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19/01/2012 | FRANCE | N°09/05938

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 19 janvier 2012, 09/05938


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRET DU 19 Janvier 2012

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/05938 - MAC



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Mai 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG n° 07/07126



APPELANTE

SARL SOGEPI

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Serge MAREC, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué

par Me Linda HALIMI, avocat au barreau de PARIS, toque : A427



INTIMEES

Madame [D] [L] épouse [E]

[Adresse 3]

[Localité 6]

comparant en personne



SA R.P.S.

[Adresse 2]

[...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRET DU 19 Janvier 2012

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/05938 - MAC

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Mai 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG n° 07/07126

APPELANTE

SARL SOGEPI

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Serge MAREC, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Linda HALIMI, avocat au barreau de PARIS, toque : A427

INTIMEES

Madame [D] [L] épouse [E]

[Adresse 3]

[Localité 6]

comparant en personne

SA R.P.S.

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Serge MAREC, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Linda HALIMI, avocat au barreau de PARIS, toque : A427

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 Décembre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine METADIEU, Présidente

Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère

M. Julien SENEL, Vice-Président placé sur ordonnance du Premier Président en date du 20 juillet 2011

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Mme Catherine METADIEU, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Mme [E] a été engagée par la SARL Sogepi en qualité de directeur business développement, suivant un contrat de travail à durée indéterminée du 15 janvier 2006.

Mme [E] a démissionné de ses fonctions le 1er juin 2007 puis a signifié à son employeur par un courrier du 4 juin 2007 qu'elle prenait acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur en raison du non-paiement des salaires correspondant aux mois de février à mai 2007.

Mme [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris afin d'obtenir la condamnation solidaire de la SARL Sogepi et de la société RPS, à lui régler un rappel de salaire et diverses indemnités, la démission valant prise d'acte de la rupture et devant avoir les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par un jugement du 19 mai 2007, le conseil de prud'hommes de Paris, section encadrement, a mis hors de cause la société RPS et a pris acte que la SARL Sogepi reconnaissait devoir à Mme [E] la somme de 670,25 euros à titre de solde de rappel de congés payés.

Ce conseil de prud'hommes a aussi condamné la SARL Sogepi à verser à Mme [E] les sommes suivantes :

- 32'000 € à titre de rappel de salaire en deniers et quittances,

- 24'000 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 2400 € au titre des congés payés afférents,

- 450 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

et a débouté Mme [E] du surplus de ses demandes.

La SARL Sogepi et la société RPS ont relevé appel de ce jugement et demandent à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a mis hors de cause la société RPS, considéré que la rupture du contrat de travail s'analysait comme une démission, débouté Mme [E] de ses demandes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, pour congés payés, pour travail dissimulé, et de remise de l'attestation Pôle emploi sous astreinte, mais de l'infirmer en ce qu'il a condamné la SARL Sogepi à verser une indemnité de préavis, des congés payés afférents, un rappel de salaire alors qu'elle avait perçu 23 000 € d'acomptes sur salaire 2007, somme supérieure à ce qu'elle pouvait prétendre.

La SARL Sogepi confirme qu'elle reconnaît devoir sept jours de congés payés non pris aux termes du bulletin de salaire 2007.

Elle propose que la cour ordonne la compensation entre cette dette avec sa créance au titre du trop versé sur les avances sur salaires de janvier à mai 2007.

À titre reconventionnel, la SARL Sogepi réclame la restitution du téléphone mobile et de l'ordinateur portable mis à sa disposition et ce sous astreinte de 1000 € par jour de retard passé un délai d'un mois après la signification de l'arrêt à intervenir.

Enfin, la SARL Sogepi sollicite une indemnité de 1500 € titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [E] conclut à la confirmation du jugement déféré et insiste pour que les sommes allouées lui soient versées.

La rémunération brute mensuelle de Mme [E] s'élevait à 8000 €.

Motifs :

Sur la mise hors de cause de la société RPS :

C'est à la salariée qui prétend avoir travaillé dans le cadre d'un lien de subordination à l'égard de la société RPS de justifier de celui-ci.

Au regard des éléments communiqués, il apparaît que Mme [E] a conclu un contrat de travail avec la SARL Sogepi, laquelle société lui a délivré les bulletins de paye et lui a réglé des salaires jusqu'à la fin de l'année 2006.

