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06/07/2011 | FRANCE | N°10/17732

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 4, 06 juillet 2011, 10/17732


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 3 - Chambre 4



ARRET DU 06 JUILLET 2011



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/17732



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Juillet 2010 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - chambre 8 cabinet E - RG n° 10/06848





APPELANT



Monsieur [D] [N]

[Adresse 2]

[Localité 5]

représ

enté par la SCP MICHEL BLIN et LAURENCE BLIN AVOUES ASSOCIES, avoués à la Cour

assisté de Me Gaby COHEN-BACRI, avocat au barreau de PARIS, toque : C 152





INTIMEE



Madame [I] [C] épouse [N]

[Ad...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 4

ARRET DU 06 JUILLET 2011

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/17732

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Juillet 2010 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - chambre 8 cabinet E - RG n° 10/06848

APPELANT

Monsieur [D] [N]

[Adresse 2]

[Localité 5]

représenté par la SCP MICHEL BLIN et LAURENCE BLIN AVOUES ASSOCIES, avoués à la Cour

assisté de Me Gaby COHEN-BACRI, avocat au barreau de PARIS, toque : C 152

INTIMEE

Madame [I] [C] épouse [N]

[Adresse 4]

[Localité 5]

représentée par la SCP REGNIER-BEQUET-MOISAN, avoués à la Cour

assistée de Me Isabelle NADL , avocat au barreau du VAL DE MARNE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 Juin 2011, en audience non publique, devant la Cour composée de :

Madame Brigitte GUYOT, Présidente

Madame Véronique NADAL, Conseiller

Madame Françoise DESBORDES, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Anne-Laure MONTABORD

ARRET :

- contradictoire

- prononcé hors la présence du public par Madame Brigitte GUYOT, Présidente

- signé par Madame Brigitte GUYOT, président et par Madame Nathalie GALVEZ, greffier présent lors du prononcé.

[D] [N] et [I] [C] se sont mariés le [Date mariage 3] 1997 à [Localité 6] (Algérie). Un enfant est issu de cette union : [R] [P], née le [Date naissance 1] 1998.

[I] [C] a déposé une requête en divorce.

Par ordonnance de non-conciliation en date du 13 juillet 2010, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Créteil, a notamment :

- déclaré inopposable en France le jugement de divorce prononcé par le tribunal de Bir Mourad Rais le 11 janvier 2010 en Algérie en ce qu'il est contraire à l'ordre public français

- attribué à l'épouse la jouissance du logement à titre gratuit au titre du devoir de secours ainsi que celle du mobilier du ménage

- fait injonction à l'époux d'avoir à quitter ledit logement dans un délai de 15 jours

- dit que le remboursement des échéances du crédit immobilier afférent au logement familial sera pris en charge par l'époux

- fixé à 500€ la pension alimentaire due à l'épouse au titre du devoir de secours

- dit que l'autorité parentale sera exclusivement exercée par la mère

- dit n'y avoir lieu d'interdire la sortie du territoire français de l'enfant sans l'autorisation des deux parents, la mère exerçant seule l'autorité parentale

- fixé chez la mère la résidence de l'enfant et dit que le droit de visite et d'hébergement du père s'exercera, à charge pour lui de prendre et de ramener l'enfant au domicile de sa mère, de la manière suivante :

pendant une période de trois mois à compter de l'ordonnance de non-conciliation : les premier, troisième et cinquième dimanches de chaque mois de 10 heures à 17 heures

à l'issue de cette période : les première, troisième et cinquième fins de semaine de chaque mois, du samedi 10 heures au dimanche 19 heures

la première moitié des vacances scolaires les années paires et la seconde moitié les années impaires.

- fixé à 600€ par mois la contribution mensuelle du père à l'entretien et l'éducation de l'enfant.

Appelant de cette décision, [D] [N] demande à la cour dans ses dernières conclusions du 3 décembre 2010 de :

A titre principal :

- infirmer l'ordonnance de non-conciliation en toutes ses dispositions

- déclarer applicable en toutes ses dispositions le jugement de divorce prononcé le 11 janvier 2010 par la juridiction algérienne

A titre subsidiaire :

- infirmer l'ordonnance et débouter l'épouse de toutes ses demandes concernant l'attribution du logement conjugal, l'exercice exclusif de l'autorité parentale, le droit de visite et d'hébergement, l'interdiction de sortie du territoire français de l'enfant et la contribution à l'entretien de celui-ci

- condamner [I] [C] à lui verser la somme de 6000€ au titre de dommages-intérêts

- la condamner aux entiers dépens et ainsi qu'au paiement de la somme de 3.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civil. .

