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19/01/2011 | FRANCE | N°09/01770

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 19 janvier 2011, 09/01770


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 3 - Chambre 1



ARRÊT DU 19 JANVIER 2011



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/01770



Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Décembre 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/05676







APPELANTE





Madame [I] [K] [IF] épouse [W]

née le [Date naissance 2] 1926 à

[Localité 8]

[Adresse 4]

[Localité 8]



représentée par Me Louis-Charles HUYGHE, avoué à la Cour

assistée de Me Olivier BARATELLI de l'association LOMBARD-BARATELLI et associés, avocat au barreau de PAR...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRÊT DU 19 JANVIER 2011

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/01770

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Décembre 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/05676

APPELANTE

Madame [I] [K] [IF] épouse [W]

née le [Date naissance 2] 1926 à [Localité 8]

[Adresse 4]

[Localité 8]

représentée par Me Louis-Charles HUYGHE, avoué à la Cour

assistée de Me Olivier BARATELLI de l'association LOMBARD-BARATELLI et associés, avocat au barreau de PARIS, toque : E 183

INTIMÉS

1°) Mademoiselle [S] [D]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 5] (MEXIQUE)

défaillante

2°) L'INSTITUT DE FRANCE

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Localité 6]

représenté par la SCP ALAIN RIBAUT ET VINCENT RIBAUT, avoués à la Cour

assisté de Me Paul-Albert. IWEINS de la SELAS VALSAMIDIS et associés, avocats au barreau de PARIS, toque : J 10

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Décembre 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Pascal CHAUVIN, Président de chambre

Madame Isabelle LACABARATS, Conseillère

Madame Dominique REYGNER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Nathalie GALVEZ

ARRET :

- par défaut

- prononcé publiquement par Monsieur Pascal CHAUVIN, Président de chambre

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Pascal CHAUVIN, président et par Mme Marie-France MEGNIEN, greffier présent lors du prononcé.

***********

[KI] [F] est décédée le [Date décès 1] 2004, sans héritier réservataire, en l'état d'un testament olographe par lequel elle a institué un légataire universel, l'Institut de France, ainsi que plusieurs légataires particuliers.

Elle a ainsi légué à Mme [I] [IF] épouse [W] '1 parure collier de brillants et clips d'oreilles assortis', outre 'une paire de statuettes ivoire polychromé'.

Elle a indiqué, à propos d'un coffre situé dans son appartement parisien, que 'les disponibilités en espèce qui pourraient se trouver dans ce coffre-fort et tous objets qui n'auraient pas été attribués devront être remis à Mademoiselle [S] [D]'.

Par lettre du 28 février 2005, Me [Z], notaire de l'Institut de France, a informé Mme [IF] de ce que les bijoux qui lui avaient été légués n'avaient pu être retrouvés, de sorte que le legs était caduc.

Apprenant alors qu'une vente aux enchères publiques portant sur des bijoux dépendant de la succession de [KI] [F] était organisée le 23 novembre 2005 et prétendant que les lots n° 55, 'Paire de Clips d'Oreilles en platine et or gris sertis d'une ligne de diamants trapèze entre deux lignes de brillants partiellement en chutes. Travail français', et n° 74, 'Important Collier articulé en platine et or gris pavé de diamants ronds et diamants baguettes retenant au centre une chute de larges diamants baguettes soulignés de deux lignes de diamants ronds de taille décroissante. Travail français', correspondaient à la parure qui lui avait été léguée, Mme [IF] a obtenu du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris, le 17 novembre 2005, une ordonnance l'autorisant à pratiquer une saisie-revendication des deux lots, puis, le 16 janvier 2006, une ordonnance enjoignant à l'Institut de France de les lui remettre.

L'Institut de France ayant formé opposition à la seconde ordonnance, Mme [IF] l'a assigné, ainsi que Mlle [D], devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de délivrance des lots n° 55 et 74.

Par jugement du 11 décembre 2008, le tribunal a :

- débouté Mme [IF] de son action déclarée mal fondée,

- rejeté les demandes reconventionnelles,

- condamné Mme [IF] aux dépens, avec bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Par déclaration du 27 janvier 2009, Mme [IF] a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions déposées le 15 octobre 2010, elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes,

- constater que les lots n° 55 et 74 constituent bien la parure dont [KI] [F] a fait état dans son testament à son bénéfice,

- en conséquence,

- reconnaître son droit de propriété sur ces bijoux en vertu des dispositions de l'article 1014 du code civil,

- ordonner la délivrance de ces bijoux à son profit,

- confirmer le jugement déféré en qu'il a débouté l'Institut de France de toute demande reconventionnelle,

- condamner solidairement les intimés à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les 'défendeurs' aux dépens, avec bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées le 19 octobre 2010, l'Institut de France demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [IF] de son action déclarée mal fondé,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande reconventionnelle,

- statuant à nouveau,

- condamner à titre reconventionnel Mme [IF] à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance, pour les lots retirés de la vente, d'être adjugés lors de la vente aux enchères organisée le 23 novembre 2005,

- en tout état de cause,

- condamner Mme [IF] à lui verser la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [IF] aux entiers dépens, avec bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Mlle [D], qui a été régulièrement assignée et à laquelle les conclusions de l'appelante ont été dénoncées, n'a pas constitué avoué.

SUR CE, LA COUR,

Considérant que, dans son testament, [KI] [F], après avoir désigné cinq exécuteurs testamentaires, a énoncé que, 'une fois les legs payés', ceux-ci 'devront remettre le reliquat à l'Institut de France et ce, au profit uniquement de la Fondation [KI] et [P] [F]' ; qu'elle a légué des bijoux, ainsi que des bibelots, à une quarantaine de personnes, au rang desquelles figure 'Madame [C] [W]' ; qu'elle a légué ses biens immobiliers à ses cousins et cousines, ainsi qu'à différentes institutions (Croix Rouge Française, Institut Pasteur, CNRS, Institut de France) ; qu'elle a légué différents objets à titre de 'souvenirs', des sommes d'argent et des meubles à une centaine de personnes ; qu'elle a indiqué, s'agissant d'un coffre situé dans son appartement parisien, que 'les disponibilités en espèce qui pourraient se trouver dans ce coffre-fort et tous objets qui n'auraient pas été attribués devront être remis à Mademoiselle [S] [D]' ; qu'elle a précisé que, 'à part les legs déjà distribués, le restant du contenu' de quatre coffres bancaires 'appartiendra à l'Institut de France au seul profit bien entendu de la Fondation [KI] et [P] [F]' et que 'les bijoux très importants devront être expertisés par des experts assermentés et être vendus en vente publique, par Christie ou Sotheby ou Tajan' ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions testamentaires que [KI] [F] a distingué, d'une part, les bijoux légués à titre particulier, d'autre part, les bijoux pouvant figurer dans le coffre de son appartement parisien et à remettre à Mlle [D], enfin, les bijoux 'très importants' devant revenir au final à l'Institut de France, qui avait pour mission de les faire expertiser et de les faire vendre aux enchères par Christie's, Sotheby's ou Tajan, au profit de la Fondation [KI] et [P] [F] ;

Considérant que, dans une attestation délivrée le 26 juillet 2007, M. [V] [G], qui a été le 'conseiller privé' de [KI] [F] à partir de 1993 et dont l'objectivité du témoignage n'est pas sérieusement remise en cause par Mme [IF], énonce que [KI] [F] 'avait décidé que ses 'grands bijoux' ou ses 'bijoux les plus importants' [...] étaient destinés en premier à des oeuvres caritatives et naturellement à la fondation [KI] et [P] [F]' et qu'elle 'réservait ensuite les plus modestes à sa famille, ses filleuls, puis à ses amis et connaissances', celle-ci n'ayant 'laissé aucun de ses grands bijoux à ses amies' et n'ayant pas hésité, afin d'éviter de léguer 'de trop gros lots', à opérer un 'démembrement' de certains pièces ; qu'il ajoute que les bijoux correspondant aux lots n° 55 et 74 de la vente du 23 novembre 2005 n'étaient portés par [KI] [F] que 'dans des grandes occasions' et que, pour elle, ils étaient 'compris dans la mention des bijoux très importants' devant être expertisés et vendus au seul profit de la Fondation ;

Que, dans une lettre datée du 6 décembre 2005, Me [M], commissaire priseur ayant instrumenté la vente du 23 novembre 2005, déclare que [KI] [F] a légué ses bijoux de grande valeur à des oeuvres de charité, à sa Fondation ou à sa famille et les bijoux 'de moindre importance' à ses amis ;

Considérant que, si elle démontre par les pièces produites qu'elle entretenait des liens d'amitié avec [KI] [F], ainsi qu'en attestent d'ailleurs les legs qui lui ont été consentis, Mme [IF] n'apparaît dans le testament qu'au vingtième rang des légataires de bijoux ;

Considérant que les bijoux litigieux représentent incontestablement des biens d'une valeur certaine ; qu'alors que la vente du 23 novembre 2005 portait sur 84 lots, le lot n° 74 est présenté dans le catalogue de la vente comme l'un des quatre lots les plus 'importants' au sens où l'entendent les commissaires priseurs, qu'il y est reproduit en intégralité (en page 53) et en détail (en page 50) et qu'il y apparaît sur trois photographies (en pages 51, 52 et 54) où [KI] [F] le porte en collier ou en diadème lors d'occasions apparemment officielles ; que, si la valeur de ces lots peut effectivement varier dans le temps, notamment en fonction de la mode et du goût, il n'en demeure pas moins que, dans le catalogue de la vente, le lot n° 74 a été estimé entre 50 000 et 80 000 euros et le lot n° 55 entre 6 000 et 8 000 euros, tandis que, indépendamment même de leur valeur, ces bijoux révèlent en eux-mêmes leur importance ; que, si la vente s'est déroulée sous le marteau de Me [L] [M], la société Tajan y a été associée puisque son nom figure sur le catalogue et que les lots ont été exposés à l'espace Tajan, ce qui répond au voeu exprimé par la testatrice ;

Considérant que, si la thèse de Mme [IF] devait être suivie, [KI] [F], qui a donné des indications assez précises sur la plupart des bijoux qu'elle a légués à ses amis, n'aurait fourni qu'une description somme toute assez banale, compte tenu de leur importance, des bijoux qui correspondraient aux lots n° 55 et 74, le second lot en particulier représentant bien davantage qu'un 'collier de brillants' ;

Considérant qu'aucun élément ne peut être déduit du fait que [KI] [F], personne avertie en la matière et connaissant par conséquent très certainement le sens exact du terme brillant, y a eu principalement recours dans son testament, tout en utilisant également le terme diamant (cf. le legs à la Signora [T] [F]) ;

Considérant que l'Institut de France verse aux débats l'avis de M. [X] [TG], expert inscrit sur la liste de la cour d'appel de Paris et intervenu à la vente du 23 novembre 2005, selon lequel les bijoux constituant les lots n° 55 et 74 'ne peuvent constituer une parure dite de brillants', compte tenu de leurs caractéristiques différentes et de leur réalisation par des ateliers différents à des moments différents ;