Pour établir qu'elle a travaillé essentiellement pour la société RPS, Mme [E] expose que la SARL Sogepi est une filiale de la société RPS dont l'activité est la maîtrise technique de tranchées en milieu urbain et suburbain, qu'elle a été embauchée en tant qu'expert en monétique et systèmes de sécurité dans le but de développer ces deux activités, que les deux entreprises appartiennent à M [B] et sont dirigées par lui.

Elle explique qu'elle a notamment été mandatée par M. [B] pour effectuer un déplacement en Algérie s'agissant de la sécurisation des sites d'hydrocarbures de la société Sonatrach, que sa mission était consacrée à l'appel d'offres pour le compte de RPS dont le chiffre d'affaires avait jusqu'alors été de 10 millions d'euros, l'appel d'offres portant sur un enjeu de 10,5 millions d'euros. Elle ajoute qu'une fois le marché obtenu, elle a dirigé l'ensemble du projet avec une équipe pluridisciplinaire en Algérie pour mener à bien ce projet.

Il résulte d'un fax expédié par M. [J], directeur technique LQS de la société Sonatrach, que Mme [E] et son collègue M. [Y] étaient les représentants des établissements RPS pour appréhender sur place, en Algérie, les besoins relatifs au projet de système de télésurveillance, de contrôle d'accès et de rondes.

Le nom de Mme [E] apparaît également sur l'organigramme fonctionnel RPS du projet CCTV.

L'employeur fait aussi écrire que Mme [E] a été immédiatement affectée à la mission Sonatrach, auprès de RPS dès son embauche, ce qui conforte l'affirmation de la salariée selon laquelle elle a été amenée à travailler dans le cadre d'un lien de subordination à l'égard des deux sociétés.

Il s'ensuit que Mme [E] est fondée à prétendre qu'elle exerçait son activité professionnelle dans le cadre d'un lien de subordination tant à l'égard de la société RPS qu'à l'égard de la SARL Sogepi.

Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a mis hors de cause la société RPS.

Sur la démission :

Il résulte des pièces communiquées que Mme [E] a adressé à M. [B] sa démission le 1er juin 2007, et a par un courriel du 4 juin 2007 précisé

'je vous confirme ma prise d'acte de la rupture de mon contrat de travail à vos torts en raison du non-paiement des salaires correspondant aux mois de février, mars, avril et mai 2007.'

D'après le contrat de travail, la rémunération trimestrielle brute de la salariée était fixée de la manière suivante :

- 15'000 € pour le premier trimestre,

- 19'500 € pour le deuxième trimestre,

- 24'000 € pour le troisième trimestre,

- 29'700 € pour le quatrième trimestre.

Il était précisément spécifié que la rémunération fixe annuelle brute pour l'année 2006 serait de 88,2 k€.

Le contrat prévoyait également une rémunération variable pour l'année 2006 objectifs atteints de 20 % de la rémunération fixe annuelle brute ,soit 17,64 k€ sur l'année, les objectifs étant mesurés sur les résultats.

Pour 2007, la rémunération variable était négociable.

Enfin, le contrat prévoyait qu'une association au capital de la SARL Sogepi était à envisager en 2007.

L'examen du bulletin de salaire du mois de décembre 2006 montre que le montant de la rémunération brute a atteint la somme de 81'000,20 €, soit une somme inférieure à celle qui était contractuellement prévue.

Les bulletins de salaire ne font au surplus aucune mention d'une part variable de la rémunération.

Les deux parties s'accordent sur le fait que début 2007, Mme [E] a perçu au total 23'000 €, soit

- 5000 € le 1er février 2007,

- 6000 € le 28 février 2007,

- 6000 € le 30 mars 2007,

- 6000 € le 2 mai 2007.

Mme [E] soutient que les parties s'étaient accordées verbalement pour que le salaire soit lissé pour l'année 2007, ce qui est corroboré par le fait que ces quatre versements correspondaient en réalité au versement des salaires pour les quatre premiers mois de l'année soit pour les mois de janvier, février, mars et avril 2007, ce qui correspondait à un salaire brut de 29'400 € soit 88'200 pour l'année, rémunération fixe arrêtée contractuellement pour l'année 2006.

