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19/11/2010 | FRANCE | N°10/00404

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 6, 19 novembre 2010, 10/00404


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 6



ORDONNANCE DU 19 NOVEMBRE 2010

Contestations d'Honoraires d'Avocat





Numéro d'inscription au répertoire général : 10/00404





NOUS, Marie-Christine LAGRANGE, Conseillère à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Florence DESTRADE, Greffière, aux débats et au prononcé de l'ordonnance.


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Vu le recours formé par :





Monsieur [T] [I]

[Adresse 2]

[Localité 4]





comparant en personne





Demandeur au recours,





contre une décisio...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 6

ORDONNANCE DU 19 NOVEMBRE 2010

Contestations d'Honoraires d'Avocat

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/00404

NOUS, Marie-Christine LAGRANGE, Conseillère à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Florence DESTRADE, Greffière, aux débats et au prononcé de l'ordonnance.

Vu le recours formé par :

Monsieur [T] [I]

[Adresse 2]

[Localité 4]

comparant en personne

Demandeur au recours,

contre une décision du Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS dans un litige l'opposant à :

Maître [Y] [O] [E]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Maître Agnès RONDI, avocat au barreau de PARIS, toque : R294

Défenderesse au recours,

Par décision contradictoire, statuant publiquement, après avoir entendu l'appelant et la représentante de l'intimée à notre audience du 22 Octobre 2010 et pris connaissance des pièces déposées au Greffe,

l'affaire a été mise en délibéré au 19 Novembre 2010 :

Vu les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ;

Vu le recours formé le 31 mai 2010 par Monsieur [T] [I] à l'encontre de la décision rendue le 26 avril 2010 par Monsieur le Bâtonnier de l'Ordre des avocats à la Cour d'appel de Paris qui a :

- fixé à la somme de 5 572,50 € hors taxes le montant des honoraires dus à Maître [C] [E] sous déduction de la provision d'un montant de

3 097,24 €, soit un solde d'honoraires de 2 175,26 €,

- dit, en conséquence, que Monsieur [T] [I] doit régler à Maître [C] [E] un solde de 2 175,26 € outre les intérêts au taux légal à compter de la date de la décision et la T.V.A. au taux de 19,60% ainsi que les frais d'huissier de justice en cas de signification de la même décision ;

Vu les demandes formées et reprises oralement à l'audience par Monsieur [T] [I], appelant qui, poursuivant l'infirmation de la décision déférée :

- soulève l'exception d'inconventionnalité des dispositions législatives et réglementaires créant et organisant la procédure de contestation des honoraires d'avocats devant le Bâtonnier au motif qu'elles ne respectent pas l'article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales et l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne,

- demande que soit déclarée nulle la décision du Bâtonnier qui a été prise par un délégué qui n'est pas membre du Conseil de l'Ordre en contravention avec l'article 175 du décret du 27 novembre 1991,

- soutient que le montant demandé par Maître [C] [E] est disproportionné par rapport aux usages et à ses revenus,

- soutient que l'action de l'avocat devant l'Ordre des Avocats n'a respecté ni le bref délai ni la diligence requises par l'Ordre,

- conteste la réalité des diligences dont fait état Maître [C] [E] pour justifier ses honoraires exorbitants d'autant plus que c'est sa collaboratrice qui a fourni le travail,

- demande que :

* la durée du travail fourni soit fixée à 9 heures et qu'il lui soit remboursé la somme de 1 347,88 €,

* lui soit remboursée la somme de 1 022,58 € au motif que le Bâtonnier n'a pas tenu compte des 5 heures de provision déjà payées le 3 mars 2009,

- met en cause la qualité des diligences réalisées par Maître [C] [E],

- demande l'allocation de :

* 500 € en dédommagement d'un courriel abusif de désistement,

* 1 000 € à titre de préjudice moral

* 800 € pour rétention abusive de pièces,

* 750 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les observations formées et reprise oralement à l'audience par Maître [C] [E] qui demande la confirmation de la décision entreprise et la condamnation de Monsieur [T] [I] à lui payer la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE :

Considérant que l'appel est recevable pour avoir été formé dans le mois de la décision déférée ;

Considérant que Monsieur [T] [I] a confié à Maître [C] [E] la défense de ses intérêts dans un litige l'opposant à son épouse et, plus particulièrement, dans une procédure de référé pour violences conjugales ; que la rupture des relations par l'avocat a pour origine un comportement intempestif de la part de son client ;

