Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 2
ARRET DU 06 MAI 2011
(n° 112, pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/01722.
Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Janvier 2010 - Tribunal de Grande Instance de CRETEIL 1ère Chambre - RG n° 08/01585.
APPELANT :
Monsieur [E] [B] dit [S]
demeurant [Adresse 3],
représenté par la SCP BERNABE-CHARDIN-CHEVILLER, avoués à la Cour,
assisté de Maître Antoine WEIL, avocat au barreau de PARIS, toque A 364.
INTIMÉE :
SA EURO MEDIA FRANCE anciennement dénommée Société Française de Production et de Création Audiovisuelle (SFP)
prise en la personne de ses représentants légaux,
ayant son siège social [Adresse 2],
représentée par la SCP FANET SERRA, avoués à la Cour,
assistée de Maître Janine BARIANI plaidant pour la SELARL STC, avocat au barreau de PARIS, toque R 231.
INTIMÉE :
Association OPERA NATIONAL DE LYON
prise en la personne de son Président,
ayant son siège social [Adresse 1],
représentée par la SCP BAUFUME GALLAND VIGNES, avoués à la Cour,
assistée de Maître Gaël BOUSQUET plaidant pour la SCP AGUERA & Associés, avocat au barreau de LYON.
INTIMÉE :
Société de droit allemand MONARDA ARTS GmbH anciennement dénommée RM ARTS FERNSEH UND FILM GmbH
prise en la personne de ses représentants légaux,
ayant son siège social [Adresse 4]),
représentée par Maître Louis-Charles HUYGHE, avoué à la Cour,
assistée de Maître Christophe GRONEN plaidant pour le Cabinet BMH Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque R 216.
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 18 mars 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur GIRARDET, président,
Madame REGNIEZ, conseillère,
Madame NEROT, conseillère.
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur NGUYEN.
ARRET :
Contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Monsieur GIRARDET, président, et par Monsieur NGUYEN, greffier présent lors du prononcé.
Par contrat du 20 décembre 1991, [E] [B] dit [E] [S] a cédé à la Société Française de Production, SFP, devenue Euro Media France, les droits d'exploitation par télédiffusion ainsi que les droits d'exploitation secondaire de l'enregistrement audiovisuel du ballet '[F] et [M]' de Prokoviev, qu'il avait réalisé à [Localité 5]. Puis, le 7 mai 1992, la SFP concluait avec l'Opéra de [Localité 5] un contrat par lequel elle donnait mandat à ce dernier 'de faire procéder par la société RM Arts à la distribution : cession commerciale des droits de télédiffusion et vidéogrammes de commerce de l''uvre '[F] et [M]''. C'est ainsi que la société de droit allemand RM Arts, puis sa filiale la société RM Associates fut chargée de la distribution de l'oeuvre sous forme , notamment, de vidéogrammes.
Par arrêt en date du 11 octobre 2006, la cour d'appel de Paris a prononcé aux torts de la SFP la résiliation du contrat la liant à Monsieur [S], l'arrêt précisant 'qu'il appartiendra aux intimés (L'Opéra de Lyon et la société Rm Arts) de tirer toutes les conséquences juridiques de la résiliation du contrat du 20 décembre 1991 qui prive la SFP du droit d'exploitation de l'oeuvre audiovisuelle [F] et [M]'.
Ayant constaté la poursuite de l'exploitation de l''uvre nonobstant les conséquences attachées à cet arrêt, [E] [S] assigna la SFP devant le tribunal de grande instance de Créteil, laquelle appela en garantie l'Opéra de Lyon qui appela aux mêmes fins la société RM Arts.
Le tribunal, au terme de son jugement du 26 janvier 2010, débouta [E] [S] de l'ensemble de ses demandes et rejeta la demande de dommages et intérêts formée par la SFP.
