La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/03/2010 | FRANCE | N°08/13087

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 16 mars 2010, 08/13087


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 8



ARRÊT DU 16 MARS 2010



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 08/13087



Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2008 -Tribunal de Grande Instance de MELUN - RG n° 06/01376





APPELANT



Monsieur [H] [A]

né le [Date naissance 2] 1933 à [Localité 6]

de nationalité frança

ise

demeurant [Adresse 1]

[Localité 4]



représenté par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avoués à la Cour

assisté de Me Samuel ROTHOUX, avocat au barreau du HAVRE, toque 6







ASSIGNÉE EN REPRIS...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 16 MARS 2010

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/13087

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2008 -Tribunal de Grande Instance de MELUN - RG n° 06/01376

APPELANT

Monsieur [H] [A]

né le [Date naissance 2] 1933 à [Localité 6]

de nationalité française

demeurant [Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avoués à la Cour

assisté de Me Samuel ROTHOUX, avocat au barreau du HAVRE, toque 6

ASSIGNÉE EN REPRISE D'INSTANCE

SCP [Y] [I] en la personne de Maître [N] [Y], ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire des Sociétés LES AMBULANCES DU CENTRE et AUBERT

ayant son siège [Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par la SCP BASKAL - CHALUT-NATAL, avoués à la Cour

ayant pour avocat Me Guenael HUET, du barreau de MELUN

(SCP FGB)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 2 Février 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Christine DEGRANDI, Présidente

Madame Marie-Paule MORACCHINI, Conseillère

Madame Evelyne DELBES, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Marie-Claude HOUDIN

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Christine DEGRANDI, présidente et par Mme Marie-Claude HOUDIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Selon trois actes en date du 28 mars 1995, M. [H] [A], porteur de l'intégralité des parts de la SNC Ambulances du Centre, a cédé 5 parts à M. [J], 5 parts à Mme [J] et 490 parts à la Sarl [J].

Les époux [J] ne se sont pas acquittés du prix de cession. La Sarl [J] ne l'a réglé qu'en partie. Aussi, par acte du 30 novembre 1995, M. [A] a assigné les intéressés devant le tribunal de grande instance de Melun pour obtenir le paiement du solde du prix de cession.

Au cours de cette procédure, soit le 25 mars 1996, la SNC Ambulances du Centre, devenue une Sarl, a été placée en redressement judiciaire, la date de cessation des paiements étant provisoirement fixée au 24 octobre 1994. Le 1er avril 1996, le tribunal de commerce de Melun a prononcé la liquidation judiciaire de la Sarl Ambulances du Centre et désigné M. [D] en qualité d'expert avec mission de réunir les éléments d'information permettant de déterminer la date de cessation de paiements de l'intéressée. Une procédure de liquidation judiciaire a été également ouverte à l'égard de la Sarl [J]. Maître [O] a été désigné en qualité de mandataire liquidateur des deux sociétés.

Par jugement du 6 janvier 1998, le tribunal de grande instance de Melun a rejeté la demande en nullité pour dol des actes de cession du 28 mars 1995 formée par les époux [J] et par Maître [O], ès qualités de liquidateur de la Sarl [J], a fixé la créance de M. [A] à l'encontre de la Sarl [J] à la somme de 360 000 francs et a ordonné son inscription au passif de la liquidation judiciaire de l'intéressée.

Par arrêt du 19 mars 1999, la cour d'appel de Paris, infirmant ce jugement et retenant que le cédant avait dissimulé aux cessionnaires la véritable situation de la société Ambulances du Centre, a annulé les cessions de parts du 28 mars 1995, a condamné M. [A] à restituer à Maître [O], ès qualités, la somme de 1 600 000 francs, représentant la fraction du prix de cession réglé par la Sarl [J], et ce, outre les intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt.

Par jugement du 30 juillet 2002, confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Rouen en date du 9 décembre 2003, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance du Havre a débouté M. [A] de sa demande tendant à voir surseoir à l'exécution de l'arrêt du 19 mars 1999 tant que les parts de la société Ambulances du Centre ne lui auraient pas été restituées par Maître [O], ès qualités, le juge de l'exécution estimant ne pas pouvoir ajouter à la décision au fond.

Son pourvoi en cassation formé contre l'arrêt de la cour d'appel de Rouen ayant été rejeté, M. [A] a, par acte du 17 mars 2006, assigné Maître [O], ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire des sociétés Ambulances du Centre et [J], devant le tribunal de grande instance de Melun pour obtenir le paiement de la somme de 298 800,07 euros, outre intérêts, au titre de la restitution de ses parts et la compensation de cette somme avec celle de 243 918,42 euros par lui due à la Sarl [J].

