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29/09/2010 | FRANCE | N°09/09409

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 1, 29 septembre 2010, 09/09409


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 1



ARRÊT DU 29 Septembre 2010

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/09409



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 Octobre 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS RG n° 08/12086





APPELANT

Monsieur [C] [G]

[Adresse 1]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de Me Philippe DANESI, avocat au barreau de PARIS, toque :

R 255







INTIMEE

SNCF

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Marijke GRANIER-GUILLEMARRE, avocat au barreau de PARIS, toque : R 234 substitué par Me Valérie BOGAERT, ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 1

ARRÊT DU 29 Septembre 2010

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/09409

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 Octobre 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS RG n° 08/12086

APPELANT

Monsieur [C] [G]

[Adresse 1]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de Me Philippe DANESI, avocat au barreau de PARIS, toque : R 255

INTIMEE

SNCF

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Marijke GRANIER-GUILLEMARRE, avocat au barreau de PARIS, toque : R 234 substitué par Me Valérie BOGAERT, avocat au barreau de PARIS, toque : R234

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Juin 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Bernadette LE GARS, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Yves GARCIN, président

Madame Marie-Bernadette LE GARS, conseillère

Madame Claire MONTPIED, conseillère

Greffier : Madame Sandie FARGIER, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Yves GARCIN, président et par Madame Sandie FARGIER, greffier.

La cour est saisie de l'appel interjeté par M. [C] [G] du jugement du Conseil des Prud'hommes de Paris du 8 octobre 2009, qui après avoir retenu que son licenciement par la SNCF était justifié par une insuffisance professionnelle, a condamné l'employeur à lui payer la somme de 11.916,07 € à titre de rappel de salaire variable pour 2008, ladite somme avec intérêts au taux légal à compter de la réception par la partie défenderesse de sa convocation devant le bureau de conciliation, déboutant le salarié du surplus de ses demandes et la SNCF de sa demande reconventionnelle.

Faits et demandes des parties :

Le 1er septembre 2000 M. [C] [G] a été embauché par la SNCF en qualité de responsable juridique à la direction du transport public régional et local, ce recrutement intervenant dans le contexte de décentralisation de la compétence 'transport ferroviaire' au niveau des régions, lequel prévoyait que les régions passent avec la SNCF des conventions fixant les conditions d'exploitation et de financement des services ferroviaires. A compter de 2005 M. [C] [G] a occupé le poste de directeur délégué TER pour la région PACA, poste basé à [Localité 5]. A ce titre, sa rémunération mensuelle brute s'élevait à 9.529 € à laquelle s'ajoutaient une part variable collective liée aux résultats de l'entreprise, soit 5.811 € brut en 2007, et une part variable individuelle liée à ses performances personnelles, soit 13.000 € brut en 2007.

Sur convocation téléphonique de la veille M. [C] [G] a été auditionné le 24 juillet 2008 par un cadre du contrôle général de l'entreprise sur les conditions dans lesquelles il avait passé certains marchés avec une société LTK COMMUNICATION domiciliée en Lorraine, contexte dans lequel il était reproché au salarié des irrégularités graves et des actes de favoritisme.

Le 12 août suivant la SNCF notifiait verbalement à M. [C] [G] une mise à pied conservatoire et l'invitait à quitter immédiatement son bureau après remise des clés de celui-ci (dont les clés étaient remplacées) et remise de son ordinateur, de son badge et de son véhicule. La mise à pied verbale était confirmée par écrit le lendemain et une procédure disciplinaire était initiée le 14 août 2008 sous la forme d'une demande d'explications comportant une série de questions sur 5 marchés passés, questions auxquelles il était demandé au salarié de répondre dans un délai de 6 jours, ce à quoi il se conformait.

Le 10 septembre 2008 M. [C] [G] était destinataire d'une lettre recommandée avec avis de réception datée du 8 septembre aux termes de laquelle la DRH (Mme [Y]) lui annonçait l'abandon des poursuites disciplinaires engagées contre lui, 'au vu des réponses qu'il avait fournies', et le convoquait, parallèlement à un entretien préalable en vue de licenciement 'pour insuffisances et négligences' dont il avait fait preuve dans la direction de son service.

Le 3 octobre 2008, aux termes d'une lettre de 8 pages, la SNCF notifiait à M. [C] [G] son licenciement pour 'insuffisance professionnelle'.

