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22/11/2011 | FRANCE | N°10/12304

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2- chambre 1, 22 novembre 2011, 10/12304


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 22 NOVEMBRE 2011
(no 342, 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 12304
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 décembre 2006 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS 1ère chambre 1ère section arrêt de la Cour d'appel de PARIS rendu le 3 juin 2008 1ère chambre section A arrêt du 20 janvier 2010 rendu par la Cour de Cassation 1ère chambre civile

SUR RENVOI APRÈS CASSATION

DEMANDEUR À LA SAISINE

Monsieur Charles X... ... LOME-TOGO

représenté par la SCP BERNABE-CHARDIN...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 22 NOVEMBRE 2011
(no 342, 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 12304
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 décembre 2006 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS 1ère chambre 1ère section arrêt de la Cour d'appel de PARIS rendu le 3 juin 2008 1ère chambre section A arrêt du 20 janvier 2010 rendu par la Cour de Cassation 1ère chambre civile

SUR RENVOI APRÈS CASSATION

DEMANDEUR À LA SAISINE

Monsieur Charles X... ... LOME-TOGO

représenté par la SCP BERNABE-CHARDIN-CHEVILLER, avoué à la Cour assisté de Maître PUTIGNY-RAVET substituant Maître LOMBARD, avocat au barreau de Paris, E 183

DÉFENDEUR À LA SAISINE

Monsieur L'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR représentant l'Etat Français 75703 PARIS CEDEX 13

représenté par Maître Frédéric BURET, avoué à la Cour assisté de Maître Carole PASCAREL, avocat au barreau de Paris, P 261 U. G. G. C.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 4 octobre 2011, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :
Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller Mme Line TARDIF, Conseiller venu d'une autre chambre pour compléter la cour en application de l'ordonnance de roulement portant organisation des services de la cour d'appel de PARIS à compter du 3 janvier 2011, de l'article R 312-3 du Code de l'organisation judiciaire et en remplacement d'un membre de cette chambre dûment empêché

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Isabelle COULON

MINISTERE PUBLIC : Madame ARRIGHI de CASANOVA, avocat général, a fait connaître ses conclusions

ARRET :
- contradictoire-rendu publiquement par Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé par Monsieur François GRANDPIERRE, président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

***************

La Cour,
Considérant que, le 12 février 1971, Victor D..., dit Vasarely, peintre, et Claire F..., son épouse ont créé la fondation Vasarely dont la présidence a été assurée par l'artiste, puis du 15 mars 1985 au 8 avril 1993, par M. Charles X... ; Que, lors du règlement de la succession de Mme E..., décédée le 27 décembre 1990, un conflit a opposé le peintre à André E... et à Jean-Pierre E..., ses deux fils, et, à cette occasion, les consorts E... ont déposé plaine avec constitution de partie civile devant le doyen des juges d'instruction du Tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence contre M. X..., le 23 octobre 1992, du chef d'abus de confiance, de complicité et de recel, le 5 janvier 1993, des chefs d'escroqueries et de tentative d'escroquerie, puis le 24 février 1994, M. E... seul, des chefs de vol, d'abus de confiance et de recel ; Que M. X... a été mis en examen le 28 novembre 1994 du chef d'abus de confiance pour avoir détourné des fonds ou des œ uvres d'art appartenant à la fondation ou aux consorts E... et pour avoir acquitté des dépenses personnelles sur les deniers de ladite fondation pour une somme d'1 million de francs, environ ; Que, sur une plainte déposée par M. X... pour violences commises par des dépositaires de l'autorité publique et actes attentatoires à la liberté individuelle et par une ordonnance du 15 juin 1995, le juge d'instruction a refusé partiellement d'informer ; que cette décision a été confirmée par un arrêt de la chambre d'accusation, devenu irrévocable après le rejet, intervenu le 28 janvier 1997, du pourvoi formé par M. X... ; Que, par un arrêt du 3 juin 1998, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par M. X... contre un arrêt de la chambre d'accusation qui a rejeté sa requête en nullité de la procédure d'instruction ouverte contre lui ; Que, par ordonnance confirmée le 27 avril 2000 par la chambre d'accusation, le juge d'instruction a rejeté la demande présentée par M. X... et tendant à l'annulation de certains actes de procédure ; Que, renvoyé devant le tribunal correctionnel d'Aix-en-Provence par ordonnance du 26 juin 2001, M. X... a été déclaré coupable par cette juridiction des délits d'abus de confiance, de faux et d'usage de faux ; que, par un arrêt partiellement infirmatif du 7 janvier 2003, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence l'a relaxé du chef des délits de faux et d'abus de confiance pour partie des sommes dont le détournement lui était reproché ; que cet arrêt a été cassé et annulé par un arrêt du 6 octobre 2004 et que, sur renvoi et par arrêt du 11 mai 2005, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a condamné M. X... des chefs d'abus de confiance, de faux et d'usage de faux à la peine de deux ans d'emprisonnement dont un an avec sursis, à une amende de 150. 000 francs et à la privation de ses droits civiques, civils et de famille pendant cinq ans ;

