Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 8
ARRÊT DU 25 FEVRIER 2010
(n° ,4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/10458
Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Avril 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 09/80559
APPELANT
COMITE LAPIN INTERPROFESSIONNEL POUR LA PROMOTION DES PRODUITS - CLIPP
agissant en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 1]
représenté par la SCP Anne-Marie OUDINOT et Pascale FLAURAUD, avoués à la Cour
assisté de Maître Pierre GREFFE, avocat au barreau de PARIS, toque : E617
INTIMÉES
SOCIETE PROTECTRICE DES ANIMAUX - S.P.A
prise en la personne de Maître [J] [X], Administrateur judiciaire, domiciliée en cette qualité [Adresse 3]
ayant son siège [Adresse 2]
représentée par Maître Lionel MELUN, avoué à la Cour
assistée de Maître Eric-Denis FERRÉ, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1151
L214
Association
représentée par son Président Monsieur [M] [S]
ayant son siège [Adresse 4]
représentée par Maître Lionel MELUN, avoué à la Cour
assistée de Maître Eric-Denis FERRÉ, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1151
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 28 janvier 2010, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Annie BALAND, présidente,
Madame Alberte ROINÉ, conseillère
Madame Martine FOREST-HORNECKER, conseillère
qui en ont délibéré,
GREFFIÈRE :
lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Mademoiselle Sandra PEIGNIER
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Annie BALAND, présidente, et par Mademoiselle Sandra PEIGNIER, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Par arrêt du 17 décembre 2008, la cour d'appel de Paris a fait interdiction à la SPA et à l'association L 214 d'utiliser le film litigieux dans sa « campagne » ainsi que les renseignements recueillis par des détenteurs de fausses cartes professionnelles sous astreinte de 3000 € par infraction constatée, dans les huit jours de la signification de la présente décision, et a condamné la SPA et l'association L 214 à faire figurer l'arrêt sur leur site Internet, dans le délai de huit jours à compter de la signification de la décision et ce pendant deux mois sous astreinte provisoire de 100 € par jour de retard ou d'omission. Cette décision a été signifiée le 28 décembre 2008.
Le Comité Lapin Interprofessionnel pour la Promotion des Produits, plus loin CLIPP est appelant d'un jugement, en date du 17 avril 2009, par lequel le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de PARIS :
- rejette les demandes du CLIPP tendant à la liquidation de l'astreinte en ce qui concerne la publication sur Internet et à la fixation d'une nouvelle astreinte,
- condamne le CLIPP à payer à la SPA et l'association L 214 la somme globale 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions du 27 juillet 2009, le CLIPP demande d'infirmer le jugement entrepris et de :
- liquider l'astreinte provisoire à la somme de 8'700 €,
- condamner la SPA et l'association L 214 à lui payer cette somme,
- condamner la SPA et l'association L 214 à une astreinte définitive de 3000 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir
- condamner in solidum la SPA et l'association L 214 au paiement d'une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il soutient que les intimés n'ont pas respecté l'obligation car cette décision n'est que très difficilement accessible, voire introuvable, pour un utilisateur moyen, qu'elle est accompagnée de nombreux commentaires tendancieux ou mensongers visant à en donner une interprétation volontairement trompeuse, que le juge l'exécution n'a pas recherché si les mesures de publication judiciaire ordonnées avaient été exécutées de bonne foi, ce qui équivaut à une carence dans l'exécution.
Par dernières conclusions du 14 janvier 2010, la SPA et l'association L 214 demandent de :
- confirmer le jugement ,
- condamner le CLIPP au paiement d'une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elles soutiennent qu'elles ont exécuté l'arrêt en le faisant figurer sur leur site, que celui-ci a reconnu leur liberté d'expression pour communiquer sur les conditions d'élevage intensif des lapins en raison même de leur objet social, que le rappel de cette liberté d'expression ne dénature pas l'arrêt.
