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01/12/2009 | FRANCE | N°08/11272

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 1, 01 décembre 2009, 08/11272


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 1



ARRET DU 01 décembre 2009

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/11272

Jonction avec le dossier n° 09/04146



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Octobre 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS section RG n° 07/09277





APPELANTE



Madame [I] [H]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Cat

herine GUILLOTIN LE JOUAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1119 substitué par Me Azzedine BOUNOUARA, avocat au barreau de PARIS, toque : E1135







INTIMEES



Société NEXT STOP

[Adresse 1]

...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 1

ARRET DU 01 décembre 2009

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/11272

Jonction avec le dossier n° 09/04146

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Octobre 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS section RG n° 07/09277

APPELANTE

Madame [I] [H]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Catherine GUILLOTIN LE JOUAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1119 substitué par Me Azzedine BOUNOUARA, avocat au barreau de PARIS, toque : E1135

INTIMEES

Société NEXT STOP

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Jacques LANG, avocat au barreau de PARIS, toque : E 323 substitué par Me Sébastien PREVOT, avocat au barreau de PARIS, toque : E323

Société COTTEBUS

[Adresse 1]

[Localité 2]

non comparante

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 26 Octobre 2009, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Yves GARCIN, Président

Madame Marie-Bernadette LE GARS, Conseillère

Madame Claire MONTPIED, Conseillère

qui en ont délibéré

Le prononcé de la décision initialement prévu pour le 30 novembre 2009 a été prorogé au 01 décembre 2009,

Greffier : Madame Sandie FARGIER, lors des débats

ARRET :

- REPUTE CONTRADICTOIRE

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Yves GARCIN, président et par Madame Sandie FARGIER, greffier.

Vu l'appel régulièrement interjeté par Mme [I] [S] d'un jugement prononcé le 2 octobre 2008 par le conseil des prud'hommes de Paris qui, statuant sur les demandes qu'elle avait formées et après avoir prononcé la jonction des dossiers n° 07/9277 et 07/13306 a :

- mis hors de cause la Société Cottebus

- condamné la Société Next Stop à payer à Mme [I] [S] :* 8.100€ à titre d'indemnité de préavis,

* 810€ à titre de congés payés y afférents,

avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par le défendeur de la convocation devant le bureau de conciliation,

* 2.700€ à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,

avec intérêts légal à compter du jugement,

- ordonné la remise des bulletins de salaire conformes , attestation Assedic, certificat de travail sous astreinte provisoire de 100€ par jour et par document, et ce, prenant effet un mois après la notification du jugement pour une durée de trois mois ,

- débouté Mme [I] [S] du surplus de ses demandes

Vu les conclusions contradictoirement échangées, visées par le greffier le 26 octobre 2009 et soutenues oralement à l'audience aux termes desquelles Mme [I] [S] entend voir :

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la Société Next Stop à lui payer l'indemnité de préavis et les congés payés y afférents ,

- infirmer le jugement pour le surplus et statuant à nouveau,

- prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts des sociétés Cottebus et Next Stop ,

- fixer la date de la rupture au jour du prononcé de l'arrêt, ( et au 5 octobre 2009 dans le corps des conclusions )

- condamner solidairement et indéfiniment ces sociétés à lui payer:

* 80.543,83€ au titre des salaires du 11 avril 2007 au 5 octobre 2009,

* 8.054,38€ à titre de congés payés y afférents ,

* 1.620€ à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ,

* 27.000€ à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive ,

- prononcer la condamnation solidaire des Société Cottebus et Next Stop aux sommes allouées par le premier juge,

- condamner chacune des Sociétés à lui verser 2000,00€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ,

- les condamner aux dépens ,

Vu les conclusions contradictoirement échangées, visées par le greffier le 26 octobre 2009 et soutenues oralement à l'audience aux termes desquelles la société Next Stop demande à la Cour de :

- dire inapplicable à son encontre l'article 1224-1 du code du travail en l'absence de transfert d'entité, de transfert d'éléments d'actifs, ainsi que de transferts d'éléments corporels et incorporels,

en conséquence,

- dire et juger parfait le licenciement opéré par Me [B] es qualité de représentant de la SARL 99,

- débouter Mme [I] [S] de l'ensemble de ses demandes,

- ordonner la restitution des sommes et documents versés à Mme [I] [S] dans le cadre de l'exécution provisoire,

- condamner reconventionnellement cette dernière à lui verser 2.000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Vu l'absence à l'audience de la Société Cottebus, bien que régulièrement convoquée,

SUR CE LA COUR :