Vu les dernières écritures en date du 29 octobre 2010 d'[E] [S] qui fait grief d'une part, à la SFP de n'avoir effectué aucune diligence pour s'assurer de la cessation de l'exploitation de l''uvre, d'autre part, à l'Opéra de [Localité 5] d'avoir réagi plus de 8 mois après le prononcé de l'arrêt, enfin à la société Rm Arts de ne pas avoir procédé à la résiliation des conventions qu'elle avait passées avec ses distributeurs, pour conclure à la condamnation in solidum des intimés à lui verser une somme de 100 000 euros à valoir sur la réparation de son préjudice, à la désignation d'un expert pour, notamment, aider à la détermination du nombre d'exemplaires de vidéogrammes vendus depuis l'arrêt et des télédiffusions intervenues et pour solliciter la publication de la présente décision ;
Vu les dernières écritures en date du 6 juillet 2010 de la SFP devenue Euro Media France qui soutient que l'appelant ne prouve pas plus qu'en première instance que les exemplaires des vidéogrammes dont il a constaté l'offre à la vente, aient été mis dans le commerce postérieurement à l'arrêt, et affirme qu'elle a pris les mesures nécessaires pour faire respecter l'arrêt, avant de solliciter la condamnation de l'appelant à lui verser la somme de 10 000 euros pour procédure abusive ;
Vu les dernières écritures en date du 19 octobre 2010 de l'Opéra National de Lyon qui soutient également que la preuve de la matérialité des actes de contrefaçon allégués par l'appelant n'est pas rapportée, et conteste, à titre subsidiaire, devoir sa garantie à la société Euro Média France, tout en sollicitant la garantie de la société RM Arts dont elle souligne qu'elle était seule en charge de la distribution de l'enregistrement ;
Vu les dernières écritures en date du 1er juillet 2010 de la société RM Arts dénommée désormais Monarda Arts Gmbh, qui considère également que les pièces produites ne prouve pas une poursuite de l'exploitation postérieurement à l'arrêt du 11 octobre 2006, dans la mesure où nombre d'entre elles sont des captures d'écran réalisées par l'appelant lui même et que les pièces recevables n'apportent pas la preuve recherchée puisque l'arrêt du 11 octobre 2006 n'a pas ordonné le rappel ou la destruction des vidéogrammes mis sur le marché antérieurement à son prononcé ; elle soutient enfin que l'article 16 du contrat qu'elle a conclu avec l'Opéra de [Localité 5] prévoit la poursuite des sous-contrats conclus avant la résiliation du contrat principal, mais souligne qu'elle a fait toute diligence auprès de ses distributeurs pour mettre un terme à la commercialisation litigieuse ;
SUR CE,
Sur les faits dénoncés :
Considérant qu'[E] [S] fait grief aux intimés d'avoir poursuivi l'exploitation commerciale de l''uvre audiovisuelle qu'il a réalisée , alors que l'arrêt du 11 octobre 2006 auquel les intimées avaient été parties avait privé la SFP du droit d'exploitation de l''uvre audiovisuelle ;
Considérant qu'il agit dès lors en contrefaçon puisqu'il soutient que la poursuite de la diffusion de son 'uvre, postérieurement à l'intervention du dit arrêt, caractérise une atteinte à ses droits de réalisateur ;
Considérant qu'il convient tout d'abord d'examiner la portée de l'arrêt avant d'apprécier si la preuve des actes de contrefaçon allégués est administrée ;
Considérant que l'arrêt précisa qu'en vertu de l'effet relatif des contrats, [E] [S] était irrecevable à poursuivre la résiliation des conventions conclues entre la SFP et l'Opéra de [Localité 5] et entre l'Opéra de [Localité 5] et la société RM Arts auxquelles il n'était pas partie ; qu'il ajouta cependant, qu'il appartenait aux intimées 'de tirer toutes les conséquences juridiques de la résiliation du contrat du 20 décembre 1991 qui prive la SFP du droit d'exploitation de l''uvre' ;
