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02/05/2012 | FRANCE | N°10/07119

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 02 mai 2012, 10/07119


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 8



ARRET DU 02 MAI 2012



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/07119



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mars 2010 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2009069642





APPELANTE



S.A.S. RODYN

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège [Adresse 1]>
[Localité 3]



représentée et assistée de la SCP BOMMART FORSTER - FROMANTIN (Me Edmond FROMANTIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : J151)

et de Me Guy SIX, Avocat au barreau de LILLE





IN...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRET DU 02 MAI 2012

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/07119

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mars 2010 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2009069642

APPELANTE

S.A.S. RODYN

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège [Adresse 1]

[Localité 3]

représentée et assistée de la SCP BOMMART FORSTER - FROMANTIN (Me Edmond FROMANTIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : J151)

et de Me Guy SIX, Avocat au barreau de LILLE

INTIMES

S.A.S. NIDOR

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège [Adresse 2]

[Localité 4]

représentée et assistée de la SCP BOMMART FORSTER - FROMANTIN (Me Edmond FROMANTIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : J151)

et de Me Guy SIX, Avocat au barreau de LILLE

S.A.S. LMBO

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège [Adresse 5]

[Localité 4]

représentée et assistée de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN (Me Bruno REGNIER) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0050)

et de Me Olivier BAULAC (avocat au barreau de PARIS, toque : P0207)

Monsieur [S] [B]

demeurant [Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 4]

pris tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'ancien président de la société LMBO VENDOME nouvelle dénomination de la société NIDOR SAS et de président de la société LMBO SAS

représenté et assisté de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN (Me Bruno REGNIER) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0050)

et de Me Olivier BAULAC (avocat au barreau de PARIS, toque : P0207)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 février 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie HIRIGOYEN, Présidente

Madame Evelyne DELBES, Conseillère

Monsieur Joël BOYER, Conseiller

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Marie-Claude HOUDIN

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie HIRIGOYEN, présidente et par Mme Marie-Claude HOUDIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La SAS LMBO Vendôme est une société d'investissement en valeurs mobilières. Créée par la société LMBO, elle a vocation à lever des fonds aux fins de réaliser des opérations de prise de participation dans des entreprises de taille moyenne. Elle a pour président la société LMBO, elle-même animée par M. [S] [B].

La SAS Rodyn, autre société d'investissement, a conclu, le 12 février 2004, un engagement irrévocable de souscription de 2 000 000 euros à une ou deux augmentations de capital, d'actions de catégories A, de valeur unitaire de 12 500 euros, majorée d'une prime d'émission, de la société LMBO Vendôme.

N'ayant pas respecté cet engagement de souscription lorsqu'elle a y été conviée par une assemblée générale extraordinaire de la société LMBO Vendôme du 6 décembre 2004 pour un montant de 1 000 000 euros, plus prime d'émission, la société Rodyn a, sur assignation de la société LMBO Vendôme, été condamnée, par un jugement du tribunal de commerce de Lille du 5 juillet 2006, confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Douai du 22 mai 2008, à une obligation de faire conformément aux articles 1101 et suivants du code civil et à verser la somme de 1 000 000 euros en souscrivant 80 actions nouvelles de catégorie A d'une valeur nominale de 12 500 euros, outre prime d'émission conventionnelle, assortie des intérêts à hauteur de 10 % l'an à compter du 6 décembre 2004. Par un arrêt du 12 mai 2009, la cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la société Rodyn.

L'assemblée générale extraordinaire du 6 décembre 2004 a constaté la souscription de la société Pictet à l'augmentation de son capital, à hauteur de 1.000.000 euros, pour 80 actions nouvelles de catégorie A, et la défaillance de la société Rodyn.

En exécution du jugement du 5 juillet 2006 confirmé par l'arrêt du 22 mai 2008, la société Rodyn a effectué, fin 2008, un versement de 1 388 567,96 euros.

