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07/06/2012 | FRANCE | N°11/01162

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 07 juin 2012, 11/01162


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 07 Juin 2012

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/01162



Décision déférée à la Cour : Après Cassation le 30 septembre 2010 suite à arrêt rendu le 12 juin 2008 par la 22ème Chambre C de la Cour d'Appel de PARIS, sur appel d'un jugement du Conseil de prud'hommes de BOBIGNY section activités diverses en date du 20 janvier 2006 RG n° 03/02878



APP

ELANT

Monsieur [F] [B]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Barbara VRILLAC, avocat au barreau de SENLIS



INTIMEE

SNC FALCON TR...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 07 Juin 2012

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/01162

Décision déférée à la Cour : Après Cassation le 30 septembre 2010 suite à arrêt rendu le 12 juin 2008 par la 22ème Chambre C de la Cour d'Appel de PARIS, sur appel d'un jugement du Conseil de prud'hommes de BOBIGNY section activités diverses en date du 20 janvier 2006 RG n° 03/02878

APPELANT

Monsieur [F] [B]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Barbara VRILLAC, avocat au barreau de SENLIS

INTIMEE

SNC FALCON TRAINING CENTER

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Yves LEBEAU, avocat au barreau de SEINE SAINT DENIS, toque : B 212

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 Avril 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine METADIEU, Présidente

Monsieur Louis-Marie DABOSVILLE, Conseiller

M. Julien SENEL, Vice-Président placé sur ordonnance du Premier Président en date du 30 novembre 2011

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Mme Catherine METADIEU, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. [B], engagé par la SNC Falcon Training Center en 1993 en qualité d'agent de maîtrise était titulaire de divers mandats représentatifs depuis 1996.

En 2002, il a postulé pour un poste de cadre nouvellement créé.

Les parties ont signé, le 4 octobre 2002, un avenant à son contrat de travail prévoyant une période probatoire de six mois avec retour à ses fonctions antérieures en cas de rupture à l'initiative de l'une ou de l'autre des parties.

Le 13 mars 2003, la société a mis fin à la période probatoire et a réintégré M. [B] dans ses anciennes fonctions.

C'est dans ces conditions que M. [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny aux fins d'obtenir outre sa réintégration au poste de responsable du service achats et logistique, des rappels de salaires y compris au titre d'heures supplémentaires, des dommages-intérêts pour déqualification, la prime de fonction.

Par un jugement du 20 janvier 2006, le conseil de prud'hommes de Bobigny, section activités diverses, statuant en départage a débouté M. [B] de l'ensemble de ses prétentions et rejeté la demande d'indemnité formulée par la société au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant un arrêt du 12 juin 2008, la cour d'appel de Paris, statuant sur l'appel interjeté par M. [B], a confirmé le jugement déféré.

Par un arrêt du 30 septembre 2010, la Cour de Cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris, remis en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel de Paris autrement composée.

M. [B] demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, de déclarer nulle la décision de la SNC Falcon Training Center en date du 13 mars 2003, d'ordonner sa réintégration dans son statut cadre au coefficient 125 et ce, sous astreinte de 500 € par jour de retard.

Il sollicite également la condamnation de la SNC Falcon Training Center à lui verser les sommes suivantes :

- 63 786,51 € à titre de rappel de salaire,

- 6378,65 € au titre des congés payés afférents,

- 90 000 € à titre de dommages et intérêts,

- 4641 € à titre de rappel d'heures supplémentaires,

- 464,10 € au titre des congés payés afférentes aux heures supplémentaires.

Il entend voir ordonner à la SNC Falcon Training Center de lui remettre sous astreinte de 100 € par jour de retard des bulletins de salaire rectifiés de mars 2003 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir et ainsi que la condamnation de la SNC Falcon Training Center à lui verser une indemnité de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il demande qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par l'arrêt à intervenir et en cas d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 soient supportées par le défendeur.

