RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 1
ARRÊT DU 08 Juin 2011
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/09396
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 Septembre 2010 par le conseil de prud'hommes de BOBIGNY RG n° 06/04129
APPELANTE
SA SERVAIR
Zone de Service
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Arnaud GRIS, avocat au barreau de PARIS, toque : K 18
INTIME
Monsieur [I] [X]
[Adresse 2]
[Localité 3]
comparant en personne,
assisté de Me Houria AMARI, avocat au barreau de SEINE SAINT DENIS, toque : BOB103
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Avril 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Bernadette LE GARS, chargée d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Yves GARCIN, président
Madame Marie-Bernadette LE GARS, conseillère
Madame Claire MONTPIED, conseillère
Greffier : Madame Sandie FARGIER, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Yves GARCIN, président et par Madame Sandie FARGIER, greffier.
La cour est saisie de l'appel interjeté par la société SERVAIR du jugement rendu le 21 septembre 2010 par le Conseil des Prud'hommes de Bobigny dans sa formation de départage, lequel a :
- dit nul le licenciement par elle de M. [I] [X],
en la condamnant à payer à son ancien salarié les sommes de :
* 1.056,65 € à titre de rappel de salaires sur la prime du 13ème mois, ladite somme avec intérêts au taux légal à compter du 6 décembre 2006,
* 35.000 € à titre d'indemnité pour licenciement nul,
- ordonné à la société SERVAIR de remettre à M. [I] [X] un bulletin de salaire rectifié du mois de décembre 2005,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné la société SERVAIR à payer à M. [I] [X] 1.200 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- condamné la société SERVAIR aux dépens.
Pour déclarer le licenciement nul les premiers juges ont retenu que le licenciement était intervenu pendant la suspension du contrat de travail en suite de l'accident de travail et n'était justifié ni par une faute grave ni pour un motif étranger à l'accident.
Faits et demandes des parties :
Aux termes d'un CDD du 2 juin 1982, renouvelé tacitement en CDI, M. [I] [X] a été engagé par la société SERVAIR, qui compte plus de 11 salariés, en qualité de cuisinier-chef de brigade moyennant une rémunération brute qui était en dernier lieu de la relation contractuelle de 2.905,33 €.
Le 9 février 2005 le salarié a subi un accident de travail et a été arrêté jusqu'au 20 septembre 2005 inclus.
A compter du 21 septembre et jusqu'au 31 décembre 2005 M. [I] [X] était placé en arrêt de maladie, lequel était prorogé jusqu'au 30 avril 2006.
Le 26 février 2006 M. [I] [X] était convoqué à un entretien préalable, fixé au 2 février suivant, en vue de licenciement. Il était licencié par lettre recommandée avec avis de réception du 17 février 2006.
Après avoir contesté la mesure de licenciement dont il faisait l'objet auprès de son employeur, lequel maintenait sa décision, M. [I] [X] a saisi le Conseil des Prud'hommes le 27 novembre 2006 aux fins d'entendre juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse avec les conséquences financières afférentes, contexte dans lequel est intervenu le jugement dont appel.
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La société SERVAIR poursuit l'infirmation totale du jugement en demandant à la cour de :
- rétablir la situation de fait et de juger que le licenciement est intervenu pour une cause réelle et sérieuse, M. [I] [X] ne pouvant être considéré, lorsque la procédure a été engagée et poursuivie, comme étant en arrêt de travail en raison d'un accident de travail,
- débouter M. [I] [X] de sa demande au titre du 13ème mois, l'intégralité des montants qui lui étaient dûs lui ayant été versés au prorata de sa présence dans l'entreprise,
- condamner M. [I] [X] à payer 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
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M. [I] [X] conclut au principal au rejet de toutes les demandes de la société SERVAIR et à la confirmation du jugement en ce qu'il a dit le licenciement nul ou, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse.
Il demande de :
-' ramener' l'indemnité pour licenciement nul à 35.196 € en raison de l'intégration du 13ème mois, et, subsidiairement, de lui accorder la même indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- confirmer le jugement en ce qu'il lui a alloué 1.056,65 € au titre du rappel de salaire 13ème mois,
- ordonner la remise d'un bulletin de salaire conforme,
- confirmer la décision pour le surplus,
- condamner la société SERVAIR à lui payer 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE,
Considérant qu'il convient de se référer expressément aux conclusions des parties visées à l'audience et à leurs explications orales développées au soutien de celles-ci ;
Considérant que dans la lettre de licenciement, notifiée à M. [I] [X] le 17 février 2006, l'employeur motive la mesure en question par l' absence du salarié depuis le 10 février 2005, situation le contraignant, selon lui, à recourir à du personnel en CDD ou en contrat temporaire, soit d'une qualification moindre que celle d'un chef de brigade et situation, toujours selon l'employeur, pénalisante pour la bonne marche du service, ce qui justifie, également selon lui, la mesure de licenciement pour cause réelle et sérieuse au motif suivant : 'obligation de remplacement définitif au poste de travail par un salarié qualifié' ;
Considérant qu'il résulte des éléments du dossier que M. [I] [X] a, à la suite de son accident de travail du 9 février 2005 qui lui avait occasionné un traumatisme crânien, été en situation d'arrêt pour 'accident de travail' jusqu'au 30 septembre 2005, date à laquelle il a été déclaré consolidé ; que postérieurement à cette date, M. [I] [X] a fait parvenir à son employeur des arrêts de travail (non motivés par l'accident de travail lui-même, mais par la maladie) ;
Qu'il est constant, et non contesté par l'employeur, qu'à l'issue de son accident de travail et au cours de ses arrêts de travail pour maladie qui excédaient 21 jours, M. [I] [X] n'a subi aucune visite de reprise ;
Qu'il s'ensuit qu'à la date de son licenciement M. [I] [X] se trouvait en situation de suspension de son contrat de travail, situation qui interdisait à l'employeur de le licencier en l'absence de faute grave reprochée au salarié et en l'absence d'une impossibilité démontrée de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie ;
Considérant que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont déclaré nul le licenciement de M. [I] [X] par la société SERVAIR dès lors que ce licenciement était intervenu, à défaut de visite de reprise organisée, pendant une période de suspension du contrat de travail,
Que le jugement sera confirmé sur ce point ;
Considérant que c'est également par des motifs pertinents, que la cour adopte, que les premiers juges ont alloué à M. [I] [X] à titre indemnitaire pour licenciement nul la somme de 35.000 € correspondant à 12 mois de salaire calculés sur une base mensuelle brute de 2.905, 33 €, ainsi que la somme de 1.056,65 € à titre de rappel de salaire sur le 13ème mois, en ordonnant parallèlement à l'employeur de remettre au salarié un bulletin de salaire conforme, l'intégration d'une somme de 196 € pour un 13ème mois n'étant pas justifiée, au vu du calcul qu'il fait ;
Considérant que l'équité commande de condamner la société SERVAIR à payer à M. [I] [X] 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, ladite somme s'ajoutant à l'indemnité accordée au même titre en première instance ;
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;
Condamne la société SERVAIR à payer à M. [I] [X] la somme de 1.500 € au titre des frais irrépétibles d'appel ;
Condamne la société SERVAIR aux entiers dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT