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24/03/2010 | FRANCE | N°08/10299

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 24 mars 2010, 08/10299


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 3 - Chambre 1



ARRÊT DU 24 MARS 2010



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 08/10299



Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Avril 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 03/04636





APPELANTS





1°) Monsieur [O] [U]

[Adresse 17]

[Adresse 17]

[Localité 1]
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2°) Monsieur [F] [U]

[Adresse 11]

[Localité 14]



représentés par la SCP ROBLIN - CHAIX DE LAVARENE, avoués à la Cour

assistés de Me Eric BENAMOU, avocat au barreau de PARIS, toque : B 268, substituant Me Mar...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRÊT DU 24 MARS 2010

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/10299

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Avril 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 03/04636

APPELANTS

1°) Monsieur [O] [U]

[Adresse 17]

[Adresse 17]

[Localité 1]

2°) Monsieur [F] [U]

[Adresse 11]

[Localité 14]

représentés par la SCP ROBLIN - CHAIX DE LAVARENE, avoués à la Cour

assistés de Me Eric BENAMOU, avocat au barreau de PARIS, toque : B 268, substituant Me Martine DELAVELLE

INTIMÉS

1°) Monsieur [D] [V]

[Adresse 5]

[Localité 15]

2°) Monsieur [N] [V]

[Adresse 2]

[Localité 12]

représentés par la SCP Pascale NABOUDET-VOGEL - Caroline HATET-SAUVAL, avoués à la Cour

assistés de Me Jean-Pierre SOMMELET, avocat au barreau de PARIS, toque : C 494

3°) Monsieur [Z] [U]

[Adresse 8]

[Localité 16]

représenté par Me Patrice MONIN, avoué à la Cour

assisté de Me Françoise GELINET de la SCP DEHORS et associés, avocat au barreau de PARIS, toque P.375

4°) LA FONDATION LES ORPHELINS APPRENTIS D'AUTEUIL

[Adresse 9]

[Localité 13]

représentée par la SCP PETIT LESENECHAL, avoués à la Cour

assistée de Me Nicole MULOT-CALVINO, avocat au barreau de PARIS, toque : R 129

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 16 février 2010, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Pascal CHAUVIN, président,

Madame Isabelle LACABARATS, conseiller

Madame Dominique REYGNER, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier :

lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Marie-France MEGNIEN

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Pascal CHAUVIN, président, et par Madame Marie-France MEGNIEN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

[G] [S], née le [Date naissance 4] 1921, s'est mariée le [Date mariage 7] 1966 sous le régime de la séparation de biens avec [I] [U], père de trois enfants, MM. [Z], [O] et [F] [U].

Par actes reçus le 25 août 1972 par M. [N] [V], notaire, les époux se sont consenti une donation 'au dernier vivant' et [G] [S] a consenti à [I] [U] une donation portant sur la nue-propriété d'un appartement d'un immeuble situé [Adresse 6].

Hospitalisée le 24 septembre 1998, [G] [S] est décédée le [Date décès 10] 1998, en l'état d'un testament olographe daté du 15 octobre 1998 par lequel elle a légué à titre particulier :

- à M. [D] [V] (fils de M. [N] [V]) et à M. [Z] [U] la nue-propriété de l'immeuble situé [Adresse 6], chacun pour moitié, à l'exception de l'appartement donné à [I] [U],

- à la fondation les Orphelins Apprentis d'Auteuil ses avoirs au Crédit Agricole,

- par un codicille figurant sur le même document, à M. [D] [V], les titres déposés dans un coffre ouvert au Crédit Agricole.

Par acte des 5, 6, 7 et 8 août 2002, [I] [U] a assigné M. [D] [V], M. [N] [V] (père de M. [D] [V] et notaire), M. [Z] [U] et la fondation les Orphelins Apprentis d'Auteuil devant le tribunal de grande instance de Paris en annulation du testament.

[I] [U] étant décédé le [Date décès 3] 2002, MM. [O] et [F] [U] ont repris l'instance en son nom.

Par ordonnance du 20 octobre 2004, le juge de la mise en état a ordonné une mesure d'expertise en donnant mission à l'expert de 'donner son avis sur l'attribution ou non à [G] [U] du testament et de l'enveloppe le contenant'.

L'expert désigné a déposé son rapport le 19 mai 2005.

