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08/06/2011 | FRANCE | N°09/08080

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 1, 08 juin 2011, 09/08080


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 1



ARRET DU 08 Juin 2011

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/08080



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Juillet 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS RG n° 07:07458





APPELANTE



BANQUE PALATINE

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Isabelle ZAKINE-ROZENBERG, avocat au barreau de PARIS, toque : J007<

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INTIME



Monsieur [F] [T] [N]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me Linda CAPOANO, avocat au barreau de PARIS, toque : R156











COMPOSITION DE LA COUR :



En app...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 1

ARRET DU 08 Juin 2011

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/08080

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Juillet 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS RG n° 07:07458

APPELANTE

BANQUE PALATINE

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Isabelle ZAKINE-ROZENBERG, avocat au barreau de PARIS, toque : J007

INTIME

Monsieur [F] [T] [N]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me Linda CAPOANO, avocat au barreau de PARIS, toque : R156

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Avril 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Bernadette LE GARS, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Yves GARCIN, président

Madame Marie-Bernadette LE GARS, conseillère

Madame Claire MONTPIED, conseillère

Greffier : Madame Sandie FARGIER, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Yves GARCIN, président et par Madame Sandie FARGIER, greffier.

La cour est saisie de l'appel interjeté par la SA BANQUE PALATINE du jugement rendu le 7 juillet 2009 par le Conseil des Prud'hommes de Paris (départage), lequel après avoir prononcé à ses torts la résiliation judiciaire du contrat de travail la liant à M. [S] [N], l'a condamnée à payer à ce dernier les sommes de :

- 21.173,88 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 2.117,39 € pour les congés payés afférents,

- 145.867,53 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 300.000 € à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

l'exécution provisoire de la décision étant ordonnée.

Faits et demandes des parties :

En 1973 M. [N] a été embauché par la BANCO DI ROMA en qualité de comptable. En mars 1989 M. [N] a intégré la BANQUE SAN PAOLO en qualité de chef comptable. En 2005 la BANQUE SAN PAOLO est devenue la BANQUE PALATINE.

M. [N] a bénéficié de promotions successives au sein de la BANQUE PALATINE jusqu'à devenir, à compter du 22 décembre 2004, directeur du département comptabilité fiscalité. Il était également à compter de cette date membre du comité opérationnel de la SA . En 2006 son salaire annuel moyen s'élevait à 7.057,96 €.

A compter du 1er mars 2007 la BANQUE PALATINE nommait M. [N] au poste de contrôleur au sein de la direction conformité-contrôles permanents.

Estimant que cette nouvelle affectation, à la suite de laquelle il n'avait plus de fonction d'encadrement et devenait simple collaborateur, constituait une rétrogradation à laquelle il n'avait à aucun moment donné son accord, et se disant par ailleurs victime de faits de harcèlement moral, M. [N] a saisi le Conseil des Prud'hommes de Paris aux fins de connaître de ces faits et entendre condamner la SA BANQUE PALATINE à assumer les charges financières en résultant, contexte dans lequel est intervenu le jugement dont appel.

°°°

La SA BANQUE PALATINE poursuit, à titre principal, l'infirmation totale du jugement en requérant la condamnation de M. [N] à lui restituer les sommes qu'elle lui a versé dans le cadre de l'exécution provisoire dont ledit jugement est assorti, soit les sommes de 285.632,71 e et 170.931,80 €.

Elle réclame 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Subsidiairement, la SA BANQUE PALATINE demande à la cour de constater que M. [N] ne peut exciper d'aucun préjudice susceptible de fonder la demande de dommages intérêts qu'il formule et donc de le débouter de sa prétention à ce titre.

La SA BANQUE PALATINE fait valoir qu'elle n'a aucunement failli à ses obligations contractuelles d'employeur, la désignation de M. [N] en 2007 en qualité de contrôleur au sein de la direction conformité-contrôles permanents étant intervenue, selon elle, à la suite d'une demande de changement de poste formulée par le salarié et ayant été acceptée par lui, et ne constituant pas, en tout état de cause, une modification du contrat de travail, mais seulement des conditions de travail sans modification de rémunération. Elle conteste également tout fait de harcèlement moral.

°°°

M. [N] conclut à la confirmation du jugement dont appel en toutes ses dispositions hormis celle concernant l'article 700 du code de procédure civile, demandant que la somme allouée à ce titre en première instance à hauteur de 3.000 € soit portée à 10.000 €.

