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31/05/2012 | FRANCE | N°11/14610

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 31 mai 2012, 11/14610


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 8



ARRET DU 31 MAI 2012



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/14610



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Juillet 2011 -Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG n° 10/07317





APPELANTE



CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE agissant poursuites et diligences en la personne de ses re

présentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 2]



Rep/assistant : la SCP DUBOSCQ-PELLERIN en la personne de Me Jacques PELLERIN , avocats au barreau de PARIS (toque : L0018)





INT...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 8

ARRET DU 31 MAI 2012

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/14610

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Juillet 2011 -Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG n° 10/07317

APPELANTE

CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 2]

Rep/assistant : la SCP DUBOSCQ-PELLERIN en la personne de Me Jacques PELLERIN , avocats au barreau de PARIS (toque : L0018)

INTIMES

Maître [R] [U] notaire associé de la SCP [E] [G] [U] COURANT LETROSNE

Hôtel du Poet [Adresse 9]

[Localité 5]

Rep/assistant : la SCP Jeanne BAECHLIN en la personne de Me Jeanne BAECHLIN , avocats au barreau de PARIS (toque : L0034)

Monsieur [B], [I], [S] [M]

et

Madame [L] [F] épouse [M]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentés par la SCP LAGOURGUE - OLIVIER en la personne de Me Charles-Hubert OLIVIER , avocats au barreau de PARIS (toque : L0029)

Assistés de Me Pascaline DUPUY plaidant pour le cabinet de Me Bertrand CAYOL , avocats au Barreau de Paris (toque C140)

SCP [E] [G] [U] COURANT LETROSNE

[Adresse 9]

[Localité 5]

Rep/assistant : la SCP Jeanne BAECHLIN en la personne de Me Jeanne BAECHLIN , avocats au barreau de PARIS (toque : L0034)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 Avril 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Alain CHAUVET, Président

Madame Martine HORNECKER, Conseillère

Madame Hélène SARBOURG, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Chaadia GUICHARD

ARRET CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile

- signé par Monsieur Alain CHAUVET, président et par Madame Cécilia GALANT, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par jugement du 12 juillet 2011 auquel la Cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le Juge de l'Exécution du tribunal de grande instance d'EVRY a :

- déclaré recevable la contestation de Monsieur et Madame [M] formée par acte du 05 juillet 2010 et dénoncé à l'Huissier poursuivant par lettre recommandée avec avis de réception du même jour,

- s'est déclaré compétent pour statuer sur les contestations élevées sur le caractère exécutoire de l'acte notarié du 10 décembre 2002,

- rejeté les demandes de sursis à statuer de la banque et des notaires,

- ordonné la mainlevée de la saisie attribution pratiquée le 09 juin 2010 par la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST entre les mains de la Société SGCR au préjudice de Monsieur et Madame [M],

- débouté Monsieur et Madame [M] de leur demande de dommages-intérêts,

- déclaré le présent jugement commun et opposable à Maître [R] [U], notaire associé, et à la SCP [E] [G] [U] [W] [Y], notaires,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- rappelé que la présente décision est exécutoire de plein droit par provision,

- condamné le CREDIT MUTUEL aux entiers dépens, en ce compris les frais de mainlevée de la saisie attribution objet du litige.

La CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST a relevé appel du jugement par déclaration reçue au Greffe de la Cour le 02 août 2011.

