Grosses délivréesGrosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRÊT DU 10 MAI 2012
AUDIENCE SOLENNELLE
(no 153, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 17452
Sur recours en révision formé à l'encontre des décisions rendues le 25 novembre 2010 par la première chambre du pôle 2 de la Cour d'Appel de Paris.
DEMANDEURS AU RECOURS :
M. Gérard X...
...
75005 PARIS
Comparant
LA SELARL LEX ET COS
...
75005 PARIS
Représentée par son gérant, M. Gérard X...
DÉFENDEUR AU RECOURS :
LE BARREAU DE PARIS
Administré par le Conseil de l'ordre
Représenté par son représentant légal
11 place Dauphine
75001 PARIS
Représenté à l'audience du 22 mars 2012 par Me Guillaume Z...,
Avocat au Barreau de Paris
Toque P 0019
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 22 Mars 2012, en audience tenue en chambre du conseil,
sur demande de M. Gérard X..., devant la Cour composée de :
- Monsieur François GRANDPIERRE, Président
-Monsieur Alain SADOT, Président
-Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller
-Madame Dominique GUEGUEN, Conseiler
-Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseiller désigné pour compléter la Cour en application de l'ordonnance de roulement portant organisation des services de la Cour d'Appel de Paris à compter du 2 janvier 2012, de l'article R312-3 du Code de l'organisation judiciaire et en remplacement d'un membre de cette chambre dûment empêché
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : Melle Sabine DAYAN
MINISTERE PUBLIC :
L'affaire a été communiquée au Procureur Général, représenté lors des débats par Mme Michèle SALVAT, Avocat Général qui a fait connaître son avis.
DÉBATS : à l'audience tenue le 22 Mars 2012, on été entendus :
- Mme Brigitte HORBETTE, en son rapport
-M. Gérard X..., en ses explications et demandes
-Me Guillaume Z..., avocat représentant le Barreau de Paris, en ses observations
-Mme Michèle SALVAT, Avocat Général, en ses observations
-M. Gérard X..., en ses observations, ayant eu la parole en dernier
ARRÊT :
- contradictoire
-prononcé en chambre du conseil par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Brigitte HORBETTE, conseiller, en lieu et place de M. François GRANDPIERRE, président empêché et par Madame Noëlle Klein, greffier à qui la minute de l'arrêt a été remise par le magistrat signataire.
* * *
M. X..., se disant avocat au Barreau de Paris, et la SELARL Lex et Cos, " représentée par son gérant " ont délivré, le 11 septembre 2011, une " citation recours en révision des décisions de la cour d'appel du 25 novembre 2010 " au " Barreau de Paris doté de la personnalité civile et administré par le conseil de l'ordre, régi par les articles 15 et suivants de la loi du 31 décembre 1971... représenté par son représentant légal ".
Se référant " aux dispositions de l'article 595 du code de procédure civile et sur le fondement des pièces communiquées ", estimant que " les arrêts RG 09/ 19409, RG 09/ 19408 et 10/ 07098 du 25 novembre 2010... ont été surpris par la fraude " et qu'ils n'ont pu " faire valoir la cause qu'ils invoquaient... notamment sur l'irrégularité de procédure disciplinaire ", M. X... et la SELARL Lex et Cos demandent de " rétracter les arrêts RG 09/ 19409, RG 09/ 19408 et 10/ 07098 du 25 novembre 2010 de la cour d'appel de Paris ".
Ils énoncent que " le requérant vient de découvrir " que des pièces de la procédure disciplinaire avaient été dissimulées à la cour et " que l'intégrité des fichiers informatiques de données personnelles des avocats avaient été violée (sic) à plusieurs reprises aux fins d'imputer au Requérant des faits délictuels imaginaires au profit du cabinet Clifford Chance " ; ils ajoutent que " Monsieur Olivier C... a fait disparaître les preuves fournies par le plaignant, lesquelles désignaient le cabinet Clifford Chance comme le co-auteur de propos diffamatoires ".
