La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/04/2012 | FRANCE | N°10/246887

France | France, Cour d'appel de Paris, C1, 03 avril 2012, 10/246887


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRET DU 3 AVRIL 2012

(no 115, 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/24688

Décision déférée à la Cour :

jugement du 8 décembre 2010 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 10/00970

APPELANTS

Monsieur Philippe X...

...

92100 BOULOGNE BILLANCOURT

représenté par Me Olivier BERNABE (avocat au barreau de PARIS, toque : B0753)

assisté

de Me Philippe CHARRON (avocat au barreau de PARIS, toque : B 453)

Madame Dominique Balbine X...

...

92100 BOULOGNE BILLANCOURT

représenté par...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRET DU 3 AVRIL 2012

(no 115, 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/24688

Décision déférée à la Cour :

jugement du 8 décembre 2010 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 10/00970

APPELANTS

Monsieur Philippe X...

...

92100 BOULOGNE BILLANCOURT

représenté par Me Olivier BERNABE (avocat au barreau de PARIS, toque : B0753)

assisté de Me Philippe CHARRON (avocat au barreau de PARIS, toque : B 453)

Madame Dominique Balbine X...

...

92100 BOULOGNE BILLANCOURT

représenté par Me Olivier BERNABE (avocat au barreau de PARIS, toque : B0753)

assisté de Me Philippe CHARRON (avocat au barreau de PARIS, toque : B 453)

INTIMEES

Société COVEA RISKS

19/21 allée de l'Europe

92110 CLICHY

représentée par Me Patricia HARDOUIN (avocat au barreau de PARIS, toque : L0056)

assistée de la SCP BOITELLE, HOCQUARD et ASSOCIES (Me Vincent PERRAUT) (avocats au barreau de PARIS, toque : P 87)

Société RLM

5 rue Alphonse de Neuville

75017 PARIS

représentée par Me Patricia HARDOUIN (avocat au barreau de PARIS, toque : L0056)

assistée de la SCP BOITELLE, HOCQUARD et ASSOCIES (Me Vincent PERRAUT) (avocats au barreau de PARIS, toque : P 87)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 février 2012, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :

Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre

Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller

Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN

ARRET :

- contradictoire

- rendu publiquement par Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur François GRANDPIERRE, Président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

******************

M. et Mme X..., qui ont souhaité acquérir un immeuble en 1987, avaient sollicité les conseils de M. A..., avocat fiscaliste membre de la SELARL RLM, et lui font reproche de leur avoir suggéré d'acquérir les titres de la société propriétaire pour ensuite louer l'immeuble à Mme X... sous le régime de la loi du 1er septembre 1948, comme le leur proposait son dirigeant, alors qu'il n'était plus possible à cette époque de donner en location des locaux libres selon ce régime juridique, ce qui a eu pour conséquence un redressement fiscal de la société, un redressement fiscal personnel du fait de la redistribution des dividendes et de la perception de loyers insuffisants et les contraint à dissoudre la société pour acquérir l'immeuble avec un surcoût très important.

Par jugement du 8 décembre 2010, le tribunal de grande instance de Paris les a déboutés de toutes leurs demandes en constatant que, si la faute n'est pas contestée par la SELARL RLM, aucune preuve n'est rapportée de l'existence d'aucun des chefs de préjudice.

CECI ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,

Vu l'appel de ce jugement par M. et Mme X... en date du 22 décembre 2010,

Vu leurs dernières conclusions déposées le 2 février 2012 selon lesquelles, poursuivant l'infirmation du jugement, ils demandent la condamnation de la SELARL RLM et de son assureur, la société COVEA RISKS, à leur payer les sommes de 26 996 € au titre des impositions complémentaires réglées par la société IUM, de 572 713 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice relatif au coût de la dissolution de la société IUM, à titre infiniment subsidiaire la désignation d'un expert pour vérifier les coûts comparés de la dissolution et du maintien dans la situation antérieure, la condamnation de la SELARL RLM et de son assureur à leur payer la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions déposées le 13 février 2012 par lesquelles la SELARL RLM et la société COVEA RISKS demandent la confirmation du jugement et la condamnation de M. et Mme X... in solidum à leur payer la somme de 4 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

