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29/06/2010 | FRANCE | N°08/06962

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 5, 29 juin 2010, 08/06962


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 5



ARRET DU 29 JUIN 2010



(n° , 11 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : 08/06962



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Juillet 2007 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 03/03687









APPELANT





Monsieur [R] [J]

[Adresse 2]

[Localité 6]






Représenté par la SCP BOLLING DURAND LALLEMENT, avoué

Assisté de Me Sandra BERDUGO, avocat





INTIMEES





S.A. AXA FRANCE VIE pris en la personne de son Président

[Adresse 3]

[Localité 5]





ASSOCIATION GENERALE ...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 5

ARRET DU 29 JUIN 2010

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/06962

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Juillet 2007 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 03/03687

APPELANT

Monsieur [R] [J]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représenté par la SCP BOLLING DURAND LALLEMENT, avoué

Assisté de Me Sandra BERDUGO, avocat

INTIMEES

S.A. AXA FRANCE VIE pris en la personne de son Président

[Adresse 3]

[Localité 5]

ASSOCIATION GENERALE INTERPROFESSIONNELLE DE PREVOYANCE ET D'INVESTISSEMENT - AGIPI prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par la SCP BOMMART-FORSTER - FROMANTIN, avoué

Assisté de Me Guy-Claude ARON, avocat

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats :

Mme Sylvie NÉROT, conseiller, siégeant en application de l'article 786 du code de procédure civile à laquelle les avocats ne se sont pas opposés.

Lors du délibéré :

Mme S. GARBAN, président

Mme Janick TOUZERY-CHAMPION, et Mme Sylvie NÉROT, conseillers

GREFFIER

Lors des débats :

Mme Christiane BOUDET

DEBATS

A l'audience publique du 26.05.2010

Rapport fait par Mme Sylvie NÉROT, conseiller en application de l'article 785 du CPC

ARRET

Rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Signé par Mme S. GARBAN, président, et par D. BONHOMME-AUCLERE, greffier

*************************

Selon contrat à effet au 1er mars 1984, Monsieur [R] [J], pharmacien en officine, a adhéré à un contrat d'assurance groupe dénommé Convention d'Assurance et de Prévoyance - CAP souscrit par l'Association Générale Interprofessionnelle de Prévoyance - AGIPI auprès de la société AXA Conseil Vie (aux droits de laquelle se trouve la société AXA France Vie) .

Ils avaient pour objectif de garantir, respectivement, les pertes de revenus et le remboursement des emprunts contractés par l'adhérent en cas d'arrêt de travail ou de décès, par le versement, à compter du 31ème jour d'incapacité (sauf rechute dans les 90 jours), d'indemnités journalières servies jusqu'au 1.095ème jour suivant la cessation d'activité

En garantie de divers emprunts souscrits entre le 13 mai 1990 et le 1er janvier 1993, il a régularisé diverses adhésions et 12 certificats d'adhésion ont été établis.

Monsieur [J] a été placé en arrêt de travail à compter du 07 avril 2000 et a réclamé le service des indemnités journalières prévu au titre de son adhésion aux conventions CAP et ARC.

Eu égard aux conclusions d'un rapport médical amiable puis d'un rapport établi dans le cadre de la procédure d'arbitrage convenue, lesquels retenaient diverses périodes d'incapacité partielle de travail, l'assureur, se fondant sur la convention qui ne prévoit le service d'indemnités journalières qu'en cas d'incapacité totale de travail, n'en a versé à l'assuré qu'à ce dernier titre, après observation du délai de carence contractuel, en sorte que Monsieur [J] qui conteste cette appréciation a saisi la juridiction de fond aux fins d'obtenir une indemnisation ininterrompue à compter du 07 avril 2000 jusqu'au 30 avril 2003, date de reprise de son activité professionnelle.

Par jugement avant-dire droit, le tribunal de grande instance de Paris saisi a désigné un expert et le docteur [X] [E] ainsi missionné a établi un rapport daté du 13 avril 2006.

