Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 4
ARRÊT DU 09 MARS 2010
(n° 99 , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/15532
Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Mai 2008 - Tribunal d'Instance de PARIS 13ème arrondissement - RG n° 11-08-000079
APPELANTE :
- Madame [I] [B]
demeurant [Adresse 2]
représentée par Maître Chantal BODIN-CASALIS, avoué à la Cour
INTIMÉ :
- PARIS HABITAT OPH, nouvelle dénomination de l'OFFICE PUBLIC D'AMENAGEMENT ET DE CONSTRUCTION DE PARIS - OPAC, pris en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 1]
représenté par la SCP BOMMART-FORSTER - FROMANTIN, avoués à la Cour
assisté de Maître Florence LANGLOIS MENANT, avocat plaidant pour le Cabinet MENANT et Associés, avocats au barreau de PARIS, toque L 190
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 26 Janvier 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jacques REMOND, Président
Madame Marie KERMINA, Conseillère
Madame Claude JOLY, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier :
lors des débats et du prononcé : Madame OUDOT
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jacques REMOND, président et par Madame OUDOT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Par acte sous seing privé du 23 mars 1984, l'OFFICE PUBLIC D'HABITATIONS A LOYER MODERE DE LA VILLE DE PARIS a loué à Mme [E], devenue Mme [B], un appartement situé à [Adresse 4].
Par acte distinct du 25 janvier 1988, les parties ont conclu une convention d'occupation d'un emplacement de stationnement de véhicule situé à la même adresse.
Le 21 novembre 2007, l'OFFICE PUBLIC D'AMENAGEMENT ET DE CONSTRUCTION DE PARIS (l'OPAC), venant aux droits du bailleur, a assigné devant le tribunal d'instance Mme [B], M. [P] [F] et Mlle [D] [Y] aux fins, notamment d'expulsion.
Par jugement du 22 mai 2008, le tribunal d'instance de PARIS (13e arrondissement) a :
- prononcé la résiliation des deux contrats,
- ordonné l'expulsion de Mme [B] et dit qu'elle devra quitter les lieux, les laisser libre de tous occupants de son chef, notamment de M. [P] [F] et de Mlle [D] [Y] et de tous biens et qu'à défaut de départ volontaire dans un délai d'un mois à compter de la signification du jugement, elle pourra y être contrainte par tous moyens de droit à la suite du délai légal de deux mois suivant le commandement de quitter les locaux signifié par acte d'huissier de justice,
- dit qu'il sera procédé en tant que de besoin à l'enlèvement des meubles et objets mobiliers se trouvant dans les lieux et à leur séquestration dans un garde-meubles aux frais, risques et périls de la partie défenderesse,
- fixé l'indemnité d'occupation au montant des loyers et charges en cours et condamné in solidum les défendeurs à son paiement à compter du 22 mai 2008 jusqu'à la libération des lieux,
- débouté la partie demanderesse 'du surplus de ses demandes',
- condamné in solidum les défendeurs à payer à l'OPAC une indemnité de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant le coût d'un constat d'huissier de justice (du 19 octobre 2007).
Mme [B] a interjeté appel de ce jugement sans intimer M. [P] [F] ni Mlle [D] [Y].