Une assemblée générale extraordinaire du 16 février 2009 de la société LMBO Vendôme a approuvé les comptes sociaux arrêtés au 12 décembre 2008, a transformé la dénomination sociale de la société en 'Nidor', a donné tous pouvoirs au président pour transférer le siège social, a pris acte du projet de démission par la société LMBO de son mandat de président, a donné tous pouvoirs au président démissionnaire pour convoquer une nouvelle assemblée et désigner un nouveau président, a décidé la réduction du capital social par voie de rachat suivi de l'annulation des 80 actions de catégorie A libérées du quart par la société Pictet et des 3 actions de catégorie A entièrement libérées, le prix de rachat étant fixé à 5 233,08 euros pour les 80 actions de catégories A libérées du quart et de 14 608,08 euros pour les 3 actions entièrement libérées, a annulé les actions de catégorie A rachetées par la société, a décidé d'augmenter le capital social d'un montant de 1 277 419,20 euros (1 000 000 euros plus une prime d'émission de 277 419,20 euros), et ce, par la création de 80 actions nouvelles de catégories A d'un montant nominal de 12 500 euros, a constaté la souscription de la société Rodyn à cette augmentation de capital par compensation avec une créance liquide et exigible détenue par celle-ci sur la société LMBO Vendôme, a décidé la suppression et le remboursement des actions de catégories B au prix de 1 euros par action, a décidé le rachat par la société des 2 actions de catégorie A détenues par la société LMBO Finance pour le prix total de 29 216,16 euros et de l'action A détenue par la société LMBO pour le prix de 14 608,08 euros et la suppression de ces actions, a constaté qu'à la suite de ces opérations le capital social s'élève à 1 000 000 euros, divisé en 80 parts nouvelles de catégories A d'une valeur nominale de 12 500 euros détenues par la société Rodyn.

Estimant qu'elle a été écartée de toutes ces décisions alors qu'elle était de fait associée majoritaire et soutenant que, par suite de manoeuvres, elle se retrouve associée unique d'une société sans activité et grevée de dettes, la société Rodyn a, par acte du 22 octobre 2009, assigné, devant le tribunal de commerce de Paris, la société Nidor, anciennement dénommée LMBO Vendôme, la société LMBO et M. [S] [B], pris tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'ancien président de la société LMBO, aux fins de voir prononcer la nullité de l'assemblée générale extraordinaire du 16 février 2009 et, en tout cas, celle de ses délibérations à compter de la sixième résolution, et d'obtenir le paiement de dommages et intérêts.

L'assemblée générale des associés de la société Nidor (LMBO Vendôme) du 19 novembre 2009 a décidé de révoquer la société LMBO de son mandat de président de la société Nidor et de son remplacement par la société Rodyn, son unique associée.

Par jugement du 15 mars 2010, le tribunal de commerce de Paris a dit la société Rodyn recevable en ses demandes, l'a déboutée de sa demande en nullité de l'assemblée générale extraordinaire du 16 février 2009, de sa demande en nullité des délibérations prises par ladite assemblée après la décision d'augmentation de capital à son profit, de sa demande en nullité de l'assemblé générale ordinaire annuelle du 15 octobre 2009 et de ses demandes de dommages et intérêts, a pris acte de ce que la demande de désignation d'un administrateur provisoire est devenue sans objet depuis l'assemblée générale ordinaire de la société Nidor du 19 novembre 2009, a débouté la société Rodyn de sa demande d'expertise, a condamné l'intéressée à payer à la société LMBO et à M. [B] la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et a rejeté toute autre demande.

Par déclaration du 30 mars 2010, la société Rodyn a interjeté appel de cette décision.