Par jugement du 3 avril 2008, le tribunal de grande instance de Paris a :

- débouté MM. [O] et [F] [U] de leur demande en nullité du testament,

- rejeté l'ensemble des demandes à titre de dommages et intérêts et au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné MM. [O] et [F] [U] aux dépens, en ce compris les frais de la mesure d'expertise, avec bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Par déclaration du 28 mai 2008, MM. [O] et [F] [U] ont interjeté appel de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions déposées le 15 janvier 2010, ils demandent à la cour de :

- réformer le jugement déféré,

- prononcer la nullité du testament olographe, contracté en état d'altération mentale et déterminé sous influence par les manoeuvres dolosives de M. [N] [V] sans lesquelles les dispositions testamentaires exorbitantes n'auraient pas été faites,

- subsidiairement,

- prononcer l'annulation de la seule donation au profit de M. [D] [V] pour avoir été faite en violation de la loi, dès lors que le notaire savait que son fils bénéficiait de dispositions en sa faveur dans le testament qu'il a reçu,

- ordonner la remise en état du patrimoine successoral de [I] [U] au jour de son décès, tel qu'il résulte de la succession initiale de [G] [S], et subséquemment celle du patrimoine successoral de ses ayants droit,

- ordonner aux légataires particuliers indûment gratifiés la restitution aux héritiers de [I] [U] de l'intégralité des legs dont ils ont été mis en possession du fait du testament et, à défaut de pouvoir les restituer en leur état, les condamner au paiement de la contrepartie financière telle qu'elle sera évaluée à dire d'expert au jour du 'jugement',

- condamner MM. [D] et [N] [V] au paiement de la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi et de celle de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les 'défendeurs' aux dépens de première instance et d'appel, avec bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions déposées le 27 janvier 2010, MM. [D] et [N] [V] demandent à la cour de :

- déclarer MM. [O] et [F] [U] irrecevables en leur action,

- subsidiairement, les déclarer 'mal fondés',

- déclarer irrecevables les attestations produites par les docteurs [X], [Y] et [B],

- débouter MM. [O] et [F] [U] de l'intégralité de leurs demandes,

- statuant sur la demande reconventionnelle,

- condamner solidairement MM. [O] et [F] [U] à leur payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux entiers dépens, avec bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées le 20 janvier 2009, M. [Z] [U] demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- y ajoutant,

- déclarer irrecevables les demandes de MM. [O] et [F] [U],

- subsidiairement, les dire 'mal fondées',

- en conséquence, les en débouter,

- à 'titre incident',

- condamner MM. [O] et [F] [U] à lui payer une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice et une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner MM. [O] et [F] [U] en tous les dépens, avec bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées le 8 octobre 2009, la fondation les Orphelins Apprentis d'Auteuil demande à la cour de :

- débouter les appelants de leurs demandes,

- confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- statuant à nouveau,

- condamner in solidum MM. [O] et [F] [U] au paiement de la somme de 2 000 euros de ce chef,

- condamner les mêmes ou tout succombant au paiement de la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

- condamner les mêmes aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR,

Considérant que la délivrance des legs est une mesure essentiellement provisoire qui n'enlève aux héritiers et autres intéressés aucun des moyens de forme et de fond qu'ils peuvent avoir à proposer pour faire valoir leurs droits dans la succession ; que le fait, pour [I] [U], dont l'action a été reprise par ses fils [O] et [F], d'avoir délivré les legs particuliers n'a pas fait obstacle à ce qu'il conteste par la suite la validité du testament ; que l'action est par conséquent recevable ;

Considérant que, dans les conclusions de son rapport, M. [J] [L], expert désigné judiciairement, affirme clairement, au terme d'une étude très complète et très précise, que [G] [S] a 'rédigé et signé le testament olographe et son codicille', l'expert observant en outre que l'écriture 'a conservé une remarquable régularité jusqu'à la fin de sa vie' et que la signature 'est encore empreinte de la pleine maîtrise du geste' ; que ces conclusions ne sont pas remises en cause par Mme [C] [T] [P], expert mandaté par M. [O] [U], qui, après avoir avancé l'hypothèse qu'il pourrait s'agir d'un faux testament, ajoute fort prudemment ne pouvoir être formelle faute d'en avoir examiné l'original ; que, par ailleurs, aucun élément ne vient accréditer la thèse du testament 'à main guidée' alléguée par MM. [O] et [F] [U] ; qu'ainsi le testament litigieux, dont [G] [S] a été l'auteur, ne révèle pas en soi une quelconque irrégularité ;

Considérant, s'agissant de l'état mental de [G] [S] au moment de la rédaction du testament, que les certificats médicaux qui ont été établis, sur dossier, par les trois médecins généralistes mandatés par MM. [O] et [F] [U], dont la recevabilité n'est pas sérieusement contestée et qui évoquent principalement, en des termes très mesurés, une probable altération de la vigilance et du discernement en raison de la maladie (une leucémie) et des traitements pratiqués, sont insuffisants à démontrer une insanité d'esprit au sens de l'article 901 du code civil ; que les trois attestations versées aux débats par MM. [O] et [F] [U] et émanant d'une 'amie proche' (Mme [M]) et de 'visiteurs' (M. [K] et M. [H]), personnes censées être dépourvues de connaissances médicales notamment en matière de troubles de l'esprit, sont encore moins probantes et au demeurant contredites par deux attestations (Mme [W] et Mme [A]) produites par MM. [D] et [N] [V], sans qu'il soit dès lors nécessaire de s'attarder plus avant sur les dénégations opérées par M. [F] [U] après sa lettre du 1er janvier 1999 dans laquelle il indiquait que, 'sur son lit d'hôpital, [G] s'est toujours exprimé avec lucidité, pudeur et clairvoyance' ;