Par jugement rendu le 10 juillet 2007, le tribunal de grande instance de Paris, se prononçant sur l'interprétation des contrats, sur la demande de Monsieur [J] se prévalant d'un arrêt de travail continu de trois années, sur la demande reconventionnelle de l'assureur se prévalant, quant à lui, d'un trop versé a, avec exécution provisoire :

- mis hors de cause l'AGIPI ,

- condamné la société AXA France Vie à verser à Monsieur [R] [J] les indemnités journalières dues en application des contrats CAP et ARC pour quatre périodes d'incapacité, soit: du 07 avril au 30 novembre 2000, du 12 décembre 2000 au 12 avril 2001, du 09 octobre au 09 décembre 2001 et du 16 janvier au 30 juillet 2002,

- dit qu'il sera déduit des indemnités journalières dues les prestations déjà versées et l'application de la franchise contractuelle de 30 jours pour la première et la troisième période d'incapacité,

- débouté Monsieur [R] [J] de ses autres demandes,

- débouté la société AXA France Vie de sa demande reconventionnelle,

- débouté l'AGIPI de sa demande au titre de ses frais non répétibles,

- condamné la société AXA France Vie à verser à Monsieur [J] la somme 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Monsieur [R] [J] a relevé appel de ce jugement et, par dernières conclusions signifiées le 06 avril 2010, il demande à la cour :

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a mis hors de cause l'AGIPI, limité les indemnités journalières aux quatre périodes qu'il a retenues et l'a débouté de ses autres demandes,

- de le confirmer en ce qu'il a débouté la société AXA France Vie de sa demande reconventionnelle, l'AGIPI de sa demande au titre de ses frais non répétibles et condamné la société AXA France Vie à lui verser la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens,

- de statuer à nouveau pour le surplus et :

* de considérer que l'AGIPI et l'assureur doivent lui servir les prestations découlant des stipulations des conditions générales des contrats souscrits relatives à l'incapacité temporaire totale (prévues aux articles 11 et suivants du contrat 'ARC' et 16 et suivants du contrat 'CAP') pour la période du 07 avril 2000 eu 30 avril 2003 dont à déduire les prestations déjà versées,

* de condamner 'solidairement' l'AGIPI et la société AXA France Vie à lui payer les prestations pour cette dernière période déduction faite des paiement effectués au cours des périodes suivantes : du 07 avril 2000 au 30 novembre 2000, du 24 janvier au 28 février 2001, du 09 octobre au 09 décembre 2001 et du 20 juin 2002 au 29 janvier 2003,

* de les condamner, en outre, 'solidairement' à lui payer la somme de 15.000 euros en réparation de son préjudice,

- et, y ajoutant, de condamner 'solidairement' l'AGIPI et la société AXA France Vie à lui payer la somme de 4.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter tous les dépens.

En réplique et par dernières conclusions signifiées le 10 mai 2010, l'Association Générale Interprofessionnelle de Prévoyance et d'Investissement - AGIPI et la société anonyme AXA France Vie demandent à la cour :

- de juger injustifié l'appel interjeté par Monsieur [J] mais parfaitement fondés leurs appels principal et incident en réformant le jugement entrepris dans le seul intérêt d'AXA France Vie,

- de confirmer la mise hors de cause de l'association AGIPI,

- de considérer, d'une part, que Monsieur [J] ne peut contractuellement prétendre, dans la limite de 1.095 jours, qu'à l'indemnisation des seules périodes d'arrêt total de travail, à l'exclusion des périodes de ralentissement même important d'activité et sous déduction, chaque fois, de la franchise des trente premiers jours et, d'autre part, que ne sont pas justifiées les critiques de Monsieur [R] [J] contre l'avis du docteur [E],

- de considérer, d'une part, que Monsieur [J] justifie uniquement de trois périodes d'arrêt de travail total (du 07 avril au 07 septembre 2000, du 12 décembre 2000 au 12 avril 2001 et du 16 janvier au 30 juillet 2002), qu'il ne peut prétendre qu'à l'indemnisation de ces trois périodes sous déduction de la franchise des trente premiers jours et que l'indemnisation contractuelle de la société AXA se limite à 382 jours et, d'autre part, que du fait qu'elle a, en réalité, versé provisionnellement des indemnités journalières pendant 470 jours, doit être constaté un trop versé par l'assureur,

- de débouter en conséquence Monsieur [J] de l'ensemble de ses prétentions comme étant injustifiées,

-de la recevoir, en revanche, en sa demande reconventionnelle et de condamner Monsieur [J] à lui restituer :