Par jugement contradictoire du 20 mai 2008, le tribunal de grande instance de Melun a déclaré M. Marais Hotier irrecevable en ses demandes, a débouté Maître [O], ès qualités, de ses demandes de dommages et intérêts et a condamné M. [A] à payer aux sociétés Ambulances du Centre et [J], représentée par Maître [O], la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 1er juillet 2008, M. [A] a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières écritures signifiées le 26 janvier 2010, il demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de le dire recevable en sa demande en restitution des parts cédées, de dire que cette restitution se fera en valeur, d'ordonner une expertise comptable, afin de déterminer la valeur des parts et de faire les comptes entre les parties, et de condamner la SCP [Y]-[I], en la personne de Maître [N] [Y], désignée en qualité de mandataire liquidateur des société Ambulances du Centre et Aubert, en remplacement de Maître [O], à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 19 janvier 2010, la SCP [Y]-[I], en la personne de Maître [Y], ès qualités, demande à la cour de dire M. Marais Hotier irrecevable en ses demandes, compte tenu de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 19 mars 1999, de confirmer, subsidiairement, le jugement dont appel et de condamner l'appelant à lui payer, ès qualités, la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et celle de 7 500 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

Considérant que M. [A] sollicite la restitution de la valeur des parts de la société Ambulances du Centre au jour de la cession du 28 mars 1995, dont l'annulation, à effet rétroactif, entraîne la remise des parties en leur état antérieur à l'acte annulé ; qu'il soutient que les parts avaient une valeur à la date de la cession et qu'elles ont péri du seul fait des cessionnaires auxquels incombe la responsabilité de l'ouverture de la liquidation judiciaire ;

Considérant que la SCP [Y]-[I], en la personne de Maître [Y], ès qualités, conteste la recevabilité des demandes de M. [A], invoquant l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 19 mars 1999 et le défaut d'intérêt à agir de l'appelant ; qu'il fait valoir que la société Ambulances du Centre ayant pris fin le jour de sa liquidation, la cour d'appel n'avait pas à ordonner, le 19 mars 1999, la restitution de ses parts, qui n'existaient plus ; qu'il ajoute que M. [A], censé être resté propriétaire des parts dont la cession a été annulée, doit supporter les risques de leur perte consécutive à la liquidation judiciaire ; qu'il fait encore plaider qu'il appartenait à l'intéressé de présenter ses prétentions au titre de la restitution des parts ou de leur valeur dans le cadre de l'instance en annulation de la cession, en vertu de la règle de la concentration des demandes posée par l'arrêt de l'assemblée plénière de la cour de cassation du 7 juillet 2006 ; qu'il argue enfin de l'absence de valeur des parts au jour de la cession eu égard à la cessation des paiement fixée au 24 octobre 1994 ;

Considérant que, dans son arrêt du 19 mars 1999, cette cour n'a pas ordonné la restitution au vendeur des parts dont elle annulait la cession ; qu'à la date du prononcé de cette décision, la société Ambulances du Centre était cependant déjà en liquidation judiciaire et donc dissoute, de sorte qu'il était inutile d'ordonner la restitution de parts qui n'existaient plus ;

Considérant que M. [A] forme, toutefois, aujourd'hui une demande tendant à obtenir, non une restitution en nature, mais une restitution en valeur du fait de la disparition des parts, consécutive à la dissolution de la société intervenue entre la vente et l'annulation de celle-ci ; que cette prétention, jamais formulée auparavant, n'a été ni débattue ni tranchée à ce jour, de sorte que l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée à M. Marais Hotier ;

Considérant que le principe posé par l'arrêt de l'assemblée plénière de la Cour de cassation du 7 juillet 2006, selon lequel il incombe au demandeur de présenter, dès l'instance relative à sa première demande, l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci, ne saurait faire obstacle à la recevabilité de la demande de restitution en valeur qui procède d'une autre cause que l'action en paiement du prix de cession engagée par M. [A] ayant abouti au prononcé de l'arrêt du 19 mars 1999, qui a fait droit à la demande reconventionnelle en nullité de l'acte de cession formée par les cessionnaires ;

Considérant que l'appelant justifie enfin d'un intérêt à agir, l'annulation de l'acte de cession entraînant la remise des parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient antérieurement à l'acte annulé et ce, quelle que soit la cause de l'annulation prononcée ; que la question de savoir sur qui pèsent les risques de la perte des parts entre leur vente et l'annulation de celle-ci et si lesdites parts avaient une valeur au jour de la cession annulée ne relève pas de l'appréciation de la recevabilité de la demande mais du fond du droit ;

Considérant que la demande de M. [A] est, par suite, recevable;

