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21/05/2010 | FRANCE | N°09/17189

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 2, 21 mai 2010, 09/17189


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 2



ARRET DU 21 MAI 2010



(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/17189



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Juin 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 08/07925



APPELANTE



Madame [K] [I]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représentée par Me Luc COUTURIER, avoué

à la Cour

assistée de Me Raphael MAYET, de la SELARL MAYET et PERRAULT, avocat au barreau de VERSAILLES (393)



INTIME



ETABLISSEMENT PUBLIC DE SANTE DE [3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représenté ...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2

ARRET DU 21 MAI 2010

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/17189

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Juin 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 08/07925

APPELANTE

Madame [K] [I]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Luc COUTURIER, avoué à la Cour

assistée de Me Raphael MAYET, de la SELARL MAYET et PERRAULT, avocat au barreau de VERSAILLES (393)

INTIME

ETABLISSEMENT PUBLIC DE SANTE DE [3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Yves MENARD, avoué à la Cour

assisté de Me Irène JASTRZEB, avocat au barreau de PARIS, toque C 872

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 Mars 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :

Jacques BICHARD, Président

Marguerite-Marie MARION, Conseiller

Domitille DUVAL-ARNOULD, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Gilles DUPONT

L'affaire a été communiquée au Ministère Public qui n'a pas fait d'observation

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jacques BICHARD, président et par Tony METAIS , greffier.

Mme [K] [I] a fait l'objet d'une mesure d'hospitalisation d'office à la demande d'un tiers du 26 juin au 23 juillet 2006 au sein de la clinique [4] dépendant de l'établissement public de santé de [3] .

Par jugement du 16 novembre 2006, le tribunal administratif de Cergy Pontoise a annulé les décisions de placement et de maintien de l'hospitalisation /

Par ordonnance du 13 juillet 2007, le juge des référés, saisi par Mme [K] [I], lui a alloué une indemnité provisionnelle de 7500 euros .

C'est dans ces conditions que par acte du 28 mai 2008, Mme [K] [I] a fait assigner l'établissement public de santé de [3] devant le tribunal de grande instance de Paris afin d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 300 000 euros à titre de dommages intérêts .toutes causes de préjudices confondues .

Vu le jugement rendu le 19 juin 2009 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :

- déclaré l'établissement public de santé de [3] responsable du préjudice moral causé à Mme [K] [I] par l'illégalité des décisions administratives et de maintien de son hospitalisation à la demande d'un tiers et par le défaut d'informations dur ses droits et sa situation juridique,

- fixé la réparation de ce préjudice à la somme de 7500 euros,

- constaté qu'il a été alloué à Mme [K] [I] la somme de 7500 euros à titre provisionnel en réparation de son préjudice moral et dit en conséquence qu'elle ne peut prétendre à une indemnisation complémentaire à ce titre,

- condamné l'établissement public de santé de [3] à payer à Mme [K] [I] une indemnité de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toutes autres chefs de demandes .

Vu la déclaration d'appel déposée au greffe de cette cour le 28 juillet 2009 par Mme [K] [I] .

Vu les dernières conclusions déposées le :

- 3 mars 2010 par Mme [K] [I] qui, au visa de l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme demande à la cour de :

* infirmer le jugement déféré,

* condamner l'établissement public de santé de [3] à lui payer la somme de 300 000 euros toutes causes de préjudices confondus eu égard à l'internement illégal dont elle a fait l'objet, outre une indemnité de 4000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile .

- 4 mars 2010 par l'établissement public de santé de [3] qui demande à la cour de :

* débouter Mme [K] [I] de ses demandes,

* confirmer le jugement déféré,

- condamner Mme [K] [I] à lui verser une indemnité de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile .

Le Ministère public n'a fait valoir aucune observation .

Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 11 mars 2010 .

SUR QUOI LA COUR

Considérant que l'annulation des décisions administratives est suffisante à consacrer, eu égard aux dispositions de l'article 5 de la convention européennes des droits de l'homme, l'atteinte à la liberté individuelle subie par Mme [K] [I] et par conséquent le droit à indemnisation de celle-ci, peu important, contrairement à ce que soutient l'établissement public de santé de [3] les motifs de cette annulation et sans qu'il y ait lieu de rechercher si la mesure de placement était médicalement justifiée ;

que le préjudice moral éprouvé par l'appelante en raison de la privation de liberté consécutive à un acte illégal est certain et doit donner lieu à réparation ;