* pour paiement indu au titre des indemnités journalières au delà de 382 jours, une somme principale de 22.856,31 euros avec intérêts au taux légal à hauteur de la somme de 20.542,44 euros à compter de ses conclusions signifiées le 31 mai 2006 et, pour le surplus, à compter de ses conclusions signifiées le 23 octobre 2006,

* la somme de 25.597,66 euros réglée à son profit en vertu de l'exécution provisoire ordonnée par le jugement déféré avec intérêts à compter de l'arrêt à intervenir ou, à tout le moins, à compter de sa signification,

- de condamner Monsieur [R] [J] à payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, à l'association AGIPI la somme de 5.000 euros, à la société AXA France Vie la somme de 2.000 euros et à supporter les entiers dépens incluant les frais d'expertise judiciaire.

SUR CE,

Sur la demande de mise hors de cause de l'association AGIPI

Considérant que Monsieur [J] appelant estime qu'il est fondé à présenter ses demandes tant à l'égard de la souscriptrice, l'association AGIPI, prise en sa qualité de co-contractant, qu'à l'égard de la société AXA France Vie, prise en sa qualité d'assureur du risque, et fait grief aux premiers juges d'avoir mis hors de cause l'association AGIPI ;

Que, pour ce faire, il se prévaut cumulativement des stipulations des deux contrats, et, en particulier, de leurs articles 4 et des articles 8 du contrat ARC et 10 du contrat CAP qui prévoient le paiement des cotisations au profit de l'AGIPI ou le versement par cette dernière du capital-décès, ainsi que d'éléments factuels tels que le fait que l'AGIPI ne s'est jamais présentée comme un simple intermédiaire au moment de la souscription du contrat ou de son exécution, que le rapport d'arbitrage a été initié à la demande conjointe de l'AGIPI et de lui-même et que le refus d'indemnisation d'une période continue d'incapacité émane de l'association ;

Qu'il estime, en outre, que l'intervention volontaire à l'instance de l'assureur ne peut justifier la mise hors de cause de l'AGIPI ;

Mais considérant qu'à juste titre, le tribunal énonce qu'aux termes de l'article 1er des conditions générales de la police de groupe souscrite par l'association, l'assureur est seul débiteur des prestations dont Monsieur [J] poursuit le paiement ;

Qu'avec pertinence, les intimées qui s'interrogent à juste raison sur l'intérêt d'une telle prétention sans qu'il n'y soit apporté réponse par l'appelant, opposent à l'argumentation de ce dernier les stipulations de l'article 5 des polices d'assurance de groupe confiant à l'AGIPI un mandat de gestion pour l'encaissement des cotisations, le règlement des sinistres et le suivi des dossiers et se prévalent du fait qu'est seul concerné par la demande en paiement l'assureur mandant directement en cause ;

Que la demande ne saurait, par conséquent, prospérer en sorte que le jugement sera confirmé sur ce point ;

Sur l'interprétation des contrats

Considérant que les articles 16 du contrat CAP et 11 du contrat ARC stipulent que les indemnités journalières au montant variable, selon les options de l'adhérent ' sont versées à l'assuré qui se trouve, par suite de maladie ou d'accident, dans l'incapacité totale médicalement constatée d'exercer sa profession' et précisent : ' toute reprise, même partielle, de l'activité professionnelle, entraîne l'arrêt du service des prestations' ;

Que ces mêmes stipulations apportent une dérogation au principe de la période franchise de 30 jours convenue ainsi énoncée : ' En cas de rechute dans les 90 jours suivants la reprise d'activité, le paiement des indemnités reprend immédiatement si le nouvel arrêt de travail est dû à la même cause que l'arrêt précédent' ;

Considérant que Monsieur [J], poursuivant l'indemnisation ininterrompue de son arrêt d'activité, reproche aux premiers juges d'avoir, par refus de dénaturation et en raison de leur clarté rejeté sa demande d'interprétation de ces clauses et d'avoir estimé que les intimées avaient satisfait à leur devoir d'information ; qu'il présente au soutien de son moyen d'appel une argumentation en quatre branches tendant à voir considérer que doit être écartée la définition de l'incapacité totale de travail dont se prévalent les intimées afin de voir limiter leur garantie ;

