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31/05/2011 | FRANCE | N°10/18371

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 4, 31 mai 2011, 10/18371


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 4





ARRÊT DU 31 MAI 2011



(n° 277 , 6 pages)





Sur renvoi après cassation, selon arrêt rendu le 29 juin 2010 par la Cour de Cassation (3ème Chambre Civile), de l'arrêt rendu le 12 février 2009 par la Cour d'appel de Paris (6ème Chambre, section B), sur appel d'un jugement rendu le 13 septembre 2007 par le Tribunal de Grande Instance de Paris (RG n°02/180

28)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/18371









DEMANDEURS A LA SAISINE :



- Monsieur [F] [V]



- Madame [M] [U] [O] épouse [...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 4

ARRÊT DU 31 MAI 2011

(n° 277 , 6 pages)

Sur renvoi après cassation, selon arrêt rendu le 29 juin 2010 par la Cour de Cassation (3ème Chambre Civile), de l'arrêt rendu le 12 février 2009 par la Cour d'appel de Paris (6ème Chambre, section B), sur appel d'un jugement rendu le 13 septembre 2007 par le Tribunal de Grande Instance de Paris (RG n°02/18028)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/18371

DEMANDEURS A LA SAISINE :

- Monsieur [F] [V]

- Madame [M] [U] [O] épouse [V]

demeurant tous deux [Adresse 3]

représentés par la SCP VERDUN - SEVENO, avoués à la Cour

assistés de Maître Isabelle MONIN LAFIN, avocat plaidant pour la SELARL ASTREE AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, toque C230

DÉFENDERESSE A LA SAISINE :

- S.C.I. [Adresse 2] prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège [Adresse 1]

représentée par la SCP BOMMART-FORSTER - FROMANTIN, avoués à la Cour

assistée de Maître Isabelle FLEURET, avocat plaidant pour le Cabinet CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE, avocats au barreau de NANTERRE, toque NAN1701

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 29 Mars 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jacques REMOND, Président

Madame Marie KERMINA, Conseillère

Madame Claude JOLY, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier :

lors des débats et du prononcé : Madame OUDOT

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jacques REMOND, président et par Madame OUDOT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***********

En vertu d'une convention intitulée 'contrat de location' conclue le 1er septembre 1990 avec la SCI [Adresse 2], Mme [V] occupe, à usage d'habitation, un appartement situé à [Adresse 3].

Par arrêt du 6 février 2001, devenu irrévocable, la cour d'appel de PARIS (6e chambre C) a requalifié le contrat en convention de prêt à usage gratuit et à durée indéterminée et a dit n'y avoir lieu à application des articles 1888 et 1889 du code civil.

Par acte d'huissier de justice du 19 septembre 2001, la SCI [Adresse 2], se prévalant du 'contrat de location en date du 1er septembre 1990, requalifié en prêt à usage gratuit', a signifié à M. et Mme [V] un 'congé pour reprise' au profit de Mme [O].

M. et Mme [V] se maintenant dans les lieux, la SCI [Adresse 2] les a assignés le 21 novembre 2002 devant le tribunal de grande instance aux fins, notamment, de voir 'valider' le congé et voir ordonner leur expulsion.

Par jugement du 13 septembre 2007 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de grande instance de PARIS a :

- dit que l'arrêt du 6 février 2001 n'a pas fixé de terme au contrat de prêt à usage gratuit du 1er septembre 1990,

- dit que la SCI [Adresse 2] a pu mettre valablement fin au prêt à usage par le congé du 19 septembre 2001,

- dit qu'elle a respecté un délai raisonnable,

- dit que M. et Mme [V] devront rendre les lieux libres de toute occupation dans un délai de six mois à compter de la signification du jugement et qu'il sera sursis à toute mesure d'expulsion pendant ce délai,

- dit que passé ce délai, M. et Mme [V] devront libérer les lieux deux mois après délivrance d'un commandement à cette fin et qu'à défaut, il pourra être procédé à leur expulsion et à celle de tous occupants de leur chef au besoin avec l'assistance de la force publique,

- autorisé en tant que de besoin la SCI [Adresse 2], si la mesure d'expulsion est exécutée, à transporter dans tel garde-meubles les meubles et objets appartenant à M. et Mme [V] et garnissant les lieux à leurs frais exclusifs,

- fixé à la somme de 3 500 euros l'indemnité d'occupation mensuelle, charges en sus, qui sera due par M. et Mme [V] à compter du 22 novembre 2002 et les a condamnés à payer cette somme à la SCI [Adresse 2] jusqu'à la complète libération des lieux,

- condamné M. et Mme [V] à payer à la SCI [Adresse 2] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de 'toutes leurs autres demandes',

- condamné M. et Mme [V] aux dépens.