Des " observations sur citation " ont été déposées le 12 mars 2012, reprises oralement à l'audience, et demandent essentiellement à la cour de rétracter les arrêts visés et de condamner le conseil de l'ordre des avocats du barreau de Paris " à réparer l'important préjudice subi par les Requérants, lequel a porté atteinte à son intégrité physique et morale ainsi que celle de sa famille " (sic) et à leur payer " une somme dont le montant sera déterminé d'une manière contradictoire par le bâtonnier à la suite de la perte de ses chances d'honoraires résultant de l'intervention délictuelle de l'Autorité de poursuite ", à titre subsidiaire " en raison de la connexité avec la présente affaire, annuler les arrêtés du 20 avril 2010 et du 1er mars 2011, surpris également par la fraude sans qu'il soit nécessaire de statuer sur l'instance en cours ".
Elles développent des arguments selon lesquels " les Requérants ont été victimes d'une procédure disciplinaire d'une barbarie sans précédent qui a mis à jour l'existence d'une association de malfaiteurs au sens du code pénal ", et il y a eu fraude aux " jugements disciplinaires " entraînant " la nullité des arrêts confirmatifs no 410, 411 et 418 ", la cour ayant " méconnu non seulement les immunités judiciaires de droit commun... mais aussi garanties par la Constitution sur la liberté d'opinion et l'indépendance des avocats " dans la mesure où les propos qui sont reprochés émanent d'écrits judiciaires pris dans l'intérêt de clients et ne pouvaient, comme tels, servir de fondement à des poursuites.
Par " requête en suspension d'instance " déposée le 19 mars 2012 M. X... et la SELARL Lex et Cos demandent, au visa de l'article 108 du code de procédure civile, de " suspendre l'instance au titre de l'article 4 du code de procédure pénale et en application de l'article 108 du code de procédure civile le temps nécessaire à la purge de l'action pénale " au motif que l'action publique aurait été mise en mouvement " à effet du 1er septembre 2011 pour obtenir réparation face au comportement délictuel présumé du bâtonnier Y..., du cabinet Clifford-Chance et Consorts " sans autre précision.
M. X..., qui a eu la parole en dernier, a expliqué que la plainte qu'il a déposée concerne des faits d'abus d'autorité, d'atteintes aux libertés individuelles, de discrimination, de trafic d'influence, de faux et usage et d'association de malfaiteurs et qu'elle est dirigée contre MM. D..., E..., F..., G..., H..., C..., I... et J... et la SA CARREFOUR ; il a indiqué que, nonobstant l'erreur concernant les références des arrêts dont il souhaite la rétractation, la juridiction est suffisamment informée de ceux qu'il vise puisqu'il les a communiqués dans un CD avec son mémoire ; il a ajouté qu'il avait conscience que l'action qu'il mène est enfermée dans le délai de deux mois prévu par l'article 596 du code de procédure civile et qu'il n'avait aucune preuve de la date à laquelle il avait découvert la fraude qu'il dénonce mais que celle-ci était demeurée " occulte ", même s'il la subodorait depuis fort longtemps, et qu'il a pris conscience des manipulations des fichiers informatiques par la réponse de l'ordre en date du 12 mars 2012 ; il a précisé que sa demande de rétractation concerne un dossier no 172267, supprimé en février 2008 et remplacé par un dossier ouvert à son nom sous le no176880 ;
Le représentant du Conseil de l'ordre des avocats au Barreau de Paris, qui s'oppose au sursis et sollicite le rejet du recours, soutient que M. X... est irrecevable en sa requête, tardive au sens de l'article 596 du code de procédure civile, et souligne que les développements consacrés à l'informatisation du barreau de Paris sont étrangers à la question de la fraude prétendue aux arrêts du 25 novembre 2011.
Le Procureur Général sollicite le rejet de la requête de M. X..., irrecevable pour avoir été déposée plus de deux mois après que les arrêts visés aient été rendus et dans la mesure où il ne cite aucune date ni événement précis qui ferait courir ce délai, et ajoute que la question des fichiers informatiques du barreau de Paris est sans lien avec la requête et avec les arrêts visés par elle qui se prononcent sur des comportements répréhensibles de M. X... à l'encontre de confrères ou de leurs clients.