La SNC Falcon Training Center conclut à la confirmation du jugement déféré. À titre subsidiaire, elle demande que la cour d'appel, en cas de réintégration du salarié limite à la somme de 38 414,91 € sa condamnation au titre du rappel de salaire. Elle s'oppose à la demande de dommages et intérêts et réclame une indemnité de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens développés, aux conclusions respectives des parties, visées par le greffier et soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIFS :

Sur la demande tendant à prononcer la nullité de la décision rendue par la SNC Falcon Training Center le 13 mars 2003, et à ordonner sa réintégration

Aux termes de l'article 2 de l'avenant du 4 octobre 2002 prévoyant la promotion du salarié au statut de cadre en qualité de responsable du service achats et logistique, la SNC Falcon Training Center et M. [B] se sont accordés sur le principe d'une période probatoire de six mois avec le retour du salarié à ses fonctions antérieures pour le cas où il ne donnerait pas satisfaction au cours de cette période.

Le 13 mars 2003, la SNC Falcon Training Center a mis fin à la période probatoire de M. [B] et lui a notifié qu'à l'issue de la période du préavis de 15 jours commençant à la date de présentation de la lettre, il était invité à « reprendre le poste de responsable approvisionnement niveau V, échelon 1, coefficient 305, au salaire brut mensuel de 2191,10 € auxquels s'ajouteraient une prime d'ancienneté de 297,19 € », ce que M. [B] a refusé en soutenant, à bon droit, qu'en sa qualité de salarié protégé, l'employeur ne pouvait lui imposer sa réintégration nonobstant une clause probatoire.

En effet, les dispositions légales qui assurent une protection exceptionnelle et exorbitante du droit commun à certains salariés, en raison du mandat ou des fonctions qu'ils exercent dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs, s'appliquent à la modification des conditions de travail du salarié à l'initiative de l'employeur pendant une période probatoire. Dans ces conditions, la décision de replacer le salarié dans ses fonctions antérieures constituait une modification des conditions de travail ne pouvant être imposée au salarié protégé. En cas de refus de celui-ci, il appartenait à l'employeur, soit de le maintenir sur le nouveau poste, soit de saisir l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation administrative de licenciement.

En raison du refus de M. [B], salarié protégé, de reprendre le poste de responsable approvisionnement qu'il occupait avant la signature de l'avenant du 4 octobre 2002, et à défaut pour l'employeur d'avoir saisi l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation administrative de licenciement, la SNC Falcon Training Center devait maintenir M. [B] sur le nouveau poste.

La décision de l'affecter de nouveau à ses fonctions antérieures n'est pas valide, en l'absence d'accord du salarié.

La réintégration de M. [B] au poste de cadre coefficient 125, sera en conséquence, ordonnée.

Une astreinte provisoire de 100 euro par jour de retard passé un délai de huit jours après la notification du présent arrêt sera prononcée.

Le jugement déféré sera en conséquence infirmé sur ce point.

Sur la demande de rappel de salaire

M. [B] fait valoir qu'il aurait dû percevoir le salaire de responsable achats-logistique et voir son coefficient évoluer conformément aux dispositions de l'article 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, qu'une négociation de salaire est d'ailleurs intervenue tous les ans au mois de mai au sein de la société et qu'il en est résulté une augmentation de salaire de 1 % au 1er mai 2005, 1,3 % au 1er mai 2006, 1,3 % au 1er mai 2007 et 1,5 % au 1er mai 2008, qu'il aurait également dû percevoir à compter d'avril 2003 une prime de 260 € outre une augmentation de 265 €, qu'enfin sa carrière aurait évolué et qu'il devait connaître une évolution du coefficient de 108 du 1er avril 2003 au 31 mars 2006, à 114 du 1er avril 2006 au 30 mars 2009, puis à 120 du 1er avril 2009 au 30 mars 2012 et enfin à 125 à compter du 1er avril 2012.

La SNC Falcon Training Center soutient, avec pertinence, que ce faisant, M. [B] ne prend pas en compte l'évolution de son salaire d'agent de maîtrise à compter du 1er avril 2003, qu'il a ainsi perçu pour toute la période du 1er avril 2003 au 30 avril 2012 une rémunération globale de 316 226,86 € alors qu'il aurait perçu comme cadre la somme globale de 354 641,59 €, que le différentiel devant correspondre au rappel de salaire s'élève à la somme de 38 414,91 €.

La SNC Falcon Training Center sera condamnée à verser à M. [B] la somme de 38 414,91 € outre celle de 3841,49 € au titre des congés payés afférents.

Sur la demande de dommages-intérêts,

Il résulte des circonstances de l'espèce que le statut protecteur de M. [B] a effectivement été violé, ce qui lui a causé à tout le moins un préjudice moral certain.