Vu les dernières conclusions du 14 mars 2012 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments, par lesquelles la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST demande à la Cour de :

- déclarer l'appel de la Banque recevable,

- se déclarer incompétente pour statuer sur les demandes présentées,

- débouter Monsieur et Madame [M] de leurs demandes, fins et conclusions,

- les déclarer irrecevables et subsidiairement mal fondés,

- dire notamment qu'il n'existe aucune sanction au défaut d'annexion des procurations,

- constater que Monsieur et Madame [M] ne contestent pas leur titre de propriété passé avec la même procuration et dans les mêmes conditions,

- sommation leur est faite de communiquer leur état réel d'endettement avec la date des encours et de verser aux débats leur déclaration d'impôt et avis d'imposition depuis l'octroi du prêt accordé par la Banque,

- réformer le jugement de première instance dans toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne la validité de la saisie et l'intervention des notaires,

- condamner Monsieur et Madame [M] au paiement de la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, outre 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance et procédure abusive et dilatoire, ainsi qu'aux entiers dépens,

- débouter les notaires de leurs demandes, fins et conclusions, sauf en ce qui concerne la validité du titre,

- en tout état de cause, condamner solidairement tout succombant à payer au CREDIT MUTUEL la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Vu les dernières conclusions du 06 octobre 2011 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de leurs moyens et arguments, par lesquelles la SCP RAYBAUDON - [G] - [U] - [W] - [Y] et Maître [R] [U] demandent à la Cour de :

- dire qu'il appartient aux demandeurs à la critique de préciser :

' l'acte critiqué entre la minute et la copie exécutoire,

' la qualification juridique de la critique (nullité, inscription de faux, inopposabilité, déchéance...)

' la qualification juridique et la conséquence qu'ils en tirent,

- dire que les textes spéciaux applicables aux actes notariés (Décret 71-9541) dérogent aux textes généraux visant tous les actes authentiques (article 1318 du Code Civil),

- se déclarer incompétent rationae materiae pour statuer sur les critiques de l'acte notarié original déposé en minute et qui ne constitue pas le titre exécutoire en vertu duquel est effectué la voie d'exécution et tel que défini par les articles du Décret de 1961,

- dire que l'article L.213-6 alinéa 3 du Code de l'Organisation Judiciaire limite les compétence du Juge de l'Orientation par rapport aux compétences du Juge de l'Exécution générales de l'alinéa 1 du même texte,

- dire que la contestation de la régularité d'un acte authentique, produit à titre de preuve littérale par la banque au soutien de son exécution, constitue une demande incidente de faux,

- dire qu'à peine d'irrecevabilité, ces contestations doivent être soumises au tribunal de grande instance de détention de la minute dans les conditions de l'article 314 et suivants du Code de Procédure Civile,

- surseoir à statuer sur la demande principale, soit par application de l'article 1319 du Code Civil, soit en application de l'article 313 du Code de Procédure Civile,

- dire qu'à défaut de respecter cette procédure, les investissements seront déboutés de leurs critiques touchant à la validité de la copie exécutoire, preuve littérale produite par la Banque, par application de l'article 313 alinéa 2 du Code de Procédure Civile,

- dire que les critiques contre la validité des actes notariés s'assimilent à celles régies par l'article 1304 du Code Civil et les déclarer prescrites par l'écoulement du délai de cinq ans depuis sa date et son commencement d'exécution,

- dire qu'aucun texte n'oblige à joindre la photocopie des annexes aux copies exécutoires délivrées par les notaires,

- débouter, par conséquent, tout prétendant à la perte du caractère exécutoire des actes délivrés en copie aux parties pour défaut de jonction des annexes,

- subsidiairement, se dessaisir en l'état de la connexité et par application de l'article 101 du Code de Procédure Civile au profit de la juridiction de fond, soit le tribunal de grande instance de MARSEILLE,

- encore plus subsidiairement, vu les dispositions des articles 378 du Code de Procédure Civile et 4 du Code de Procédure Pénale, surseoir à statuer dans la présente instance jusqu'à ce que la juridiction pénale se soit prononcée définitivement sur les faits dénoncés,

- condamner la partie succombante aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions du 12 Mars 2012 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de leurs moyens et arguments, par lesquelles Monsieur et Madame [M] demandent à la Cour de :

- constater que l'appelante ne justifie pas avoir relevé appel dans les délais impartis (15 jours),