C'est dans ce contexte de fait et de procédure que M. [C] [G], qui contestait le motif de son licenciement et, en tous cas, le caractère réel et sérieux de ce licenciement, a saisi le Conseil des Prud'hommes de diverses demandes chiffrées et qu'est intervenu le jugement dont appel.

M. [C] [G] poursuit l'infirmation du jugement et demande à la cour de :

- dire et juger que son licenciement est intervenu de façon verbale le 12 août 2008, de sorte qu'il est sans cause réelle et sérieuse,

- à titre subsidiaire, juger que le motif d'insuffisance professionnelle ne correspond pas au motif réel de licenciement du 3 octobre 2008, s'agissant, en réalité, d'un motif disciplinaire, et, en conséquence juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

- à titre très subsidiaire, juger que le motif invoqué d' 'insuffisance professionnelle' est, en tout état de cause, dénué de cause réelle et sérieuse,

en conséquence,

- condamner la SNCF à lui payer la somme de 350.000 € au titre de l'indemnité prévue par l'article L.1235-3 du code du travail,

En tout état de cause,

- condamner la SNCF à lui payer :

- 60.000 € à titre de dommages intérêts pour licenciement intervenu dans des circonstances vexatoires,

- 14.293 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés RTT compris,

- 1.426 € à titre de rappel de la part individuelle supplémentaire de la rémunération variable pour l'année 2007 outre 142,60 € pour les congés payés afférents,

- 2.922,65 € pour la part individuelle supplémentaire de la rémunération variable pour l'année 2008 outre 292,30 € pour les congés payés afférents,

- 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

°°°

La SNCF demande d'infirmer le jugement en ce qu'elle a été déboutée de sa demande de remboursement de trop perçu au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés ainsi qu'en ce qu'il a considéré qu'il devait octroyer à M. [C] [G] 11.916, 07 € brut à titre de rappel de salaire variable pour 2008. En appel, elle demande le restitution des montants alloués. Elle requiert la confirmation de la décision pour le surplus ainsi qu'une indemnité de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE,

Considérant qu'il convient de se référer expressément aux conclusions des parties visées à l'audience et à leurs explications orales développées au soutien de celles-ci ;

Sur la nature du licenciement :

Considérant qu'il sera référé aux différentes étapes ayant présidé au licenciement de M. [C] [G] telles que ci-dessus rappelées ;

Qu'il est constant que M. [C] [G] a fait l'objet, le 12 août 2008, d'une mise à pied, qualifiée de 'conservatoire', avec effet immédiat, comportant remise des clés de son bureau et de ses outils de travail ; qu'il a été dispensé de préavis mais que celui-ci lui a été réglé ; qu'il est non moins constant qu'une procédure disciplinaire était engagée contre lui le 14 août 2008 , sous forme de questions auxquelles il lui était demandé de s'expliquer quant à la passation de 11 marchés dont 5 précisément listés, au sujet desquels il lui était reproché, notamment, des procédés 'gravement irréguliers', car 'en infraction avec la réglementation', des procédures d'appel d'offres 'contournées' pour 'favoriser la société LTK', des 'habillages de marchés' 'fautifs', la 'mise en risque de la SNCF pour prêt de main d'oeuvre illicite' ; que la procédure initiée contre M. [C] [G] était donc engagée sur un plan disciplinaire motif pris de l'existence de fautes graves commises par le salarié ;

Que si la lettre de licenciement du 3 octobre 2008 a été notifiée à M. [C] [G] pour 'insuffisance professionnelle', laquelle est par nature non fautive (étant afférente à du travail ou à des résultats insuffisants, à la non réalisation d'objectifs malgré la mise en position de le faire etc...), force est de constater qu'elle reprend, cependant, les griefs qui étaient allégués au soutien de la procédure disciplinaire initiale, à savoir : les 'très graves irrégularités dans la passation de certains marchés mais aussi et surtout dans leur exécution', lesquelles 'graves irrégularités étaient de nature à porter atteinte aux intérêts financiers de la SNCF mais aussi à lui faire courir des risques importants notamment au plan judiciaire et au plan de son image' (page 1), règles de passation des marchés 'non respectées' (page 2), marchés passés 'sans habilitation' (page 3), 'non-respect du principe d'impartialité dans la mise en oeuvre de la procédure de consultation' (page 4), absence de contrôle des prestations prévues au contrat et absence des livrables prévus et 'violation des principes comptables' (page 5), autorisation du recours au prêt de main d'oeuvre dans des conditions susceptibles d'engager la responsabilité civile et pénale de la SNCF (page 6), et de manière générale 'transgression des règles d'éthique' (page 7) .... ;