Considérant qu'estimant avoir été victime d'un fonctionnement défectueux du service de la justice, M. X... a saisi le Tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement rendu le 20 décembre 2006 et confirmé par la Cour le 3 juin 2008, l'a débouté de toutes ses demandes ; Que, par arrêt du 20 janvier 2010, la Cour de cassation a cassé et annulé, dans toutes ses dispositions, l'arrêt de la Cour d'appel et renvoyé l'affaire devant la Cour autrement composée ; que, pour statuer ainsi, la Cour de cassation a estimant qu'en n'examinant pas les lettres des 11 et 16 janvier 1996 versées aux débats, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile et qu'ainsi, elle s'est abstenue de répondre au moyen soulevé par M. X... qui soutenait n'avoir pas eu accès au dossier pénal, à tout le moins depuis le début de l'année 1995 ;

Considérant qu'appelant du jugement, M. X... demande que l'Etat soit condamné à lui payer la somme de 750. 000 euros en réparation des préjudices nés de l'atteinte portée aux droits de la défense et au principe du procès équitable, la somme de 350. 000 euros correspondant aux réparations qu'il a été indûment condamné à payer à l'hoirie E..., la somme de 990. 919 euros en réparation du préjudice matériel particulier lié à la perte de clientèle, à la notoriété de son cabinet et à la perte de la présidence du quotidien Le Dauphiné libéré, la somme de 405. 000 euros en réparation du préjudice résultant de la perte de chance des avantages liés à ses fonctions au sein du Dauphiné libéré, la somme de 750. 000 euros en réparation de son préjudice moral et la somme de 2. 070. 000 euros au titre du temps passé à préparer sa défense ; Qu'au soutien de ses prétentions, il fait d'abord valoir que ses demandes sont recevables dès lors que l'ensemble des griefs invoqués portent sur les actes qu'il était en droit d'attendre du service de la justice au regard des faits connus des juridictions saisies ; Qu'au fond, invoquant notamment les articles 141-1 du Code de l'organisation judiciaire et 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme, l'appelant soutient successivement 1o) qu'au début de l'année 1995, il n'a pas eu accès aux pièces du dossier pénal, 2o) que la juridiction d'instruction n'a effectué aucune investigation sur l'autonomie et la capacité de Victor E..., 3o) qu'elle a refusé toute confrontation, 4o) que cette juridiction a refusé d'entendre les membres du conseil d'administration de la fondation et de les confronter avec lui, rejeté les demandes d'actes d'instruction et dénaturé des faits relatifs à la dissimulation de dépenses, 5o) qu'elle a dénaturé les termes du rapport de l'expertise des quittances qu'il a produites, 6o) qu'elle a également dénaturé le témoignage de Mme Lucia G..., ancienne secrétaire du peintre, cité à l'appui des conclusions de l'expert, 7o) que des militaires de la gendarmerie ont réalisé des investigations en dehors de tout cadre légal et de toute saisine valable, 8o) que la juridiction d'instruction a omis de statuer sur des éléments présentés par la défense et 9o) qu'elle a refusé de verser au dossier les pièces de l'instruction menée par Mme Imbert sur une plainte qu'il a déposée ; Qu'enfin, M. X... s'explique sur les différents chefs de préjudices dont il sollicite la réparation ;