- vu l'article 66 du Décret du 31 juillet 1992, confirmer que la contestation formée par Monsieur et Madame [M] est régulière en la forme, conformément aux dispositions de l'article 66 dudit décret,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il ordonne la mainlevée de la mesure de saisie attribution faute de titre exécutoire valable et partant du défaut d'annexion des procurations à l'acte de prêt,

- débouter Maître [U], la SCP [E] - [G] - [U] - [W] - [Y] de leurs prétentions nouvelles au visa de l'article 564 du Code de Procédure Civile,

- débouter la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST et la SCP [E] - [G] - [U] - [W] - [Y] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- en conséquence, confirmer la mainlevée immédiate de la saisie attribution pratiquée au préjudice de Monsieur et Madame [M] le 09 juin 2010,

- en tant que de besoin, ordonner la mise à disposition immédiate des fonds au profit de Monsieur et Madame [M] ,

- à titre subsidiaire, si par extraordinaire la Cour d'appel de céans venait à remettre en cause le fondement de la décision dont appel, dire que la saisie pratiquée au préjudice de Monsieur et Madame [M] est nulle et de nul effet faute de présentation du titre exécutoire, conformément à l'article 502 du Code de Procédure Civile,

- en conséquence, ordonner la mainlevée immédiate de la saisie attribution pratiquée au préjudice de Monsieur et Madame [M],

- en tant que de besoin, ordonner la mise à disposition immédiate des fonds à leur profit,

- à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la Cour d'appel de céans venait à remettre en cause le fondement du jugement dont appel et devait ne pas retenir l'irrégularité de la mesure de saisie faute de respect de l'article 502 du Code de Procédure Civile, dire que l'acte ne vaut pas titre exécutoire faute de la Banque de justifier du respect des dispositions de la Loi Scrivener relative au délai de rétractation ( article L.312-10 du Code de la Consommation),

- en conséquence, ordonner la mainlevée immédiate de la saisie attribution pratiquée au préjudice de Monsieur et Madame [M] le 09 juin 2010,

- en tant que de besoin, ordonner la mise à disposition immédiate des fonds à leur profit,

- en tout état de cause, infirmer le jugement entrepris en ce qu'il déboute Monsieur et Madame [M] de leurs demandes indemnitaires,

- et statuant à nouveau, condamner l'appelante au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts à Monsieur [M] et 10 000 euros à titre de dommages-intérêts à Madame [M], 7 000 euros chacun au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris les frais de mainlevée de la saisie litigieuse.

Sur la demande de la Cour, le conseil des époux [M] a fait parvenir à la Cour le 11 avril 2012, l'original du justificatif de l'envoi et de la réception de la lettre RAR adressée à l'huissier saisissant pour l'informer de la contestation de la saisie.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l'appel

Considérant que l'appelante produit en pièce 59 la preuve de la notification du jugement déféré par le greffe du juge de l'exécution d'[Localité 8] le 25 juillet 2011 ; que l'appel ayant été interjeté par déclaration reçue au Greffe de la cour le 02 août 2011, soit dans le délai de quinze jours prévu par l'article 29 du décret du 31 juillet 1992, l'appel est recevable ;

Sur la demande de sursis à statuer formée par Maître [U] et la SCP de notaires

Considérant que le juge de l'exécution est compétent pour statuer en application de l'article L.213-6 du Code de l'Organisation Judiciaire ; que la procédure pénale en cours au tribunal de grande instance de MARSEILLE ne fait pas obstacle au jugement de la présente affaire, l'article 4 du Code de Procédure Pénale ne s'appliquant pas aux procédures d'exécution ; qu'en outre l'acte notarié n'est pas argué de faux par les époux [M] qui n'en demandent pas non plus la nullité ;

Considérant qu'il convient donc de rejeter les demandes formées de ce chef par Maître [U] et la SCP de notaires associés et de confirmer le jugement de ce chef ;