Qu'il tire d'abord argument des termes des dépliants publicitaires édités par l'AGIPI pour la promotion de la convention d'assurance à laquelle il a adhéré, reprochant 'aux assureurs' un silence délibérément trompeur sur la définition de l'incapacité totale médicalement constatée d'exercer une profession alors qu'elles lui laissaient penser que la garantie s'appliquerait dès lors qu'il ne serait pas en état de travailler dans son officine ;

Que pour revendiquer, d'une deuxième part, sur le fondement des articles 1162 du code civil et L 133-2 du code de la consommation, une interprétation des clauses litigieuses en sa faveur, il argue d'une rédaction dépourvue de clarté et de précision, à telle enseigne, ajoute-t-il, que l'avocat des intimées a estimé utile, dans des conclusions de première instance, de définir de manière détaillée l'incapacité litigieuse ;

Que rappelant la définition que donne le dictionnaire Littré de la profession de pharmacien et précisant la nature et l'étendue concrètes de ses tâches, il estime, en troisième lieu, que l'admission de la limitation de garantie qui lui est opposée reviendrait à priver de cause les contrats auxquels il a adhéré ;

Que se fondant, enfin, sur les dispositions des articles L 5124-4 et R 4235-13 du code de la santé publique relatifs au devoir du pharmacien d'exercer personnellement ses fonctions, il estime qu'admettre que sa tâche pouvait se limiter, à certaines périodes, à un travail de simple gestion contrevient à ses obligations légales et qu'il n'aurait pas contracté s'il avait su que la garantie lui serait refusée en cette occurrence ;

Mais considérant, sur les deux premiers de ces arguments, que par motifs pertinents et circonstanciés que la cour fait siens, les premiers juges ont estimé que le moyen tiré de brochures publicitaires éditées plusieurs années après les adhésions de Monsieur [J] et celui tiré de l'obscurité de ces clauses ne pouvaient prospérer ;

Qu'il y sera simplement ajouté qu'admettre l'argumentation que développe l'appelant à partir de la lecture circonstanciée qu'ont pu faire les intimées de ces clauses pour en démontrer la pleine clarté reviendrait à priver toute partie se prévalant de l'absence d'obscurité d'une clause de la faculté de s'en expliquer ;

Qu'aux troisième et quatrième arguments de Monsieur [J] les intimées opposent pertinemment le fait que, dans le cadre de cette garantie facultative librement définie par les parties à des contrats qui n'étaient pas spécialement conçus pour la profession de pharmacien, la prime telle que fixée par l'assureur en considération du nécessaire équilibre de l'opération d'assurance et telle qu'acceptée par l'adhérent trouve sa contrepartie dans l'obligation de garantir le risque précisément défini dont les parties ont librement convenu et dont Monsieur [J], disposant d'un niveau intellectuel qui lui permettait d'exercer la profession de pharmacien, ne pouvait pas méconnaître la portée ;

Qu'à juste titre, les intimées en déduisent que la prime calculée, comme en l'espèce, pour le seul cas d'un arrêt total de travail ne peut être identique à celle qui aurait pu être calculée pour garantir également la simple réduction d'activité ;

Que la cour ne saurait, par conséquent, tirer les conséquences juridiques dont entend bénéficier Monsieur [J] à la faveur de moyens inopérants ;

Sur la mise en oeuvre de la garantie

Considérant qu'alors que le docteur [E], commis par le tribunal et qui a réalisé son expertise le 24 janvier 2006, identifie trois périodes discontinues d'incapacité temporaire totale telle que contractuellement définie, à savoir:

- du 07 avril au 07 septembre 2000 ,

- du 12 décembre 2000 eu 12 avril 2001 ,

- du 16 janvier au 30 juillet 2002 ,

le tribunal, en contemplation d'éléments médicaux dont se prévaut Monsieur [J], a :

- prolongé la première période jusqu'au 30 novembre 2000,

- et ajouté une période intermédiaire d'indemnisation, du 09 octobre au 09 décembre 2001 ;

Considérant que l'appelant, poursuit, la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu les quatre périodes sus-évoquées et, critiquant le rapport d'expertise judiciaire, entend, de plus, être indemnisé durant les périodes intermédiaires ;