Par conclusions signifiées le 30 décembre 2009, Mme [B] demande à la cour, réformant le jugement, à titre principal, de débouter l'OPAC de ses demandes, à titre subsidiaire, de lui accorder les plus larges délais pour quitter les lieux, et, en tout état de cause, de lui payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions signifiées le 3 avril 2009, l'établissement public PARIS HABITAT OPH, nouvelle dénomination de l'OPAC, demande à la cour de confirmer le jugement, sauf à fixer au loyer courant majoré de 30 %, charges en sus, le montant de l'indemnité d'occupation due à compter de l'assignation, subsidiairement de limiter à trois mois les délais éventuellement accordés à Mme [B] pour quitter les lieux avec clause de déchéance en cas de non paiement d'une mensualité d'indemnité d'occupation et de lui allouer une somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR :
Considérant que, tout en rappelant les dispositions de l'article 10-2° de la loi du 1er septembre 1948 applicables aux habitations à loyer modéré par renvoi de l'article L. 442-6 du code de la construction et de l'habitation, PARIS HABITAT OPH fonde sa demande de résiliation du bail sur les dispositions de l'article 1741 du code civil en ce que Mme [B] a méconnu les clauses du bail stipulant que ' le preneur occupera le logement exclusivement pour son habitation personnelle (et) celle de ses enfants', 's'interdit (..) de prendre aucune initiative pouvant avoir pour objet ou pour effet de mettre l'Office en présence d'un autre occupant' et s'oblige 'de ne pouvoir en aucun cas, même accidentellement, ni céder, ni sous-louer, ni mettre gratuitement à la disposition de tiers non mentionnés dans le présent engagement , en meublé ou non, tout ou partie des lieux loués, la location devant toujours de condition expresse et absolue rester personnelle au preneur.' ;
Que les développements de PARIS HABITAT OPH relatifs à la justification de l'assurance des lieux loués ou à la régularisation de l'arriéré locatif ne sont pas invoqués à l'appui de la demande de résiliation mais comme illustration de ce que Mme [B] se serait 'désintéressée du sort de son bail depuis que le logement est cédé à son fils' ;
Considérant que la charge de la preuve des griefs reprochés à la locataire pèse sur le bailleur ;
Considérant que PARIS HABITAT OPH ne peut tirer aucun élément probant des lettres recommandées avec demande d'avis de réception adressée à Mme [B] le 21 juin 2007 et le 14 août 2007 à l'adresse des lieux loués, retournées à l'expéditeur sans mention 'n'habite pas à l'adresse indiquée' ni même 'non réclamé, retour à l'envoyeur', ou de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée à Mme [B] le 14 août 2007 chez une tierce personne qui a elle-même signé l'avis de réception ;
Considérant que l'huissier de justice requis par le bailleur le 19 octobre 2007 a constaté que le nom '[E]' figurait sur la boîte aux lettres, que se trouvaient dans le logement M. [P] [F] et Mlle [D] [Y], tous deux domiciliés à [Adresse 3], M. [F] ayant déclaré à l'huissier de justice qu'il occupait l'appartement en l'absence de sa mère 'en vacances actuellement', que le logement de quatre pièces principales était meublé, la cuisine, la salle de bains et les WC étant 'conformes à leur destination', et l'huissier de justice n'ayant nullement relevé, contrairement à ce que laisse entendre PARIS HABITAT OPH dans ses conclusions, qu'aucun document, lettre ou objet personnel n'aurait été trouvé dans le logement ;
Que le circonstance que l'ameublement soit qualifié de 'chiche' par l'huissier de justice ou que l'appartement soit en désordre est sans intérêt ;
Qu'il ne peut rien être déduit de la déclaration de M. [F] selon laquelle il a indiqué à l'huissier de justice 'je n'ai pas de bail d'habitation à mon nom', l'ambiguïté du propos permettant de l'interpréter comme signifiant que le bail des lieux loués litigieux n'est pas à son nom d'autant que M. [F] est locataire de PARIS HABITAT OPH à l'adresse qu'il a déclarée et qu'il n'est nullement établi qu'il a cédé son logement à son beau-père ;
Qu'enfin, l'affirmation du gardien de l'immeuble recueillie par l'huissier de justice selon laquelle Mme [B] aurait quitté le logement depuis quatre ans, qui n'est étayée d'aucune pièce (le document sibyllin établi le 22 septembre 2008 par un autre gardien étant dépourvu de toute portée), n'emporte pas la conviction de la cour ;
Considérant que PARIS HABITAT OPH ne rapporte pas la preuve du défaut d'occupation personnelle des lieux par la locataire ni celle d'une cession prohibée ;
Que dans ces conditions, la démonstration contraire offerte par Mme [B] n'est pas nécessaire ;
Que le jugement sera infirmé dans toutes ses dispositions ;
Considérant que Mme [B] ne démontre pas que PARIS HABITAT OPH a commis une faute de nature à dégénérer en abus en agissant en justice ; qu'elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts ;
Considérant qu'il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Mme [B] dans les termes du dispositif ci-après ;
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau :
Déboute l'établissement public PARIS HABITAT OPH de sa demande de résiliation des baux, d'expulsion et d'indemnité d'occupation ;
Déboute Mme [B] de sa demande de dommages et intérêts ;
Condamne l'établissement public PARIS HABITAT OPH à payer à Mme [B] la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute l'établissement public PARIS HABITAT OPH de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne l'établissement public PARIS HABITAT OPH aux dépens de première instance et d'appel avec, pour les dépens d'appel, droit de recouvrement direct au profit des avoués de la cause conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La Greffière, Le Président,