Il s'ensuit que la remise en cause par la salariée, dès le 4 juin 2007, de sa démission adressée à l'employeur le 1er juin 2007, à raison des manquements imputables à l'employeur s'agissant du non-paiement intégral de la rémunération due était fondée, la démission étant dans ce contexte équivoque.

Elle s'analyse donc en une prise d'acte de la rupture elle même devant produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, au regard des manquements graves de l'employeur s'agissant du non paiement d'une partie de la rémunération.

Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents :

Dès lors que la prise d'acte de la rupture doit avoir les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents étaient dus.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a accordé à la salariée les sommes de 24'000 € et de 2 400 € à ces titres.

La société RPS en tant que co-employeur sera également condamnée au paiement de ces sommes.

Sur le rappel de salaire :

Mme [E] réclame la confirmation du jugement déféré ayant condamné son employeur à lui verser la somme de 32 000 €.

Lors de l'audience, elle a précisé qu'en réalité elle évaluait à la somme de 34'575,96 € le montant de la rémunération demeurée impayée.

Il a été précédemment relevé que le salaire fixe brut pour l'année 2006 s'est élevé à la somme de 81'000, 20 € alors qu'il était contractuellement stipulé que la rémunération fixe brute serait de 88'200 €.

Une somme de 7199,80 euros reste donc due au titre de l'exercice 2006.

Par ailleurs, l'employeur a subordonné le bénéfice de la partie variable de la rémunération à la réalisation d'objectifs dont il n'est pas établi qu'ils ont été portés à un moment ou un autre à la connaissance de la salariée et vérifiables par celle-ci.

Il convient en conséquence d'accorder à la salariée la partie variable prévue contractuellement à objectifs atteints soit 20 % de 88'200 € bruts ce qui correspond à la somme de 17'640€.

Enfin, sur l'année 2007, un reliquat de salaire brut de 8179 € est dû.

Il s'ensuit que la somme restant due à la salarié s'élève à la somme de 33'018,80 €.

Toutefois, compte tenu des limites de la demande, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a accordé à la salariée un rappel de salaire à hauteur de 32 000 €.

Il sera simplement réformé sur un point.

En effet, dès lors que la société RPS a la qualité de co-employeur, la condamnation sera également prononcée à son égard.

Lors des débats, Mme [E] s'étant limitée à solliciter la confirmation du jugement n'a pas soutenu sa demande de rappel d'indemnité de congés payés.

La cour confirmera simplement le jugement déféré en ce qu'il a pris acte que la SARL Sogepi reconnaissait devoir à la salariée la somme de 670,25 euros à titre de solde de rappel de congés payés, et l'en a, au besoin condamnée au paiement, la SARL Sogepi confirmant cette reconnaissance de dette.

Sur la demande de restitution du téléphone portable et de l'ordinateur :

Mme [E] ne conteste pas ne pas avoir restitué le téléphone portable dont elle soutient que la ligne a été suspendue une semaine après son départ ni l'ordinateur, faisant observer que personne ne lui a demandé la restitution de quelque document que ce soit.

Ces deux éléments étant la propriété de la SARL Sogepi, il sera fait droit à sa demande de restitution.

Aucune astreinte ne sera pourtant ordonnée, une telle demande étant prématurée.

Sur la demande d'indemnité en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile :

Les deux sociétés, qui succombent dans cette procédure, seront déboutées de leur demande d'indemnité en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamnées aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

Statuant contradictoirement et publiquement,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a pris acte que la SARL Sogepi reconnaissait devoir à Mme [E] la somme de 670,25 euros à titre de solde de rappel de congés payés et l'a condamnée en tant que de besoin au paiement et a accordé à la salariée les sommes suivantes :

- 32'000 € au titre du rappel de salaire,

- 24'000 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 2400 € au titre de congés payés afférents,

- 450 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'infirme pour le surplus

Statuant à nouveau,

Dit n'y avoir lieu à mettre en cause la société RPS,

Dit que la démission était équivoque, qu'elle vaut prise d'acte de la rupture aux torts exclusifs de l'employeur et doit avoir les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Dit que la société RPS est condamnée solidairement avec la SARL Sogepi au paiement des sommes allouées à Mme [E],

Déboute les deux sociétés de leur demande d'indemnité en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL Sogepi et la société RPS aux entiers dépens

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 09/05938
Date de la décision : 19/01/2012

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°09/05938 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-01-19;09.05938 ?
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