Dans leurs dernières écritures signifiées le 2 septembre 2011, les sociétés Rodyn et Nidor qui concluent ensemble, demandent à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de constater que la société LMBO et l'ancien président de la société LMBO Vendôme ont commis une faute dans l'exécution de la décision de la cour d'appel de Douai du 22 mai 2008, de dire qu'elle devait être convoquée à l'assemblée générale extraordinaire de la société LMBO Vendôme du 16 février 2009, que ladite assemblée générale est entachée de nombreuses irrégularités révélatrices d'un abus de droit caractérisé, que l'égalité entre actionnaires n'a pas été respectée et que les actionnaires majoritaires ont commis un abus de majorité, de prononcer la nullité de l'assemblée générale extraordinaire du 16 février 2009 et celle de toutes ses délibérations et, par conséquent, d'annuler tous les actes subséquents intervenus après cette assemblée générale, en toute hypothèse, de dire que les intimés doivent réparer le préjudice qu'elle a subi du fait de leurs fautes et abus de droit, de constater qu'elle n'a pas pris part au vote après la sixième résolution, alors qu'elle était devenue associée, de prononcer la nullité des délibérations prises au cour de l'assemblée générale du 16 février 2009 à compter de la sixième résolution et de tous les actes subséquents, de dire que la convention de gestion conclue entre les sociétés LMBO et LMBO Vendôme est nulle et doit engager la responsabilité de la société LMBO et de M. [B], ès qualités de président de ladite société, faute d'avoir été ratifiée selon les dispositions légales en vigueur, de dire que la société LMBO, président de la société LMBO Vendôme, et M. [B], ès qualités de président de la société LMBO, ont commis des fautes de gestion caractérisées, de dire, en conséquence, que les défendeurs sont tenus d'indemniser les sociétés Nidor, anciennement dénommée LMBO Vendôme, et Rodyn du préjudice qu'elles ont subi, de constater que le rapport de M. [E] a évalué ce préjudice à la somme de 830 000 euros et d'entériner ses conclusions, de condamner la société LMBO et M. [B] solidairement à verser aux sociétés Nidor et Rodyn la somme provisionnelle de 500 000 euros, de dire que la société LMBO est tenue de communiquer à la société Nidor, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, les documents comptables suivants : facture correspondant aux prestations de gestion accomplies au titre de la convention conclue entre les sociétés LMBO et LMBO Vendôme avant 2009, facture de Maître [L] de 2008 d'un montant de 71 760 euros, registre des ordres de mouvements complets et rapports spéciaux mentionnés dans chacune des assemblées générales annuelles d'approbation des comptes, si la cour ne s'estimait pas suffisamment éclairée par le rapport de M. [E], de désigner un expert chargé d'arrêter le préjudice définitif des sociétés Rodyn et Nidor, de condamner solidairement la société LMBO et M. [B], ès qualités, à supporter les frais de cette expertise, et à verser à la société Rodyn, d'une par, à la société Nidor, d'autre part, la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 12 décembre 2011, la société LMBO et M. [B] demandent à la cour de confirmer le jugement déféré et, y ajoutant, de mettre M. [B] hors de cause, de dire irrecevable comme cause nouvelle d'appel et défaut d'intérêt à agir, la demande en nullité de la convention de gestion, et ce, au visa de l'article 564 du code de procédure civile, de condamner la société Rodyn au paiement de la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et de la somme de 50 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

Considérant que la société Rodyn invoque la nullité de l'assemblée générale extraordinaire des associés de la société LMBO Vendôme du 16 février 2009 à l'issue de laquelle elle s'est retrouvée seule associée et chargée des dettes de cette dernière et ce, du chef :

- de sa non convocation à ladite assemblée, alors qu'en réglant la somme prévue parle jugement du 5 juillet 2006 confirmé par l'arrêt du 22 mai 2008 valant souscription de 80 actions nouvelles de la société LMBO Vendôme, elle était devenue actionnaire de celle-ci,

- de la non conformité des conditions de l'augmentation de capital objet de sa 6ème résolution aux décisions précitées,

- des irrégularités de comptabilisation du versement de 1 000 000 euros par elle effectué en exécution des dites décisions, affecté à un compte 467, 'créditeurs divers', au lieu du compte 101, 'capital social', et du défaut de certificat de dépôt des fonds et de bon de souscription,

- de l'abus de majorité qui a présidé à chacune de ses décisions,

- de l'abus de droit et de la fraude que les dites décisions traduisent de la part de la société LMBO et de M. [B] ;

Considérant que l'assemblée générale extraordinaire de la société LMBO Vendôme du 6 décembre 2004, après avoir 'relevé l'irrévocabilité des engagements contractuels de souscription des sociétés Pictet Private Equity Investors SA et Rodyn SA' a décidé, 'en considération du non-respect de son engagement de souscription par la société Rodyn, à hauteur de 80 actions de catégorie A d'une valeur nominale de 12 500 euros, de suspendre temporairement, à toutes fins utiles, et notamment celle de parvenir à recueillir cette souscription, la réalisation de l'augmentation de capital' ;

