Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRÊT DU 23 MAI 2012
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/09026
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Avril 2011 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 08/41267
APPELANT
Monsieur [X] [X] [X] [X]
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représenté par Me Luc COUTURIER de la SELARL HANDS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0061
INTIMÉE
Madame [W] [W]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par la SCP BOMMART FORSTER - FROMANTIN, avocats au barreau de PARIS, toque : J151, postulant
assisté de Me Pierre-Olivier LEVI avocat au barreau de PARIS, toque : G0815, plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral et en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 avril 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Pascal CHAUVIN, président et Madame Nathalie AUROY, conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Pascal CHAUVIN, président
Madame Nathalie AUROY, conseiller
Madame Florence BRUGIDOU, conseiller appelé d'une autre Chambre pour compléter la Cour
Greffier :
lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Marie-France MEGNIEN
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Pascal CHAUVIN, président et par Madame Marie-France MEGNIEN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
Le divorce de M. [X] [X] et Mme [W] [W], mariés le [Date mariage 4] 1994 sans contrat préalable, a été prononcé, après ordonnance de non-conciliation du 14 octobre 2003, qui a attribué la jouissance du logement et du mobilier du ménage à l'épouse, et sur assignation du 8 avril 2004, par jugement du 25 janvier 2005, qui a également ordonné la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux et désigné le président de la chambre interdépartementale des notaires de [Localité 7], avec faculté de délégation, pour y procéder.
Maître [Y] [Y], notaire associé de la société civile professionnelle '[Y] [Y] et [E] [E]', déléguée, a dressé un procès-verbal de difficultés le 5 juillet 2007.
Par jugement du 7 avril 2011, sur assignation délivrée le 22 septembre 2008 par Mme [W], le tribunal de grande instance de Paris a :
- dit qu'il y a lieu d'intégrer à l'actif de communauté l'épargne salariale de M. [X] à hauteur de 9 380,70 euros,
- dit qu'il convient de considérer qu'une jouissance à titre gratuit du domicile conjugal a été attribuée à Mme [W],
- attribué préférentiellement à M. [X] le bien situé [Adresse 2],
- commis Maître [Z], qui s'adjoindra éventuellement tout sapiteur de son chois pour évaluer les valeurs vénale et locative du bien et faire les comptes entre les parties, soit déterminer le montant des récompenses éventuelles au regard des fonds apportés à la communauté, des emprunts et des remboursements effectués, de l'occupation du bien par Mme [W] et des contre-parties mises à sa charge par décision de justice, de l'attribution préférentielle du bien à M. [X] et d'une soulte éventuelle et envisager toutes autres questions d'importance ; en vue de dresser un état liquidatif de la communauté ayant existé entre les époux, d'établir les comptes entre les parties, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots à répartir,
- partagé les dépens.
M. [X] a interjeté appel de cette décision le 13 mai 2011.
Dans ses uniques conclusions déposées le 16 août 2011, il demande à la cour de :
- infirmer le jugement déféré, sauf en ce qu'il lui a attribué préférentiellement le bien immobilier de l'[Adresse 2],
- avant dire droit, ordonner une expertise, aux frais avancés par moitié par chacune des parties, aux fins d'estimation des valeurs marchande et locative du bien immobilier de l'[Adresse 2],
- juger que la communauté lui doit récompense d'une somme représentant 33,67 % de la valeur vénale du bien immobilier de l'[Adresse 2],
- juger que la communauté lui doit récompense d'une indemnité égale à 31 mois et 15 jours d'occupation exclusive par Mme [W] du bien immobilier de l'[Adresse 2],
- juger que Mme [W] devra lui rembourser la somme de 2 796,48 euros correspondant au règlement de la fraction des échéances mensuelles du prêt Banque régionale de l'Ouest assuré par lui aux lieu et place de son ex-épouse,
- débouter Mme [W] de toute demande tendant à se voir octroyer une récompense d'un montant de 23 610,91 euros,
- dire que les frais de partage seront supportés par chacun des ex-époux pour moitié,
- condamner Mme [W] à lui verser une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de la présente instance, avec bénéfice de l'article 699 du même code.