Considérant ainsi que les griefs allégués dans la lettre de licenciement, qui, doit t-il être rappelé fixe les limites du litige, sont donc objectivement afférents à un comportement fautif et non à une insuffisance professionnelle par définition non fautive, ce dont il résulte que la motivation de la lettre est dépourvue de cohérence, ce qui implique que le licenciement de M. [C] [G] par la SNCF doit être analysé en licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la prise d'effet de ce licenciement doit être fixée à la date de réception de la lettre du 31 octobre 2008 ; qu'en effet, en l'état des seuls éléments d'appréciation communiqués aux débats relativement aux conséquences objectives de la mise à pied conservatoire du 12 août 2008 et de la procédure disciplinaire initiée le 14 août 2008 et abandonnée le 10 septembre 2008, la cour n'est pas en mesure de satisfaire à la réclamation de M. [G] tendant à voir juger que le licenciement serait intervenu verbalement le 12 août 2008 ;

Sur les demandes chiffrées :

Considérant que, dès lors, qu'infirmant le jugement, la cour estime que le licenciement de M. [C] [G] par la SNCF est sans cause réelle et sérieuse il convient de condamner la SNCF à payer à son ancien salarié sur ce fondement la somme de 90.000 €, ce montant étant arrêté au vu du fait que M. [C] [G] a retrouvé un emploi de chargé de mission chez VEOLIA dès le 1er décembre 2008, soit 2 mois après son licenciement par la SNCF, et ce, moyennant un salaire équivalent (130.000 €/ l'an) à son précédent salaire et ne justifie pas d'un préjudice particulier justifiant une indemnisation supérieure ;

Considérant que le licenciement de M. [C] [G] étant intervenu dans des conditions brutales et expéditives et donc éminemment vexatoires, cette circonstance justifie que la SNCF soit condamnée à lui payer, en sus, une indemnité de 10.000 € sur ce fondement ;

Considérant, au regard des autres réclamations formulées par le salarié, qu'il résulte des éléments du dossier que M. [C] [G] a perçu à titre de solde de tous comptes les sommes de :

- 1.536,98 € à titre d'indemnité de préavis,

- 40.663,74 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 20.512,47 € pour congés non pris, ces différents montants ayant été crédités sur son bulletin de salaire de janvier 2009 ;

Que force est de constater que M. [C] [G] ne justifie pas, pièces probantes à l'appui, être créancier de son ancien employeur d'autres sommes au titre de congés payés non pris ; qu'il sera, en conséquence, débouté de sa demande chiffrée portant sur 14.293 € supplémentaires à ce titre ;

Considérant, pour le surplus, que c'est par des motifs appropriés, que la cour adopte, que les premiers juges ont rejeté les demandes supplémentaires de M. [C] [G] au titre de la rémunération variable 2007 avec les congés payés afférents et au titre de la part individuelle de la rémunération variable 2008 et les congés payés afférents; que le jugement sera confirmé sur ces points ; que la SNCF sera déboutée de sa demande de restitution dont elle ne justifie pas ;

Considérant que l'équité commande de condamner la SNCF à payer à M. [C] [G] 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement dont appel en ce qu'il a jugé que le licenciement de M. [C] [G] par la SNCF était justifié par une insuffisance professionnelle ;

Statuant à nouveau sur ce point,

Dit que le licenciement de M. [C] [G] par la SNCF est sans cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

Condamne la SNCF à payer à M. [C] [G] la somme de 90.000 € à titre de dommages intérêts sur ce fondement ;

Condamne la SNCF à payer à M. [C] [G] la somme de 10.000 € à titre de dommages intérêts pour licenciement vexatoire ;

Confirme le jugement pour le surplus de ses autres dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne la SNCF à payer à M. [C] [G] 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne la SNCF aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 09/09409
Date de la décision : 29/09/2010

Références :

Cour d'appel de Paris K1, arrêt n°09/09409 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-09-29;09.09409 ?
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