Considérant que l'article 2-4 du contrat de souscription conclu le 12 février 2004 entre les société LMBO Vendôme et Rodyn stipulait : 'Le non-respect par le souscripteur de tout ou partie de son engagement de souscription à l'une des augmentations de capital tel de défini à l'article 2-2, emporte de plein droit obligation pour ce dernier de verser en numéraire ou de faire apport en nature à la Société d'un montant égal à celui qu'il aurait normalement dû verser au titre de l'augmentation de capital considérée, majorée au taux de dix pour cent (10%) l'an, sans préjudice de l'action que la société peut exercer contre l'associé défaillant. En outre, le souscripteur défaillant ne recevra jusqu'à la date de liquidation de la société ou de la régularisation de sa situation, aucune distribution, remboursement ou réduction de capital, de quelque nature que ce soit' ;

Considérant que le jugement du tribunal de commerce de Lille du 5 juillet 2006, confirmé par l'arrêt de la cour d'appel du 22 mai 2008, en condamnant la société Rodyn, en application de l'article 2-4 du contrat de souscription, à une obligation de faire et à verser la somme de 1 000 000 euros en souscrivant 80 actions nouvelles de catégorie A d'une valeur nominale de 12 500 euros, outre prime d'émission conventionnelle, assortie des intérêts de 10 % l'an à compter du 6 décembre 2004, a contraint l'intéressée à respecter l'engagement de souscription qu'elle avait pris à l'augmentation de capital dont l'assemblée générale du 6 décembre 2004 avait suspendu la réalisation jusqu'au recueil de cette souscription, dont le contrat de souscription du 2 février 2004 permettait la régularisation ;

Considérant qu'il résulte des termes du procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 16 février 2009, que la société Rodyn a versé, dès la fin de l'année 2008, la somme de 1 000 000 euros, correspondant à l'augmentation de capital à laquelle elle avait souscrit et celle de 277 419,15 euros, correspondant à la prime d'émission contractuelle ; que dans leurs dernières écritures, les intimés indiquent que la société LMBO Vendôme a reçu ces sommes au mois de janvier 2009 ; que ces versements ont réalisé la souscription de l'appelante à l'augmentation de capital qui lui avait été réservée et la libération totale à son profit des 80 actions nouvelles de catégorie A et ont fait d'elle une associée de la société LMBO Vendôme ;

Considérant qu'il est constant que la société Rodyn n'a pas été convoquée et n'a pas assisté à l'assemblée générale extraordinaire du16 février 2009 de la SAS LMBO Vendome, qui a approuvé les comptes de l'exercice clos le 12 décembre 2008 et a décidé la réduction et l'augmentation du capital, toutes décisions devant être prises collectivement par les associés (L 227-9 alinéa 2 du code de commerce) ; que cette assemblée générale extraordinaire s'est donc tenue en violation des dispositions légales relatives à la validité des décisions collectives ; que les décisions prises par l'assemblée générale en litige ont apporté des changements fondamentaux au capital et à l'actionnariat de la société de sorte que l'exclusion de la société Rodyn justifie son annulation en application de l'article L 227-9 alinéa 4 du code de commerce ; que cette annulation entraîne celle de tous les actes subséquents intervenus après le 16 février 2009 ;

Considérant que l'annulation ainsi prononcée rend inutile l'examen des autres griefs invoqués par la appelantes à l'appui de leur demande en nullité de l'assemblée générale du 16 février 2009 ;

Considérant que les appelantes soutiennent que les décisions prises par l'assemblée générale du 16 février 2009, totalement à l'insu de la société Rodyn et qui sont le fruit d'abus de droit et de fraudes commis par la société LMBO et M. [B], sont à l'origine, pour elles, d'un important préjudice financier que M. [E], expert en finances agréé auprès de la Cour de cassation, auquel elles ont confié l'examen des faits de la cause, a évalué à 831 000 euros, dans un rapport établi le 23 juillet 2010 ; qu'elles ajoutent que l'analyse des comptes de la société LMBO Vendôme des cinq dernières années effectuée par ce professionnel a révélé un certain nombre d'anomalies dans les écritures comptables et des actes de gestion anormaux ; qu'elles sollicitent, si la cour ne s'estimait pas suffisamment éclairé par le rapport de M. [E], la désignation d'un expert judiciaire avec mission d'examiner l'ensemble des comptes et opérations financières réalisés depuis l'origine de la société LMBO Vendôme et d'arrêter les préjudices qu'elles ont subis ;

