Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRÊT DU 10 FÉVRIER 2010
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/06781
Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Janvier 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 07/06887
APPELANTE
Madame [J] [D] [O]
née le [Date naissance 2] 1960 à [Localité 7] (92)
[Adresse 9]
[Localité 5]
représentée par la SCP MONIN - D'AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour
assistée de Me Marie-Geneviève THENAUT, avocat au barreau de PARIS, toque : B 161
INTIMÉE
Madame [P] [O]
née le [Date naissance 6] 1959 à [Localité 7] (92)
[Adresse 10]
[Localité 1] (ITALIE)
représentée par la SCP VERDUN - SEVENO, avoués à la Cour
assistée de Me François RIBIS, avocat au barreau de PARIS, toque : D 779
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral et en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 janvier 2010, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Dominique REYGNER, conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Pascal CHAUVIN, président
Madame Isabelle LACABARATS, conseiller
Madame Dominique REYGNER, conseiller
Greffier :
lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Marie-France MEGNIEN
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Monsieur Pascal CHAUVIN, président, et par Madame Marie-France MEGNIEN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* *
[W] [K] est décédée le [Date décès 3] 2000 en laissant pour lui succéder ses deux filles, [J] et [P] [O].
Par testament authentique du 16 septembre 1996, elle avait indiqué avoir remis à sa fille [P] une somme de 140 800 francs que celle-ci devrait rapporter à sa succession à défaut de quoi, elle léguait, par préciput et hors part, à sa fille [J] la même somme que cette dernière prélèverait avant tout partage de sa succession en deux parts égales.
Par jugement du 12 décembre 2002, le tribunal de grande instance de Paris a :
- ordonné le partage de la succession et désigné un notaire pour y procéder,
- dit que l'appartement situé [Adresse 4] serait attribué à Madame [P] [O] et l'appartement situé [Adresse 9] à Madame [J] [O],
- dit Madame [J] [O] redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation de l'appartement de la [Adresse 9] et Madame [P] [O] d'une indemnité pour l'utilisation du véhicule Renault Twingo,
- désigné Monsieur [L] en qualité d'expert pour évaluer les immeubles et donner tous éléments permettant de fixer le montant de l'indemnité due par Madame [J] [O].
Maître [Y] [U], notaire, a dressé procès-verbal de difficultés le 23 janvier 2007.
Par jugement du 22 janvier 2009, le tribunal de grande instance de Paris a :
- dit que l'évaluation des appartements proposée par l'expert, soit 165 000 euros pour l'appartement de la [Adresse 4] et 155 000 euros pour l'appartement de la [Adresse 9] devait être retenue,
- dit que l'indemnité d'occupation due par Madame [J] [O] devait être fixée au montant proposé par l'expert, soit 31 176,74 euros et que celle-ci devait être réévaluée en fonction de l'indice du coût de la construction depuis le 14 février 2004,
- rejeté la demande de condamnation de Madame [P] [O] au paiement d'une indemnité d'occupation de l'appartement situé [Adresse 4],
- dit que, concernant l'appartement situé [Adresse 9], la succession devait supporter les seules charges incombant normalement au propriétaire, à l'exclusion des charges locatives qui incombent à l'occupant et notamment la taxe d'ordures ménagères,
- débouté Madame [J] [O] de sa demande tendant à la prise en charge par la succession de travaux à concurrence de 5 176,96 euros dans l'appartement de la [Adresse 9],
- dit que Madame [P] [O] devrait rapporter à la succession la somme de 140 800 francs, soit 21 464,82 euros et dit que cette somme produirait intérêts au taux légal à compter de l'ouverture de la succession en application de l'article 856 du code civil et que ces intérêts seraient capitalisés en application de l'article 11 54 du même code,
- fixé l'indemnité d'utilisation du véhicule RENAULT Twingo à 3 800 euros,
- ordonné la poursuite des opérations de partage devant le notaire commis,
- ordonné l'emploi des dépens, qui comprendraient les frais d'expertise, en frais généraux de partage, dit qu'ils seraient supportés par les parties dans la proportion de leurs parts dans l'indivision.