Considérant que L'Agent judiciaire du Trésor conclut à la confirmation du jugement aux motifs que, d'une part, M. X... ne démontre pas que l'Etat ait commis une faute lourde, ni un déni de justice au sens de l'article 141-1 du Code de l'organisation judiciaire et susceptible d'engager sa responsabilité pour fonctionnement défectueux du service de la justice et que, d'autre part et subsidiairement, il ne justifie pas du préjudice allégué ; Qu'il fait valoir, en particulier, que les moyens soulevés par M. X... ont déjà été débattus et qu'ils ont donné lieu à des décisions écartant ses allégations, soit devant la juridiction d'instruction, soit devant la juridiction de jugement, que d'autres moyens ont donné lieu à une décision contre laquelle aucune voie de recours pertinente n'a été exercée ; qu'en réalité, il conteste tous les griefs articulés par M. X... et qu'a déjà rejetés le Tribunal de grande instance de Paris et la Cour dans des dispositions qui n'ont pas été critiquées par la Cour de cassation ; Que, s'agissant du prétendu défaut d'accès au dossier pénal, seul point sur lequel l'arrêt de la Cour d'appel a été cassé et annulé, l'Agent judiciaire du Trésor soutient qu'il n'existe, en la cause, aucun déni de justice dès lors que les correspondances versées aux débats ne démontrent aucunement que le dossier d'instruction serait resté abusivement inaccessible à la défense. Qu'enfin, l'Agent judiciaire du Trésor souligne que M. X... ne justifie pas de la réalité des divers dommages dont il demande réparation alors, notamment, qu'il n'existe aucun lien démontré entre l'affaire pénale et la démission des fonctions exercées au sein du Dauphiné libéré et que l'Etat ne saurait supporter la charge définitive des sommes allouées aux parties civiles ;

Considérant que M. le procureur général conclut à la confirmation du jugement pour de mêmes et semblables motifs, notamment quant au prétendu défaut d'accès au dossier pénal et ce, en soulignant que tous les griefs articulés par M. X..., à l'exception de celui-là, ont déjà été rejetés par les premiers juges et par la Cour d'appel en des motifs qui n'ont pas été censurés par la Cour de cassation ;
SUR CE :
Considérant que la recevabilité de l'action n'est pas contestée et que, même si la cour de cassation a cassé l'arrêt du 3 juin 2008 dans toutes ses dispositions en retenant un défaut de motivation touchant l'un des nombreux griefs articulés par M. X... à l'appui de sa demande d'indemnisation, il n'en demeure pas moins qu'il est en droit de reprendre devant la juridiction de renvoi, l'ensemble des moyens qu'il estime utiles au succès de ses prétentions ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 141-1 du Code de l'organisation judiciaire, « l'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service de la justice » ; que, « sauf dispositions particulières, cette responsabilité n'est engagée que par une faute lourde ou par un déni de justice » ; Qu'il s'infère de ce texte que, d'une part, la faute lourde est caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service de la justice à remplir la mission dont il est investi et que, d'autre part, le déni de justice s'entend non seulement du refus de répondre aux requêtes ou de la négligence à juger les affaires en état de l'être, mais aussi de tout manquement de l'Etat à son devoir de protection juridictionnelle de l'individu qui comprend notamment le droit de tout justiciable de voir statuer sur ses prétentions dans un délai raisonnable ; qu'ainsi défini, le déni de justice s'apprécie au regard des circonstances propres à chaque affaire ; Considérant que, rappelées ces règles, il y a lieu d'examiner les griefs articulés par M. X... contre la manière dont a été menée la procédure pénale qui le visait et, tout particulièrement, au regard des actes qu'il était en droit d'attendre du service de la justice compte tenu des faits connus des juridictions saisies ;