Considérant que l'annulation de l'assemblée générale du 16 février 2009 entraîne la remise de la situation en son état antérieur ; que les demandes de réparation fondées sur des délibérations annulées ne peuvent pas prospérer, sauf à établir que la remise de la situation dans son état antérieur est impossible ou qu'elle laisse subsister un préjudice ;

Considérant que cette preuve n'est pas faite par les intimées qui invoquent un préjudice du chef de la plus value 'exorbitante' de 168 464 euros réalisée par la société Pictet lors de sa sortie de la société LMBO Vendôme, dont le principe et les conditions ont été décidés par l'assemblée générale extraordinaire annulée du 16 février 2009 ; qu'il en est de même de leur demande afférente à un préjudice de 227.000 euros, correspondant au montant des charges accumulées par la société LMBO Vendôme au 31 décembre 2007, déduction faite de la prime d'émission versée par la société Pictet, qui échoient à la seule société Rodyn, restée unique actionnaire de la société Nidor à l'issue de l'assemblée générale du 16 février 2009 dont les décisions sont mises à néant, parmi lesquelles celles faisant de la société Rodyn l'unique actionnaire de la société LMBO Vendôme ; que la cour observe que, parmi les charges invoquées, figurent les honoraires, d'un montant de 71 760 euros, de Maître [L], avocat de la société LMBO Vendôme au cours de la longue procédure qui l'a opposée à la société Rodyn devant le tribunal de commerce de Lille, la cour d'appel de Douai et la Cour de cassation, et les frais d'huissier afférents à cette même procédure, dont il n'apparaît pas anormal que la charge incombe à la société Rodyn;

Considérant que les demandes de réparation formées de ces chefs seront en conséquence rejetées ;

Considérant que les appelantes arguent de la nullité et de l'inopposabilité à la société Nidor (ex LMBO Vendôme) de la convention de gestion conclue par l'intéressée le 10 mars 2003 avec la société LMBO qu'elles estiment illégale, faute d'avoir été ratifiée et fait l'objet d'un rapport du commissaire aux comptes conformément aux dispositions légales relatives aux conventions réglementées, et contraires aux intérêts de la société Nidor ; qu'elles ajoutent que la signature de cette convention constitue, de la part de la société LMBO, en sa qualité de présidente de la société Nidor, et de M. [B], dirigeant de la société LMBO, une faute de gestion engageant leur responsabilité et les obligeant à réparer le préjudice en ayant découlé pour elles qu'elles évaluent, s'appuyant en cela sur les travaux de M. [E], à 435.000 euros, soit au montant de la somme perçue en 2009 par la société LMBO au titre de la convention en litige ;

Considérant que les intimés estiment ces demandes irrecevables comme nouvelles en cause d'appel ;

Considérant qu'il est constant que la société Nidor (ex LMBO Vendôme) n'a pas présenté aux premiers juges, même implicitement ou virtuellement, la moindre demande en nullité ou aux fins d'inopposabilité de la convention de gestion concernée; que ladite demande ne tend manifestement pas aux mêmes fins que les prétentions formulées par elle en première instance ; qu'elle n'établit pas que, s'agissant d'une convention par elle conclue huit années auparavant avec son président, sa demande en nullité et aux fins d'inopposabilité puisse procéder de la survenance ou de la révélation d'un fait nouveau ; que la demande en nullité et aux fins d'inopposabilité formulée en appel par la société Nidor est donc irrecevable en application des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile;