1/ Sur l'exception d'inconventionnalité

Considérant que Monsieur [T] [I] soutient que les dispositions tant législatives que réglementaires régissant la procédure de contestation des honoraires devant le Bâtonnier sont contraires d'une part à l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales et à l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dès lors que le principe du droit à un procès équitable et celui de l'impartialité de la juridiction ne sont pas respectés ;

Considérant que la procédure spécifique de contestation des honoraires d'avocats, très strictement encadrée tant par les textes que par la jurisprudence, est une procédure orale obéissant aux règles de la procédure civile en la matière et au cours de laquelle l'avocat et son client exercent chacun leurs droits exactement dans les mêmes conditions ; que Monsieur [T] [I] est mal fondé à soutenir que le client ne bénéficie pas d'un procès équitable dès lors que le Bâtonnier ou son délégué exerce une fonction juridictionnelle avec la possibilité pour le client d'exercer un recours contre la décision auprès du Premier Président de la Cour d'appel compétente ; que le respect de l'impartialité est garanti par les règles déontologiques applicables à la profession d'avocat, par l'application du principe du contradictoire et par le respect du principe de l'équité dès lors qu'à défaut de convention entre les parties, les honoraires sont fixés conformément aux dispositions de la loi du 31 décembre 1971 modifiée par la loi du 10 juillet 1991 qui prévoit quatre critères : la situation de fortune du client, la difficulté de l'affaire, les frais exposés par l'avocat outre sa notoriété et ses diligences ;

Considérant que le fait que le Bâtonnier soit celui qui fixe les honoraires non seulement ne porte pas atteinte à l'exigence du procès équitable dès lors qu'il n'affecte pas le droit de celui qui conteste les honoraires de présenter sa cause dans des conditions ne le plaçant pas dans une situation de net désavantage par rapport à l'avocat, partie adverse, mais aussi permet d'assurer le respect du principe de l'égalité des armes ;

Considérant, en conséquence, que les textes législatifs et réglementaires régissant la procédure de contestation d'honoraires ne sont pas contraires tant de l'article 6-1 de la Déclaration des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales que de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

2/ Sur les moyens de forme soulevés par Monsieur [T] [I]

* sur la nullité de la décision rendue le 26 avril 200 par le Délégué du Bâtonnier

Considérant que Monsieur [T] [I] soutient que Monsieur [V] [N], ancien Membre du Conseil de l'Ordre n'était pas compétent pour statuer sur la demande de fixation d'honoraires présentée par Maître [C] [E] ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des articles 21 du décret du 12 juillet 2005, 7, 109, 110 et 175 du décret du 27 novembre 1991 et du Règlement intérieur du Barreau de Paris en son article 13-1 et 2 que tout avocat honoraire membre du conseil de l'Ordre est inscrit sur la liste spéciale des membres du barreau et peut être investi par le Bâtonnier ou le Conseil de l'Ordre de toute mission ou activité utile à l'administration de l'Ordre, à l'intérêt de ses membres ou à l'intérêt général de la profession; que ces dispositions, ensemble, s'appliquent aux pouvoirs confiés par le Bâtonnier à Monsieur [N], avocat honoraire membre du Conseil de l'Ordre, en matière de contestations d'honoraires ; que la délégation en cause est donc régulière ;

Considérant, pour ces motifs, que Monsieur [T] [I] sera débouté de sa demande d'annulation de la décision déférée ;

* sur le respect de la procédure devant le délégué du Bâtonnier

Considérant que Monsieur [T] [I] soutient d'une part que Maître [C] [E] n'a respecté 'ni le bref délai ni les diligences requises par l'Ordre' en ne déposant ses conclusions que six jours avant l'audience et que, d'autre part, le délégué du Bâtonnier n'a pas respecté le principe du contradictoire en refusant les conclusions et pièces qu'il déposait le jour de l'audience et en lui imposant une courte note en délibéré ;

