Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 5
ARRET DU 28 JUIN 2011
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/15814
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/01725
APPELANTS
Madame [L] [R] [M]
[Adresse 2]
[Localité 9]
[S] [Z]
[Adresse 2]
[Localité 9]
Monsieur [D] [X] [Z]
[Adresse 2]
[Localité 9]
S.C.I. [Z] représentée par son gérant
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentés par la SCP VERDUN - SEVENO, avoué
Assistés de Me Nicolas DUVAL, avocat
INTIME
S.A. GAN EUROCOURTAGE VIE agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 8]
[Localité 7]
Représentée par Me TEYTAUD, avoué
Assistés de Me Christian LAMBARD, avocat
INTIME
S.A. BNP PARIBAS agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me THEVENIER, avoué
Assistée de Me Jean-Frédéric SITRUK, avocat
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 31.05.2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Dominique REYGNER, Président
M. Christian BYK, Conseiller
Mme Sophie BADIE, Conseillère
qui en ont délibéré
Rapport a été fait par Mme Dominique REYGNER, président, en application de l'article 785 du code de procédure civile.
GREFFIER, lors des débats :
Dominique BONHOMME-AUCLERE
ARRET :
- contradictoire
- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Dominique REYGNER, président et par Mme Dominique BONHOMME-AUCLERE, greffier présent lors du prononcé.
****
Par acte notarié du 29 juillet 1987, la BNP a consenti à la SCI [Z] FRERES un crédit de 540 000 francs d'une durée de 84 mois (référencé 621 269 26).
Les conditions de ce prêt ont été renégociées suivant avenant du 31 juillet 1992, la durée d'amortissement du crédit étant portée à 21 ans et le montant des échéances mensuelles à 2 251,31 francs à compter du 31 août 1992.
Par acte notarié du 5 janvier 1989, la BNP a par ailleurs consenti à la SCI [Z] FRERES un crédit de 1 900 000 francs remboursable en 72 termes mensuels à compter du 5 janvier 1991 (référencé 621 268 29).
Les conditions de ce prêt ont été elles aussi renégociées suivant avenant du 31 juillet 1992, la durée d'amortissement du crédit étant portée à 19 ans et 7 mois et le montant des échéances mensuelles à 21 894,55 francs, puis à nouveau en 1994, le montant des échéances mensuelles étant ramené à 19 481,77 francs à compter du 30 juin 1994.
Messieurs [O] [Z] et [Y] [Z], co-gérants de la SCI [Z] FRERES, ont adhéré pour les deux emprunts au contrat d'assurance groupe invalidité décès contracté par la banque auprès de la société GAN EUROCOURTAGE VIE à hauteur de 50 % chacun.
A la suite de l'incapacité de travail de Monsieur [Y] [Z], survenue le 30 avril 1990, et après application de la franchise contractuelle de 90 jours, la société GAN EUROCOURTAGE VIE a accepté en 1998 de prendre en charge :
- pour le prêt n° 62 126926, un montant global de 38 147,11 euros au titre des échéances du 31 juillet 1990 au 31 décembre 2003,
- pour le prêt n° 62126829, un montant global de 216 106,42 euros au titre des échéances du 31 juillet 1990 au 31 mars 1998.
[Y] [Z] est décédé le [Date décès 1] 2004.
S'étant heurtés à un refus de prise en charge de la garantie décès Mademoiselle [S] [Z] et Monsieur [D] [Z], pris en qualité d'héritiers de [Y] [Z] et représentés par Madame [L] [Z] née [M], leur mère, administratrice légale sous contrôle judiciaire, ont par acte du 1er septembre 2004 assigné la société BNP PARIBAS devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir dire cette garantie acquise au titre du contrat de prêt du 5 janvier 1989 avec toutes conséquences.
Par acte du 25 janvier 2006, Mademoiselle [Z] et Monsieur [Z] ainsi que Madame [Z] née [M] et la SCI [Z], intervenants volontaires, ont appelé en intervention forcée la société GAN EUROCOURTAGE VIE aux fins notamment de la voir condamner solidairement avec la BNP à leur payer les sommes qu'ils estimaient dues au titre du remboursement de la moitié des échéances de chacun des deux prêts jusqu'en février 2005.