Considérant, s'agissant du dol dont [G] [S] aurait été la victime de la part de M. [N] [V] à l'époque de la rédaction du testament, qu'il y a lieu de rappeler que le notaire a reçu les actes de donations du 25 août 1972 et d'observer que [G] [S] a manifesté de l'affection pour M. [D] [V] dès le plus jeune âge de celui-ci, laquelle s'est concrétisée notamment par sa désignation en qualité de bénéficiaire de deux contrats d'assurance-vie souscrits en 1990 et en 1994 ;

Que MM. [O] et [F] [U] prétendent que M. [N] [V] a fait des visites répétées et insistantes à [G] [S] à l'hôpital dans le dessein de lui faire rédiger et signer un testament olographe au profit notamment de son propre fils, tandis que M. [N] [V] soutient qu'il s'est rendu à quatre reprises au chevet de [G] [S] à la demande expresse de celle-ci qui souhaitait prendre des dispositions de dernières volontés ; que, s'il n'est pas possible de déterminer avec exactitude le nombre de ces visites, le fait que le testament comporterait une 'rédaction professionnelle', le fait que M. [N] [V] ait fourni l'enveloppe contenant le testament et ait mentionné sur l'enveloppe que celle-ci renfermait le testament, le fait que l'écriture du testament serait de couleur bleu clair alors que l'écriture du codicille et de l'enveloppe serait de couleur noire, le fait que M. [N] [V] ait rencontré [G] [S] le 15 octobre 1998, le fait que le notaire ait pu connaître la consistance du patrimoine de sa cliente et la teneur des dispositions testamentaires constituent autant d'éléments qui peuvent être utilisés indifféremment au soutien des deux thèses en présence ; que, cependant, MM. [O] et [F] [U], sur lesquels pèse la charge de la preuve du dol qu'ils invoquent, ne démontrent nullement que c'est leur propre thèse qui correspond à la réalité ; qu'à cet égard, les témoignages faisant état d'une 'emprise' de M. [N] [V] sont en contradiction avec ceux attestant de la parfaite lucidité de [G] [S] au cours des derniers jours de sa vie, lesquels sont corroborés par les conclusions de l'expertise judiciaire ;

Que, par ailleurs, outre que le fait que M. [N] [V], qui n'était pas tenu de solliciter un avis médical avant de se faire remettre le testament, a rédigé les mentions figurant sur l'enveloppe laisse à penser qu'il n'a pas cherché à dissimuler son action, aucune violation de l'article 1007 du code civil ne peut être utilement invoquée, dès lors que ce texte ne fait pas obligation au notaire de déposer l'enveloppe contenant un testament au rang des minutes et que le procès-verbal établi par M. [N] [V] est conforme à ces dispositions ; que, outre que l'auteur d'un testament dispose d'un droit discrétionnaire quant au choix des personnes qu'il entend gratifier et quant à l'ampleur des gratifications, le legs attribué à M. [D] [V] s'explique aisément par les relations d'affection qui ont été rappelées précédemment ; qu'enfin, outre que cet élément serait à lui seul insuffisant à prouver le dol, il n'est pas démontré, en l'état d'attestations qui se contredisent mutuellement, que M. [N] [V] ait la fâcheuse réputation qui lui est prêtée ;

Considérant en conséquence qu'il y a lieu de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de débouter MM. [O] et [F] [U] de toutes leur demandes, y compris de leur demande subsidiaire en annulation de la seule 'donation' au profit de M. [D] [V] ;

Considérant que, MM. [O] et [F] [U] n'ayant pu qu'être convaincus par le tribunal de l'absence de sérieux de leurs prétentions, il y a lieu de les condamner in solidum à payer à MM. [D] et [N] [V] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts et à M. [Z] [U] la somme de 1 000 euros à ce titre pour appel abusif ;

PAR CES MOTIFS :

Déclare recevable l'action de MM. [O] et [F] [U],

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne in solidum MM. [O] et [F] [U] à payer à MM. [D] et [N] [V] la somme de 2 000 euros et à M. [Z] [U] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts,

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum MM. [O] et [F] [U] à verser à MM. [D] et [N] [V] la somme de 3 000 euros, à M. [Z] [U] la somme de 2 500 euros et à la fondation les Orphelins Apprentis d'Auteuil la somme de 2 000 euros,

Rejette toutes autres demandes,

Accorde à la Scp Naboudet-Hatet, à la Scp Monin d'Auriac de Brons et à la Scp Petit Lesénéchal le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 08/10299
Date de la décision : 24/03/2010

Références :

Cour d'appel de Paris E1, arrêt n°08/10299 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-03-24;08.10299 ?
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