Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRÊT DU 13 OCTOBRE 2010
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/12913
Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Mars 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 05/18760
APPELANTE
Madame [T] [C] [O] veuve [R]
née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 13] (Isère)
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 7] (ARGENTINE)
représentée par la SCP AUTIER, avoués à la Cour
assistée de Me Nicolas SCHBATH, avocat au barreau de PARIS, toque : E177
INTIMÉ
Monsieur [U] [R]
né le [Date naissance 4] 1938 à [Localité 10]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représenté par Me Gilbert THEVENIER, avoué à la Cour
assisté de Me Marie COTTINET, avocat au barreau de PARIS, toque : C007
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral et en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 septembre 2010, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mesdames Isabelle LACABARATS et Dominique REYGNER, conseillers.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Pascal CHAUVIN, président
Madame Isabelle LACABARATS, conseiller
Madame Dominique REYGNER, conseiller
Greffier :
lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Marie-France MEGNIEN
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Pascal CHAUVIN, président et par Madame Marie-France MEGNIEN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* *
[E] [R] est décédé le [Date décès 1] 2005, sans descendant ni ascendant, en laissant pour lui succéder Madame [T] [C] [O], son épouse séparée de biens, donataire de la plus large quotité disponible entre époux en vertu d'un acte notarié du 12 février 1976, et en l'état d'un testament olographe du 1er juillet 1993 léguant, notamment, 80 % de ses actions de la SA 'Le Consulat' et un appartement situé à [Adresse 12], à Madame [K] [M], et un studio situé à [Adresse 9], à son frère, Monsieur [U] [R].
Par acte du 13 décembre 2005, Madame [O] veuve [R] a assigné Madame [M] et Monsieur [R] devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir dire nuls et de nuls effets les legs à eux consentis par [E] [R].
Par acte du 19 décembre 2005, Madame [M] a assigné Madame [O] veuve [R] devant la même juridiction en délivrance de son legs.
Les deux instances ont été jointes le 19 mai 2006.
Par jugement rendu le 12 mars 2009, le tribunal a :
- homologué le protocole transactionnel intervenu le 26 avril 2007 entre Madame [M] et Madame [O] veuve [R],
- joint et annexé ce protocole au jugement dont il fera partie intégrante pour être exécutoire dans les mêmes termes,
- dit et jugé que ce protocole sera porté à la suite du dispositif du jugement et qu'il ne pourra en être délivré copie ou expédition sans ce protocole,
- dit et jugé parfait le désistement d'instance et d'action de Madame [M] à l'encontre de Madame [O] veuve [R],
- débouté Madame [O] veuve [R] de ses demandes formées à l'encontre de Monsieur [R],
- ordonné la délivrance à Monsieur [R] de son legs, portant sur le studio sis à [Adresse 9],
- condamné Madame [O] veuve [R] à verser à Monsieur [R] la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Madame [O] veuve [R] aux dépens et dit que ceux relatifs au litige opposant cette dernière à Madame [M] resteront à la charge des parties qui les ont exposés.
Madame [O] veuve [R] a relevé appel de ce jugement le 10 juin 2009, contre Monsieur [U] [R] exclusivement.