Que Mme [IF] produit quant à elle les 'expertises' de M. [R] [Y], de Mme [A] [E], de M. [H] [N], de la société Christie's, et de Mmes [U] [O] et [J] [B], de la société Sotheby's ; qu'il se déduit de ces avis que, si les bijoux correspondant aux lots n° 55 et 74 n'ont vraisemblablement pas été réalisés à la même époque et par le même maître, un tel constat ne fait pas obstacle à ce qu'ils soient considérés comme formant une parure, l'un des lots ayant pu être réalisé en contemplation de l'autre ; qu'à cet égard, si M. [Y] affirme que les deux lots 'forment parfaitement une parure' et si M. [N] retient que 'la parure collier de brillants et clips d'oreilles assortis décrite dans le testament de [KI] [F], décédée en mai 2004, peut être considérée comme une parure à part entière', Mme [E] estime pour sa part qu''il serait fort plausible que collier et clips aient été des achats fractionnés, les clips d'oreilles ayant été achetés pour être assortis au collier, acquérant ainsi dans l'esprit de la propriétaire le statut de parure', tandis que Mmes [O] et [B] avancent quant à elles que 'le collier et la paire de clips d'oreilles en diamants ronds taille brillant et baguettes pourrai[en]t selon nous constituer une parure' ;

Considérant que, quoi qu'il en soit, indépendamment de la question de savoir si, d'un point de vue purement technique, les deux lots forment une parure, l'essentiel est de savoir si la testatrice les considérait comme tels ;

Que Mme [IF] verse aux débats des photographies où [KI] [F] arbore un collier et des clips d'oreilles qui, sur l'une d'elles (reproduite en gros plan), apparaissent, en dépit de l'ancienneté de l'image, comme étant les lots litigieux ;

Que, sur les quatre photographies figurant dans le catalogue de la vente du 23 novembre 2005 et la représentant parée du collier, [KI] [F] porte des boucles d'oreilles et non des clips ;

Qu'il convient de relever que les lots litigieux ont été retrouvés à des endroits différents après le décès de [KI] [F] ;

Qu'en l'état de ces éléments, il n'est pas démontré que [KI] [F] considérait que les deux lots formaient une parure ;

Considérant qu'à supposer même que tel fût le cas, il appartiendrait à Mme [IF] de prouver qu'il s'agit de la parure qui lui a été léguée ;

Or considérant à cet égard que le seul fait que les bijoux constitueraient une parure ne signifie pas pour autant qu'il s'agirait de la parure qui a été léguée, dès lors que, ainsi qu'il a été vu précédemment, [KI] [F] n'ayant pas légué à ses amis ses bijoux les plus importants, l'Institut de France s'est vu attribuer, 'une fois les legs payés', le 'reliquat' au profit de la Fondation [KI] et [P] [F] et qu'il n'est pas contesté que ce 'reliquat' était composé notamment de bijoux qui devaient être expertisés et adjugés dans de grandes maisons de vente ; qu'en outre, il s'est écoulé près de dix années entre la rédaction du testament et le décès de [KI] [F], qui a fort bien pu en disposer au cours de cette période ;

Considérant en conséquence que, faute par Mme [IF] de rapporter la preuve que les lots n° 55 et 74 de la vente du 23 novembre 2005 constituent la parure qui lui a été léguée par [KI] [F], il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes ;

Considérant que l'Institut de France sollicite une somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de chance ;

Mais considérant que, compte tenu des circonstances de l'affaire, Me [IF] a pu se méprendre sur la portée de ses droits, de sorte que son action ne saurait être regardée comme fautive ; qu'au surplus, l'Institut de France ne se prévaut que d'un préjudice hypothétique, dès lors qu'il n'existe aucune certitude de voir les bijoux litigieux adjugés à l'avenir à un prix moindre que celui auquel ils auraient été vendus le 23 novembre 2005 ; qu'il y a donc lieu de débouter l'Institut de France de sa demande de dommages et intérêts ;

PAR CES MOTIFS :

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Y ajoutant,

Déboute l'Institut de France de sa demande de dommages et intérêts,

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes,

Condamne Mme [IF] aux dépens,

Accorde à la Scp Ribaut, avoué, le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 09/01770
Date de la décision : 19/01/2011

Références :

Cour d'appel de Paris E1, arrêt n°09/01770 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-01-19;09.01770 ?
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