Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 2
ARRÊT DU 12 NOVEMBRE 2010
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 05/16682
Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Mai 2005 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 04/1393
APPELANTS:
FONDATION HÔPITAL SAINT JOSEPH
agissant en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 3]
[Localité 6]
Monsieur [L] [C]
[Adresse 1]
[Localité 8]
représentés par la SCP BOMMART-FORSTER - FROMANTIN, avoués à la Cour
assistés de Maître Luc WYLER , avocat au barreau de PARIS, toque R 001, plaidant pour le CABINET HELLMANN
INTIMES:
Monsieur [T] [K] ès qualité de tuteur légal de Madame [D] [K]
[Adresse 2]
[Localité 7]
SERVICE MÉDICAL DE L'UNESCO
pris en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 4]
[Localité 5]
représentés par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués à la Cour
assistés de Maître Patrick DE LA GRANGE, avocat au barreau de PARIS, toque : R 112
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 16 Septembre 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :
Jacques BICHARD, Président
Marguerite-Marie MARION, Conseiller
Marie-Hélène GUILGUET-PAUTHE, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Sabine DAYAN
ARRET :
- contradictoire
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Jacques BICHARD, Président et par Guénaëlle PRIGENT, Greffier
***
Vu l'action en responsabilité engagée par M. [T] [K], ès qualité d'administrateur légal de sa mère Mme [D] [K] , à l'encontre de la Fondation Hôpital [9] et du docteur [C] .
Vu l'expertise médicale du 15 septembre 2003 ordonnée par le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris .
Vu le jugement rendu le 30 mai 2005 par le tribunal de grande instance de Paris qui, avec exécution provisoire a :
- déclaré parfait le désistement de M. [T] [K], ès qualité, à l'égard de M. [C] et l'extinction corrélative de l'instance entre ces deux parties,
- dit que le retard de diagnostic de la complication hémorragique subie par Mme [D] [K] lui a causé une perte de chance ouvrant droit à indemnisation des préjudices subis à concurrence de 70 %,
- fixé à 650 055, 70 euros la créance du service médical de l'UNESCO, non déduite l'indemnité réparant le préjudice de Mme [D] [K] soumis à recours et à 15 050 euros le préjudice personnel,
- condamné la Fondation Hôpital [9] à payer diverses sommes tant à M. [T] [K], ès qualité d'administrateur légal de sa mère Mme [D] [K], qu'au service médical de l'UNESCO .
Vu l'appel interjeté par la Fondation Hôpital [9] et M. [C] .
Vu l'arrêt rendu par cette cour le 21 décembre 2007 qui a :
- confirmé le jugement en ce qu'il a écarté la responsabilité de la Fondation hôpital [9] au titre de l'infection nosocomiale contractée par Mme [D] [K],
- débouté Mme [D] [K] de sa demande au titre du défaut d'information relatif aux risques liés à la coronarographie,
- pour le surplus, avant dire droit sur la responsabilité de la Fondation Hôpital [9] quant à la complication hémorragique subie par Mme [D] [K] et le préjudice subi par cette dernière, ordonné une mesure d'expertise confiée au docteur [M],
- sursis à statuer sur les autres demandes des parties .
Vu l'ordonnance du 12/2/2009 ayant désigné le professeur [B] en remplacement du docteur [M],
Vu le rapport déposé par l'expert, clos le 20 juillet 2009 .
Vu les dernières conclusions déposées le :
- le 19 mai 2010 par la Fondation Hôpital [9] et M. [C] qui demandent à la cour de:
* infirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu la responsabilité de la Fondation Hôpital [9] quant à l'accident cardio vasculaire subi par Mme [D] [K] et dire que sa responsabilité n'est pas engagée,
* débouter les intimés de toutes leurs prétentions,
* ordonner la restitution par M. [T] [K], ès qualité de la somme de 530 281, 67 euros et le service médical de l'UNESCO de celle de 140 928, 73 euros,
* condamner M. [T] [K], ès qualité de tuteur légal de sa mère Mme [D] [K] et le service médical de l'UNESCO à lui payer la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile .
- 20 mai 2010 pour le Service médical de l'UNESCO et le 2 septembre 2010 par M. [T] [K], ès qualité de tuteur légal de sa mère Mme [D] [K] qui demandent à la cour de:
* à titre principal d'ordonner une mesure d'instruction complémentaire aux frais avancés des appelants,
* à titre subsidiaire, confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu la responsabilité de la Fondation Hôpital [9], condamner celui-ci à indemniser les préjudices subis par Mme [D] [K] à hauteur de 70 %,
* condamner la Fondation Hôpital [9] et son assureur à indemniser les préjudices de Mme [D] [K] tels que détaillés dans les écritures avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, outre l'application des dispositions de l'article 1154 du Code Civil .
- condamner la Fondation Hôpital [9] et son assureur à payer à Mme [D] [K] une indemnité de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile .
Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 2 septembre 2010 .
SUR QUOI, LA COUR
Considérant que les conclusions de l'expert [B] sont les suivantes :
'L'accident vasculaire ischémique sylvien droit constitué le 3 avril 1999 n'est pas en relation avec la coronarographie et la complication hémorragique survenue sur la zone de ponction de l'artère fémorale au niveau du scarpa ni avec le retard de diagnostic de cette complication imputé à la Fondation Hôpital Saint Joseph . Il s'agit d'un accident vasculaire ischémique de survenue brutale, favorisé certes par l'hospitalisation, mais qui n'aurait pu être prévenu par aucun traitement efficace dans le cas de Madame [K] .
En prenant en compte l'état antérieur de Mme [K], il n'y a pas de préjudice subi en lien de causalité avec cette complication hémorragique et plus précisément d'imputabilité de troubles neurologiques au choc hypovolémique' ;
que l'expert a répondu aux dires des parties par une synthèse précise en indiquant :
- que la coronarographie était justifiée et que le bloc de branche qui était survenu durant cet examen constituait un aléa thérapeutique,
- que la prise en charge de cet accident médical non fautif a été immédiate, diligente et conforme aux règles de l'art,
- qu'au décours de ce premier accident aucun élément ne permet d'affirmer avec certitude qu'un accident vasculaire ischémique se soit ou non produit,
- qu'au décours de cet examen un deuxième accident médical s'est produit mais qu'il s'agit également d'un aléa thérapeutique,
- que la surveillance de la patiente a été constante, attentive, l'hémorragie secondaire ayant été brutale et massive en quinze minutes,
- que la prise en charge de la complication a été immédiate et conforme aux règles de l'art,
- que malgré cette prise en charge un état de choc s'est produit,
- qu'aucun élément du dossier ne permet de dire qu'un accident vasculaire cérébral s'est ou non produit dans les suites immédiates de cet état de choc puisque le scanner était normal et que l'état clinique neurologique était considéré comme normal à l'arrivée de la patiente en réanimation,
- que durant les 17 jours qui ont suivi aucun élément du dossier ne relate l' état neurologique de la patiente mais que celle-ci est consciente et est mise en fauteuil,
- que cette absence de surveillance neurologique est certes non conforme aux règles de l'art mais n'a cependant pas provoqué de perte de chance d'éviter l'accident vasculaire du 3 avril car si des signes en rapport avec l'ischémie survenue le 16 mars avaient été mis en évidence, il n'aurait pas été possible de mettre Madame [K] à un traitement anticoagulant préventif efficace car celui-ci aurait transformé un accident ischémique en un accident hémorragique gravissime .
- que le 3 avril Madame [K] a présenté un accident brutal ischémique sylvien droit dû à un embol et qui ne saurait être la conséquence directe et certaine des épisodes de bas débit subis par la patiente car ce type d'accident de bas débit survient sur les zones charnières distales de vascularisation, là où le calibre des vaisseaux est le plus petit et non sur les troncs artériels .