SUR CE,

Considérant qu'au soutien de leur appel M. et Mme X..., qui indiquent que, désormais, la réclamation fiscale les concernant à titre personnel est prescrite, font essentiellement valoir que, par la faute, non contestée, de leur avocat, qui leur a fait conclure un bail relevant de dispositions abrogées puis l'a renouvelé 9 ans plus tard sous les mêmes conditions, ils ont été privés de la propriété directe de leur résidence principale puisque la dissolution de la société IUM est la seule solution susceptible d'y aboutir et que, mieux informés, ils auraient pu renoncer à acquérir les parts de la société, acquérir directement l'immeuble ou acquérir un autre bien ; que cette faute a eu des conséquences "ruineuses" puisqu'ils ont dû acquitter un "loyer trop élevé", ce dont ils auraient été dispensés s'ils avaient acquis l'immeuble, et qu'ils ne pouvaient récupérer, au titre des dividendes, qu'une somme "diminuée de l'impôt sur les sociétés" et de plus "imposable à l'IRPP" ; qu'ils indiquent que, contrairement à ce qu'énonce le tribunal, ils fournissent la preuve du redressement fiscal de la société et de ses conséquences sur leur patrimoine personnel, à savoir leurs avis d'imposition des années 2005 à 2007 inclus, s'étant appauvris du fait du paiement du complément d'impôt sur les sociétés alors qu'il détiennent la société IUM à 99%, que la société est désormais dissoute et que l'immeuble est devenu leur propriété indivise, leur imposant de régler l'impôt sur les sociétés, la CGS et la CRDS sur le boni de liquidation, les frais d'acte notarié, d'avocat, d'expert-comptable, un complément d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2010 sur le boni de liquidation, soit une somme totale de 572 713 € qui renchérit d'autant le prix d'acquisition de l'immeuble ;

Que pour s'y opposer la SELARL RLM et la société COVEA RISKS soutiennent tout d'abord que M. et Mme X... n'ont pas qualité à agir en remboursement d'une imposition qui n'a pas été acquittée par eux mais par la société IUM et que, si ce paiement a pu avoir une incidence néfaste sur leur patrimoine puisqu'ils détenaient 99% du capital, leur préjudice ne peut être l'égal exact de la somme payée par la société ; qu'elles observent que la prétention liée à la dissolution de la société IUM est confuse, aucun détail n'étant fourni sur ce qui relève de celle-ci et de ce qui incombe à M. et Mme X..., qu'aucune preuve n'est avancée de la nécessité de la dissolution et surtout que l'indemnisation recherchée consiste à obtenir le bénéfice attendu d'une opération qui était illicite et qui ne peut donc être un dommage indemnisable, dans la mesure où la cession de droits sociaux n'a été préférée, à l'époque, à la cession de l'immeuble que du fait de sa fiscalité beaucoup plus légère qui permettait d'obtenir le prix attendu de la vente, et qu'ils cherchent, en fait, à "neutraliser le coût représenté par le fait d'être personnellement propriétaires" ; que, surabondamment, ce "supposé dommage... est à confronter à l'avantage considérable qu'ils ont pu tirer de la situation juridique qu'ils critiquent aujourd'hui" durant la période échappant, du fait de la prescription, au redressement fiscal, soit 18 ans, en payant un loyer dérisoire au lieu de celui du marché ;

Considérant que n'est pas discutée la faute commise par l'avocat qui a rédigé, en 1987, un bail soumis à la loi du 1er septembre 1948 au profit de Mme X... alors que les locaux étant libres, par l'effet de la vente des parts de la société IUM, et la loi du 23 décembre 1986 ayant interdit la conclusion de nouveaux baux soumis à cette loi pour les locaux d'habitation vacants, un tel bail n'était plus possible ; que n'est pas plus discutée la récidive, en 1996, lors du renouvellement du bail en question, toujours soumis à la loi, inapplicable à ce local, de 1948 ;

Qu'est seulement en débat le préjudice qui en est résulté pour M. et Mme X... en lien avec le manquement en question ;

Que les appelants énoncent que cette faute les a privés du choix de pouvoir acquérir directement l'immeuble au lieu de n'acquérir que les titres de la société propriétaire et a eu des conséquences fiscales néfastes pour la société acquise et, par voie de conséquence, sur eux personnellement ;