M. et Mme [V] ont interjeté appel de ce jugement.

Par arrêt du 12 février 2009, la cour d'appel de PARIS (6e chambre B), infirmant le jugement, a, essentiellement, débouté la SCI [Adresse 2] de ses demandes.

Statuant sur le pourvoi de la SCI [Adresse 2] par arrêt du 29 juin 2010, la Cour de cassation (3e chambre civile) a cassé cet arrêt dans toutes ses dispositions et a renvoyé la cause et les parties devant la cour d'appel de PARIS autrement composée.

Par conclusions signifiées le 23 février 2011, M. et Mme [V] demandent à la cour, infirmant le jugement (ou l'annulant, page 16 de leurs conclusions), à titre principal, de dire 'l'action' de la SCI [Adresse 2] (ou 'la demande', page 16 de leurs conclusions) irrecevable pour défaut de droit d'agir tirée de la chose jugée et de la condamner à leur payer la somme de 200 000 euros à titre de dommages et intérêts, à titre subsidiaire, de dire le congé infondé et de dire que le terme naturel prévisible du commodat est la liquidation de la succession à venir de Mme [O], à titre très subsidiaire, de dire qu'il a été statué ultra petita en condamnant conjointement les époux [V] au paiement d'une indemnité d'occupation, de fixer l'exigibilité de cette indemnité à la date de l'arrêt et d'en fixer le montant à la somme mensuelle de 500 euros, et, en tout état de cause, de débouter la SCI [Adresse 2] de ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 35 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées le 3 mars 2011, la SCI [Adresse 2] demande à la cour, à titre principal, de confirmer le jugement, à titre subsidiaire au cas où le jugement serait infirmé en ce qu'il a dit que la SCI [Adresse 2] a pu mettre valablement fin au prêt à usage, de fixer à la date du décès à venir de Mme [O] le terme de la convention du 1er septembre 1990, de dire que Mme [V], ainsi que tout occupant de son chef, devra quitter les lieux dans un délai de quatre mois à compter du jour du terme du prêt, qu'à défaut, Mme [V] devra verser une indemnité mensuelle d'occupation à fixer par expertise judiciaire, charges et taxes en sus, à compter de la date de l'expiration du délai de quatre mois, de dire qu'en cas de pré-décès de Mme [V], le commodat prendra fin à cette date et de dire que tout occupant du chef de Mme [V] devra verser une indemnité mensuelle d'occupation à fixer par expertise judiciaire, charges et taxes en sus, à compter de la date de l'expiration du délai de quatre mois, et, en tout état de cause, de débouter M. et Mme [V] de leurs demandes et de condamner Mme [V] au paiement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'elle seule aux entiers dépens.

SUR CE, LA COUR :

Considérant qu'il résulte des dispositions des articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile que l'autorité de chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ;

Que, dès lors, l'autorité de la chose jugée s'attache au seul dispositif de l'arrêt du 6 février 2001 qui dit n'y avoir lieu à mettre fin au prêt à usage gratuit et à durée indéterminée par application des articles 1888 et 1889 du code civil, peu important que, dans ses motifs, la cour ait retenu qu'il ne pouvait y être mis fin 'actuellement' ;

Considérant que selon l'article 1351 précité, il y a autorité de la chose jugée lorsque la chose demandée est la même et que la demande est fondée sur la même cause, entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en la même qualité ;

Qu'il n'y a pas autorité de la chose jugée lorsqu'un fait ou un acte postérieur à la décision dont l'autorité est invoquée modifie la situation antérieurement reconnue en justice et la cause de la demande ;

Considérant que l'objet de la demande portée devant la cour d'appel de PARIS par l'effet de l'appel interjeté par la SCI [Adresse 2] à l'encontre du jugement rendu le 19 février 1999 par le tribunal d'instance de PARIS (14e arrondissement) tendait, selon ses conclusions récapitulatives signifiées le 1er décembre 2000 telles qu'exposées dans l'arrêt du 6 février 2001, à voir condamner M. et Mme [V], devenus dépourvus de droit et de titre d'occupation, à libérer les lieux litigieux, au besoin par l'effet d'une expulsion, et à payer une indemnité d'occupation ;

Que la demande portée présentement devant la cour par la SCI [Adresse 2], qui tend, tant à titre principal qu'à titre subsidiaire, à la libération des lieux par Mme [V], et par tout occupant de son chef, et au versement d'une indemnité d'occupation, répond aux mêmes fins ;