Par jugement rendu le 20 mai 2008, le tribunal a :
- donné acte à Mademoiselle [S] [Z] et Monsieur [D] [Z] de leur intervention volontaire à titre principal et les a déclarés recevables en leurs demandes à l'encontre de la société BNP PARIBAS,
- dit prescrite la demande à l'encontre de la compagnie GAN EUROCOURTAGE VIE,
- débouté Mademoiselle [Z], Monsieur [Z] et la SCI [Z] de leurs demandes à l'encontre de la société BNP PARIBAS,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné in solidum Mademoiselle [Z], Monsieur [Z] et la SCI [Z] aux dépens.
Madame [L] [Z] née [M], Mademoiselle [S] [Z], Monsieur [D] [Z] et la SCI [Z] (consorts [Z]) ont relevé appel de ce jugement par déclaration du 4 août 2008.
Dans leurs dernières conclusions du 1er mars 2011, ils demandent à la cour de :
- réformer le jugement entrepris,
- déclarer leur action recevable tant à l'encontre de la BNP PARIBAS qu'à l'encontre du GAN,
- dire et juger que le contrat d'assurance de groupe décès-invalidité n° 6904/423979 auquel a adhéré [Y] [Z] doit recevoir application en toutes ses dispositions,
En conséquence
- condamner solidairement la société BNP PARIBAS et la société GAN EUROCOURTAGE VIE à payer à la SCI [Z] la somme de 128 044,58 euros au titre du remboursement de la moitié des échéances prélevées concernant le prêt n° 62126829 d'avril 1998 à février 2005,
- dire et juger que pour le cas où le capital assuré serait supérieur aux sommes réellement dues à l'organisme prêteur, l'excédent sera reversé aux héritiers de [Y] [Z],
- débouter la société BNP PARIBAS et la société GAN EUROCOURTAGE VIE de toutes leurs demandes,
Subsidiairement
- dire et juger que la société BNP PARIBAS a manqué à son devoir d'information et de conseil,
- condamner la société BNP PARIBAS au paiement de la somme de 128 044,58 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice que cette faute leur a occasionné,
- condamner solidairement la société BNP PARIBAS et la société GAN EUROCOURTAGE VIE à leur payer la somme de 2 000 euros chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et en tous les dépens.
Aux termes de ses uniques conclusions du 4 mars 2009, la société BNP PARIBAS prie à la cour de :
- déclarer les consorts [Z] mal fondés en leur appel, les en débouter,
- confirmer le jugement déféré,
- condamner in solidum les appelants au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.
Suivant uniques conclusions du 3 mars 2009, la compagnie GAN EUROCOURTAGE VIE demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris,
- déclarer l'action des demandeurs irrecevable comme prescrite,
- les débouter de l'ensemble de leurs demandes,
- les condamner à lui payer une somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens d'appel.
SUR CE, LA COUR,
Considérant que le jugement entrepris n'est pas remis en cause en ce qu'il a déclaré Mademoiselle [Z] et Monsieur [Z], héritiers de [Y] [Z], recevables en leurs demandes à l'encontre de la société BNP PARIBAS ;
Que par ailleurs, les consorts [Z] ne formulent plus de demande concernant le contrat de prêt n° 621.269/26 ;
Sur la prescription
Considérant que la société GAN EUROCOURTAGE VIE soutient que l'action des appelants concernant le contrat de prêt n° 621.268/29 est irrecevable comme prescrite par application de l'article L. 114-1 du Code des assurances, le point de départ de la prescription ayant commencé à courir le 24 juin 1998, date à laquelle [Y] [Z] a été informé de la cessation de la prise en charge par l'assureur au motif que le prêt était échu depuis le 31 mars 1998 ;
Que les consorts [Z] font valoir que leurs demandes concernent également le capital décès prévu au contrat d'assurance et que l'action à ce titre ne peut être déclarée prescrite, le point de départ de la prescription étant la date du décès ;
Mais considérant qu'aux termes de l'article L. 114-1, alinéa 1er, du Code des assurances 'toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance' ;
Qu'en matière d'assurance de groupe emprunteurs, la prescription de l'action de l'assuré contre l'assureur ne commence à courir qu'à compter du premier des deux événements suivants, soit le refus de garantie de l'assureur, soit la demande en paiement de l'établissement de crédit, bénéficiaire de l'assurance par l'effet de la stipulation faite à son profit ;
