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18/12/2008 | FRANCE | N°06/10582

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0135, 18 décembre 2008, 06/10582


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
21ème Chambre C

ARRET DU 18 Décembre 2008
(no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 07 / 01486- IL

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Novembre 2006 par le conseil de prud'hommes de MELUN section activités diverses RG no 05 / 00816

APPELANT

1o- Monsieur Laurent X...
......
77320 BETON BAZOCHES
comparant en personne, assisté de M. Thierry DINH Y..., Délégué syndical ouvrier,

INTIMEES

2o- Me L

AUREAU-JEANNEROT-Commissaire à l'exécution du plan de la SA BAC SECURITE VENANT AUX DROITS DE LA SA PROSEGUR SECURITE
7, rue Jean M...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
21ème Chambre C

ARRET DU 18 Décembre 2008
(no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 07 / 01486- IL

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Novembre 2006 par le conseil de prud'hommes de MELUN section activités diverses RG no 05 / 00816

APPELANT

1o- Monsieur Laurent X...
......
77320 BETON BAZOCHES
comparant en personne, assisté de M. Thierry DINH Y..., Délégué syndical ouvrier,

INTIMEES

2o- Me LAUREAU-JEANNEROT-Commissaire à l'exécution du plan de la SA BAC SECURITE VENANT AUX DROITS DE LA SA PROSEGUR SECURITE
7, rue Jean Mermoz
78000 VERSAILLES

3o- Me SAMZUN-Mandataire ad'hoc de la SA BAC SECURITE VENANT AUX DROITS DE LA SA PROSEGUR SECURITE
2 Passage Roche
78009 VERSAILLES CEDEX

4o- Sté D2M SECURITY
7 avenue Charles Bohn
90000 BELFORT
représentés par Me Myriam MONTI, avocat au barreau de VERSAILLES (Cabinet HADENGUE),

5o- UNEDIC AGS-CGEA IDF OUEST
130, rue Victor Hugo
92309 LEVALLOIS PERRET CEDEX
représentée par Me Claude Marc BENOIT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1953,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Octobre 2008, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Irène LEBE, Conseillère, charg d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Marie-Pierre DE LIEGE, président
Mme Irène LEBE, conseiller
Mme Hélène IMERGLIK, conseiller

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
- signé par Mme Marie-Pierre DE LIEGE, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par M. Laurent X... du jugement rendu le 29 novembre 2006 par le conseil de prud'hommes de Melun, section Activités Diverses, auquel il est renvoyé pour l'exposé des éléments du litige à cette date, qui a dit ses demandes irrecevables comme formées contre la seule SA BAC SECURITE, venant aux droits de la société Proségur Sécurité, assistée par SCP Laureau-Jeannerot, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession de la dite société et en présence de Me Ph. Z..., ès qualités de représentant des créanciers et de l'Unedic Délégation AGS-CGEA IDF Est.
Pour un bref exposé des faits et de la procédure, il suffit de rappeler que M. X... a été embauché le 20 juin 1997, par contrat de travail à durée indéterminée, en qualité de " conducteur de chiens " par la société Lancry Protection Sécurité exerçant son activité dans le domaine de la sécurité et du gardiennage d'entreprises.
Après que son contrat de travail ait été transféré, sans contestation, 1er juin 2003 à la société SEEI, suite à la perte du marché auquel il était affecté, la société SEEI était mise en location gérance dans le groupe Proségur, aux droits de laquelle se présente la SA BAC SECURITE.
Celle-ci perdait, à effet au 1er octobre 2005, au profit de la société Groupe 4 Securicor, le marché de la Snecma-Villaroche Sud, auquel était affecté le salarié.
L'intéressé, qui en avait été informé le 9 septembre 2005 par la SA BAC SECURITE, refusait par lettre du 4 octobre 2005 le transfert de son contrat de travail à la société Groupe 4 Securicor au motif de modifications illicites de son contrat de travail, portant sur sa rémunération, ainsi que sur sa qualification, par la société Groupe 4 Securicor qui lui avait soumis une proposition de contrat de travail en ce sens.
Alors que la SA BAC SECURITE était placée le 8 avril 2005 en redressement judiciaire, et après qu'un PSE ait été mis en oeuvre à partir de juillet 2005, cette société faisait l'objet le 24 octobre 2005 d'un plan de cession au profit de la société D2M.
C'est dans ces conditions que M. X... a été licencié le 4 novembre 2005 par Me Ph. Jeannerot, représentant la SCP Laureau-Jeannerot, es qualités d'administrateur judiciaire de la SA BAC SECURITE, dans le cadre du plan de cession précité de la dite société au profit de la société D2M.
En l'état de la procédure collective, il convient de préciser que, par ordonnance du 4 juillet 2006, le tribunal de Commerce de Versailles a mis fin à la mission de la SCP Laureau-Jeannerot, es qualités d'administrateur judiciaire de la SA BAC SECURITE à la suite de sa cession au profit de la société D2M.
La SA BAC SECURITE est représentée en cause d'appel par Me Ph. Z..., précédemment représentant des créanciers de la dite société, désigné en qualité de mandataire ad hoc par ordonnance du 18 septembre 2008 par le Président du tribunal de Commerce de Versailles.

