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05/10/2010 | FRANCE | N°08/06098

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 5, 05 octobre 2010, 08/06098


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 5



ARRET DU 05 OCTOBRE 2010



(n° , 7 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : 08/06098



Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Janvier 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 04/19055







APPELANTE





S.A. COMPAGNIE AXA FRANCE IARD agissant poursuites et diligences

en la personne de son Président de son Conseil d'Administration

[Adresse 2]

[Localité 5]



Représenté par la SCP ARNAUDY - BAECHLIN, avoué

Assisté de Me Brigitte BEAUMONT, avocat





INTIME





S.A....

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 5

ARRET DU 05 OCTOBRE 2010

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/06098

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Janvier 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 04/19055

APPELANTE

S.A. COMPAGNIE AXA FRANCE IARD agissant poursuites et diligences en la personne de son Président de son Conseil d'Administration

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par la SCP ARNAUDY - BAECHLIN, avoué

Assisté de Me Brigitte BEAUMONT, avocat

INTIME

S.A. CHARTIS EUROPE anciennement dénommée AIG EUROPE prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représenté par Me OLIVIER, avoué

Assisté de Me Jean-Louis ROINE, avocat

INTIME

S.A. AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE anciennement dénommée AXA GLOBAL RISKS prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par la SCP GRAPPOTTE-BENETREAU JUMEL, avoué

Assisté de Me Jérôme CHARPENTIER, avocat

INTIME

S.A. EUROPACORP venant aux droits de la Société LEELOO PRODUCTIONS prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représenté par la SCP DUBOSCQ - PELLERIN, avoué

Assisté de Me Paul LE FEURE, avocat plaidant pour la SCP KIEJMAN et MAREMBERT

INTIME régulièrement assigné

SARL [M] [G] PERFORMANCES pris en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 6]

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats et du délibéré :

PRESIDENT : Madame Sabine GARBAN

CONSEILLERS : M. Christian BYK et Mme Sophie BADIE

GREFFIER

Dominique BONHOMME-AUCLERE

DEBATS

A l'audience publique du 31.08.2010

Rapport fait par M. Christian BYK, conseiller, en application de l'article 785 du CPC

ARRET

Rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Signé par Mme S. GARBAN, président, et par D. BONHOMME-AUCLERE, greffier

***********************

Suite à un accident de cascade intervenu le 16 août 1999, qui a coûté la vie à un cameraman et au cours duquel deux autres assistants ont été blessés, le tournage du film Taxi II, produit par la société EUROPACORP, assurée par la compagnie AIG EUROPE, a été interrompu jusqu'au 22 août 1999.

Soutenant avoir versé à son assurée une somme de 285265,50 euros au titre des frais de tournage supplémentaires engendrés par l'accident, la compagnie AIG EUROPE a, par acte du 1er août 2001, assigné la société [M] [G] PERFORMANCES et la société AXA CORPORATE SOLUTIONS, assureur de la société des AUTOMOBILES PEUGEOT, sur le fondement de l'article L 121-12 du code des assurances et de la loi du 5 juillet 1985. Par acte du 13 juin 2002, la société [M] [G] PERFORMANCES a appelé en garantie la société EUROPACORP tandis que, par conclusions du 14 février 2003, la compagnie AXA FRANCE IARD, assureur du véhicule à l'origine de l'accident, intervenait volontairement à l'instance.

Par jugement du 8 janvier 2008, le Tribunal de grande instance de PARIS a :

- condamné in solidum la société [M] [G] PERFORMANCES et la société AXA FRANCE IARD à payer à la société AIG EUROPE la somme de 285265, 50 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement et capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil,

- condamné la société AXA FRANCE IARD à garantir la société [M] [G] PERFORMANCES des condamnations prononcées à son encontre,

-condamné in solidum la société [M] [G] PERFORMANCES et la société AXA FRANCE IARD à payer à chacune des sociétés AIG EUROPE et AXA CORPORATE SOLUTIONS la somme de 4000 euros au titre des frais irrépétibles,

-condamné la société [M] [G] PERFORMANCES à payer à la société EUROPACORP la somme de 4000 euros sur le même fondement.

La compagnie AXA FRANCE IARD a fait appel de cette décision par déclaration du 25 mars 2008 et, dans ses dernières conclusions du 28 juin 2010, elle sollicite de déclarer irrecevable à son encontre l'action de la société CHARTIS EUROPE, nouvelle dénomination d'AIG EUROPE; à titre subsidiaire, elle demande à la cour de dire que la garantie de cette compagnie a porté sur la réparation des dommages résultant de la perte d'exploitation de la société EUROPACORP et de dire que la police d'assurance souscrite par EUROPACORP auprès d'AXA FRANCE IARD n'a pas pour objet de garantir cette indemnisation. En tout état de cause, il est réclamé de la compagnie CHARTIS EUROPE une somme d e 4000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions du 16 juin 2010, la compagnie CHARTIS EUROPE demande la confirmation du jugement déféré sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande à l'encontre de la société AXA CORPORATE SOLUTIONS et, en conséquence, elle sollicite la condamnation in solidum, ou l'une à défaut de l'autre, des compagnies AXA CORPORATE SOLUTIONS et AXA FRANCE IARD à lui verser la somme de 285265,50 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 1999 sur la somme de 152449,02 euros et du 13 juin 2000 sur celle de132807,48 euros, subsidiairement à compter de l'assignation, et application de l'article 1154 du code civil. Il est, en outre, demandé, la condamnation in solidum de la société [M] [G] PERFORMANCES et des compagnies AXA CORPORATE SOLUTIONS et AXA FRANCE IARD à lui payer une somme de 20000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