Considérant qu'il est constant que :

- Mme [I] [S] a été embauchée à compter du 5 octobre 2006 par la SARL 99 en qualité de Manager , statut cadre, moyennant un salaire mensuel brut de 2.700€ , les relations contractuelles étant régies par la Convention Collective du commerce de Détail de l'Habillement et du Textile,

- la SARL 99 exerçait son activité de vente de prêt à porter dans le cadre d'une location-gérance d'un fonds de commerce, propriété de la Société Next Stop,

- le 11 avril 2007, la location-gérance confiée à la SARL 99, prenait fin au terme d'un protocole d'accord entre les parties,

- par contrat du 5 avril 2007 la Société Next Stop confiait la location gérance de son fonds de commerce à la Société Cottebus à compter du 15 avril 2007,

- le 26 avril 2007, la SARL 99 était déclarée en liquidation judiciaire par le Tribunal de Commerce de Paris ,

- par courrier du 30 avril 2007, le liquidateur convoquait Mme [I] [S] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 7 mai 2007,

- le 9 mai 2007, Mme [I] [S] se voyait notifier son licenciement,

- par courrier du 21 juin 2007, le liquidateur , informait Mme [I] [S] qu'en vertu du contrat de location gérance liant la SARL 99 à la Société Next Stop, son contrat de travail y avait été transféré en application de l'article L. 122-12 du code du travail et qu'il appartenait à la Société Next Stop de lui régler sa créance salariale depuis le 11 avril 2007,

- par courrier du 26 juin 2007 adressé à la Société Next Stop , Mme [I] [S] indiquait à cette société qu'elle se tenait à sa disposition pour reprendre ses fonctions ;

Sur la validité du licenciement opéré par le mandataire liquidateur

Considérant qu'aux termes de l'article L 1224-1 du code du travail ( anciennement L.122-12) lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ;

Considérant qu'il est constant que c'est à la suite d'un protocole d'accord intervenu le 11 avril 2007 entre la SARL 99, locataire gérant , et la Société Next Stop, propriétaire bailleur, et à raison des impayés de la SARL 99 que la location gérance du fonds de commerce situé [Adresse 1], dont elle bénéficiait , a pris fin;

Considérant que la liquidation judiciaire de la SARL 99 est intervenue le 26 avril 2007 soit postérieurement à cette décision ; qu'il s'en déduit que la Société Next Stop a, dès avant le prononcé de la liquidation judiciaire de la SARL 99, récupéré le fonds de commerce dont rien ne permet d'établir qu'il était inexploitable ou en ruine alors même qu'il ressort de la liste annexée à ce protocole qu'à cette date , une partie des marchandises, à savoir un stock de 196 vêtements, sont restés dans les lieux ;

Considérant par ailleurs que dès le 5 avril 2007, soit avant même la résiliation du contrat de location gérance de la SARL 99, la Société Next Stop a conclu un nouveau contrat de location gérance avec la Société Cottebus , à effet du 15 avril 2007, portant sur un fonds de commerce de 'prêt à porter' situé [Adresse 1]; qu'il est précisé au contrat que ledit fonds comprend ' la clientèle, l'achalandage y attachés ainsi que l'enseigne , les matériels et le mobilier servant à l'exploitation du fonds', à savoir, divers meubles de rangements et de bureaux , paravents de vitrine, ordinateurs, téléphone, portants, cabines d'essayage, miroirs, système d'antivol pour vêtements etc, ce qui confirme, compte tenu du stock de vêtements existant, le transferts d'éléments permettant la poursuite immédiate de l'activité de vente de vêtement de confection précédemment exercée par la SARL 99 ;

Considérant que ce faisant , le contrat de travail de Mme [I] [S] qui avait été de plein droit transféré à la Société Next Stop du fait de la récupération d'un fonds de commerce exploitable à compter du 11 avril 2007, s'est ensuite poursuivi, à compter du 15 avril 2007 avec la Société Cottebus laquelle exerce comme la SARL 99 une activité de prêt à porter, dans le cadre de la location-gérance ;

Considérant qu'il ressort également de l'examen du contrat de location gérance en date du 5 avril 2007 que la Société Next Stop et la Société Cottebus ont, de concert, procédé à une fraude à l'article L. 122-12 devenu 1224-1 du code du travail qui leur imposait la reprise du contrat de travail de Mme [I] [S] ; qu'en effet l'examen de ce document révèle que les parties ont, volontairement , rayé à la main l'article 12 pré-imprimé selon lequel 'le locataire gérant reprend les contrats en cours', étant observé que ce contrat a été conclu avant même la dénonciation du précédent ;