Considérant que la société Rodyn, devenue actionnaire en janvier 2009 est recevable à contester la validité d'une convention conclue entre la société et son dirigeant et associé, la société LMBO ; qu'elle prétend n'avoir découvert l'existence de la convention en cause que grâce aux travaux de M. [E], qui ne se sont terminés que le 23 juillet 2010, soit postérieurement au prononcé du jugement dont appel ; qu'à supposer que cette assertion soit exacte et que la société Rodyn puisse exciper de la survenance d'un fait nouveau, force est de constater que l'article L 227-10 du code de commerce, ne sanctionne pas l'absence de rapport du commissaire aux comptes sur une convention soumise au contrôle des associés de la SAS et le défaut d'approbation de ceux-ci par la nullité ou l'inopposabilité de la convention concernée, mais dispose que celle-ci produit néanmoins ses effets, à charge pour la personne intéressée, et éventuellement pour le président et les autres dirigeants d'en supporter les conséquences dommageables pour la société ;

Considérant que la demande en nullité et aux fins d'inopposabilité de la convention de gestion du 10 mars 2003 formée par la société Rodyn doit donc être rejetée ;

Considérant que les appelantes, qui ont recherché, en première instance, la responsabilité de la société LMBO du chef de fautes dans la gestion de la société LMBO Vendôme à raison du non respect de dispositions légales et conventionnelles, sont recevables en leur action en responsabilité fondée sur la signature de la convention de gestion ;

Considérant, cependant, que la preuve n'est pas établie du caractère dommageable pour la société LMBO Vendôme de la conclusion, dès sa création en 2003 et en une délégation inscrite dans ses statuts, d'une convention confiant sa gestion à la société LMBO et reconnaissant à celle-ci une commission de gestion d'un taux annuel égal à 2,5 % TTC des capitaux appelés au dernier jour du trimestre précédent ; que la cour observe que la facturation des commissions versées à la société LMBO en vertu de cette convention ont toujours été approuvées, avec les comptes annuels, par l'assemblée générale des associés de la société LMBO Vendôme ; que la somme perçue en 2009 par la société LMBO correspond au montant de trois trimestres de commissions et, à hauteur de 350 978,48 euros, à l'indemnité contractuellement prévue en cas de résiliation (articles 6 et 7 de la convention de gestio), laquelle est effectivement intervenue et dont le caractère frauduleux, ou même seulement fautif, n'est pas démontré et ne saurait résulter de la seule circonstance qu'elle est survenue, le 19 novembre 2009, soit un mois seulement avant que la société LMBO quitte ses fonctions de présidente de la société LMBO Vendôme ;

Considérant que la demande de dommages et intérêts ainsi fondée sera donc rejetée ;

Considérant que les appelantes seront en conséquence déboutées de leur demande de dommages et intérêts du chef des préjudices dont elles ont chiffré le montant dans leurs écritures ; qu'elles ne démontrent l'existence d'aucun autre dommage en relation avec une quelconque faute des intimés ; que la cour n'a pas à pallier leur carence à cet égard en ordonnant une expertise ; que leur demande de communication de pièces n'est pas fondée, étant observé que leur expert, M. [E] a manifestement eu connaissance, grâce aux bilans de la société LMBO Vendôme de 2004 à 2008, du montant des honoraires de gestion versés à la société LMBO et que la facture de Maître [L] et le registre des ordres de mouvement leur ont été communiqués par les intimés ;

Considérant que compte tenu de la solution donnée au litige, la demande des intimés tendant à obtenir le paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive n'est pas fondée et sera rejetée ;

Considérant que l'équité commande de ne pas faire application, en l'espèce, au profit de d'une ou l'autre des parties, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Dit la société Rodyn recevable et fondée en sa demande en nullité de l'assemblée générale extraordinaire du 16 février 2009 et de tous les actes subséquents,

Annule ladite assemblée et tous les actes subséquents,

Dit la société Nidor irrecevable en sa demande tendant à voir dire nulle et inopposable à son égard la convention de gestion du 10 mars 2003,

Déboute la société Rodyn et la société Nidor de toutes leurs autres demandes,

Déboute la société LMBO et M. [B] de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Dit n'y a avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Laisse à chacune des parties la charge des dépens qu'elle a exposés en première instance et en appel et dit que les dépens d'appel pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 10/07119
Date de la décision : 02/05/2012

Références :

Cour d'appel de Paris I8, arrêt n°10/07119 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-05-02;10.07119 ?
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