Dans ses uniques conclusions déposées le 7 octobre 2011, Mme [W] demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il dit qu'il y a lieu d'intégrer à l'actif de communauté l'épargne salariale de M. [X] à hauteur de 9 380,70 euros, dit qu'il convient de considérer qu'une jouissance à titre gratuit du domicile conjugal a été attribuée à Mme [W] et attribué préférentiellement à M. [X] le bien situé [Adresse 2],
- l'infirmer pour le surplus,
- avant dire droit, ordonner une expertise, aux frais avancés par moitié par chacune des parties, aux fins d'estimation du bien immobilier de l'[Adresse 2], compte tenu des travaux à réaliser et d'évaluation du coût des travaux de remise en état,
- juger que la communauté lui doit récompense de la somme de 23 610,91 euros,
- dire que le passif de la communauté se compose, outre 'les récompenses ci-dessus énoncées', du montant de l'emprunt dont le solde était de 63 607,75 euros au 31 mars 2007,
- dire qu'en cas d'attribution à M. [X] du bien immobilier de l'[Adresse 2], M. [X] devra lui verser une soulte,
- dire que les frais de partage seront répartis par moitié,
- débouter M. [X] de toute demande tendant à se voir octroyer une récompense d'une somme représentant 33,67 % de la valeur vénale du bien immobilier de l'[Adresse 2],
- débouter M. [X] de sa demande de remboursement de la somme de 2 796,48 euros correspondant au règlement de la fraction des échéances mensuelles du prêt Banque régionale de l'Ouest,
- le condamner à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, avec bénéfice de l'article 699 du même code.
SUR CE, LA COUR
Considérant que la disposition du jugement ayant dit qu'il y avait lieu d'intégrer à l'actif de la communauté l'épargne salariale de M. [X] à hauteur de 9 380 euros ne fait l'objet d'aucune critique ; qu'il convient de confirmer le jugement de ce chef ;
Considérant que Mme [W] ne s'oppose pas à l'attribution préférentielle à M. [X] de l'immeuble ayant constitué l'ancien domicile conjugal, situé [Adresse 2] ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement de ce chef, en précisant que cette attribution se fera à charge de soulte, s'il y a lieu ;
Considérant que les parties s'accordent sur la nécessité de recourir à une expertise aux fins d'estimation de la valeur vénale de l'immeuble ;
Mais, sans qu'il y ait lieu de recourir à une mesure d'expertise qui nécessairement va engendrer des frais substantiels et retarder la liquidation des intérêts patrimoniaux des parties ordonnée voici plus de sept années, il y a lieu, avant dire droit, d'enjoindre aux parties de fournir chacune à la cour trois estimations réalisées par des notaires, des agents immobiliers ou autres professionnels de l'immobilier, qui devront tenir compte de l'état actuel des lieux et des travaux de remise en état nécessaires, en vue de lui permettre de fixer la valeur vénale de l'immeuble concerné ; qu'il convient donc d'ordonner sur ce point la réouverture des débats ;
Considérant que M. [X] sollicite improprement qu'il soit jugé que la communauté lui doit récompense d'une indemnité égale à 31 mois et 15 jours au titre de l'occupation exclusive par Mme [W] du bien immobilier de l'[Adresse 2] entre le 1er février 2004 et le 15 septembre 2006, une telle indemnité n'étant susceptible d'être due par Mme [W] qu'envers l'indivision post-communautaire, dès lors que les effets du jugement de divorce dans les rapports patrimoniaux entre époux, et donc la dissolution de la communauté, remontent au 8 avril 2004, date de l'assignation, en vertu de l'article 262-1 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 26 mai 2004, applicable au litige ;
Considérant, au surplus, que, si les décisions de divorce sont silencieuses sur ce point, il en résulte que l'attribution à titre gratuit de la jouissance de l'ancien domicile conjugal à Mme [W] a été accordée, au vu de l'accord des parties, tant pendant la procédure de divorce, au titre du devoir de secours, qu'après le jugement, pour une période limitée jusqu'au 30 juin 2007, étant observé que, l'acte de signification du jugement de divorce n'étant pas produit, la date où celui-ci est devenu définitif n'est pas connue de la cour ; qu'en effet, tenant compte des revenus des époux à l'époque et de leur disparité (en 2003, 1 644 euros pour M. [X] et 1 340 euros pour Mme [W] ; en 2004, respectivement 1 724 euros et 1 222 euros) et de la fixation de la résidence habituelle de leurs deux enfants mineurs chez la mère, l'ordonnance de non-conciliation a 'attribu(é) la jouissance du logement et du mobilier du ménage à l'épouse', donné acte à cette dernière 'de ce qu'elle participera au remboursement mensuel du crédit BRO à hauteur de 70 euros, Monsieur assumant le surplus, et, ce, à compter du versement de la pension alimentaire' et 'fix[é] la contribution mensuelle du père à l'entretien et l'éducation des enfants mineurs à la somme de 300 euros, soit 150 euros par enfant, qui devra être versée d'avance par le père, au domicile ou à la résidence de la mère, prestations familiales en sus' , puis le jugement de divorce a 'donné acte aux parties de leur accord sur le fait que Madame [W] [W] épouse [X] conserve la jouissance du domicile conjugal sis au [Adresse 2], jusqu'au 30 juin 2007, à charge pour chaque partie de supporter la moitié du remboursement des deux prêts contractés aux fins de l'acquisition de cet immeuble', la contribution mensuelle du père à l'entretien et l'éducation des enfants restant fixée à la somme modeste de 150 euros par enfant ;