Par dernières conclusions du 11 juin 2010, la société AXA CORPORATE SOLUTIONS demande à la cour de réformer le jugement en disant la loi du 5 juillet 1985 inapplicable à l'espèce, en déclarant irrecevable et mal fondée l'action subrogatoire de la société CHARTIS EUROPE, de constater que le contrat de partenariat entre la société productrice et la société des AUTOMOBILES PEUGEOT, mettant à disposition le véhicule à l'origine de l'accident, interdisait tout recours à son encontre, de la mettre hors de cause et de condamner la société CHARTIS EUROPE ou tout succombant in solidum à lui payer la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions du 22 juin 2010, la société EUROPACORP demande à la cour de constater qu'aucune demande n'est faite à son encontre; subsidiairement, elle sollicite la confirmation du jugement.

Assignée conformément à l'article 659 du code de procédure civile, la société [M] [G] PERFORMANCES n'a pas constitué avoué.

CE SUR QUOI, LA COUR

Sur l'irrecevabilité de l'action de la société CHARTIS EUROPE à l'encontre de la compagnie AXA FRANCE IARD :

Considérant qu'au soutien de son appel, la société AXA FRANCE IARD fait valoir que le recours de la société CHARTIS EUROPE est irrecevable dès lors qu'il vise l'assureur de son propre assuré, les conditions contractuelles interdisant à CHARTIS EUROPE un tel recours ;

Considérant qu'aux termes de l'alinéa de l'article 5-7 des conditions générales de la police d'assurance souscrite auprès de CHARTIS EUROPE, ' les assureurs n'exerceront pas de recours, en cas de sinistre, contre le ou les assurés , ensemble ou individuellement, les directeurs , l'ensemble du personnel engagé pour la 'production assurée'et en général, contre toutes les personnes dont l'assuré serait reconnu responsable (le cas de malveillance excepté), ainsi que contre toute personne ou entité juridique envers lequel l'assuré aurait lui-même contractuellement renoncé à recours; mais si le responsable est assuré, les assureurs peuvent, malgré cette renonciation, exercer leurs recours contre l'assureur du responsable, dans la limite de cette assurance';

Considérant que le recours introduit par CHARTIS EUROPE vise la compagnie AXA FRANCE IARD en tant qu'elle assure le véhicule à l'origine de l'accident ;

Considérant que le contrat souscrit par la société EUROPACORP auprès de la compagnie AXA FRANCE IARD définit l'assuré comme étant 'les sociétés de production ou les personnes physiques utilisant un véhicule dans le cadre d'une activité cinématographique';

Considérant qu'au regard des faits de l'espèce, le véhicule était utilisé par la société [M] [G] PERFORMANCES, qui a organisé la cascade, et dont le préposé était au volant ;

Considérant qu'ainsi l'assuré est contractuellement la société [M] [G] PERFORMANCES et non la société EUROPACORP, qu'il s'ensuit qu'il ne saurait être reproché à la société CHARTIS EUROPE d'exercer un recours contre l'assureur de son assuré et que l'exception d'irrecevabilité sera rejetée de ce chef ;

Considérant que la société AXA CORPORATE SOLUTIONS avance une autre cause d'irrecevabilité, le fait que la société CHARTIS EUROPE ne justifie pas du paiement et, en conséquence, de la subrogation, suivant les conditions de l'article 1250-1 du code civil ;

Considérant que la société CHARTIS EUROPE réplique que le recours subrogatoire fondé sur les dispositions de l'article L 121-12 du code des assurances peut s'exercer nonobstant le fait qu'il ne serait pas prévu par le contrat d'assurance, que la preuve que l'assureur a payé son assuré peut se faire par tous moyens et que la police démontre que les paiements sont intervenus en vertu d'une garantie régulièrement souscrite, qu'en outre, la subrogation légale n'est pas soumise au seul article 1382 du code civil, l'article L 121-2 alinéa 1er du code des assurances visant le tiers responsable quel que soit le fondement de sa responsabilité, qu'enfin, la lettre d'acceptation de la société EUROPACORP permet à la société CHARTIS EUROPE d'invoquer également le bénéfice de la subrogation conventionnelle ;