SUR CE,

Considérant qu'il convient de se référer expressément aux conclusions des parties visées à l'audience et à leurs explications orales développées au soutien de celles-ci ;

Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :

Considérant qu'un salarié peut solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur en cas de manquements de ce dernier à ses obligations, lesquelles consistent à procurer au salarié le travail convenu et les moyens pour le réaliser, à le rémunérer et à s'acquitter du contrat de manière légale et loyale ;

Considérant qu'il résulté des éléments du dossier, qu'alors que M. [N] occupait au sein de la SA BANQUE PALATINE les fonctions 'directeur' du département comptabilité fiscalité, ceci depuis décembre 2004 et était, depuis la même date, membre du comité opérationnel de la SA BANQUE PALATINE, il était informé par lettre du 1er mars 2007 signée par V.KLEPAC, DRH, de ce qu'il était nommé au poste de 'contrôleur' au sein de la direction conformité-contrôles permanents ;

Qu'outre le fait que le titre de 'contrôleur' n'est pas assimilable à celui de 'directeur', force est de constater que, dans les faits, M. [N], à la suite de cette nomination, avait changé de position dans l'organigramme de la banque, n'étant plus rattaché directement à M. [C], membre du directoire, auquel il rapportait, mais au directeur de la conformité, puis à Mme [P], elle-même rattachée au directeur de la conformité, ce dernier rattaché au présidnet du directoire ; qu'il est également établi qu'alors que dans ses anciennes fonctions de directeur M. [N] encadrait une équipe de 26 personnes, dans ses nouvelles fonctions il n'avait plus de fonction d'encadrement et occupait un bureau partagé (openspace) au lieu du bureau individuel occupé précédemment; que cette situation constitue incontestablement une rétrogradation, indépendamment du salaire mensuel demeuré inchangé ;

Que c'est vainement que la SA BANQUE PALATINE vient soutenir que M. [N] avait accepté cette nouvelle fonction, l'ayant même réclamée selon elle, alors qu'il est, au contraire, justifié que le salarié protestait fermement et clairement à cette rétrogradation par lettres des 14 mars et 30 mai 2007 ; que la lettre qui lui était adressée le 23 mars 2007, en suite de sa protestation du 14 mars 2007, par M. [K] [B], membre du directoire, ne saurait valoir preuve en quoi que ce soit d'une demande en ce sens du salarié telle qu'alléguée, la banque ne pouvant se constituer une preuve à elle-même ;

Considérant qu'il s'ensuit que, à défaut par la banque d'avoir obtenu (ne l'ayant au demeurant pas sollicité) le consentement du salarié à la modification substantielle de son contrat de travail telle que décrite ci-dessus, il convient de retenir, comme l'a fait le premier juge, que l'employeur a gravement manqué à ses obligations contractuelles, n'exécutant pas le contrat de travail de bonne foi ;

Que la demande de résolution judiciaire du contrat de travail formulée par le salarié aux torts de l'employeur est donc justifiée pour ce premier motif ;

Sur le harcèlement :

Considérant qu'en vertu de l'article L.1152-1 du code du travail 'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral, qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale, ou de compromettre son avenir professionnel.' ;

Considérant que, dans le cas présent, la lettre de nomination à un poste comportant des responsabilités réduites, combinée à une rétrogradation dans l'organigramme de la banque ainsi qu'à un positionnement géographique en 'open space' au lieu d'un bureau individuel traditionnellement l'apanage des directeurs, s'analysent en faits répétés e harcèlement moral ; que force est de constater, par ailleurs, que dès le 4 mars 2007 M. [N] a été placé en arrêt de travail, d'abord pour une sciatique invalidante, puis, à compter du 19 mars 2007 pour un syndrome dépressif, qui perdure encore aujourd'hui, et a nécessité un suivi psychologique en sus des traitements médicamenteux ; que la concomitance de l'épisode pathologique avec les faits précités permet de retenir l'incidence de ceux ci sur l'état de santé de M. [N] ; que ce deuxième motif justifie aussi que la résolution judiciaire du contrat de travail soit prononcée aux torts de l'employeur ;

Sur les conséquences financières de la résolution judiciaire :

Considérant que la résolution judiciaire prononcée aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ouvrant droit pour le salarié aux indemnités de rupture et aux dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et

sérieuse ;

* indemnités de rupture :

Considérant qu'il convient d'allouer à M. [N], en vertu de la convention collective applicable la somme de 21.173,88 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis (3 mois de salaire brut) et la somme de 2.117, 39 € pour les congés payés afférents;

Qu'il convient également de lui allouer la somme de 145.867,53 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, indemnité retenue par le premier juge par des motifs pertinents que la cour adopte ;

* Dommages intérêts :

Considérant que, eu égard à l'ancienneté de M. [N] dans la société, à son âge à la date de la rupture contractuelle (56 ans) et donc des difficultés inhérentes à cette situation pour retrouver un emploi de même nature, c'est à bon droit que le premier juge a évalué à 300.000 € les dommages intérêts que devait lui payer la banque pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* article 700 du code de procédure civile :

Considérant que le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué à M. [N] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'au titre des frais irrépétibles d'appel, la cour condamnera la SA BANQUE PALATINE à payer à M. [N] une somme de 4.000 € ;

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;

Condamne la SA BANQUE PALATINE à payer à M. [N] 4.000 € au titre des frais irrépétibles d'appel ;

Condamne la SA BANQUE PALATINE aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 09/08080
Date de la décision : 08/06/2011

Références :

Cour d'appel de Paris K1, arrêt n°09/08080 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-06-08;09.08080 ?
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