SUR QUOI,
Sur la demande de " suspension d'instance " :
Considérant qu'à l'appui de cette demande M. X... invoque les articles 4 du code de procédure pénale qui, selon lui, impose le sursis lorsque l'action publique est mise en mouvement pour réparer un dommage, ainsi que 73, 74 et 108 du code de procédure civile qui ordonnent au juge de " suspendre l'instance lorsque la partie qui le demande jouit de quelque autre délai d'attente " ; qu'à " titre subsidiaire " il demande l'application à son profit de l'article " 40 du code de procédure civile qui énonce que toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit... " ;
Considérant toutefois qu'aucun des textes visés par M. X... ne sont de nature à lui octroyer le sursis qu'il sollicite ; qu'outre le fait que l'article 40 du code de procédure civile porte sur les jugements statuant sur des demandes indéterminées et non sur les points cités qui relèvent du code de procédure pénale, les articles 73, 74 et 108 du code de procédure civile qui se réfèrent aux exceptions dilatoires et renvoient à d'autres délais d'attente, peuvent inclure le sursis prévu par l'article 4 du code de procédure pénale ; que cependant il ressort de ce dernier texte, dans sa rédaction actuelle, que ce sursis n'est pas obligatoire contrairement à ce qu'énonce M. X... ; qu'en l'espèce il n'est, de plus, pas opportun, la plainte avec constitution de partie civile qu'il a déposée visant des faits d'abus d'autorité, d'atteintes aux libertés individuelles, de discrimination, de trafic d'influence, de faux et usage et d'association de malfaiteurs, sans aucun lien avec la requête en révision dont la juridiction est saisie, ces faits poursuivis par lui concernant des infractions pénales qu'il impute à diverses personnalités ordinales ou judiciaires en lien avec une affaire qui a opposé ses clients à une société CARREFOUR et aucune de ces personnes ou société n'étant partie à la présente procédure ;
Sur la " citation recours en révision " :
Considérant qu'aux termes de l'article 593 du code de procédure civile " Le recours en révision tend à faire rétracter un jugement passé en force de chose jugée pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit. " ;
Que selon l'article 596 du même code " Le délai du recours en révision est de deux mois. Il court à compter du jour où la partie a eu connaissance de la cause de révision qu'elle invoque. " ;
Considérant qu'il appartient à M. X... comme à la SELARL Lex et Cos de rapporter la preuve de la date à laquelle ils ont eu connaissance de la fraude qu'ils invoquent ;
Que force est de constater que, non seulement la requête, pas plus que le mémoire, ne mentionne aucune date qui serait celle d'une révélation de faits susceptibles de remettre en cause les constatations faites dans les arrêts du 25 novembre 2010 visés ni n'évoque un événement quelconque qui aurait pu faire naître une prise de conscience de ce que lesdits arrêts auraient été surpris par fraude, mais encore, à l'audience, M. X... a indiqué, dans des propos quelque peu confus, qu'il n'avait aucun élément à fournir sur la période à laquelle il aurait connu la fraude qu'il dénonce tout en disant qu'il la suspectait depuis fort longtemps, étant en opposition depuis de nombreuses années avec le conseil de l'ordre ;
Que dans ces conditions, et faute par les requérants d'indiquer le moindre point de départ du délai de leur action qui serait inférieur à deux mois précédant la requête, elle ne peut qu'être déclarée irrecevable, le surplus des développements, explications et moyens de M. X... et de la SELARL Lex et Cos, devenant, pour ce motif, inopérants, y compris en ce qu'ils poursuivent la nullité des arrêtés disciplinaires confirmés par les arrêts dont la révision est sollicitée ;
Qu'en particulier, les digressions portant sur le contenu, les modifications ou la légitimité des fichiers informatiques du barreau sont sans rapport avec le contenu des arrêts dont la révision est recherchée ; qu'à supposer même leur existence, elle n'est de toutes façons pas datée, la seule date fournie à ce sujet, tenant à une lettre de l'ordre des avocats au Barreau de Paris de mars 2012, largement postérieure à celle de la requête ;
PAR CES MOTIFS,
Déclare le recours de M. X... et de la SELARL Lex et Cos irrecevable,
Les condamne aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,