Considérant, enfin, qu'il n'est nullement établi que le nouveau compagnon de Mme [W], domicilié en Angleterre au moment de la naissance de leur enfant, le [Date naissance 5] 2005, ait résidé avec elle dans les lieux, ce que celle-ci conteste formellement ;
Qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a dit qu'il convenait de considérer qu'une jouissance à titre gratuit du domicile conjugal a été attribuée à Mme [W] et de rejeter la demande de M. [X] ;
Considérant que M. [X] ne justifie par aucune pièce avoir financé pour partie l'acquisition de l'immeuble commun au moyen de fonds propres provenant d'un donation qui lui aurait été consentie par sa grand-mère et d'un plan d'épargne logement qu'il aurait constitué avant le mariage ; qu'il y a lieu, infirmant le jugement de ce chef, de rejeter sa demande tendant à voir juger que la communauté lui doit récompense d'une somme représentant 33,67 % de la valeur vénale de ce bien ;
Considérant que, si Mme [W] verse aux débats des documents attestant de virements bancaires en provenance du Brésil dont elle-même ou sa mère lors de ses passages à [Localité 7] retirait le produit en espèces, pour un montant total de 23 610,91 euros, ainsi qu'une attestation aux termes de laquelle cette dernière expose avoir entre 2000 et 2003 effectué ces dons financiers à sa fille, celle-ci n'établit nullement, comme elle le prétend, que cette somme a été encaissée pour le compte de la communauté, la seule circonstance de son utilisation (sans autre précision) pendant la vie commune n'étant pas suffisante pour établir cette preuve ; qu'il y a lieu, infirmant de ce chef le jugement, de rejeter sa demande tendant à voir juger que la communauté lui doit récompense de la somme de 23 610,91 euros ;
Considérant qu'il résulte de l'ordonnance de non-conciliation que la répartition de la charge du remboursement des crédits immobiliers pendant la procédure de divorce procède également de l'exécution du devoir de secours entre époux ; qu'il y a lieu, infirmant le jugement de ce chef, de débouter M. [X] de sa demande tendant à voir condamner Mme [W] à lui rembourser la somme de 2 796,48 euros correspondant à la fraction des échéances du prêt Banque Régionale de l'Ouest assumée par lui en lieu et place de son épouse pendant la procédure de divorce et de dire que les reliquats de prêts immobiliers restant dûs au 8 avril 2004 devront être inscrits à la masse passive de la communauté, le notaire devant faire les comptes entre les parties en tenant compte de la répartition de la charge du remboursement des crédits immobiliers telle qu'elle résulte des décisions de justice ;
Considérant qu'il convient de renvoyer les parties devant le notaire initialement désigné, qui a une parfaite connaissance du dossier, pour la poursuite des opérations de comptes, liquidation et partage ; que le jugement, qui désigne un autre notaire, doit être infirmé de ce chef ;
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :
- dit qu'il y a lieu d'intégrer à l'actif de communauté l'épargne salariale de M. [X] à hauteur de 9 380,70 euros,
- dit qu'il convient de considérer qu'une jouissance à titre gratuit du domicile conjugal a été attribuée à Mme [W],
- attribué préférentiellement à M. [X] le bien situé [Adresse 2],
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Avant dire droit sur la valeur vénale du bien immobilier commun situé [Adresse 2], ordonne la réouverture des débats à l'audience du mardi 30 octobre 2012 à 14 heures et enjoint aux parties de fournir chacune à la cour trois estimations réalisées par des notaires, des agents immobiliers ou autres professionnels de l'immobilier, qui devront tenir compte de l'état actuel des lieux et des travaux de remise en état nécessaires, en vue de lui permettre de fixer la valeur vénale de l'immeuble concerné,
Précise que l'attribution préférentielle se fera à charge de soulte s'il y a lieu,
Rejette les demandes de récompenses de M. [X] et de Mme [W],
Rejette la demande de M. [X] tendant à voir condamner Mme [W] à lui rembourser la somme de 2 796,48 euros correspondant à la fraction des échéances du prêt Banque Régionale de l'Ouest assumée par lui en lieu et place de son épouse pendant la procédure de divorce,
Dit que les reliquats de prêts immobiliers restant dûs au 8 avril 2004 devront être inscrits à la masse passive de la communauté, le notaire devant faire les comptes entre les parties en tenant compte de la répartition de la charge du remboursement des crédits immobiliers telle qu'elle résulte des décisions de justice,
Renvoie les parties devant SCP '[Y] [Y] et [E] [E]' pour la poursuite des opérations de comptes, liquidation et partage de leurs intérêts patrimoniaux,
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes,
Ordonne l'emploi des dépens en frais de partage.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,