SUR CE, LA COUR :
Considérant que l'article 36 de la loi du 9 juillet 1991 dispose que l'astreinte doit être liquidée en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter ; qu'elle peut être supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère ; qu'il incombe à celui qui se prétend libéré de l'obligation de faire de prouver qu'il s'est acquitté de cette obligation ou d'établir les difficultés qu'il a rencontrées ;
Considérant qu'il ressort des constats auxquels le CLIPP a fait procéder par l'huissier les 5et 12 janvier 2009, que si l'arrêt pouvait être lu sur le site Internet des intimées, ce n'était qu'après diverses démarches pour accéder à la copie de la décision, mais surtout qu'il était précédé de commentaires qui, soit en rapportaient le sens positivement au bénéfice des intimés soulignant que leur liberté d'expression avait été reconnue, soit en contredisait le sens ;
Que sur le site de la SPA, il était mentionné « la SPA et L. 214 ont le droit de communiquer sur les conditions d'élevage des lapins ! Suite à l'appel du CLIPP, le tribunal a rendu son jugement mis en délibéré le 17 décembre dernier. Pour lire le premier jugement, pour le second jugement » ; qu'on pouvait lire aussi, après un rappel de leurs buts « sensibiliser, informer le grand public sur le traitement infligé aux lapins pour le commerce de la viande mais également demander aux producteurs d'abandonner le modèle intensif, source de maltraitance» et de la procédure intentée par le CLIPP, que « le 17 décembre dernier la délibération a conclu que la Société Protectrice des Animaux et L. 214 étaient dans leur bon droit quant à la communication sur les conditions d'élevage des lapins destinés à la consommation et que cela correspondait à leur mission de protection animale. C'est une première victoire qui espérons-le en entraînera d'autres ... » ;
Que sur le site de l'association L. 214, était indiqué « tentative d'interdiction de notre campagne contre l'élevage intensif de lapins », « débouté en juillet dernier suite à son assignation en référé, le CLIPP (filière cunicole) a fait appel. Ce 17 décembre, la cour d'appel de Paris a rendu sa décision. En vertu de la liberté d'expression, l'arrêt reconnaît à la SPA et à L. 214 le droit de faire campagne contre l'élevage de lapins en cage. Celles-ci poursuivront avec détermination l'action entreprise dans ce domaine. Par ailleurs le film « le lapin : garanti 100 % cage », dont certaines séquences ont été tournées par des personnes présentant de fausses cartes professionnelles, doit cesser d'être utilisé dans la campagne des deux associations dans un délai de huit jours » ;
Considérant que cette dernière présentation était plus équilibrée que la précédente en ce qu'elle rappelait, non pas que les sociétés avaient été condamnées pour utilisation de films tournés à l'étranger ou de renseignements fournis par des personnes présentant de fausses cartes professionnelles, mais de façon plus de neutre, que le film devait cesser d'être utilisé ; que la présentation plus que partielle et partiale de la décision qui surtout sanctionnait une présentation fallacieuse des pratiques de la filière cunicole en France, n'invitait pas à lire la décision qui comportait sanctions et interdictions, qui étaient passées sous silence ; qu'une telle présentation de la décision qu'elles avaient été condamnées à publier sur leur site, ne peut valoir pour les intimées une exécution correcte et conforme
de l'obligation mise à leur charge ; qu'en conséquence, l'astreinte doit être liquidée pour chacune à la somme de 8700 € pour le retard mis à faire une publication conforme et correcte ; qu'il convient d'assortir à nouveau la publication de l'arrêt sur le site Internet des associations intimées d'une astreinte mais seulement provisoire de 300 € par jour de retard ;
Considérant que le jugement entrepris doit être infirmé ;
Considérant que l'équité commande de rembourser le CLIPP des frais exposés pour cette procédure à concurrence de la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
Infirme le jugement entrepris,
Et statuant à nouveau,
Condamne la Société Protectrice des Animaux et l'association L. 214 à payer chacune au Comité Lapin Interprofessionnel pour la Promotion des Produits CLIPP la somme de 8.700 euros pour la liquidation de l'astreinte fixée par l'arrêt du 17 décembre 2008,
Fixe le montant de la nouvelle astreinte provisoire à 300 euros par jour de retard ou d'omission pour la publication, dans les termes de l'arrêt du 17 décembre 2008, pendant 4 mois à compter de la signification du présent arrêt,
Condamne solidairement la SPA et l'association L. 214 à payer au Comité Lapin Interprofessionnel pour la Promotion des Produits CLIPP la somme forfaitaire de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne solidairement la SPA et l 'association L. 214 aux dépens de première instance et d'appel dont le montant pourra être recouvré selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,