Il fait valoir avoir subi des mesures vexatoires passant par la modification de son bureau, le refus de ses congés, ce dont il justifie par les pièces produites aux débats.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, du retentissement des agissements de l'employeur à son égard et de la perte de chance d'avoir des revenus supérieurs au cours des années de contentieux et le train de vie en résultant, la cour dispose d'éléments suffisants pour fixer à la somme de 30 000 € le montant des dommages-intérêts à revenir au salarié en réparation des préjudices ainsi subis.

Sur la demande de rappel au titre des heures supplémentaires,

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Il incombe au salarié qui demande le paiement d'heures supplémentaires de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Au soutien de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, M. [B] communique au débat des tableaux hebdomadaires de ses horaires établis par lui.

Ces tableaux sont de nature à étayer sa demande.

La SNC Falcon Training Center réplique qu'en matière d'heures supplémentaires, l'accord sur la réduction du temps de travail a été négocié avec les syndicats et signé par M. [B] lui-même en qualité de délégué syndical CGT le 21 février 2002, qu'il a été convenu que les heures supplémentaires conservaient un caractère exceptionnel et limité, qu'elles devaient faire l'objet d'un accord préalable auprès de la hiérarchie, qu'elles seraient comptabilisées par les responsables des services et payées selon la convention collective en vigueur, qu'au surplus elles devaient être signalées à la hiérarchie a posteriori et dans un délai maximum de 24 heures en semaine et de 48 heures le week-end, que M. [B] n'a fourni aucune demande de paiement d'heures supplémentaires dans les délais prévus en application de l'accord signé par les représentants syndicaux et par lui en particulier.

L'employeur communique au surplus au débat l'attestation de M. [U], supérieur hiérarchique de M. [B] qui témoigne de ce que celui-ci n'a jamais sollicité d'effectuer des heures supplémentaires.

Au regard des explications fournies par l'employeur et à raison du non-respect par M. [B] des dispositions prévues par l'accord négocié avec les syndicats s'agissant de l'obligation de signaler les heures supplémentaires effectuées dans le délai maximum de 24 heures en semaine et de 48 heures le week-end, la cour a la conviction que M. [B] n'a pas effectué les heures supplémentaires qu'il évoque et ne fera pas droit à sa demande.

Sur la demande de remise de bulletins de salaire rectifiés,

Compte tenu de la réintégration de M. [B] au poste de cadre, la demande de délivrance de bulletins de salaires rectifiés pour la période de mars 2003 à avril 2012 est légitime. Il y sera fait droit.

Aucune astreinte ne sera pour autant ordonnée à présent, le juge compétent en matière d'exécution forcée pouvant être saisi en cas d'inexécution par la SNC Falcon Training Center des obligations mises à sa charge par le présent arrêt.

De même, la juridiction compétente en matière d'exécution forcée des décisions judiciaires pourra être utilement saisie en cas de défaut de règlement spontané des condamnations prononcées. Il n'y a pas lieu de prévoir l'application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 dès à présent.

Sur la demande d'indemnité en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

L'équité commande d'accorder à M. [B] une indemnité de 3000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés par lui au soutien de certaines de ses prétentions reconnues par la cour comme étant légitimes.

PAR CES MOTIFS,

Statuant contradictoirement et publiquement, sur renvoi de la Cour de cassation,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [B] de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Ordonne la réintégration de M. [B] au poste de cadre coefficient 125, sous astreinte provisoire de 100 € par jour de retard, passé un délai de huit jours après la notification du présent arrêt,

Condamne la SNC Falcon Training Center à verser à M. [B] les sommes suivantes:

- 38 414,91 € à titre de rappel de salaire, au 30 avril 2012,

- 3841,49 € au titre des congés payés afférents,

- 30 000 € à titre de dommages et intérêts pour les préjudices subis,

- 3000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonne la délivrance de bulletins de salaires conformes aux dispositions du présent arrêt, à compter du mois de mars 2003,

Déboute M. [B] de ses demandes d'astreinte au titre de la remise des bulletins de salaires rectifiés et de l'application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2011 portant modification du décret du 12 décembre 1996,

Condamne la SNC Falcon Training Center aux entiers dépens.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 11/01162
Date de la décision : 07/06/2012

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°11/01162 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-06-07;11.01162 ?
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