Sur les demandes des parties

Considérant qu'aux termes d'un acte authentique reçu le 10 décembre 2002 par Maître [U] notaire associé à [Localité 5], la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST a consenti à Monsieur et Madame [M] un prêt de 196 659 euros pour leur permettre d'acquérir un appartement en l'état futur d'achèvement situé à [Localité 6] ([Localité 6]) ;

Considérant que les emprunteurs ayant cessé le remboursement des échéances, la déchéance du terme est intervenue le 06 octobre 2009 ; qu'en exécution d'une copie exécutoire de l'acte du 10 décembre 2002 la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST a fait pratiquer par acte du 09 juin 2010 une saisie attribution à exécution successive entre les mains de la SOCIÉTÉ DE GESTION DE CHATEAUX RESIDENCES (SGCR) à [Localité 13] pour paiement de la somme en principal de 182 539,12 euros ;

' sur la recevabilité de la contestation de Monsieur et Madame [M]

Considérant que la saisie attribution a été dénoncée aux époux [M] le 15 juin 2010 ;

que les intéressés ont saisi le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'EVRY par acte du 15 juillet 2010 ;

Considérant que les intimés justifient par la production de l'original du justificatif de l'envoi et de la réception de la lettre RAR adressée à l'huissier poursuivant, avoir dénoncé le 15 juillet 2010 copie de leur assignation devant le juge de l'exécution, à la SCP LAFONT ROUVIERE ALFIER LABADIE huissiers de justice qui a procédé à la saisie ;

Que le moyen soulevé de ce chef sera rejeté et le jugement confirmé sur ce point ;

' sur la demande de nullité de la saisie pour violation de l'article 502 du Code de Procédure Civile

Considérant selon l'article 502 du Code de Procédure Civile que nul jugement nul acte ne peut être mis à exécution que sur présentation d'une expédition revêtue de la formule exécutoire, à moins que la loi n'en dispose autrement ;

Considérant que ce texte, inclus dans le titre XV du Code de Procédure Civile : L'EXECUTION DU JUGEMENT, et dans son chapitre I : Conditions générales de l'exécution, constitue un préalable à toute exécution, et s'applique en particulier au créancier poursuivant et à l'huissier, l'article 2 de la loi du 9 juillet 1991 autorisant la mise en 'uvre d'une mesure d'exécution forcée au "créancier muni d'un titre exécutoire" et l'article 2 du décret du 31 juillet 1992 évoquant " la remise d'un titre à l'huissier de justice en vue de son exécution" ;

Qu'ainsi cet article, s'il invite l'huissier à vérifier que le titre qu'il lui est demandé de mettre à exécution est revêtu de la formule exécutoire, n'exige nullement qu'il y ait présentation matérielle du dit titre au débiteur ;

Qu'en effet l'article 56 du décret du 31 juillet 1992 n'exige, pour la validité de la saisie-attribution, que l'énonciation du titre exécutoire en vertu duquel la mesure est pratiquée, ce qui exclut toute présentation du titre lui-même, étant encore précisé qu'il s'agit en l'espèce de la copie exécutoire d'un acte auquel les débiteurs ont été parties, dont ils ne requièrent pas la nullité et qu'ils ont exécuté pendant plusieurs années.

Considérant par ailleurs que le procès verbal de saisie attribution du 09 juin 2010 énonce le titre et comporte les mentions prévues par ce texte, ainsi qu'un décompte distinct des sommes réclamées en principal frais et intérêts échus, ce que ne dénient pas les débiteurs ;

Que le moyen soulevé de ce chef sera rejeté ;

' sur la validité du titre et son caractère exécutoire

Considérant qu'aux termes de l'article L 213 -6 du Code de l'Organisation Judiciaire, le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit ;

Qu'ainsi, le juge de l'exécution tient du dit article tel qu'interprété par la Cour de Cassation dans son arrêt du 18 juin 2009, une compétence de pleine juridiction pour apprécier la portée et la validité des actes authentiques formalisant un titre exécutoire si la difficulté est survenue à l'occasion d'une mesure d'exécution forcée engagée ou opérée sur le fondement de ce titremême si elle touche au fond du droit ;