Par dernières conclusions déposées le 6 octobre 2009, Madame [J] [O], appelante, demande à la cour de :
- lui donner acte de ce qu'elle ne s'oppose pas à la poursuite des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de Madame [K],
- constater que le tribunal a attribué à chacune des parties l'appartement qu'elle souhaitait recevoir dans son lot,
- dire n'y avoir lieu à entérinement du projet de partage de l'étude Lacourte, notaire,
- dire que, depuis le jugement, les parties ont la jouissance du bien ainsi attribué avec toutes ses conséquences et qu'en leur qualité d'attributaires, elles sont notamment redevables envers l'indivision d'une indemnité d'occupation ainsi que des seules charges diverses et impôts afférents à l'occupation de ce bien,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de paiement d'une indemnité d'occupation par Mademoiselle [P] [O] pour l'appartement à elle attribué et situé [Adresse 4],
subsidiairement,
- dire que Mademoiselle [P] [O] est bien occupante dudit appartement,
- infirmer le jugement et dire que Madame [J] [O] justifie des travaux qu'elle a exécutés pour 5 176,96 euros retenus par le notaire,
- dire qu'ils constituent, ainsi que les travaux pour 1 324,20 euros exécutés postérieurement, des travaux destinés à la conservation du bien indivis et doivent rester comme tels à la charge de l'indivision, en vertu de l'article 815-2, alinéa 1 du code civil,
- dire, subsidiairement, que ces travaux, financés au moyen de ses deniers personnels, ont amélioré le bien indivis et qu'elle est en droit de demander à l'indivision une indemnité d'amélioration d'égal montant en vertu de l'article 815-13 ancien du code civil,
- débouter Mademoiselle [P] [O] de sa demande de fixation de la valeur vénale du véhicule automobile à 1 000 euros et dire que ces valeurs et indemnité mensuelle de jouissance seront fixées selon les prix du marché, à une somme globale qui ne saurait être inférieure à 10 000 euros,
- dire que la somme de 140 800 francs ou 21 464,82 euros rapportée par Mademoiselle [P] [O] à la succession sera productive d'intérêts composés à compter de la date du décès de Madame [K], en vertu des articles 856 et 1154 du code civil,
- pour le cas où le tribunal (sic) viendrait à commettre un notaire pour poursuivre les opérations de comptes, liquidation et partage, désigner tel notaire qu'il plaira au tribunal, à l'exception de l'étude Lacourte, notaire à [Localité 8],
- ordonner l'emploi des dépens de la présente instance seule, en frais généraux de partage qui seront supportés par les coindivisaires et pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile par la SCP MONIN-d'AURIAC de BRONS.
Par dernières conclusions déposées le 11 septembre 2009, Madame [P] [O] entend voir :
- confirmer pour l'essentiel le jugement entrepris et notamment en ce qu'il a :
* dit que l'évaluation des appartements proposée par l'expert, soit 165 000 euros pour l'appartement de la [Adresse 4] et 155 000 euros pour l'appartement de la [Adresse 9] devait être retenue,
* dit que l'indemnité d'occupation due par Madame [J] [O] devait être fixée au montant proposé par l'expert, soit 31 176,74 euros, et que celle-ci devait être réévaluée en fonction de l'indice du coût de la construction depuis le 14 février 2004,
* rejeté la demande de condamnation de Madame [P] [O] au paiement d'une indemnité d'occupation de l'appartement situé [Adresse 4],
* dit que, concernant l'appartement situé [Adresse 9], la succession devait supporter les seules charges incombant normalement au propriétaire, à l'exclusion des charges locatives qui incombent à l'occupant et notamment la taxe d'ordures ménagères,
* débouté Madame [J] [O] de sa demande tendant à la prise en charge par la succession de travaux à concurrence de 5 176,96 euros dans l'appartement de la [Adresse 9],
* dit qu'elle devrait rapporter à la succession la somme de 140 800 francs, soit 21 464,82 euros, et dit que cette somme produirait intérêts au taux légal à compter de l'ouverture de la succession en application de l'article 856 du code civil,
* dit qu'aucun élément produit aux débats ne justifiait le remplacement de l'office notarial LACOURTE & associés désigné par le premier jugement du 12 décembre 2002,
la recevant en son appel incident,
- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que les intérêts dus par elle sur la somme de 21 464,82 euros seraient capitalisés en application de l'article 1154 du code civil,
- ramener l'indemnité pour l'utilisation du véhicule Renault Twingo à sa charge à hauteur de 2 500 euros,
- rejeter toute demande contraire de Mademoiselle [J] [O],
- ordonner la poursuite et l'achèvement des opérations de partage devant le notaire commis,
- ordonner l'emploi des dépens qui comprendront les frais d'expertise en frais généraux de partage tant en première instance qu'en appel et seront supportés par les parties dans la proportion de leur part dans l'indivision,