Dans ses dernières conclusions en date du 17 février 2011, [I] [C] demande à la cour de :

- débouter [D] [N] de toutes ses demandes

- confirmer l'ordonnance déférée sauf sur le montant de la pension alimentaire au titre du devoir de secours

- fixer à 900€ par mois la pension alimentaire due à l'épouse au titre du devoir de secours à compter du 1er décembre 2010

- condamner [D] [N] aux entiers dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 2.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 mai 2011.

À sa demande, [P] a été entendue par un magistrat de cette chambre le 30 mars 2011.

SUR CE LA COUR

Sur la recevabilité de l'appel

Aucun élément du dossier ne permet à la cour de relever d'office des moyens d'irrecevabilité non soulevés par les parties.

Sur la recevabilité de la requête en divorce

[D] [N] oppose à la requête en divorce présentée par son épouse la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement définitif du 11 janvier 2010 du tribunal algérien de Bir Mourad Rais prononçant le divorce des époux. Il fait valoir que cette décision, dont il a exécuté toutes les dispositions, est parfaitement conforme au droit public français en ce qu'elle respecte les droits de l'épouse laquelle était représentée lors du procès et n'a pas soulevé l'incompétence du tribunal algérien au profit du tribunal français.

[I] [C] fait valoir que son mari l'a assignée en Algérie au domicile de sa soeur alors que la famille vit en France depuis 2002. Elle estime en outre cette décision contraire à l'ordre public français et conteste avoir jamais accepté la compétence de la juridiction Algérienne.

La compétence du tribunal algérien ayant prononcé le divorce des époux et notamment condamné le mari à verser à l'épouse une somme de 100.000 dinars à titre de réparation pour divorce abusif et de 3.000 dinars à titre de pension mensuelle pour abandon n'est pas contestable compte tenu de la nationalité algérienne des deux époux et du lieu de célébration du mariage. Toutefois en application de la convention Franco-Algérienne du 27 août 1964, pour être reconnue en France, cette décision ne doit pas être contraire à l'ordre public de l'état où elle est invoquée ou aux principes de droit public applicables dans cet état. Or, c'est par des motifs pertinents adoptés par la cour que le juge conciliateur l'a considérée contraire à l'ordre public français en ce qu'elle prononce le divorce en prenant en considération la seule volonté du mari sans donner d'effet juridique à l'opposition de l'épouse. Cette décision prise en application de l'article 48 du code de la famille algérien, privant l'autorité compétente de tout pouvoir autre que celui d'aménager les conséquences financières de cette rupture du lien matrimonial, est contraire au principe d'égalité des époux lors de la dissolution du mariage, reconnu par l'article 5 du protocole du 22 novembre 1984, n°7, additionnel à la convention européenne des droits de l'homme, que la France s'est engagée à garantir à toute personne relevant de sa juridiction, et à l'ordre public international réservé par l'article 1er de la convention Franco-Algérienne susvisée alors que l'épouse est domiciliée sur le territoire français.

En conséquence, il y a lieu de rejeter la fin de non recevoir.

Sur le domicile conjugal

Au soutien de sa demande, [D] [N] expose que l'appartement constituant le domicile conjugal est un bien lui appartenant en propre et que, dans le seul but de lui nuire, son épouse a préféré solliciter l'aide des services sociaux pour obtenir un logement que d'accepter un appartement proche de l'établissement scolaire de sa fille, qu'il lui proposait.

[I] [C] fait valoir qu'en dépit des dispositions de l'ordonnance de non-conciliation lui attribuant la jouissance du domicile conjugal, son mari l'a mise à la porte du logement familial ; qu'elle n'en demande plus la jouissance.

Dans ces conditions, il convient d'attribuer la jouissance du domicile conjugal au mari.

Sur les mesures concernant [P]

Le juge conciliateur a prévu que seule la mère exercerait l'autorité parentale en raison du désintérêt du père pour [P] qu'il a laissée dans un dénuement entraînant sa déscolarisation. Il a en outre mis en place des mesures instaurant une reprise progressive des relations ont été mises en place.

[D] [N] critique l'ordonnance de non-conciliation qui lui a retiré l'exercice de l'autorité parentale sur sa fille sans raison sérieuse, l'a privé de la voir sans motif grave et a interdit toute sortie de l'enfant du territoire français sans l'autorisation de la mère. Il fait valoir en substance que celle-ci fait obstacle à ses relations avec [P] à l'égard de laquelle il n'a jamais été violent et à laquelle il est très attaché.