Considérant que les époux [M] soutiennent que l'acte du 10 décembre 2002 est affecté d'irrégularités substantielles tenant à l'absence de validité de la procuration de la banque, à l'irrégularité de leur procuration faute d'être annexée ou déposée au rang des minutes du notaire et au non respect de l'article L.312-10 du Code de la Consommation, ce qui prive l'acte de sa force exécutoire ;

' sur la validité de la procuration de la banque

Considérant que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST était représentée à l'acte par Madame [O] [Z] clerc de notaire 'en vertu des pouvoirs qui lui ont été donnés par Monsieur [K] [X] [ ....] aux termes d'une procuration sous seing privé en date à [Localité 12] le 01 octobre 2002 dont l'original demeurera joint et annexé aux présentes après mention ».

Considérant que les intimés font valoir que la procuration donnée par la banque au clerc de notaire n'est pas annexée à l'acte, que ses mentions ne sont pas reproduites à l'acte et que la chaîne de délégation n'est pas énoncée dans le corps de l'acte ni même justifiée ;

Mais considérant que la mention de l'annexion de l'original de la procuration à l'acte suffit à la validité de l'acte, lequel fait foi jusqu'à inscription de faux ; qu'ainsi le manquement allégué ne peut non plus priver l'acte de sa force exécutoire ;

Considérant par ailleurs que la société produit l'acte de délégation qu'elle a consenti ; qu'ainsi Monsieur [X] a reçu délégation de pouvoir avec faculté de substitution ce qui permet la représentation par un mandataire muni d'une procuration ; que la banque qui y aurait seule intérêt, ne conteste pas l'authenticité ou la validité de la délégation de pouvoirs et de la procuration ; que les emprunteurs ne sont donc pas fondés en leur contestation de ce chef ;

' sur la validité de la procuration des époux [M]

Considérant que Monsieur et Madame [M] étaient représentés par Madame [C] [A] clerc de notaire « en vertu des pouvoirs qu'ils lui ont conférés aux termes d'une procuration reçue par Maître [P] [D] notaire à [Localité 10] le 3 octobre 2002 dont le brevet original est demeuré annexé à l'acte de vente en état futur d'achèvement dressé ce jour par le notaire soussigné » ;

Considérant que les intimés soutiennent que leur procuration n'est pas annexée, ni déposée au rang des minutes du notaire en violation des articles 21 et 22 du décret du 26 novembre 1971 ; qu'en outre l'acte ne reproduit pas les pouvoirs prétendument donnés par eux à Madame [A], ce qui affecte l'acte d'une irrégularité substantielle et le prive de sa force exécutoire ;

Mais considérant que l'article 8 du décret du 26 novembre 1971, dans sa rédaction applicable à l'époque de la signature de l'acte, disposait seulement que « les pièces annexées à l'acte doivent être revêtues d'une mention constatant cette annexe et signées du notaire . Les procurations sont annexées à l'acte à moins qu'elles ne soient déposées aux minutes du notaire rédacteur de l'acte. Dans ce cas, il est fait mention dans l'acte du dépôt de la procuration au rang des minutes » , la disposition introduite par le décret du 10 août 2005 modifiant l'articles 21 du décret du 26 novembre 1971 selon laquelle « L'acte notarié porte mention des documents qui lui sont annexés », n'étant pas applicable à l'époque de la signature mais seulement à compter du 1er février 2006 ; qu'il s'ensuit que le défaut de mention ne saurait à lui seul entraîner la perte du caractère exécutoire de l'acte, étant précisé que la procuration étant annexée à l'acte de vente des biens financés par le prêt, il ne pouvait être fait mention de son annexion à l'acte de prêt ; qu'enfin l'obligation de faire figurer les procurations en annexe de l'acte authentique, à moins qu'elles ne soient déposées aux minutes du notaire rédacteur, n'est pas sanctionnée par la perte du caractère exécutoire de l'acte, l'article 23 du décret du 26 novembre 1971 dans sa rédaction en vigueur à l'époque de l'acte, ne prévoyant pas une telle sanction ;