Considérant qu'il résulte des pièces aux débats que la société CHARTIS EUROPE justifie avoir versé par chèque sur la City Bank de 1000000 Fr (152449,02 euros) du 10 novembre 1999, encaissé le 22 novembre 1999 , et par chèque de règlement de 871219 frs (132816,48 euros) émis le 1er juin 2000 et porté à l'encaissement par la société EUROPACORP, la totalité des sommes réclamées dans le cadre du présent recours subrogatoire, que ce règlement est intervenu conformément aux dispositions contractuelles, un certificat médical établissant que l'une des personnes couvertes par la garantie n'était pas en mesure de continuer le tournage et l'indemnité versée étant limitée à indemniser les frais engendrés par la période d'arrêt relevée par le médecin ;

Considérant , par ailleurs, que ce recours intervient alors qu'existe, comme il sera rappelé ci-dessous, une action possible de l'assuré contre un tiers, qu'il satisfait ainsi aux conditions de la subrogation légale prévue par l'article L 121-12 du code des assurances, que ce second chef d'irrecevabilité sera également rejeté ;

Sur la responsabilité d'un tiers :

-application de la loi du 5 juillet 1985 :

Considérant qu'AXA CORPORATE SOLUTIONS, qui conteste l'application aux faits de la loi du 5 juillet 1985, avance que la société EUROPACORP est responsable de l'accident, la garde du véhicule litigieux lui ayant été transférée par le contrat de partenariat ;

Considérant que la société CHARTIS EUROPE répond que la loi du 5 juillet 1985 est applicable à l'espèce, l'accident ayant eu lieu sur une voie et dans un lieu ouvert à la

circulation, que la réalisation de cascades n'exclut pas l'application de cette loi, que la société [M] [G] PERFORMANCES avait la garde du véhicule, celui-ci étant conduit par son préposé au moment de l'accident ;

Mais considérant que l'accident a eu lieu sur une voie fermée à la circulation par arrêté du préfet de police, qui y a autorisé la pratique de la cascade à l'origine de l'accident, qu'ainsi celui-ci est intervenu sur une voie interdite à la circulation et dédiée ,pendant le temps de cette interdiction, exclusivement à la réalisation de cascades dans le cadre d'une production cinématographique au tournage de laquelle participaient les victimes , qu'il ne saurait donc s'agir d'un accident de la circulation ;

-autres chefs de responsabilité :

Considérant, qu'à titre subsidiaire, la société CHARTIS EUROPE soutient que la responsabilité de la société [M] [G] PERFORMANCES est engagée sur le fondement de l'article 1142 du code civil , étant débitrice, comme prestataire de services, d'une obligation de sécurité à l'égard de la société EUROPACORP ;

Considérant qu'à titre plus subsidiaire, elle invoque l'application des articles 1384 alinéa 1er et 1382 du code civil, la dite société ayant commis de multiples fautes en matière de sécurité ;

Considérant que pour justifier de sa demande, la société CHARTIS EUROPE produit uniquement un arrêt de la cour d'appel de PARIS du 29 juin 2009, dont il résulte qu' 'en n'ayant pas pris les mesures nécessaires pour assurer suffisamment la sécurité des personnes travaillant sur le tournage, en ne faisant pas d'essais grandeur nature, en ne procédant à aucun calcul précis pour régler les cascades, en ne disposant pas de moyens de mesure pour estimer la vitesse réelle d'envol du véhicule, en choisissant l'emplacement des caméras d'une manière qui n'assurait pas suffisamment la sécurité, en n'utilisant pas la caméra à déclenchement automatique et en analysant le saut dans une précipitation excessive, [M] [G] a commis une faute caractérisée exposant autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer compte tenu de sa compétence et de son expérience reconnues, ayant contribué à la réalisation d'une part du décès de [J] [L] et d'autre part aux dommages subis par [H] [R] et [Y] [B]' ;

Considérant, toutefois, que cet arrêt est frappé d'un pourvoi en cassation du 2 juillet 2009 de la société EUROPACORP et du 3 juillet 2009 de M. [M] [G] et qu'en vertu du caractère suspensif des pourvois, il n'est pas possible de déduire des constatations faites par l'arrêt en matière de responsabilité des éléments permettant de caractériser, au vu du comportement de M. [M] [G], l'existence d'une faute imputable à la société [M] [G] PERFORMANCES, que la cour estime ainsi nécessaire, au vu du lien de dépendance entre les deux procédures, de surseoir à statuer sur ce point de droit dans l'attente d'une décision définitive en matière pénale ;

Considérant que l'équité ne commande pas de faire application, en l'état , des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant ,en dernier ressort, par décision rendue par défaut, et par mise à disposition de la décision au greffe,

Rejette les exceptions d'irrecevabilité et confirme le jugement déféré de ce chef,

L'infirme en ce qu'il a dit applicable la loi du 5 juillet 1985,

Sursoit à statuer sur la responsabilité et les autres chefs de demandes dans l'attente d'une décision définitive statuant sur la responsabilité pénale,

Dit n'y avoir lieu ,en l'état, à faire application de l'article 700 du code de procédure civile,

Réserve les dépens.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 08/06098
Date de la décision : 05/10/2010

Références :

Cour d'appel de Paris C5, arrêt n°08/06098 : Sursis à statuer


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-10-05;08.06098 ?
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