Considérant qu'il suit que, comme le relève pertinemment la société Monarda Arts Gmbh, l'arrêt n'a prononcé que la résiliation du contrat conclu entre [S] et la SFP et non pas sa résolution ;
Que s'agissant d'un contrat à exécution successive, l'arrêt n'a d'effet que pour l'avenir, les conséquences des mises en vente passées n'étant pas affectées par la résiliation prononcée ;
Considérant que la société Euro Media France qui n'était plus titulaire des droits d'exploitation, ne pouvait donc procéder ou faire procéder à de nouveaux actes de diffusion que ce soit par télédiffusion de l''uvre ou par distribution sous forme de vidéogrammes ;
Considérant que l'Opéra de [Localité 5] et la société Monarda Arts qui étaient parties à l'instance et auxquels est opposable la résiliation prononcée, ne pouvaient de bonne foi, bien que leurs contrats ne fussent pas résiliés, en poursuivre l'exécution et conclure de nouveaux contrats de distribution ;
Considérant qu'il importe dès lors d'apprécier si la preuve de nouveaux actes d'exploitation de l''uvre - à savoir de nouveaux actes de mise dans le commerce -, est administrée, étant observé que l'arrêt n'ayant pas ordonné le retour des vidéogrammes qui étaient offerts à la vente au moment de son prononcé, la poursuite de la distribution de ces vidéogrammes ne constitue pas une violation de ses dispositions ;
Considérant que [E] [S] produit deux constats d'huissier établis à une année intervalle, les 28 décembre 2006 et 27 décembre 2007 qui démontrent que l'enregistrement était en vente sur divers sites internet (2 x moins cher.com, alapage.com, amazon.de, amazon.co.uk, amazon.ca, amzon.fr...etc), 6 sites en 2006 et 15 sites en 2007 ; qu'il verse aussi aux débats des DVD, sous emballage, avec le copyright correspondant, qu'il a lui même commandé à plusieurs de ces sites entre janvier 2007 et février 2008, précise-t-il ;
Considérant que sans qu'il soit nécessaire à ce stade de se prononcer sur la portée probatoire contestée des commandes effectuées par l'appelant lui même, il convient de relever que les deux constats d'huissiers établissent à suffisance la poursuite de l'offre à la vente des vidéogrammes litigieux ;
Considérant en revanche, qu'ils n'apportent pas la preuve que ces vidéogrammes ont été mis dans le commerce postérieurement à l'arrêt du 11 octobre 2006, d'autant que la société Monarda Arts Gmbh, a 'rappelé' à ses distributeurs, par courriel du 1er février 2007, que le DVD en cause n'était plus disponible et leur a demandé de 'mettre à jour (leurs) bases de données, pages d'accueil et d'informer (leurs) détaillants' ;
Que pas davantage n'est il démontré que la société Monarda aurait laissé se poursuivre certains des contrats qu'elle avait conclus avec ses détaillants ;
Qu'il suit dès lors que c'est à bon droit qu'[E] [S] auquel il incombe, contrairement à ce qu'il prétend, d'établir que les vidéogrammes offerts à la vente sur les sites listés dans les constats, ont été mis dans le commerce postérieurement à l'arrêt, a été débouté par la décision déférée de l'ensemble de ses demandes ;
Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive :
Considérant que les premiers juges ont également débouté à bon droit la société SFP devenue Euro Media France de sa demande de dommages et intérêts en relevant qu'elle n'établissait ni même ne précisait en quoi le droit d'[E] [S] d'agir en justice, qu'il tenait de sa qualité non contestée de réalisateur, avait dégénéré en abus.
Sur l'article 700 du Code de procédure civile :
Considérant que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS,
Confirme la décision déférée,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne [E] [B] dit [S] aux entiers dépens qui seront recouvrés dans les formes de l'article 699 du même code.
Le greffier,Le Président,