[I] [C] fait valoir que [P] refuse de voir son père.

[P], manifestement très choquée par la situation de dénuement qu'elle a partagée avec sa mère lors de la séparation, en tient son père responsable et refuse actuellement de le rencontrer. Toutes deux ont été hébergées par des membres de la famille ou dans des chambres d'hôtel. Toutefois, l'attachement de [D] [N] à sa fille résulte incontestablement de la lecture des courriels qu'il lui adressait et par lesquels il lui rappelait l'indéfectibilité et l'intensité de ses sentiments pour elle en dépit du silence et du refus de celle-ci de lui répondre. Il n'apparaît donc pas opportun de le priver de l'exercice de l'autorité parentale.

Pour tenir compte du ressentiment de l'enfant rendant difficile la reprise des relations, il convient de prévoir dans un premier temps un simple droit de visite lequel pourra être élargi en fonction de l'évolution de la situation.

Le juge conciliateur n'a pas prononcé l'interdiction de sortie de [P] du territoire français sans l'autorisation de la mère, puisqu'au contraire il a décidé qu'il n'y avait pas lieu de prononcer une telle interdiction dans la mesure où la mère exerçait seule l'autorité parentale, aussi, la demande de [D] [N] est sans objet.

Sur la contribution à l'entretien et l'éducation des enfants

Chacun des parents contribue à l'entretien et l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, et des besoins de l'enfant. Cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur.

[D] [N] se contente d'indiquer qu'en application du jugement algérien il verse une contribution mensuelle de 50€ au titre de l'entretien de sa fille. Il ne soumet aucun moyen à l'appui de sa demande de réformation et ne verse d'ailleurs aucun justificatif concernant sa situation financière, de sorte que la cour ne peut que confirmer la décision déférée

Sur le devoir de secours

La pension alimentaire au titre du devoir de secours n'a pas pour seule vocation d'assurer les besoins minimums de l'existence (logement, nourriture, vêtements, soins), mais aussi de permettre, autant qu'il est possible à l'époux se trouvant dans la situation la moins favorable, de maintenir un niveau de vie proche de celui de l'autre conjoint ou de celui que connaissait le couple.

Pour fixer à 500€ la pension alimentaire, due au titre du devoir de secours en sus de la jouissance gratuite du domicile conjugal le juge conciliateur a retenu que le mari percevait un revenu mensuel de 6.254€ ; que l'épouse, qui avait perçu un revenu mensuel de 572€ au cours des cinq premiers mois de l'année 2010, était en arrêt maladie et ne recevait pas d'indemnité.

Au soutien de sa demande, [I] [C] précise qu'en raison du comportement du mari qui l'a chassée du domicile conjugal elle expose aujourd'hui un loyer d'un montant de 441€.

[D] [N] affirme que son épouse a organisé son insolvabilité.

[I] [C] n'actualise pas sa situation mais verse les justificatifs du loyer qu'elle expose d'un montant de 441€, provisions pour charges comprises. Compte tenu de cette charge nouvelle et de la disparité des situations des époux, la pension due au titre du devoir de secours doit être fixée à la somme de 800€ à compter de la date des conclusions par lesquelles elle a formé cette demande, soit le 3 février 2011,

Sur la demande de dommages et intérêts

[D] [N] qui succombe en toutes ces réclamations ne justifie d'aucun fondement à l'appui de cette réclamation.

Sur les dépens

La solution donnée au litige conduit à condamner [D] [N] aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Déclare contraire à l'ordre public français le jugement du tribunal de Bir Mourad Rais en date du 11 janvier 2010 ;

Déclare recevable la requête en divorce de [I] [C] ;

Infirme partiellement la décision entreprise ;

Attribue à [D] [N] la jouissance du domicile conjugal ;

Fixe à 800€ la pension due par [D] [N] à [I] [C] au titre du devoir de secours à compter du 3 février 2011 ;

Dit que les parents exerceront conjointement l'autorité parentale sur l'enfant ;

Dit que père exercera un droit de visite les deuxième et quatrième dimanches de chaque mois de 10 heures à 18 heures ;

Confirme la décision entreprise dans toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

Déboute [D] [N] de sa demande de dommages et intérêts ;

Le condamne aux dépens de l'appel lesquels seront recouvrés par la SCP Régnier Becquet Moisan, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute [D] [N] de sa demande et le condamne à payer la somme de 1.500€ à [I] [C].

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 10/17732
Date de la décision : 06/07/2011

Références :

Cour d'appel de Paris E4, arrêt n°10/17732 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-07-06;10.17732 ?
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