1o) En ce qu'au début de l'année 1995, il n'a pas eu accès aux pièces du dossier pénal :
Considérant qu'en vertu de l'article 114, alinéa 3, du Code pénal, « la procédure est mise à leur disposition des avocats quatre jours ouvrables au plus tard avant chaque interrogatoire de la personne mise en examen … » ; qu'« après la première comparution de la personne mise en examen …, la procédure est également mise à la disposition des avocats durant les jours ouvrables, sous réserve des exigences du bon fonctionnement du cabinet de l'instruction » ; Considérant qu'en l'occurrence et pour arguer d'un accès tardif au dossier pénal, M. X... produit deux lettres adressées par un de ses conseils au juge d'instruction, l'une le 11 janvier 1995, l'autre le 16 janvier 1995, une réponse du magistrat en date du 16 janvier 1995 et une télécopie datée du même jour et expédiée par l'autre conseil de M. X... ; Considérant que, par la lettre du 11 janvier 1995, le conseil de M. X... expliquait au juge d'instruction qu'il s'était présenté le même jour pour examiner les scellés ouverts après avoir téléphoné au service des pièces à conviction et qu'il lui a été dit de se présenter le lendemain à 9 heures ; qu'un retard d'une journée pour examiner des pièces à conviction n'est pas constitutif d'un déni de justice alors surtout que, compte tenu de la nature de la diligence, le retard n'a eu aucune influence sur la durée de la détention de M. X... ; Que, par sa lettre du 16 janvier 1995, M. H..., conseil de M. X..., prend note de l'annulation de l'interrogatoire auquel il devait procédé les 16 et 17 janvier 1995 et qu'il attire l'attention du juge d'instruction sur le fait que la communication du dossier a été différée pendant deux mois et, partant, sur l'atteinte des droits de la défense qui en résulte ; qu'en réponse, le magistrat a fait connaître, le même jour, à l'avocat que M. X... n'avait pas encore été interrogé, que le report de l'interrogatoire s'inscrivait dans le souci de communiquer toutes les pièces à la défense avant tout interrogatoire au fond et que, en tous cas, M. X..., qui venait de cesser une grève de la faim, n'était pas en état de comparaître ; que, par la télécopie adressée ce même 16 janvier 1995, M. Mimran-Valensi, avocat, insiste également pour que l'interrogatoire ait lieu le plus tôt possible ; Que M. X... ne conteste pas utilement la véracité de ces faits ; Qu'il suit de là que, même si le report de l'interrogatoire a pu avoir pour effet de prolonger la détention provisoire de M. X..., une telle mesure était justifiée par les circonstances particulières de l'affaire alors surtout qu'en agissant autrement, le magistrat aurait pu s'entendre reprocher d'avoir interrogé une personne dans un état de faiblesse physique, voire psychologique ; Considérant que l'échange des correspondances dont il s'agit n'établit aucunement que les pièces de la procédure fussent restées inaccessibles pendant deux mois dès que, précisément, le magistrat exprime la volonté d'assurer la mise à disposition desdites pièces à l'avocat ; Qu'en conséquence, il n'existe au regard d'un prétendu retard de communication du dossier pénal, ni faute lourde, ni déni de justice au sens des dispositions susvisées ;

Considérant qu'enfin, si la Cour de cassation a cassé l'arrêt sur le fondement de l'article 445 du Code de procédure civile relatif à la motivation des jugements, cette décision démontre que, par l'exercice d'un pourvoi, M. X... a fait réparer une erreur de droit commise par la juridiction du fond ; que, dès lors, ce que le susnommé regarde comme un mauvais fonctionnement du service de la justice ayant été réparé par l'exercice d'une voie de recours, ne sont caractérisés, ni la faute lourde, ni le déni de justice allégués ;
2o) En ce que la juridiction d'instruction n'a effectué aucune investigation sur l'autonomie et la capacité de Victor E... :
Considérant que, s'agissant de l'absence d'investigation relative à l'autonomie et à la capacité de Victor E..., le Tribunal a justement relevé que le prétendu état d'insanité d'esprit n'était pas caractérisé au moment du dépôt des deux premières plaintes et que, quoiqu'il fût, ont ensuite été déposées, outre la plainte du peintre, qui, à l'époque, n'était pas encore placé sous tutelle, celle de ses fils dont la capacité n'est pas contestée ; qu'en outre et surtout, le ministère public a pris des réquisitions dans le même sens ; Qu'il y a lieu également lieu de relever que le rapport d'expertise invoqué par M. X..., en vue d'apprécier si, au début de l'année 1994, Victor E... devait être placé sous tutelle ne prouve pas qu'il était dans un état d'insanité d'esprit au moment du dépôt des plaintes ; Que, surtout, les juridictions d'instruction, saisies par M. X... de la question de la recevabilité des plaintes, ont répondu à ce moyen et que, par son arrêt du 6 octobre 2004, la Cour de cassation a écarté ce même moyen en décidant que « la chambre d'accusation a justifié sa décision et répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie ; d'où il suit que le moyen qui … ne fait que remettre en cause l'appréciation souveraine des juges sur les facultés de Victor E... et qui est inopérant … doit être écarté » ; Qu'enfin, l'acte de dénonciation adressé en 1993 par M. X... au procureur de la république d'Aix-en-Provence et portant sur les prétendus agissements frauduleux des fils et belles-filles du peintre n'a aucune valeur probante dès lors que nul n'est reçu à se faire le témoin de sa propre cause ;