- dire que les dépens d'appel pourront être recouvrés par la SCP VERDUN SEVENO, avoués à la cour, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR,
SUR L'APPARTEMENT DU [Adresse 4]
Considérant qu'en vertu de l'article 815-9, dernier alinéa, du code civil ' l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité ' ; que l'indemnité est due même en l'absence d'occupation effective ;
Considérant que, dès lors que, par jugement du 12 décembre 2002, Mademoiselle [P] [O] s'est vu attribuer l'appartement de la [Adresse 4], elle ne peut contester en avoir, depuis cette date, la jouissance privative ; que Madame [J] [O] avance d'ailleurs, sans être contredite, qu'au départ du locataire sa soeur s'est opposée à ce que l'appartement soit reloué, marquant ainsi qu'elle entendait en disposer seule et privant l'indivision des loyers qu'elle aurait pu percevoir ; qu'il importe peu que Mademoiselle [P] [O] n'ait pas la propriété du bien, qu'elle demeure libre de renoncer à cette attribution et qu'elle ne réside pas effectivement dans l'appartement, étant observé que la décision de l'administration fiscale, qui a pris cette circonstance en considération, est inopposable à l'appelante ;
Qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement de ce chef, de dire Mademoiselle [P] [O] redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation de l'appartement de la [Adresse 4] et de préciser que depuis le jugement du 12 décembre 2002, les parties sont redevables envers l'indivision des seules charges et impôts afférents à l'occupation du bien qui leur a été attribué ;
SUR LES TRAVAUX EFFECTUES PAR MADAME [J] [O] [Adresse 9]
Considérant que le changement de l'évier, du meuble sous évier, du ballon d'eau chaude et du mélangeur du lavabo comme le ferrage de la porte vitrée, dont Madame [J] [O] ne justifie pas qu'ils étaient nécessaires à la conservation du bien ou qu'ils l'aient amélioré, doivent rester à sa charge ; qu'il en va de même des travaux de menuiserie effectués en 2009 ;
Que le jugement doit être confirmé de ce chef ;
SUR LE VÉHICULE
Considérant qu'il est constant que le véhicule Twingo acquis par [W] [K] en janvier 2000 a été utilisé, depuis son décès, par Madame [P] [O] ; que le véhicule ayant été acheté 8 750,57 euros, l'intimée justifiant en avoir réglé le crédit à hauteur de 3 932,41 euros et le véhicule n'ayant plus à ce jour qu'une valeur résiduelle, l'indemnité due par Madame [P] [O] au titre de la jouissance du véhicule a été équitablement fixée à la somme de 3 800 euros ;
Que cette disposition du jugement doit également être confirmée ;
SUR LE RAPPORT A SUCCESSION
Considérant que Madame [P] [O] ne conteste pas devoir rapporter à la succession la somme de 140 800 francs / 21 464,82 euros, qui lui a été donnée par sa mère, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date du décès, conformément aux dispositions de l'article 856 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2006 - 728 du 23 juin 2006 ;
Qu'elle demande en revanche à la cour d'écarter la capitalisation des intérêts au motif que Madame [J] [O] n'aurait jamais concouru à une solution amiable du litige ; que cependant, à la supposer établie, une telle circonstance ne fait pas obstacle à ce que la capitalisation des intérêts dûs pour une année entière à compter de la demande qui en a été faite devant le premier juge soit ordonnée en application de l'article 1154 du code civil ;
Que le jugement sera confirmé de ce chef ;
SUR LA DÉSIGNATION DU NOTAIRE
Considérant que Madame [J] [O], qui invoque la partialité de l'étude LACOURTE pour solliciter la désignation d'un nouveau notaire afin de poursuivre les opérations de comptes, liquidation et partage, ne fait état d'aucun fait précis qui viendrait étayer ses assertions ; qu'elle sera en conséquence déboutée de sa demande à ce titre alors que, par sa connaissance du dossier, cet office notarial est en mesure de procéder au partage dans les meilleurs délais ;
Que le jugement doit encore être confirmé de ce chef ;
Considérant que les autres dispositions du jugement, qui ne sont pas critiquées, seront enfin confirmées ;
PAR CES MOTIFS
INFIRMANT PARTIELLEMENT le jugement,
DIT Mademoiselle [P] [O] redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation de l'appartement du [Adresse 4],
DIT que depuis le jugement du 12 décembre 2002, les parties sont, le cas échéant, redevables envers l'indivision des charges et impôts afférents à l'occupation du bien qui leur a été attribué,
CONFIRME pour le surplus le jugement,
DÉBOUTE les parties de toutes demandes autres, plus amples ou contraires,
ORDONNE l'emploi des dépens d'appel en frais de partage et dit qu'ils seront supportés par les parties dans la proportion de leurs parts dans l'indivision.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,