Considérant, en l'espèce, que le point de départ de la prescription biennale se situe au 24 juin 1998, date de la lettre par laquelle le GAN a informé [Y] [Z] qu'il ne pouvait prendre en compte les renégociations intervenues sur le prêt en 1992 et 1994 car à cette date l'intéressé était déjà en incapacité de travail, a accepté néanmoins de prendre en charge, sur les bases du tableau d'amortissement de 1990, les échéances d'avril 1992 à mars 1998 mais a refusé toute indemnisation à compter de la date d'expiration du prêt, soit le 31 mars 1998 ;
Que le refus de garantie du GAN, fondé sur les dispositions du contrat d'assurance de groupe N° 6904/423979 prévoyant que l'adhésion au contrat cesse à la date d'expiration normale des engagements de l'emprunteur et que les garanties et le service des prestations prend fin notamment à la date de cessation de l'adhésion, concernait aussi bien l'incapacité de travail que l'invalidité absolue et définitive ou le décès, l'assureur ayant considéré que le contrat de prêt était venu à expiration à la date initialement convenue ;
Qu'il s'ensuit que la prescription était acquise pour l'ensemble des garanties le 24 juin 2000 et n'a pu être interrompue par la première lettre recommandée avec avis de réception adressée le 1er mars 2005 par la SCI [Z] à l'assureur pour solliciter le règlement des sommes prétendument dues ;
Que le jugement entrepris doit dès lors être confirmé en ce qu'il a déclaré la demande des consorts [Z] à l'encontre de la société GAN EUROCOURTAGE VIE prescrite ;
Sur la responsabilité de la BNP PARIBAS
Considérant que les consorts [Z] soutiennent que l'abstention de la BNP d'informer l'assureur des modifications intervenues dans les modalités des prêts souscrits engage sa responsabilité, le GAN ayant soulevé la non opposabilité à son égard desdites modifications pour refuser sa garantie au-delà du 31 mars 1998, date d'expiration du prêt initial ; qu'ils font valoir qu'en effet il appartenait à la banque d'informer l'assureur des modifications intervenues et, en cas de refus de garantie, d'informer l'adhérent sur les conséquences de ce refus et de rechercher des garanties équivalentes, la faute de la BNP ayant eu directement pour conséquence de les priver de la garantie décès souscrite par [Y] [Z] ;
Mais considérant qu'ils ne font ainsi que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, les moyens dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs exacts que la cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau de la simple argumentation ;
Qu'à ces justes motifs il suffit d'ajouter que de toute évidence la société GAN EUROCOURTAGE VIE, si elle avait été informée des renégociations du prêt intervenues en 1992 et 1994, qui ont eu pour effet d'en prolonger la durée de plusieurs années, ne les auraient pas acceptées alors que le risque était déjà réalisé, [Y] [Z] se trouvant en incapacité de travail depuis le 30 avril 1990, et que pour le même motif, ce dernier n'aurait pu trouver de garanties équivalentes auprès d'un autre assureur tant pour l'incapacité de travail que pour l'invalidité et le décès ;
Que le refus de garantie opposé par la société GAN EUROCOURTAGE VIE, tenant à l'expiration du contrat de prêt à sa date d'échéance normale, entraînant cessation des prestations et garanties, ne trouve donc pas sa cause dans un manquement de la BNP PARIBAS à ses obligations d'information et de conseil tant à l'égard de l'assureur que de l'assuré ;
Que le jugement déféré sera donc également confirmé en ce qu'il a débouté les consorts [Z] de leur demande à l'encontre de la banque ;
Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens
Considérant qu'il convient de condamner les consorts [Z], qui succombent, aux dépens d'appel, et à payer aux sociétés intimées une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, leur demande sur ce fondement étant rejetée.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement entrepris,
Condamne Mademoiselle [S] [Z], Monsieur [D] [Z], Madame [L] [Z] née [M] et la SCI [Z] in solidum à payer à la société GAN EUROCOURTAGE VIE et à la société BNP PARIBAS une somme de 1 500 euros chacune en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne Mademoiselle [S] [Z], Monsieur [D] [Z], Madame [L] [Z] née [M] et la SCI [Z] in solidum aux dépens d'appel, que les avouées des intimées pourront recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,