Que l'assureur, appelant incident, soutient, quant à lui, que son assuré ne peut prétendre à une période interrompue d'arrêt total de travail depuis le 07 avril 2000, que doivent uniquement être retenues les trois périodes identifiées par cet expert qui correspondent à 382 jours indemnisables et qu'ayant procédé à une indemnisation correspondant à une période de 470 jours il est fondé à poursuivre la restitution d'un indu de 58 jours d'indemnisation (chiffré à 22.856,31 euros) ;

Mais considérant qu'à juste titre l'assureur objecte que les prétentions formulées par Monsieur [J], qui conduiraient à indemniser une période d'inactivité ininterrompue d'avril 2000 à avril 2003, sont contredites tant par l'appréciation du docteur [E] commis par le tribunal que par celles du docteur [G] désigné dans le cadre de l'expertise d'arbitrage, par nature contradictoire, puisque l'un comme l'autre estime que l'incapacité de travail n'a pas été totale durant toute cette période ;

Qu'en outre, il convient de relever que si l'appréciation du docteur [E] est critiquée par Monsieur [J], ce qui a conduit le tribunal à partiellement l'amender, sa méthodologie ne saurait porter le flanc à la critique ;

Que l'expert s'en est tenu aux termes de sa mission qui était de déterminer la durée de l'incapacité telle que définie dans les conditions générales de la convention d'assurance et de prévoyance a savoir 'l'incapacité totale médicalement constatée d'exercer sa profession' ;

Qu'il a, notamment, eu soin d'interroger Monsieur [J] sur ses conditions de travail, lequel lui a répondu (page 13/14 du rapport) qu'il a une importante officine et que quand il travaille, il reste 12 heures par jour de façon continue derrière son comptoir ; que le travail administratif est tout informatisé et qu'il y passe très peu de temps' et a repris, sur ce point, un élément de l'expertise du docteur [G] réalisée le 18 janvier 2002, à savoir qu'il effectuait des actes de gestion à domicile ;

Que le docteur [E] s'est, plus généralement, livré à une étude particulièrement circonstanciée des nombreux documents médicaux qui lui ont été soumis, a été amené à relever les contradictions dont certains étaient porteurs et à pris soin de justifier ses prises de position ;

Qu'enfin, les conclusions du docteur [E] ne sauraient être écartées aux motifs soutenus par Monsieur [J] qu'il a consulté de multiples spécialistes, dès lors que ces derniers n'avaient pas à se prononcer en regard des définitions contractuelles du risque, ou que le docteur [W] missionné dans le cadre de la mise en oeuvre de la garantie d'un autre contrat d'assurance a conclu autrement que ne l'a fait l'expert désigné par le tribunal dans le cadre du seul litige donnant lieu à la présente procédure dès lors que le contrat invoqué est étranger au présent litige; qu'il peut d'ailleurs être relevé, sur ce dernier point, que le docteur [E] a mené ses opérations d'expertise en connaissance de cette expertise d'arbitrage puisqu'il y porte une appréciation en page 9/14 de son rapport ;

Considérant, par conséquent, s'agissant de se prononcer sur les troubles de santé litigieux et sur les périodes indemnisables au sens du contrat, qu'il résulte du rapport judiciaire auquel il convient de se référer qu'en avril 2000, a été porté le diagnostic d'ostéonécrose aseptique de la tête fémorale droite, qui sera rattachée à la prise de corticoïdes de très courte durée en 1999; que Monsieur [J] a été placé en arrêt de travail le 07 avril 2000 avec une prescription de décharge du membre inférieur droit à l'aide de cannes anglaises et prescription d'un antalgique ;

Qu'en premier lieu, si le docteur [E] a considéré qu'une première période d'arrêt total d'activité doit s'inscrire entre le 07 avril 2000 et le 07 septembre 2000, le tribunal l'a prolongée jusqu'au 30 novembre 2000 ;

Que l'appréciation des premiers juges repose essentiellement sur des documents médicaux postérieurs à la période incriminée (puisqu'établis les 12 et 18 décembre 2000 par les docteurs [A] et [L]) et sur l'avis du docteur [G] qui ne le justifie que par une formule par trop générale, valable pour l'ensemble des périodes d'arrêt total d'activité par lui retenues, à savoir: ' compte tenu des constations médicales effectuées et des soins effectués, on peut considérer qu'il a existé plusieurs périodes d'inaptitude totale d'activité correspondant aux poussées douloureuses' ;

Que si, de son côté, Monsieur [J] estime qu'il a été en arrêt total d'activité, sans discontinuité, entre la première et la deuxième période retenue par le docteur [E] (ce qui revient à une période d'inactivité totale du 07 avril au 11 décembre 2000), les termes des certificats médicaux des docteurs [N], [A] et [Z] invoqués et les préconisations qu'ils contiennent ne permettent toutefois pas d'étayer tant l'appréciation du tribunal que les affirmations de Monsieur [J] ;

Que le docteur [E] précise, en effet (en page 13/14 de son rapport) : ' de tous les documents vus, il ressort certaine contradiction ; d'une part en 2000, il n'est pas vu de certificat médical descriptif du retentissement fonctionnel de sa pathologie. On peut penser que celle-ci devait être assez peu importante et assez peu douloureuse puisqu'il ne ressort que de façon épisodique un traitement antalgique assez banal' ;

Qu'il relève que le conseil qui est donné à Monsieur [J], le 12 décembre 2000, d'utiliser ses deux cannes en décharge et de ne pas du tout marcher sans canne suppose qu'il marchait sans utiliser ses cannes auparavant (page 11/14 du rapport) ;

Qu'il conclut sur ce point (en page 14/14 du rapport) : 'au delà (du 07 septembre 2000) il ne ressort pas d'argument médical formel justifiant de prolonger l'incapacité temporaire totale, Monsieur [J] était tout à fait apte à se déplacer au moins en béquillant et pouvait assurer une partie de son activité professionnelle' ;

Que l'assureur fait, quant à lui, observer sans être contredit que si Monsieur [J], responsable du fonctionnement de son officine à l'égard de l'autorité ordinale, avait totalement dû s'abstenir de toute activité, il n'aurait pas fait appel, comme il l'a fait, à un pharmacien assistant mais à un pharmacien remplaçant ;

Qu'il résulte de ces divers éléments qu'à tort, le tribunal a identifié ainsi que précisé ci-avant la première période d'arrêt total d'activité, au sens du contrat, et que celle-ci doit être circonscrite, ainsi que retenu par le docteur [E], à la période comprise entre le 07 avril et le 07 septembre 2000 ;

Qu'en deuxième lieu, le docteur [E] a considéré que Monsieur [J] a subi une deuxième période d'inactivité totale du 12 décembre 2000 (date d'une aggravation rapportée) au 12 avril 2001, estimant qu'au delà il n'y a pas de nouvel argument médical formel permettant de prolonger cette durée ;

Que l'assureur et l'assuré s'accordent à considérer qu'est justifié le service d'indemnités durant cette période ;

Qu'ils se divisent, en revanche, sur l'état incapacité totale de travail de Monsieur [J] entre le 13 avril 2001 et la troisième et dernière période retenue par l'expert, laquelle débute au constat, par ce dernier, d'une nette nouvelle aggravation le 16 janvier 2002 ;

Que le tribunal, rejetant l'argumentation de l'assureur tendant à voir entériner l'avis du docteur [E] et se référant tant à un certificat du docteur [B] du 04 octobre 2001 qu'aux conclusions du docteur [G], n'a pas entériné les conclusions expertales puisqu'il a admis une période d'arrêt total d'activité entre le 09 octobre et le 09 décembre 2001 ;

Que Monsieur [J] appelant poursuit, quant à lui, l'indemnisation de l'ensemble de la période intermédiaire ; qu'il se réfère au contenu des certificats des médecins consultés durant cette période, les docteurs [T], [U], [B], et reproche au docteur [E] de n'étayer par aucun élément médical une amélioration de son état de santé, alors qu'elle n'est que supposée, et d'avoir, de plus, arbitrairement écarté des périodes d'incapacité ;

Qu'il convient cependant de considérer que les griefs ainsi articulés à l'encontre du rapport du docteur [E] ne sont pas justifiés ;

Qu'outre le fait que son appréciation médicale est partiellement confortée par celle du docteur [G] - qui retient une période d'incapacité partielle et non totale de travail, évaluée à 80 %, à compter du 1er mars 2001 -, le docteur [E] explicite, à travers une approche emportant la conviction de la cour, les raisons qui l'ont conduit à ne pas retenir d'incapacité totale de travail à compter du 13 avril 2001 et jusqu'au 16 janvier 2002 ;

Qu'envisageant l'ensemble des traitements prescrits (page 12/14 de son rapport), il retient la prescription, par les médecins de l'hôpital [7], d'un morphinique (Skenan) non renouvelé le 24 janvier 2001 et ne constate, pour le reste de l'année 2001, qu'une seule prescription portant sur un antalgique et un anti-inflammatoire, soit le 02 février 2001 et pour un mois ; qu'il ajoute que ce n'est que le 26 mars 2002 que lui est prescrit du Skenan, associé à du Diantalvic, pour un mois, sans autre prise médicamenteuse avant l'hospitalisation du 08 juin 2002 destinée à mettre en place une prothèse totale de hanche métal-métal ;

Que portant une appréciation circonstanciée sur les certificats médicaux que ne permet pas de combattre utilement l'argumentation de Monsieur [J] - lequel se borne à en reprendre les termes et à taxer d'arbitraire la manière dont, selon lui, l'expert les écarte - le docteur [E] précise (en page 13/14 de son rapport) :

' Il ressort, début 2001, une aggravation clinique avec nécessité d'une prescription de morphinique, non renouvelée et pour l'année 2001 une seule autre ordonnance de médicament le 02.02.2001 pour un mois.

Monsieur [J] a pris de très nombreux avis chirurgicaux de très grands spécialistes qui ont émis des avis différents, ce qui a pu légitimement désorienter le choix de Monsieur [J].

Il ressort aussi des discordances entre les constatations cliniques rapportées car le 24.01.2001 il est noté une hanche droite très limitée et un flessum quasi irréductible (non chiffré) et le 22.02.2001 une bonne flexion et une extension complète de cette hanche.

On peut penser que la diminution de la mobilité du 24.01.2001 était due à la douleur qui a nécessité la prescription de morphinique et que, secondairement, son état s'est amélioré.

Le 27.03.2001, il est recommandé une décharge partielle et le 04.10.2001, il ressort une douleur avec une boiterie au niveau de la hanche droite, une gêne à la montée des escaliers et pour des longues marches.

A cette date, il ressort donc implicitement, que Monsieur [J] arrivait à se déplacer mais avec des douleurs, mais il ne ressort pas de traitement antalgique.'(ainsi souligné dans le rapport);

Que Monsieur [J] doit, dans ces conditions, être déclaré non fondé en sa revendication sur ce point à l'inverse de l'assureur, appelant incident, qui rappelle à juste titre que les conventions souscrites ne garantissaient pas la simple réduction d'activité ; que l'appréciation du docteur [E] sur cette période intermédiaire précise sera donc entérinée et infirmé le jugement en ce qu'il y a ajouté une période d'incapacité totale d'octobre à décembre 2001 ;

Qu'en troisième et dernier lieu, le docteur [E] retient une dernière période d'incapacité totale telle que définie par le contrat qu'il fixe entre le 16 janvier 2002 (date d'une nouvelle aggravation nette) et le 30 juillet 2002 (date de la fin de son hospitalisation) ;

Qu'alors que la société AXA France Vie poursuit la confirmation du jugement en ce qu'il a entériné les conclusions de l'expert sur ce point, Monsieur [J] poursuit l'indemnisation de neuf mois supplémentaires, jusqu'au 30 avril 2003, excédant ainsi, en toute hypothèse, les 1.095 jours d'indemnisation contractuels puisque l'assureur était, quoi qu'il en soit, déchargé de toute obligation à compter du 07 avril 2003 ;

Qu'avec pertinence, l'assureur oppose aux pièces médicales que produit Monsieur [J] pour étayer ces dernières prétentions, l'appréciation du docteur [E] qui indique (en page 13/14) de son rapport qu'à la suite de l'opération chirurgicale pratiquée 'il a été en rééducation jusqu'au 30 juillet 2002 et, à la sortie, il ressort une marche tout à fait normale' ;