Considérant que la procédure devant le Bâtonnier est une procédure orale dans laquelle les conclusions et pièces peuvent être déposées à tout moment y compris le jour de l'audience mais avec le risque non négligeable de les voir écartées dans le respect du contradictoire pour toutes les parties ; qu'il n'existe aucune atteinte au principe du contradictoire de la part de Maître [C] [E] qui a envoyé ses conclusions le 4 mars 2010 ; qu'en revanche, pour la même raison, il n'est pas illégitime que soit écarté des débats un jeu de quatorze pages de conclusions et de neuf pièces produit le jour de l'audience étant précisé qu'en l'espèce le principe du contradictoire a d'autant plus été respecté à l'égard de Monsieur [T] [I] qu'il lui a été quand même demandé de produire une note en délibéré, demande à laquelle le Bâtonnier n'était pas obligé ;

3/ Sur le montant des honoraires dus par Monsieur [T] [I] à Maître [C] [E]

Considérant, en l'espèce, que les explications contradictoires des parties et les pièces au dossier ne permettent pas de retenir l'existence d'une convention d'honoraires ;

Considérant qu'outre les critères de la loi du 31 décembre 1971 modifiée par la loi du 10 juillet 1991 rappelés ci-dessus, le Règlement intérieur harmonisé, en vigueur au moment des facturations objets du présent litige, précise un certain nombre d'autres éléments indicatifs servant à déterminer la rémunération de l'avocat étant en outre rappelé qu'en aucun cas le résultat obtenu ne peut avoir d'incidence en l'absence d'une convention d'honoraires ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que Maître [C] [E] a été indisponible pour des raisons de santé juste après le premier rendez-vous du 3 mars 2009 avec Monsieur [T] [I] et qu'elle en a avisé ce dernier ; que c'est sa collaboratrice qui a alors suivi le dossier tout en restant en contact avec Maître [C] [E] ;

Considérant, comme l'a exactement retenu le Bâtonnier, que la procédure de fixation et de contestation d'honoraires est exclusive de tout autre litige entre l'avocat et le client ; que Monsieur [T] [I] est dès lors irrecevable en toutes ses demandes concernant la lenteur et la qualité alléguées des diligences effectuées et en ses demandes de dommages et intérêts ;

Considérant que le taux horaire de 285 € a été accepté par Monsieur [T] [I] dès lors qu'il a accepté de régler le jour même du premier rendez-vous la facture de provision faisant apparaître expressément 'coût horaire conventionnel 285 € H.T.' ; qu'il est mal fondé à contester ce montant même en ce qui concerne les diligences effectuées par la collaboratrice dès lors qu'il a acquitté la somme de 2 000 € sur la facture émise le 27 mars 2009 en se bornant à contester non pas le taux horaire mais le nombre d'heures facturées ;

Considérant que Monsieur [T] [I] est mal venu à soutenir que c'est lui qui a réalisé la majeure partie du travail et en particulier le classement des pièces à produire ; qu'en effet, il appartient au client de présenter ses pièces dans un ordre utile pour son avocat, surtout en l'espèce compte tenu du niveau socio-culturel de Monsieur [T] [I] ; qu'en outre, il n'est pas contestable que des conclusions ont été rédigées par la collaboratrice qui, par ailleurs, a eu plusieurs contacts avec son adversaire et s'est rendue plusieurs fois au tribunal et plus particulièrement à une audience de plaidoiries qui, par essence, est chronophage ;

Considérant, en conséquence, que le nombre d'heures facturées pour deux procédures judiciaires compliquées du fait du comportement des parties n'apparaît pas excessif au regard des diligences effectuées et de la spécialisation du cabinet étant rappelé que Maître [C] [E] a volontairement réduit le nombre des heures réellement effectuées pour tenir compte des revenus de Monsieur [T] [I] ;

Considérant, en conséquence, que les honoraires fixés à une somme totale de 5 572,50 € par la décision déférée seront confirmés ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et par ordonnance contradictoire,

CONFIRMONS l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

DECLARONS irrecevables toutes les demandes formées au titre d'une éventuelle responsabilité de l'avocat,

DISONS n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTONS les parties de leurs autres demandes,

DISONS que la présente ordonnance sera notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception aux parties par le greffe de la Cour selon les dispositions de l'article 177 du décret du 27 novembre 1991 ;

ORDONNANCE rendue par mise à disposition au greffe de la Cour le DIX NEUF NOVEMBRE DEUX MIL DIX Par M.C LAGRANGE Conseillère qui en a signé la minute avec Florence DESTRADE Greffière, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA CONSEILLERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 10/00404
Date de la décision : 19/11/2010

Références :

Cour d'appel de Paris C6, arrêt n°10/00404 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-11-19;10.00404 ?
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