la clinique [6] manifestait des troubles du comportement dès son arrivée, qu'il avait notamment arraché sa perfusion à deux reprises à 19H et 20H et manifesté un comportement agressif pendant la nuit de sorte qu'il aurait du être surveillé et que l'absence de surveillance lui a permis de s'enfuir de l'hôpital et est à l'origine de sa chute et de ses blessures;

-[L] [V] avait manifesté un comportement agressif dès son arrivée à la clinique puisqu'il refusait son hospitalisation, que des mesures auraient dues être prises comme de prévoir une contention dans son lit ou son fauteuil ou l'administration d'un sédatif;

-les défauts de surveillance ont été réitérés le lendemain, [L] [V] ayant fait une chute dans la salle de bains, qu'enfin la clinique a manqué à son devoir d'informer la famille puisque son épouse a été prévenue tardivement de sa disparition lorsqu'elle a elle-même contacté la clinique le lendemain;

-la clinique, consciente de la défaillance de son dispositif de contrôle des entrées et sorties, a renforcé ce dispositif après l'accident.

Dans ses conclusions signifiées le 18 septembre 2012 la clinique demande la confirmation du jugement en ce qu'il a jugé que la société CLINEA venant aux droits de la clinique [6] n'avait pas commis de manquement à son obligation de sécurité et de surveillance et que sa responsabilité ne saurait être engagée ainsi que la condamnation solidaire de Mesdames [I] et [M] [V] à lui verser la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Elle soutient pour l'essentiel que :

-en application de l'article L 1142-1 du code de la santé publique, l'obligation de l'établissement de santé en matière de sécurité est une obligation de moyens et les héritières de [L] [V] ne prouvent pas en l'espèce que la clinique n'a pas pris toutes les dispositions de surveillance qui s'imposaient en fonction de l'état du patient qui était parfaitement calme à son arrivée dans le service lors de son examen par le Dr [G];

-lorsque [L] [V] est devenu agité vers 4H du matin, le médecin de garde a été prévenu immédiatement par l'infirmière qui avait recouché le malade et est arrivé en quelques minutes qui malheureusement ont suffi à M [V] pour s'enfuir;

-constatant sa disparition, le personnel s'est mis immédiatement à sa recherche et le commissariat a été prévenu très rapidement;

- son épouse a été avertie dès 8h du matin lorsqu'elle a téléphoné pour prendre de ses nouvelles,

-en ce qui concerne le dispositif de contrôle des entrées et sorties: l'enceinte est grillagée et l'entrée et la sortie se font par deux portails véhicules et piétons fermés de 20H à 6H45 et il semble au vu du rapport de police que [L] [V] aurait escaladé le grillage ce qui expliquerait sa blessure à la jambe et à la tête;

-enfin, la preuve d'une chute postérieure dans les toilettes n'est pas établie, ni le préjudice en résultant.

SUR CE:

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L 1142-1 du code de la santé publique, la preuve du non-respect par l'établissement de soins de son obligation de moyens de sécurité et de surveillance des patients hospitalisés en son sein incombe au patient ou à ses ayants-droits et qu'il appartient en conséquence aux héritières de [L] [V] d'établir l'existence d'une défaillance de la clinique [6] représentée par la société CLINEA, constitutive d'une faute à l'origine de la fugue et des blessures de [L] [V];

Qu'en outre l'étendue de l'obligation de surveillance varie en fonction de l'état du patient et doit être renforcée lorsque l'état du malade exige des diligences particulières;

Qu'en l'espèce, il résulte de l'ensemble des pièces versées aux débats et notamment du résumé de son passage aux urgences de l'hôpital [7] le 14 octobre, du compte rendu d'observation médicale de la Clinique [6] en date des 15 et 16 octobre ainsi que de la feuille de 'soins-transmissions' que [L] [V] , victime d'un AVC, semblait désorienté dans l'espace et le temps mais n'était pas agité avant la fin de la journée du 15 octobre où il a arraché sa perfusion vers 20H30, que son état n'exigeait cependant pas alors des diligences particulières telles que la mise en place d'une surveillance constante ,des mesures de contention ou l'administration d'un sédatif;

que vers 4H du matin lorsqu'elle a constaté que [L] [V] avait quitté sa chambre, errait dans les couloirs de la clinique et devenait très agité et agressif, l'infirmière de garde, après avoir recouché le patient, a immédiatement appelé le médecin qui est arrivé en quelques minutes et a constaté la disparition de [L] [V];

que la clinique a ainsi accompli toutes les diligences de surveillance qui s'imposaient en fonction de l'état de [L] [V];

Qu'en outre, les circonstances de la fugue et notamment la mention par le commissariat d'une chute d'environ trois mètres résultant probablement de l'escalade par [L] [V] d'une enceinte grillagée de la clinique ne permettent pas davantage de retenir une faute liée à une défaillance éventuelle du dispositif d'entrées et de sorties de la clinique qui en tant qu'établissement de gériatrie ne peut se voir imposer un dispositif renforcé comparable à celui d'un hôpital psychiatrique et alors qu'il résulte au surplus de l'ensemble des attestations du personnel que les portes d'accès à la clinique sont fermées à partir de 20H30;

Qu'enfin les circonstances de la chute du 16 octobre dans la salle de bains invoquée par Mme [V] et le préjudice qui en serait résulté ne sont pas établis, pas plus que l'existence d'un préjudice personnel de M [V] consécutif à l'information prétendument tardive donnée à son épouse;

Qu'il convient en conséquence de débouter Mesdames [M] et [I] [V] de l'ensemble de leurs demandes et de confirmer le jugement en toutes ses dispositions;

Considérant que l'équité commande de condamner Mesdames [M] et [I] [V] à payer à la société CLINEA la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Considérant que succombant en leur appel , Mesdames [M] et [I] [V] devront supporter les dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement , par décision contradictoire;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions;

Et y ajoutant,

Condamne Mesdames [M] et [I] [V] à payer à la société CLINEA la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne Mesdames [M] et [I] [V] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 10/19711
Date de la décision : 16/11/2012

Références :

Cour d'appel de Paris C2, arrêt n°10/19711 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-11-16;10.19711 ?
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