Considérant que lorsque la restitution en nature n'est plus possible, la restitution en valeur doit correspondre à la valeur du bien au jour où il a été cédé ; que le vendeur, censé ne jamais avoir cessé d'être propriétaire de la chose vendue, doit supporter sa dépréciation sauf à établir qu'elle est le fait de l'acquéreur ;

Considérant que M. [A], qui soutient que les parts de la société Ambulances du Centre avaient une valeur au jour de leur cession et qu'elles ont péri du seul fait des cessionnaires auxquels incombe la responsabilité de la liquidation judiciaire, n'en rapporte pas la preuve ; qu'il a été définitivement jugé que, le 28 mars 1995, la société était en état de cessation des paiement depuis déjà cinq mois, état qui s'entend de l'impossibilité de faire face au passif exigible avec l'actif disponible ; que critiquant les conclusions du rapport déposé le 8 octobre 1997 par l'expert [D] pour prétendre que la société était in bonis au jour de la cession et que sa liquidation judiciaire serait le seul fait des cessionnaires, l'appelant n'apporte aucun élément comptable de nature à établir la pertinence de ses dires ; que la copie de quatre chèques qu'il produit ne sauraient établir que l'expert aurait omis de tenir compte, dans l'actif, des règlements correspondants ; que le 'relevé de compte du Crédit Lyonnais', qui n'émane pas de cette banque, mais est établi sur papier libre, ne constitue pas une pièce probante ; que les tableaux comparatifs des chiffres d'affaires et des résultats d'exploitation réalisés durant sa gestion et celle des cessionnaires dressés par M. [A], ne sont étayés par aucun document tiré de la comptabilité de la société ; que le moratoire accepté le 24 janvier 1995 par l'Urssaf, la seule créancière d'une somme de 75 907 euros, ne suffit pas, à supposer qu'il ait été respecté, à établir l'absence de cessation des paiements au jour de la cession, alors que le rapport de M. [D] fait état, au 31 décembre 1994, d'un actif disponible de 47 926 francs, d'un passif exigible de 448 544 francs et d'un passif non échu de 469 129 francs, et mentionne un résultat très faiblement positif mais un fonds de roulement fortement négatif, les besoins à ce titre étant financés par de la trésorerie et des retards de paiements ; que le même rapport établit qu'au mois de novembre 1994, la Sarl Ambulances du Centre avait perdu tout crédit, le Crédit Agricole ayant rejeté les prélèvements à compter du 25 novembre 1994 et la SNVB ayant informé sa cliente, le 17 novembre 1994, de son intention de procéder à la clôture de son compte ; que l'un des éléments constitutif du dol retenu à la charge de M. Marais Hotier, dans l'arrêt du 19 mars 1999, consiste en la dissimulation d'une procédure engagée par la Caisse primaire d'assurances maladie pour des infractions de surfacturation des prestations réalisées par la société Ambulances du Centre, irrégularités qui ont conduit au prononcé de sanctions financières et d'un déconventionnement de trois mois, dont deux mois ont été subis par les cessionnaires ; que l'appelant ne produit aucun élément de preuve permettant de retenir l'existence d'un lien de cause à effet entre la liquidation judiciaire de la société et les décisions de transfert du siège social de l'intéressée et de la fermeture de l'un de ses bureaux prises par les cessionnaires ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, il n'est pas établi que les parts en cause aient pu avoir une quelconque valeur le 28 mars 1995 et, encore moins, que la liquidation judiciaire, qui a entraîné leur disparition, soit imputable aux cessionnaires;

Considérant que la valeur du seul actif de la société (son fonds de commerce), réalisé pour 1 000 000 francs par Maître [O] un an après la cession et qui a dû répondre du passif, est inefficace pour établir la valeur des parts de la société au jour de la cession ;

Considérant en conséquence qu'il convient de débouter M. [A] de l'ensemble de ses demandes ; que le jugement entrepris sera ainsi réformé uniquement en ce qu'il a dit l'intéressé irrecevable en ses demandes ;

Considérant que la SCP [Y]-[I] en la personne de Maître [Y], ès qualités, qui ne démontre pas que M. [A] a fait de son droit d'agir en justice un usage abusif qui lui aurait causé un préjudice, doit être déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts formée de ce chef ;

Considérant que M. [A] sera condamné à lui payer la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a dit M. Marais Hotier irrecevable en ses demandes ;

Statuant à nouveau quant à ce,

Dit M. Marais Hotier recevable mais non fondé en ses demandes ;

L'en déboute ;

Condamne M. [A] à payer à la SCP [Y]-[I] en la personne de Maître [Y], ès qualités, la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne M. [A] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

M.C HOUDIN M.C DEGRANDI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 08/13087
Date de la décision : 16/03/2010

Références :

Cour d'appel de Paris I8, arrêt n°08/13087 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-03-16;08.13087 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award