- que le délai de plus de 15 jours est également un argument contre ce mécanisme de bas débit qui provoque des signes immédiats,
- que l'accident ischémique sylvien est survenu dans un contexte d'hospitalisation où se sont suivies des complications qui ont certainement favorisé sa survenue mais sans qu'aucun manquement aux règles de l'art puisse être mis en évidence avec un lien de causalité certain ;
Considérant que les conclusions de l'expert sont détaillées, claires et précises ;
qu'elles viennent très largement confirmer l'avis rendu le 21 novembre 2005 par un neurochirurgien, expert agréé par la cour de Cassation, produit aux débats par l'appelante et qui estimait qu'une nouvelle expertise diligentée en milieu spécialisé dans le domaine vasculaire cérébral devait être réalisée car sa propre pratique neurochirurgicale ne lui avait jamais permis d'observer d'accident vasculaire retardé à distance d'un choc hypovolomique, de tels accidents faisant suite à l'incident causal dans des délais très rapprochés et qu'une telle expertise apparaissait d'autant plus nécessaire qu'elle conditionnait complètement l'imputabilité des troubles neurologiques séquellaires présentés ;
que contrairement à ce que soutiennent les intimés, il n'existe entre ces conclusions et celles déposées par le premier expert aucune contradiction inconciliable alors même que cette cour rapportait dans son arrêt du 21 décembre 2007 les conclusions du sapiteur, le docteur [E], neurologue, qui s'exprimait de façon dubitative lorsqu'il écrivait :
'La cause exacte de l'accident vasculaire sylvien massif du 3 avril 1999 n'est pas parfaitement élucidée. On ne peut de ce fait effectivement affirmer avec certitude le lien certain, direct et exclusif de cet accident vasculaire cérébral avec le geste de coronarographie mais l'accident est incontestablement survenu dans ses suites';
Considérant dans ces conditions qu'il n'apparaît pas nécessaire d'avoir recours à de nouvelles opérations d'expertise et que c'est à juste titre que la Fondation Hôpital [9] sollicite sa mise hors de cause ;
que le jugement déféré sera en conséquence infirmé en ce qu'il a retenu sa responsabilité ;
qu'il sera également infirmé en ce qu'il a condamné la Fondation Hôpital [9] aux dépens ainsi qu'à payer à chacun des intimés une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu d'accueillir la demande en remboursement des sommes versées en vertu du jugement déféré qui est assorti de l'exécution provisoire, présentée par la Fondation Hôpital [9] à l'encontre des intimés ;
qu'en effet le présent arrêt, infirmatif, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution dudit jugement et que les sommes restituées portent intérêts au taux légal à compter de la signification valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution;
Considérant que l'équité commande d'accorder à la seule Fondation Hôpital [9] une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant de 1 500 euros ;
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a :
- M. [T] [K], ès qualité d'administrateur légal de sa mère Mme [D] [K], après déduction de la créance du service médical de l'UNESCO , la somme de 426 194, 44 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé dudit jugement et une rente de 16 210, 95 euros par trimestre à compter du 1er juin 2005 jusqu'au 1er novembre 2006, ainsi que la somme de 3 422, 28 euros qu'au service médical de l'UNESCO et une indemnité de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- service médical de l'UNESCO la somme de 138 222, 63 euros avec intérêts au taux légal à compter du 10 novembre 2004 et une indemnité de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau,
Prononce la mise hors de cause de la Fondation Hôpital [9] .
Déboute M. [T] [K], ès qualité de tuteur légal de sa mère Mme [D] [K] de toutes ses demandes .
Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré à la cour .
Condamne M. [T] [K], ès qualité de tuteur légal de sa mère Mme [D] [K] et le Service médical de l'UNESCO à payer à la Fondation Hôpital [9] une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant de 1 500 euros.
Rejette toutes autres demandes.
Condamne M. [T] [K], ès qualité de tuteur légal de sa mère Mme [D] [K] et le Service médical de l'UNESCO aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SCP Bommart-Forster & Fromentin, avoués à la cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile .
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT