Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 5
ARRET DU 22 JUIN 2010
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/07191
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Janvier 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 07/00838
APPELANT
Monsieur [Z] [J]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par la SCP CALARN - DELAUNAY, avoué
Assisté de Me Hélène AKAOUI-CARNEC, avocat plaidant pour la SCP AKAOUI et AKAOUI-CARNEC
INTIMEE
S.A. AXA FRANCE VIE prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par la SCP BOMMART-FORSTER - FROMANTIN, avoué
Assisté de Me Christophe BOURDEL, avocat plaidant pour la SCP GRANRUT
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats :
Mme Janick TOUZERY-CHAMPION , conseiller, siégeant en application de l'article 786 du code de procédure civile à laquelle les avocats ne se sont pas opposés.
Lors du délibéré :
Mme S. GARBAN, président
Mme Janick TOUZERY-CHAMPION et Mme Sylvie NÉROT, conseillers
GREFFIER
Lors des débats :
Dominique BONHOMME-AUCLERE
DEBATS
A l'audience publique du 19 mai 2010
Rapport fait par Mme Janick TOUZERY-CHAMPION en application de l'article 785 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE
ARRET
Rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Signé par Mme S. GARBAN, président, et par D. BONHOMME-AUCLERE, greffier
*************************
Le 4 mars 1996, M.et Mme [J] ont accepté une offre de prêt de la société CREDIT FONCIER de FRANCE d'un montant de 64.028,59 € et ont dans le même temps adhéré à un contrat groupe souscrit par cette banque auprès de la société UAP, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société AXA FRANCE VIE, afin de garantir les risques décès, invalidité absolue ou définitive et incapacité de travail, à hauteur de 60 % pour Monsieur et de 40 % pour Madame.
A compter du 19 décembre 2002, M.[J] s'est trouvé en arrêt maladie et le 21 octobre 2004 avec effet au 1er septembre 2004 la CPAM l'a reconnu en invalidité de 2ème catégorie.
Le 19 mai 2005, M.[J] a informé l'assureur de ce sinistre.
Suite au refus de la société AXA FRANCE VIE d'indemniser l'incapacité de travail à compter du 19 décembre 2002 en raison de sa déclaration tardive, M.[J] l'a fait assigner devant le Tribunal de grande instance de Paris le 2 janvier 2007, qui par jugement du 29 janvier 2008 l'a :
- débouté de l'ensemble de ses demandes,
- condamné à verser à la société AXA FRANCE VIE la somme de 1.200 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par conclusions récapitulatives du 26 mars 2010, M.[J], appelant, requiert l'infirmation de la décision entreprise. Il soulève la nullité ou à tout le moins l'inopposabilité de la clause de déchéance de garantie pour déclaration tardive. Il souhaite la condamnation de la société AXA FRANCE VIE à lui verser les sommes de :
- 9.994,07 € au titre de la garantie due pour la période allant du 19 décembre 2002 au 21 septembre 2004,
- 1.249 € représentant les intérêts financiers cumulés sur les sommes dues depuis le 19 décembre 2002,
- 1.500 € à titre de dommages et intérêts,
- 2.000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile.
Il réclame le rejet de l'ensemble des prétentions de la société AXA FRANCE VIE.
Par conclusions récapitulatives du 27 novembre 2008, la société AXA FRANCE VIE, intimée formant appel incident, poursuit la confirmation du jugement querellé. Elle sollicite l'allocation d'une indemnité de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
La Cour renvoie pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR:
Considérant que M.[J] sollicite la nullité, ou à tout le moins, l'inopposabilité de la clause de déchéance pour déclaration tardive opposée par la société AXA FRANCE VIE, sur le fondement de l'article L 112-4 du Code des assurances qui dispose que 'les clauses des polices édictant des nullités, des déchéances ou des exclusions ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractères très apparents' ;
Que dans le résumé des principales dispositions de la convention d'assurance n° AG 3.870/12.468 la clause litigieuse est ainsi libellée :
'REGLEMENT DES SINISTRES
Délais de déclaration
Sauf effet de la prescription légale rappelée ci-dessous, les sinistres déclarés aux prêteurs
plus de NEUF mois après leur survenance seront considérés comme s'étant produits au jour de la déclaration. Toutefois, il ne sera pas fait application du délai de franchise de 4 mois.