Considérant que l'établissement public de santé de [3] a commis une faute en accueillant l'appelante au vu d'un seul certificat médical et ceci contrairement aux dispositions de l'article L 3212-1 du code de la santé publique qui prévoit que l'hospitalisation d'une personne à la demande d'un tiers ne peut intervenir que sur délivrance de deux certificats médicaux dont un établi par un médecin n'exerçant pas dans l'établissement accueillant ladite personne, datant de moins de quinze jours, circonstancié et attestant d'une part que les troubles présentés rendent impossible le consentement de l'intéressé, d'autre part que son état impose des soins immédiats assortis d'une surveillance constante en milieu hospitalier ;

que l'intimé argue de ce que lors de son arrivée Mme [K] [I] se trouvait dans un état de somnolence ne permettant pas un examen psychiatrique immédiat ;

que pour autant cette situation ne constitue pas une cause de péril imminent, seul cas permettant de déroger à titre exceptionnel aux exigences posées par l'article 3212-1 ;

Considérant qu'il est par ailleurs reproché à l'établissement public de santé de [3] de n'avoir pas respecté son devoir d'information sur la situation juridique et les droits de la patiente hospitalisée, celle-ci ayant la possibilité d'exercer un recours contre la décision de placement dont elle a fait l'objet et ceci contrairement aux dispositions des articles L 3211-3 et L 3211-12 du code de la santé publique ;

que l'intimé ne conteste pas ce manquement, se limitant à soutenir que Mme [K] [I] ne peut justifier d'aucun grief ;

que néanmoins le non respect de ces dispositions qui participent directement à la protection de la liberté individuelle est de nature à générer un préjudice moral dont Mme [K] [I] est fondée à obtenir l'indemnisation ;

Considérant en revanche que l'appelante échoue à démontrer que son hospitalisation serait à l'origine d'une grave dépression ainsi que des périodes d'alcoolisation, qu'elle aurait entraîné des pertes de revenus d'ordre professionnel, ainsi que son placement en invalidité;

qu'en effet les différentes notes médicales qui ont émaillé l'hospitalisation de l'appelante à compter du 26 juin 2003 démontrent que celle-ci présentait à son arrivée dans l'établissement de santé un état délirant persécutif avec des idées de suicide, un isolement social et affectif, une insomnie massive et une perte de poids, que l'état de santé s'est amélioré sous l'effet des traitements administrés dont il est précisé (note du 15 juillet 2003) que Mme [K] [I] a fini par les accepter, ce que celle-ci conteste vainement aujourd'hui ;

que c'est donc à juste titre que l'établissement public de santé de [3] fait valoir que les troubles de comportement préexistaient à la mesure de placement ;

que dans ces conditions la poursuite d'un traitement après sa sortie ne peut constituer la preuve de ce que la mesure litigieuse aurait été la cause de troubles d'ordre psychologiques;

que le document (cote 16) produit aux débats mentionnant 'alcoolisme majeur suite à un internement abusif en psychiatrie', faute d'être circonstancié, ne peut ainsi par son laconisme, constituer un élément de preuve crédible ;

Considérant qu'en ce qui concerne le préjudice professionnel allégué, la mise en invalidité de l'intéressée en juillet 2003, sans que le motif ne soit alors précisé, ne peut également dans les circonstances qui viennent d'être constatées, être rattachée à la mesure d'hospitalisation en cause ;

qu'il en est de même du jugement rendu le 23 mars 2009 par le conseil des prud'hommes de Paris qui, saisi par Mme [K] [I] le 11 février 2008, a seulement relevé que celle-ci était en arrêt de maladie depuis le 26 juin 2003 et s'est prononcé sur le fait que contrairement aux dispositions du code du travail elle n'avait fait l'objet en cinq ans d'aucune visite auprès du médecin du travail de sorte que celui-ci n'a pu constater son aptitude ou inaptitude au travail ;

qu'enfin pas d'avantage n'est démontré le lien de causalité entre la mesure de placement et le refus opposé par la MACIF, le 4 décembre 2003, de donner une suite favorable à la demande de Mme [K] [I] de souscrire un contrat de prévoyance individuel ;

Considérant que dans ces conditions seul le préjudice moral éprouvé par l'appelante tel qu'il a été précédemment caractérisé ouvre droit à son profit à une indemnisation dont le montant a justement été apprécié par le tribunal à la somme de 7500 euros ;

Considérant qu'aucun motif d'équité ne commande d'accueillir les demandes présentées par les parties en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré .

Rejette toutes autres demandes .

Condamne l'établissement public de santé de [3] aux dépens dont distraction au profit de Maître Couturier, avoué à la cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile .

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 09/17189
Date de la décision : 21/05/2010

Références :

Cour d'appel de Paris C2, arrêt n°09/17189 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-05-21;09.17189 ?
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