Considérant enfin que les époux [M] qui ont exécuté l'acte pendant plusieurs années, n'en poursuivent pas la nullité et ne s'inscrivent pas en faux, ne peuvent de ce fait valablement remettre en cause aujourd'hui la réalité de leur procuration au motif que l'acte n'en reproduit pas le contenu ; qu'au surplus aucun texte ne prévoit une telle obligation ; que ce moyen sera donc de même rejeté ;

' sur la régularité de l'acte au regard des dispositions de l'article L.312-10 du Code de la Consommation (loi SCRIVENER)

Considérant qu'aux termes de l'acte, l'emprunteur confirme avoir reçu l'offre préalable de prêt par voie postale et avoir accepté le 14 octobre 2002 par courrier adressé au notaire ;

Que l'acte mentionne également : « le notaire atteste avoir reçu l'acceptation par voie postale. L'agrément à l'assurance décès est intervenu ainsi qu'il ressort du bulletin d'adhésion et de la notice d'information énumérant les risques garantis et précisant les modalités de la mise en jeu de l'assurance, tous deux annexés aux présentes.

Le prêt obéit aux dispositions de l'offre préalable de prêt immobilier reçue et acceptée par l'emprunteur et s'il y a lieu par les cautions. Cette offre est reproduite au chapitre 1 du présent acte hypothécaire, ce que reconnaissent l'emprunteur et s'il y a lieu les cautions » ;

Considérant que Monsieur et Madame [M] font valoir qu'à la date de la procuration (3 octobre 2002) le délai de réflexion de dix jours de l'article L.312-10 du Code de la Consommation n'était pas écoulé et qu'ainsi le notaire n'a pu valablement constater une acceptation du prêt puisque selon la date d'acceptation de l'offre de prêt, celle-ci aurait été réceptionnée le 14 octobre 2002 ;

Considérant selon les pièces communiquées (accusé de réception de l'offre et lettre d'acceptation de l'offre ) que les époux [M] attestent avoir reçu le 03 octobre 2002 l'offre de prêt ; qu'ils ont accepté cette offre le 14 octobre 2002 et l'ont adressée par voie postale au notaire à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST le même jour, soit à l'expiration du délai prévu par le texte susmentionné, de sorte que les prescriptions légales ont été respectées ;

Considérant par ailleurs que le fait de donner procuration au notaire pour passer un acte de prêt, avant l'expiration du délai de réflexion de dix jours, ne constitue pas une infraction à la loi dite SCRIVENER, cette procuration pouvant être rétractée avant la passation de l'acte qui est en l'espèce largement postérieure, puisque celle-ci a eu lieu le 10 décembre 2002 ; que le moyen soulevé de ce chef sera rejeté ;

Considérant que le jugement sera donc infirmé et Monsieur et Madame [M] déboutés de l'ensemble de leurs demandes, en ce compris leur demande de dommages et intérêts ;

Considérant que Monsieur et Madame [M] qui succombent supporteront les dépens de première instance et d'appel ; que toutefois, pour des motifs de situation économique, il convient d'écarter l'application à leur encontre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a déclaré recevable la contestation de Monsieur et Madame [M] et dit n'y avoir lieu à sursis à statuer ;

INFIRME le jugement déféré pour le surplus et statuant à nouveau ;

DIT n'y avoir lieu à mainlevée de la saisie attribution pratiquée le 09 juillet 2010 à la requête de la la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST entre les mains de la SGCR à l'encontre de Monsieur [B] [M] et de Madame [L] [F] épouse [M] ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNE Monsieur et Madame [M] aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 11/14610
Date de la décision : 31/05/2012

Références :

Cour d'appel de Paris G8, arrêt n°11/14610 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-05-31;11.14610 ?
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