TOUTE ACTION DERIVANT DE LA PRESENTE CONVENTION EST PRESCRITE A COMPTER DE L'EVENEMENT QUI Y DONNE NAISSANCE DANS LES TERMES DES ARTICLES L 114-1 et L 114-2 DU CODE DES ASSURANCES';
Qu'il convient d'observer, en premier lieu, qu'aucune différence matérielle n'existe entre les caractères utilisés pour les titre et sous-titre de cette clause et les autres titres et sous-titres de cette notice, lesquels figurent tous en caractères majuscules et en gras pour les 21 autres titres et en caractères minuscules et en gras pour l'ensemble des sous-titres ;
Qu'en second lieu il est constaté que cette clause figure dans un chapitre dénommé 'Règlement des sinistres' sans aucune mention de la sanction de 'déchéance' et que cette clause n'est pas mise en relief par une typographie particulière, soit en caractères gras plus lisibles, soit par une encre de couleur différente des autres, soit par un encadrement de manière à ce qu'elle se détache de l'ensemble du texte pour frapper l'assuré à première lecture ;
Que l'attention du souscripteur est essentiellement attirée dans ce paragraphe relatif au règlement des sinistres par la clause de prescription qui figure en entier en caractères majuscules, juste au-dessous de la clause litigieuse ;
Que dans ce contexte, le seul fait de faire figurer en majuscules le chiffre neuf ne saurait suffire à donner à cette clause un caractère très apparent, ce seul chiffre n'exprimant nullement une déchéance de garantie ;
Que dans ces conditions, cette clause, qui ne répond pas aux dispositions de l'article L 112-4 du Code des assurances, contrairement à ce qu'a retenu à tort le premier juge, doit être déclarée inopposable à M.[J] ;
Qu'il s'ensuit que ce dernier est fondé à solliciter la prise en charge des échéances du prêt au titre de la garantie incapacité de travail à compter de son arrêt de travail du 12 décembre 2002, dont à déduire 4 mois représentant la franchise contractuelle jusqu'au 31 décembre 2004 , date à compter de laquelle l'assureur a accordé sa garantie pour le risque invalidité, et ce à concurrence de 60 % des échéances du prêt ;
Qu'aux termes de la notice d'information, est en 'incapacité de travail', 'l'assuré contraint d'interrompre totalement son activité professionnelle sur prescription médicale par suite de maladie ou d'accident et dont l'état de santé interdit également l'exercice de toute autre activité professionnelle.
A compter de la consolidation de l'état de santé, les assureurs considèrent en incapacité de travail, tout assuré dont le taux d'invalidité est supérieur ou égal à 66 % ';
Que M.[J] produit, d'une part, un rapport du Dr [V] du 27 mars 2002, aux termes duquel celui-ci après avoir décrit l'anamnèse de la maladie, les différents symptômes et troubles ressentis par le patient, les multiples examens pratiqués (IRM, ponction lombaire, sérologies) évoque le diagnostic de sclérose en plaques, d'autre part l'ensemble de ses arrêts de travail pour la période considérée ainsi que la notification par la CPAM le 23 novembre 2003 de sa prise en charge à 100 % à raison de l'affection de longue durée (ALD) dont il est atteint, enfin la notification d'attribution d'une pension d'invalidité de deuxième catégorie à compter du 1er septembre 2004, correspondant à la date de consolidation de son état ;
Que force est de relever que dans ses dernières écritures, la société AXA FRANCE VIE se contente de reprocher à son assuré la déclaration tardive de sa maladie , sans contester l'existence même de cette grave affection dont il est atteint depuis le 9 décembre 2002 et le fait qu'il ne peut plus exercer son activité professionnelle et toute autre activité professionnelle, en opposant seulement à titre subsidiaire la limitation de sa prise en charge ;
Qu'en effet, en page 3 de la notice d'information, il est prévu que 'le montant maximum des sommes venant à échéance versées par les assureurs sur une base mensuelle est fixée à 50.000 francs par assuré, quel que soit le nombre de prêts souscrits';
Qu'eu égard au montant de l'échéance mensuelle du prêt c'est à bon droit que l'assureur oppose une limitation de sa garantie à la somme de 7.622,45 €; qu'elle sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 janvier 2007 date de l'assignation valant mise en demeure ;
Considérant en revanche que l'appelant ne démontre ni la réalité ni l'ampleur du préjudice qu'il allègue du fait de la résistance de l'intimée; qu'il sera donc débouté de sa demande en dommages et intérêts ;
Que l'équité commande de lui allouer une indemnité de 2 000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile;
PAR CES MOTIFS:
Infirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Dit inopposable à M.[J] la clause relative à la déclaration tardive du sinistre,
En conséquence condamne la société AXA FRANCE VIE à verser à M.[J] la somme de 7.622,45 € assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 janvier 2007,
La condamne également à payer à M.[J] une indemnité de 2000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Condamne la société AXA FRANCE VIE aux dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,