Que les mêmes droits étant demandés sur la même chose, il y a identité d'objet au sens de l'article 1351 du code civil ;

Considérant que la cause de la demande de la SCI [Adresse 2] formée dans l'instance ayant abouti à l'arrêt du 6 février 2001 était, selon les conclusions précitées, la fin du prêt à usage à titre gratuit, ainsi que l'appelante qualifiait elle-même la convention du 1er septembre 1990 ;

Que la cause de la demande de la SCI [Adresse 2] dans la présente instance est également la fin du prêt à usage ;

Considérant que la fin du prêt était, en 2000, fondée par la SCI [Adresse 2], selon les énonciations de l'arrêt du 6 février 2001, à titre principal, sur la survenance d'un terme intervenu le 31 août 1996 (date l'expiration de la durée de six ans d'occupation convenue dans la convention), et, à titre subsidiaire à défaut de terme convenu, sur la disparition de son intention libérale, voire sur la mise en oeuvre de l'article 1888 du code civil (cessation du besoin des époux [V]) ou de l'article 1889 dudit code (besoin pressant et imprévu de la SCI [Adresse 2]) ;

Que le fondement de la fin du prêt invoqué dans la présente instance est, à titre principal, la délivrance de l'acte d'huissier de justice du 19 septembre 2001 et, à titre subsidiaire, la fixation d'un terme constitué par le décès de Mme [O] ou de Mme [V] ;

Que ces fondements juridiques différents articulés à l'appui d'une même cause sont sans incidence pour apprécier si les conditions de l'autorité de la chose jugée sont réunies ;

Qu'il y a en conséquence identité de cause en l'espèce au sens de l'article 1351 précité ;

Considérant, enfin, que dans l'instance ayant abouti à l'arrêt du 6 février 2001 et dans la présente instance, les parties sont les mêmes et agissent en la même qualité de propriétaire, d'une part, et d'occupants, d'autre part ;

Considérant que le fait juridique constitué par la signification, le 19 septembre 2001, postérieurement à l'arrêt du 6 février 2001 dont l'autorité est invoquée, d'un acte d'huissier de justice valant 'congé pour reprise' ne modifie pas la situation reconnue par cet arrêt, à savoir l'existence d'un prêt à durée indéterminée, auquel il n'y a pas lieu de mettre fin par application des articles 1888 et 1889 du code civil, ni la cause de la demande, qui reste la fin du prêt, le droit de résiliation unilatéral du prêteur lorsque le prêt est à durée indéterminée ne constituant pas une cause distincte ; qu'il incombait à la SCI [Adresse 2] de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'elle estimait de nature à fonder celle-ci ;

Considérant qu'il y a lieu, en conséquence, d'accueillir la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée invoquée par M. et Mme [V] et, réformant (et non annulant) le jugement, de déclarer irrecevable les demandes de la SCI [Adresse 2] tendant à la libération des lieux par Mme [V] et par tous occupants de son chef et à la voir condamner au paiement d'une indemnité d'occupation ;                                       

Considérant que M. et Mme [V] ne démontrent pas que la SCI [Adresse 2] est animée d'une intention de nuire à leur égard ; que, notamment, ils ne prouvent pas qu'en saisissant les juridictions de demandes dont il est jugé qu'elles se heurtent à l'autorité de la chose jugée, la SCI [Adresse 2] a méconnu le droit de manière si fautive que serait caractérisé un abus du droit d'agir en justice ; qu'ils seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts pour préjudice moral, le jugement étant confirmé de ce seul chef ;

Considérant qu'il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. et Mme [V] dans les termes du dispositif ci-après ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement dans toutes ses dispositions sauf celles ayant débouté M. et Mme [V] de leur demande de dommages et intérêts ;

Statuant à nouveau sur les chefs de dispositif réformés :

Déclare irrecevables les demandes de la SCI [Adresse 2] tendant à la libération des lieux par Mme [V] et de tout occupant de son chef et au paiement d'une indemnité d'occupation ;

Condamne la SCI [Adresse 2] à payer à M. et Mme [V] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la SCI [Adresse 2] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne SCI [Adresse 2] aux dépens afférents à la décision cassée ainsi qu'aux dépens de première instance et aux dépens de la présente procédure d'appel avec, pour ces derniers, droit de recouvrement direct au profit des avoués de la cause conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 10/18371
Date de la décision : 31/05/2011

Références :

Cour d'appel de Paris G4, arrêt n°10/18371 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-05-31;10.18371 ?
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