3o) En ce que la juridiction d'instruction a refusé toute confrontation entre Victor E... et lui-même :
Considérant que, sur l'absence de confrontation entre M. X... et Victor E..., le Tribunal a exactement répondu que M. X... n'a sollicité cette mesure qu'après le dépôt des opérations d'expertise relatives à l'état de santé Victor E..., que cet état de santé ne permettait aucune confrontation et qu'au vu d'une nouvelle expertise, elle n'était pas indispensable au regard des autres éléments du dossier résultant des nombreuses investigations effectuées ; qu'en outre, la Cour européenne des droits de l'Homme, saisie de ce point, n'a retenu, en son arrêt du 2 mars 2002, aucune violation de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme dès lors que, comme en l'espèce, la condamnation n'est pas fondée de façon déterminante sur les dépositions d'une personne que M. X... n'aurait pu interroger ou faire interroger ; Que, de plus, même si les rapports d'expertise médicale ou psychiatrique de Victor E... n'ont pas été notifiés immédiatement à M. X..., il n'en demeure pas moins qu'il était loisible à son conseil d'en prendre connaissance à tout moment dans le dossier de la procédure ;

4o) En ce que la juridiction d'instruction a refusé d'entendre les membres du conseil d'administration de la fondation et de les confronter avec lui, rejeté les demandes d'actes d'instruction et dénaturé des faits relatifs à la dissimulation de dépenses :

Considérant que, sur le refus d'audition et de confrontation de M. X... avec les membres du conseil d'administration de la Fondation, du refus de saisir le cahier des dépenses et de lancer des investigations sur les transactions des toiles de l'artiste, le tribunal a justement estimé que ces actes d'instruction n'étaient pas utiles, et que les principes énoncés par l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme ne les imposaient pas ; que, de surcroît, le tribunal a noté qu'il avait été procédé à l'audition des administrateurs de la Fondation aux cours des débats qui ont eu lieu devant la cour d'appel qui a motivé son refus d'ordonner des recherches sur l'ensemble des transactions des tableaux de l'artiste ; Que les juridictions du fond et, tout particulièrement la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, en son arrêt du 7 janvier 2003, a précisément répondu à l'argumentation développée par M. X... et que la Cour de cassation, saisie du moyen, a jugé qu'échappait à son contrôle l'opportunité d'ordonner un supplément d'information dès lors qu'il s'agissait d'une question de fait relevant de l'appréciation des juges du fond ;

5o) En ce que la juridiction d'instruction a dénaturé les termes du rapport de l'expertise des quittances qu'il a produites :
Considérant que le juge d'instruction et la juridiction d'appel ne sont pas liés par les conclusions d'un expert et qu'en l'occurrence, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a pu dès lors, souverainement, ne retenir qu'une partie des constatations alors surtout qu'il n'était pas soutenu que le sens en aurait été altéré ; Que M. X... n'est donc pas fondé à contester, par le biais de l'action en responsabilité de l'Etat, ce qui a été souverainement jugé par la juridiction d'appel sans que le moyen tiré d'une prétendue dénaturation du rapport d'expertise fût soulevé devant la Cour de cassation alors surtout que, pour procéder à l'expertise des quittances, les experts ont examiné trois machines à écrire et que, s'agissant de l'une d'elles, il ne ressort aucunement du procès-verbal de perquisition qu'elle ait été remise par Mme Michèle E..., belle-fille du peintre, sur la foi de ses seules déclarations ;