Que dans le chapitre de son expertise évoquant la chronologie des faits rapportée par Monsieur [J], l'expert indique d'ailleurs (en page 9/14 de son rapport) : ' le dernier arrêt de travail vu date du 28.06.2002 délivré par le professeur [N] jusqu'au 02.09.2002. (Le) 02.09.2002, il dit avoir donc repris normalement ses activités professionnelles de façon progressive' ;

Qu'indépendamment de toute considération sur l'interruption d'activités durant la période estivale, il convient de considérer que la faculté de marcher normalement dès la fin de la rééducation conduit à exclure toute incapacité totale de se livrer à une activité professionnelle à compter de cette date ; que les conclusions de l'expert qui portent sur le terme, au sens contractuel, des garanties souscrites, doit être, également, entériné ;

Considérant qu'il s'évince de l'ensemble de ces éléments que Monsieur [J] n'est pas fondé en son appel tendant à revendiquer l'indemnisation d'une période continue d'inactivité de plus de trois ans et que le jugement doit être infirmé en ses deux dispositions passant outre les périodes d'arrêt total de travail telles qu'individualisées par le docteur [E] et que la cour entérine ;

Qu'accueillant l'appel incident de l'assureur, la cour est conduite à dire que l'indemnisation de Monsieur [J] doit être limitée à 382 jours et à valider les périodes de franchise contractuelles calculées par l'assureur et à tort reconsidérées par le tribunal en conséquence de son appréciation divergente ;

Que l'assureur, qui justifie, sans être contesté, d'une indemnisation excédant cette durée, est, de ce fait, fondé à poursuivre à titre reconventionnel le remboursement de versements indus durant 58 jours, chiffrés à la somme globale de 22.856,31 euros selon le détail repris en page 40 de ses dernières écritures auquel il est renvoyé ;

Qu'il sera également fait droit à sa demande au titre des intérêts décomptés à partir de la date de signification des conclusions portant revendication de cette somme et valant mise en demeure;

Que la demande de l'assureur tendant à obtenir la condamnation de Monsieur [J] à lui restituer les sommes qu'elle lui a versées en vertu de l'exécution provisoire assortissant le jugement sera de la même façon accueillie du fait de l'infirmation du jugement ;

Sur les demandes indemnitaires subsidiaires et accessoires

Considérant qu'en l'absence de faute susceptible d'être retenue à l'encontre des intimées dans l'exécution de leurs obligations contractuelles ou de démonstration d'un manquement dans l'exécution du devoir d'information et de conseil auquel ces professionnelles étaient tenues, la demande en paiement de dommages-intérêts formée par Monsieur [J] à hauteur de 'la couverture escomptée' doit être rejetée ;

Considérant que l'équité conduit à condamner Monsieur [J] à verser à l'association AGIPI et à la société AXA France Vie une somme de 1.500 euros au profit de chacune ;

Que, débouté de ce dernier chef de prétentions, il supportera les entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris à l'exception de ses dispositions relatives à la mise hors de cause de l'Association Générale Interprofessionnelle de Prévoyance et d'Investissement-AGIPI et, statuant à nouveau dans cette limite ;

Rejette les prétentions de Monsieur [R] [J] portant sur les termes des conventions et sur le rapport d'expertise judiciairement ordonné et le déboute tant de sa demande tendant à voir mobiliser les garanties souscrites au delà d'une période de 382 jours que de sa demande indemnitaire ;

Condamne Monsieur [R] [J] à restituer à la société AXA France Vie :

- la somme de 22.856,31 euros assortie des intérêts au taux légal sur la somme de 20.542,44 euros à compter du 31 mai 2006 puis, pour le surplus, à compter du 23 octobre 2006, au titre des journées indûment indemnisées par l'assureur ,

- la somme de 25.597,66 euros versée par l'assureur en vertu de l'exécution provisoire ordonnée par le tribunal, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du présent arrêt ;

Condamne Monsieur [R] [J] à payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, à l'association AGIPI et à la société AXA France Vie une somme de 1.500 euros au profit de chacune ;

Déboute Monsieur [J] de ce dernier chef de prétentions ;

Condamne Monsieur [R] [J] aux dépens de première instance (comprenant les frais d'expertise) et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 08/06962
Date de la décision : 29/06/2010

Références :

Cour d'appel de Paris C5, arrêt n°08/06962 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-06-29;08.06962 ?
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