Considérant cependant que la SELARL RLM et la société COVEA RISKS leur opposent exactement que ce choix n'existait pas en fait, le gérant de la société étant revenu sur le mandat de vendre l'immeuble qu'il avait donné à un agent immobilier pour ne plus donner qu'un mandat de vendre les titres de la société, seule solution fiscalement intéressante pour lui, ainsi qu'il résulte des mandats successifs versés ; qu'en conséquence, le choix prétendument perdu par la faute de l'avocat n'a pas existé ; qu'il en résulte que le seul préjudice en lien causal avec le manquement tenant à la conclusion d'un bail illicite au moment de sa signature consiste en le redressement imposé du fait de la perception de loyers trop faibles par la société ;

Considérant qu'il est constant que la société IUM a dû, à ce titre, acquitter des droits d'un montant de 26 996 € ; que c'est cette somme précise dont M. et Mme X... réclament le remboursement par la SELARL RLM et la société COVEA RISKS en réparation de leur préjudice ; que ces dernières leur rétorquent justement que ce préjudice étant celui de la société, ils sont sans droit pour en demander le paiement sauf à démontrer, ce qu'ils s'abstiennent de faire, dans quelle mesure le redressement fiscal de la société a eu une influence directe sur leur patrimoine personnel, le simple constat qu'ils détiennent les parts de la société à 99% étant insuffisant à cet égard ;

Que le jugement, qui les a déboutés de ce chef de demande pour ce même motif en de plus amples développements, ne peut qu'être approuvé, aucun arguments ni pièces nouveaux ou différents n'étant apportés en appel ;

Considérant que M. et Mme X... mettent également en avant le préjudice qui est résulté, pour elle, de l'obligation dans laquelle elle s'est trouvée, à compter du 15 janvier 2009, après que soit intervenu le redressement, d'acquitter un loyer "au prix du marché" au lieu d'un "loyer dérisoire" sur lequel ils comptaient, par l'effet du bail irrégulier rédigé par la SELARL RLM ;

Que sur ce point, s'ils admettent que ces loyers auraient été encaissés par la société IUM dont ils détiennent 99% des parts et leur auraient été redistribués comme dividendes, réduisant d'autant le préjudice qui en résulterait, ils soutiennent que, néanmoins, ils devront acquitter des impôts sur ces sommes, comme la société elle-même, ce qui aboutirait selon eux, au terme d'une démonstration quelque peu confuse, à un coût supplémentaire de 28 284 € par an ;

Que toutefois ces calculs ne faisant pas, comme le soulignent avec pertinence la SELARL RLM et la société COVEA RISKS, et comme l'avait déjà relevé le tribunal dans des termes qui méritent approbation, de distinction claire entre ce qui relève du préjudice de la société et de celui de M. et Mme X..., étant rappelé qu'ils ne peuvent réclamer que le second, les appelants ne mettent par la juridiction en situation d'apprécier le préjudice dont ils revendiquent l'indemnisation ; qu'en outre, en tout état de cause, il conviendrait, pour apprécier ce poste d'indemnisation, de le mettre en balance avec le gain résultant, durant près de vingt ans, du paiement d'un loyer relevant de l'application de la loi du 1er septembre 1948 ;

Considérant que M. et Mme X..., qui indiquent que la société IUM a fait l'objet d'une dissolution, désormais effective, qu'ils présentent comme la seule solution à même de mettre un terme à la situation ci-avant décrite, résultant du paiement de loyers supérieurs et d'impôts y afférents, ainsi que de leur donner la pleine propriété de l'immeuble, sollicitent, à titre indemnitaire, le coût de cette dissolution ;

Que cependant, ils n'expliquent pas pourquoi cette dissolution s'imposait, la suggestion selon laquelle la propriété de l'immeuble était leur but et non celle de parts sociales étant en contradiction avec les faits ci-dessus constatés, notamment à la lecture des mandats de vendre, et aucune évidence ne ressortant de leurs propos évasifs à ce sujet, comme le fait observer à raison la SELARL RLM et la société COVEA RISKS ;

Que par voie de conséquence, et faute de justifier de la nécessité de dissoudre la société IUM, en lien causal avec la faute de l'avocat, M. et Mme X... ne pourront qu'être déboutés de ce chef ;

Considérant que l'équité ne commande pas, en l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant que, compte tenu du manquement de la SELARL RLM à ses obligations, elle supportera seule, avec son assureur la société COVEA RISKS, les dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement,

Condamne la SELARL RLM, in solidum avec la société COVEA RISKS, aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Cour d'Appel de Paris ARRET DU 3 AVRIL 2012

Pôle 2 - Chambre1 RG no 10/24688 - ème page


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 10/246887
Date de la décision : 03/04/2012
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2012-04-03;10.246887 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award