6o) En ce que la juridiction d'instruction a également dénaturé le témoignage de Mme Lucia G... cité à l'appui des conclusions de l'expert :
Considérant que, sur la prétendue dénaturation du témoignage de Mme G..., secrétaire du peintre pendant vingt ans, les premiers juges ont souligné que M. X... avait été mis en demeure de s'expliquer et qu'il n'avait engagé aucune action en inscription de faux ; qu'ils ajoutent pertinemment qu'au cours de débats ouverts devant la juridiction correctionnelle, M. X... a été en mesure de s'expliquer sur les faits rapportés par ce témoin ;
7o) En ce que des militaires de la gendarmerie ont réalisé des investigations en dehors de tout cadre légal et de toute saisine valable :
Considérant que les investigations réalisées prétendument hors saisine par les militaires de la gendarmerie, ont été validées par la chambre de l'instruction dès lors qu'elles se rapportaient directement aux infractions reprochées à M. X... ; que la chambre de l'instruction a motivé sa décision sur ce point et, dans le même arrêt, rejeté une demande d'actes de sorte que, ni la partialité, ni l'atteinte aux droits de la défense, ni le fonctionnement défectueux de la justice allégués ne sont démontrés ;
8o) En ce que la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a omis de statuer sur des éléments présentés par la défense :
Considérant que la condamnation de M. X... a été prononcée alors que, selon lui, il a été omis de statuer sur certains faits expressément invoqués, notamment la découverte de sommes importantes sur les comptes de membres de la famille du peintre et une facture dont il se prévalait, le Tribunal a justement relevé que ces éléments n'avaient aucun lien direct avec les détournements d'œ uvres originales reprochés, qu'en réalité, sur les éléments supposés omis, seuls deux sont expressément visés par M. X... qui, de plus et surtout, ne démontre pas en quoi ces éléments auraient été de nature à modifier, voire à anéantir les accusations portées contre lui ; Considérant que, par ailleurs, sur la reconnaissance du bien-fondé de la créance revendiquée par les consorts E... résultant des détournements imputés à M. X..., les premiers juges ont à bon droit estimé qu'il ne démontrait pas en quoi le juge de l'exécution, refusant sa demande de mainlevée d'hypothèque, aurait manqué à son devoir d'impartialité ou porté atteinte à la présomption d'innocence ;

9o) En ce que la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a refusé de verser au dossier les pièces de l'instruction menée par Mme Imbert sur une plainte qu'il a déposée :
Considérant que les juges du fond ont justifié le refus de verser aux débats toutes les pièces de la première instruction conduite par Mme Imbert, juge, par l'expiration du délai de vingt jours prévu par l'ancien article 175 du Code de procédure pénale pour formuler une telle demande ; Qu'en outre, il n'existe, en la cause, aucune violation du secret de l'instruction dès lors que, comme l'ont souligné les juges du fond, la transmission, faite par un juge à l'un de ses collègues, de pièces d'un dossier d'instruction pouvant avoir un intérêt pour parvenir à la manifestation de la vérité dans un autre dossier ;

En conclusion :
Considérant que les griefs articulés par M. X... ont été débattus devant les juridictions d'instruction et de jugement, tant en première instance qu'en cause d'appel, ainsi que devant la Cour de cassation et devant la juridiction chargée d'examiner la demande de récusation de l'un des juges d'instruction qui ont écarté définitivement les moyens qui leur étaient proposés, à l'exception d'un moyen admis par la Cour de cassation en son arrêt du 8 octobre 2004 ; Qu'il n'existe, en la cause, ni faute lourde, ni déni de justice tels qu'ils sont définis par l'article L. 141-1 du Code de l'organisation judiciaire, ni violation des règles garantissant le procès équitable et le délai raisonnable proclamées par l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme ; Qu'en conséquence de tout ce qui précède et des motifs non contraires énoncés par les premiers juges, il convient de confirmer, en toutes ses dispositions, le jugement frappé d'appel ;

Sur l'application des dispositions de l'article article 700 du Code de procédure civile :
Considérant que chacune des parties sollicite une indemnité en invoquant les dispositions susvisées ; que, succombant en ses prétentions et supportant les dépens, M. X... sera débouté de sa réclamation ; qu'en revanche, il sera condamné à payer à l'Agent judiciaire du Trésor les frais qui, non compris dans les dépens d'appel, seront arrêtés, en équité, à la somme de 8. 000 euros ;
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Vu l'arrêt rendu le 20 janvier 2010 par la Cour de cassation ;
Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 20 décembre 2006 par le Tribunal de grande instance de Paris au profit de l'Agent judiciaire du Trésor ;
Déboute M. Charles X... de sa demande d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et le condamne, par application de ce texte, à payer à l'Agent judiciaire du Trésor la somme de 8. 000 euros ;
Condamne M. X... aux dépens d'appel en ce, compris les dépens de l'arrêt cassé, et dit qu'ils seront recouvrés par Maître Buret, avoué de l'Agent judiciaire du Trésor, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2- chambre 1
Numéro d'arrêt : 10/12304
Date de la décision : 22/11/2011
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

ARRET du 29 mai 2013, Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 29 mai 2013, 12-14.359, Inédit

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2011-11-22;10.12304 ?
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