Considérant en conséquence que le licenciement opéré le 9 mai 2007, à la suite du prononcé de la liquidation judiciaire de la SARL 99, par le mandataire liquidateur dans le délai de 15 jours qui lui est légalement imposé, est en l'espèce privé d'effet ; qu'il a en effet été opéré, alors qu'il n'avait pas lieu d'être, compte tenu de la reprise d'un fonds de commerce exploitable et de la poursuite de la même activité ; que le mandataire a d'ailleurs, par lettre du 21 juin 2007, informé , Mme [I] [S] du transfert de son contrat de travail à la Société Next Stop en vertu des dispositions de l'article L. 122-12 devenu 1224-1 du code du travail ;

Sur la demande de résiliation du contrat de travail

Considérant que Mme [I] [S] demande la résiliation de son contrat de travail en raison des faits qu'elle reproche à ses employeurs successifs et notamment du fait du non paiement de ses salaires ;

Considérant qu'il ressort suffisamment des éléments du dossier que ni la Société Next Stop, ni la Société Cottebus n'ont proposé de travail à Mme [I] [S] ; qu'elles ne lui ont pas davantage réglé ses salaires ; que ce faisant ces sociétés n'ont pas satisfait aux obligations incombant aux employeurs, alors pourtant que, par courrier du 26 juin 2007 , Mme [I] [S] avait indiqué être à leur disposition pour exercer son contrat de travail ; que rien ne démontre non plus, alors même qu'elle n'a pas été licenciée, qu'elle ne soit pas restée à leur disposition , ce qu'aucune des deux sociétés ne contredit ;

Considérant qu'il convient en conséquence de résilier le contrat de travail aux torts des employeurs à la date du présent arrêt , tel que demandé au dispositif des conclusions de Mme [I] [S] ; que la rupture ainsi prononcée s'analyse comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant par ailleurs, que c'est à juste titre que la salariée demande la condamnation solidaire de ses employeurs successifs, soit celle de la Société Next Stop et de la Société Cottebus , lesdites sociétés ayant de concert et sciemment commis une fraude à la loi qui leur imposait la poursuite de son contrat de travail ;

Considérant que compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à la salarié, de son âge, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l'entreprise et de l'effectif de celle-ci, la Cour , fixe à 10.000 € le préjudice subi outre 8.100€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 8.600 à titre de congés payés y afférents , outre 80.543,83€ à titre de rappel de salaire pour la période du 11 avril 2007 au 5 octobre 2009 et 10.000€ à titre de dommages et intérêts ;

Considérant en revanche que ce n'est qu'à compter de 5 ans d'ancienneté que la convention collective applicable prévoit une indemnité de licenciement égale à 1/5 du salaire mensuel de référence; qu'il n'est pas contesté que la salariée a été embauchée en octobre 2006 , de sorte qu'au 30 novembre 2009 , date de la résiliation judiciaire de son contrat de travail , elle ne comptait que trois ans de présence ce qui lui ouvre droit , à 1/10 du salaire mensuel de référence, et ce dès la première année , soit 860€ ;

Qu'il convient en conséquence de condamner in solidum Société Cottebus et Société Next Stop au paiement de ces sommes à Mme [I] [S]

Sur les demandes sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile :

Considérant que le sens de la décision et la situation économique des parties commande de condamner in solidum la Société Next Stop et la Société Cottebus à payer 2.000€ à Mme [I] [S] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

Considérant que l'affaire a fait l'objet d'un double enregistrement par le greffe, il convient de prononcer la jonction de la procédure 09/04146 à la présente,

Par Ces Motifs

La Cour, statuant par arrêt réputé contradictoire,

Prononce la jonction de la procédure 09/04146 avec la présente,

Infirme le jugement entrepris ;

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [I] [S] à compter du présent arrêt ,

Condamne in solidum la Société Next Stop et la Société Cottebus à payer à Mme [I] [S] :

*8.100€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis

*8.600€ à titre de congés payés y afférents ,

*10.000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,

*80.543,83€ à titre de rappel de salaire pour la période du 11 avril 2007 au 5 octobre 2009

*8054,38€ à titre de congés payés y afférents ,

*860€ à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ,

Condamne in solidum la Société Next Stop et la Société Cottebus à payer à Mme [I] [S] 2000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile , ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes .

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 08/11272
Date de la décision : 01/12/2009

Références :

Cour d'appel de Paris K1, arrêt n°08/11272 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-12-01;08.11272 ?
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