Dans ses dernières conclusions du 6 avril 2010, elle demande à la cour de :
- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions s'agissant des demandes formulée à l'encontre de Monsieur [R],
En conséquence
- constater qu'elle est propriétaire indivise, pour moitié, des parts de la S.A.S. LE CONSULAT, de l'appartement sis [Adresse 6], de l'appartement sis [Adresse 9], acquis par feu [E] [R] et elle au moyen du compte joint du couple,
- dire nul et de nul effet le legs accordé par feu [E] [R] à Monsieur [U] [R],
- en tant que de besoin, désigner un expert, aux frais 'des défendeurs' (sic), avec mission de déterminer ses droits au titre de la liquidation du régime matrimonial,
A titre subsidiaire
- dire et juger qu'elle a droit à récompense à son profit contre l'actif successoral à hauteur de la valeur du legs consenti,
- en conséquence, désigner un expert afin de déterminer la valeur du legs, à défaut la valeur des fonds engagés pour l'acquisition des biens propres ayant appartenu à [E] [R],
- en tant que de besoin, surseoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise,
- en tout état de cause, condamner Monsieur [R] à lui payer la somme de 2 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions du 29 juin 2010, Monsieur [R], intimé, prie la cour de :
- déclarer Madame [O] veuve [R] mal fondée en son appel, l'en débouter,
- confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,
- condamner Madame [O] veuve [R] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
SUR CE, LA COUR,
Considérant que le legs consenti par [E] [R] à Madame [M], portant sur 80 % de ses actions de la société 'Le Consulat' et l'appartement de [Localité 11], ayant fait l'objet d'un protocole transactionnel au cours de la procédure de première instance entre Madame [O] veuve [R] et la légataire, qui n'est plus dans la cause, ne fait plus l'objet d'aucun litige devant la cour, laquelle n'a pas à 'constater' l'étendue des droits de l'appelante, comme celle-ci l'y invite ;
Considérant, s'agissant du studio du [Adresse 9] légué par [E] [R] à son frère [U], que Madame [O] veuve [R] prétend qu'elle l'a acquis en indivision avec son époux, ainsi qu'en attesterait l'acte notarié du 23 mai 1990, et qu'en tout état de cause ce bien lui appartient pour moitié en raison de l'emploi de fonds indivis provenant d'un compte joint pour financer l'acquisition ; qu'à titre subsidiaire, elle se prévaut d'un droit à 'récompense' contre l'actif de la succession à hauteur de la valeur du legs consenti, à déterminer par expertise si besoin est, et considère que Monsieur [R] est débiteur à son égard des fonds qu'elle a avancés à [E] [R] pour l'acquisition d'un bien propre ;
Que Monsieur [R] conteste les prétentions adverses, soutenant que l'acte du 23 mai 1990 est explicite, que le seul acquéreur du studio était [E] [R] et que le legs que ce dernier lui a consenti reste valable, quelle que soit la nature des fonds ayant servi à l'acquisition du bien ;
Considérant qu'effectivement, sous le régime de la séparation de biens, le bien appartient à celui dont le titre établit la propriété sans égard à son financement ;
Considérant que l'acte notarié du 23 mai 1990 énonce que l'acquéreur est 'Monsieur [E].....[R],.....époux de Madame [T].....[O]......' ; que seul [E] [R] l'a signé ;
Que, certes, la version dactylographiée initiale de l'acte désignant comme acquéreurs Monsieur [E].....[R] .....et Madame [T].....[O], son épouse,......' a été modifiée, la conjonction de coordination 'et' ayant été rayée et remplacée par la mention manuscrite 'époux de', sans que ces rature et rajout aient été mentionnés et paraphés par le notaire et les autres signataires de l'acte comme prescrit par les articles 13 et 14 du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis devant notaire ;
Que la nullité de la rature et du rajout pouvant en résulter ne saurait toutefois avoir pour effet de conférer à Madame [O] veuve [R], qui n'était pas partie à l'acte, qu'elle n'a pas signé, ni représentée, l'acte n'en faisant pas mention, la qualité d'acquéreur indivis du studio en litige, quelle que soit l'origine des fonds ayant servi au financement de l'acquisition ;
Considérant, en conséquence, que [E] [R], ayant acquis seul le studio querellé aux termes de l'acte notarié du 23 mai 1990, en est devenu l'unique propriétaire et pouvait donc en disposer librement à cause de mort, les dispositions de l'article 1423 du code civil visées par Madame [O] veuve [R], concernant le legs fait par un époux en régime de communauté, étant inapplicables en la cause puisque les époux [O]/[R] étaient mariés sous le régime de la séparation de biens ;
Considérant que l'emploi prétendu de fonds indivis pour financer l'acquisition peut seulement permettre à Madame [O] veuve [R] de se prévaloir d'une créance à l'encontre de la succession mais n'est pas de nature à remettre en cause les droits de légataire de Monsieur [R] ni à obliger personnellement celui-ci, comme le soutient à tort l'appelante, l'article 1024 du code civil énonçant que 'le légataire à titre particulier ne sera point tenu des dettes de la succession, sauf la réduction du legs.....et sauf l'action hypothécaire des créanciers', étant observé, d'une part, que Madame [O] veuve [R], conjoint successible, n'a pas la qualité d'héritier réservataire, d'autre part, qu'il n'est pas prétendu que l'actif successoral serait insuffisant pour permettre de la désintéresser de son éventuelle créance ;
Considérant qu'il s'ensuit que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a débouté Madame [O] veuve [R] de ses demandes à l'encontre de Monsieur [R] et ordonné la délivrance à celui-ci de son legs.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement entrepris,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne Madame [O] veuve [R] à payer à Monsieur [R] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Madame [O] veuve [R] aux dépens d'appel,
Accorde à Maître THEVENIER, avoué, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,