La SCP Laureau-Jeannerot, qui déclare intervenir volontairement en tant que commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA BAC SECURITE au profit de la société D2M, sollicite la mise hors de cause de celle-ci, entreprise cessionnaire.
M. X... soutient, à titre principal, que les dispositions de l'article L. 122-12 ancien du code du travail, devenu l'article 1234-1 nouveau du même code, ne sont pas applicables en l'espèce et que la société Groupe 4 Securicor, en lui proposant un avenant modifiant de façon substantielle son contrat de travail et en ne respectant pas le délai conventionnel de 4 jours de réflexion, n'a pas respecté l'accord de reprise du personnel du 5 mars 2002, seul applicable. (Articles 2-5 et 3-2).
Contestant dans ces conditions tout transfert de plein droit de son contrat de travail à la société Groupe 4 Securicor, il en conclut avoir été dès lors en droit de refuser ce transfert irrégulier et être resté salarié de la seule SA BAC SECURITE, ce qui prive de cause réelle et sérieuse son licenciement, prononcé pour ce seul motif par l'administrateur judiciaire de cette société.
Il sollicite en outre des rappels de salaires et d'indemnité de préavis sur la base du salaire réellement perçu les 12 derniers mois de son activité au sein de la SA BAC SECURITE.
Il fait valoir qu'il a subi un grave préjudice alors qu'il aurait pu bénéficier d'un licenciement pour motif économique, et donc d'un PSE, d'une convention de reclassement, du dispositif du Pare ou de l'aide à la création d'entreprise et de mesures de reclassement et de mobilité, et enfin d'une indemnité de licenciement doublée.
Il demande en conséquence à la Cour d'infirmer le jugement déféré et de fixer sa créance sur le passif de la SA BAC SECURITE, représentée par Me Ph. Z..., es qualités de mandataire ad hoc, aux sommes suivantes :
-50. 000 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-596, 35 Euros à titre de complément d'indemnité de préavis et congés payés incidents,
-264, 86 Euros à titre de rappel de salaires sur le mois d'octobre 2005,
-2. 000 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il sollicite la remise, par Me Ph. Z..., ès qualités, d'une attestation Assedic rectifiée conformément à la présente décision, spécifiant " licenciement économique " et demande à la Cour de dire sa décision opposable à l'Unedic Délégation AGS CGEA IDF Est qui lui devra sa garantie dans les limites légales.
Me Ph. Z..., ès qualités de mandataire ad hoc de la SA BAC SECURITE ainsi que la SCP Laureau-Jeannerot, es qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA BAC SECURITE, soutiennent à titre principal que les demandes du salarié, formées à l'encontre de la seule SA BAC SECURITE, à l'exclusion de la société Groupe 4 Securicor, sont irrecevables au moyen principal que son contrat de travail a été transféré de plein droit à cette dernière société, et que dès lors son refus de la rejoindre était fautif, justifiant son licenciement par la SA BAC SECURITE.
Ils soutiennent que le transfert du contrat de travail à la société Groupe 4 Securicor est intervenu de plein droit par application conjointe des dispositions de l'article L. 122-12 ancien du code du travail, devenu l'article L. 1234-1 nouveau du même code, et des dispositions de l'accord conventionnel de reprise du personnel du 5 mars 2002, dont les conditions étaient remplies, c'est à dire en l'absence de modification du contrat de travail de l'intéressé.
Ils font valoir que le refus du salarié de voir son contrat de travail transféré à la société Groupe 4 Securicor était dès lors fautif et justifiait son licenciement, SCP Laureau-Jeannerot, ce dont ils concluent que l'intéressé n'était en conséquence plus concerné par les licenciements pour motif économique prononcés postérieurement à son propre licenciement.
À titre subsidiaire, s'il devait être retenu que le contrat de travail de l'intéressé avait été modifié par la société Groupe 4 Securicor, justifiant le refus du transfert de son contrat de travail par le salarié, la SCP Laureau-Jeannerot et Me Ph. Z... soutiennent que les demandes du salarié sont irrecevables car dirigées uniquement contre la SA BAC SECURITE et non contre la société Groupe 4 Securicor, alors que la SA BAC SECURITE n'a commis aucune faute à son égard.
Ils soulignent que si le licenciement a été prononcé par la SA BAC SECURITE, en l'absence de faute de la part de cette dernière société, la rupture du contrat de travail de ce dernier doit être déclarée imputable à la seule société Groupe 4 Securicor, société entrante, son propre licenciement étant sans effet et qu'en conséquence il appartient au salarié de diriger ses demandes contre celle-ci.
La SCP Laureau-Jeannerot et Me Ph. Z... concluent en conséquence à la Cour au visa des articles 117 et 931 du code de procédure civile, des articles R. 1461-1 et 1224-1 du code du travail, ainsi que de l'accord précité du 5 mars 2002 et de la convention collective des Entreprises de Prévention et de Sécurité à l'irrecevabilité des demandes du salarié à son encontre.
Sur le fond, ils demandent :
A à titre principal,
- de constater que la société Groupe 4 Securicor avait l'obligation de reprendre le contrat de travail du salarié aux mêmes conditions à compter du 1er octobre 2005, tant en application des dispositions de l'accord du 5 mars 2002 que de l'article L. 1234-1 du code du travail,
- de constater qu'en l'absence de modification du contrat de travail du salarié, le transfert du contrat de travail à la société Groupe 4 Securicor s'imposait au salarié qui ne pouvait s'y opposer,
- en conséquence, de dire et juger que le licenciement mis en oeuvre par la SA BAC SECURITE, motivé par le refus du salarié, est bien justifié par une cause réelle et sérieuse,
A titre subsidiaire :
- de constater que la société Groupe 4 Securicor a fait obstacle à la reprise du contrat de travail du salarié en subordonnant la reprise de son contrat de travail à une modification de celui-ci, et qu'elle doit être déclarée seule responsable de la rupture intervenue,
- de débouter en conséquence le salarié de son action mal dirigée contre la SA BAC SECURITE et de le condamner à lui verser la somme de 1. 500 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'Unedic Délégation AGS CGEA IDF Est déclare, à titre principal, s'associer aux observations de la SCP Laureau-Jeannerot et de Me Ph. Z..., es qualités, et sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a dit irrecevables les demandes formées par le salarié à l'encontre de la seule SA BAC SECURITE.
À titre subsidiaire, vu l'article L. 122-14-4 ancien du code du travail, et à supposer rapportés la preuve des préjudices invoqués par le salarié, l'Unedic Délégation AGS CGEA IDF Est demande à la Cour :
- de dire que le salarié ne démontre pas la proportionnalité entre sa demande et son préjudice supposé,
- de limiter en conséquence les dommages-intérêts qui lui seraient alloués à proportion du préjudice prouvé.
En tout état de cause, l'Unedic Délégation AGS CGEA IDF Est demande à la Cour :
- de dire que sa garantie sera limitée au plafond applicable au jour du licenciement du salarié, en application des dispositions des articles L. 143 – 1-8 et D. 143-2 anciens du code du travail, à l'exclusion de l'indemnité qui serait éventuellement allouée au salarié au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de statuer ce que de droit sur les dépens, en précisant qu'ils ne pourront pas être mis à sa charge.

SUR CE, LA COUR,
Vu le jugement déféré et les conclusions des parties, soutenues oralement à l'audience, auxquels il convient de se référer pour de plus amples développements.
À titre liminaire, il convient de relever que la SA BAC SECURITE est représentée par Me Ph. Z..., ès qualités de mandataire ad hoc, et est donc régulièrement présente en la cause.
La SCP Laureau-Jeannerot déclare intervenir volontairement en qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA BAC SECURITE au profit de la société D2M, dont elle sollicite la mise hors de cause.
Aucune demande n'étant formée à son encontre, il convient de procéder à la mise hors de cause de la société D2M.

Sur la rupture du contrat de travail :
Le salarié a été licencié par lettre recommandée et accusé de réception du 4 novembre 2005 par la SA BAC SECURITE pour les motifs suivants, avec dispense d'exécuter son préavis d'un mois :
"... Le 9 septembre 2005 nous vous avons informé de la perte du contrat de prestations de surveillance du site " Snecma Villaroche " sur lequel vous étiez affecté, au profit de la société Groupe 4 Securicor.
Dans ce courrier, nous attirions notamment votre attention sur l'article 2. 5 de l'accord du 5 mars 2002, étendu le 10 décembre 2002, relatif à la reprise du personnel. Cet article prévoit qu'à l'issue des entretiens avec la " société entrante ", les salariés, à qui le transfert de leur contrat de travail est proposé, ont quatre jours ouvrables pour faire connaître leur décision à la société entrante. Or, dans ce cadre, la société Groupe 4 Securicor nous a indiqué le 10 octobre 2005 qu'elle vous avait fait une proposition de reprise que vous avez refusée.
De même, nous vous avions informé qu'en cas de refus de la proposition de transfert de la société Groupe 4 Securicor, nous serions contraints de procéder à votre licenciement en application de l'article 3. 3 de l'accord précité.
Dans ces conditions, nous n'avons pas d'autre choix que de prononcer votre licenciement.... ".
Mais c'est en vain que la SCP Laureau-Jeannerot et Me Ph. Z..., ès qualités, prétendent que la perte du marché de la surveillance de la Scnema, de Villaroche Sud au profit de la société Groupe 4 Securicor, intervenue à compter du 1er octobre 2005 entraînait le transfert de plein droit du contrat de travail du salarié à cette dernière société en application des dispositions de l'article L. 122-12 ancien du code du travail, devenu l'article L. 1324-1 nouveau du même code, et que dès lors il devait diriger son action contre la seule société Groupe 4 Securicor.
En effet, d'une part, il convient de rappeler les termes de l'article L. 122-12 ancien du code du travail, devenu l'article 1324-1 nouveau du même code, selon lequel, s'il survient une modification dans la situation de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.
Or, aucun élément probant n'établit que la perte de ce marché s'était accompagnée du transfert d'une entité économique autonome ayant conservé son identité, quand bien même cette activité a été reprise par la société entrante dans ce marché, à savoir la société Groupe 4 Securicor, alors qu'il n'est pas utilement contesté que seulement 85 % du personnel a été repris par la société entrante, aux termes de l'accord conclu entre les deux sociétés susvisées.
A cet égard, aucun élément probant n'est communiqué de nature à établir que l'activité de surveillance du site Snecma Villaroche Sud constituait une entité économique composée de moyens autonomes et disposant d'un personnel propre, affecté spécialement à cette activité, ayant une compétence spécifique de surveillance, que n'avaient pas les autres personnels de l ‘ entreprise ; alors qu'il s'agissait de salariés exerçant la surveillance avec des chiens, modalités de surveillance d'usage courant et dont il n'est pas établi qu'il ait été réservé à ce seul site.
D'autre part, tant dans son courrier du 9 novembre 2005 que dans la lettre de licenciement précitée du salarié, la SA BAC SECURITE, alors assistée de la SCP Laureau-Jeannerot, es qualités d'administrateur judiciaire n'invoquait nullement les dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail mais se bornait à invoquer les dispositions de l'accord conventionnel du 5 mars 2002, relatif à la reprise du personnel affecté sur un site dont le marché change de prestataire, applicable dans le secteur d'activité des entreprises de sécurité, qui est celui de la SA BAC SECURITE, entreprise dite " sortante " et de la société Groupe 4 Securicor, entreprise dite " entrante ".
Dans ces conditions, l'article L. 122-12 du code du travail n'était pas applicable, ce dont il résulte que le contrat de travail du salarié n'a pas été transféré de plein droit à la société Groupe 4 Securicor.

C'est de même en vain que la SA BAC SECURITE, représentée par Me Ph. Z..., ainsi que la SCP Laureau-Jeannerot prétendent qu'en application des dispositions conventionnelles de l'accord de reprise du personnel du 5 mars 2002, la société Groupe 4 Securicor avait l'obligation de reprendre le salarié et que celui-ci, en l'absence de modification de son contrat de travail, ne pouvait pas refuser le transfert de son contrat de travail à cette dernière, son refus dès lors illégitime justifiant son licenciement.
En effet, il ressort des termes de l'accord précité que la reprise litigieuse ne revêtait aucun caractère obligatoire ni automatique pour le salarié.
Ainsi, aux termes de l'article 2. 5 de l'accord précité, " l'entreprise sortante peut conserver tout ou partie de son personnel pour l'affecter à d'autres marchés et communique à l'entreprise entrante la liste du personnel transférable " eu égard à des conditions d'ancienneté et de volume horaire sur le site concerné ".
Ce même texte fait également état de " proposition de reprise ", accompagnée d'un avenant au contrat de travail de l'intéressé.
Enfin, aux termes de l'article 3-3 dudit accord, relatif aux " obligations à la charge du personnel ", il est stipulé que " le salarié ayant accepté son transfert devra signer l'avenant à son contrat de travail avec l'entreprise entrante, avant son entrée en service " et que " cet avenant sera établi " comme précisé par l'article 3-2 dudit accord, soit en y mentionnant " obligatoirement la reprise de l'ancienneté, des niveaux de qualification, ainsi que du salaire et des primes constantes soumises à cotisation, payées chaque mois et figurant sur les six derniers bulletins de paie, outre la reprise des droits acquis en matière de congés payés ".
Alors qu'en tout état de cause, en l'absence d'application des dispositions de l'article L. 122-12 ancien du code du travail, son contrat de travail était modifié du fait même du changement d'employeur qu'impliquait son transfert à la société Groupe 4 Securicor, il n'est pas utilement contesté que la proposition d'avenant faite au salarié par la société Groupe 4 Securicor le 30 septembre 2005 modifiait les modalités de sa rémunération, en modifiant les modalités de calcul de certaines des primes faisant partie de sa rémunération, notamment les indemnités de repas, de transport, de week end, les indemnités et primes " chien " et la prime de fin d'année.
L'article 3-3 précité dudit accord précisait que " le salarié ayant refusé son transfert demeure salarié de l'entreprise sortante ". Il convient à cet égard de relever que le paragraphe de cet article, qui prévoyait que " dans cette hypothèse, l'entreprise sortante prendra une mesure de licenciement pour cause réelle et sérieuse fondée sur le refus d'une modification non substantielle du contrat de travail " a été expressément exclu de l'extension de cet accord, aux termes de l'arrêté d'extension du 10 décembre 2002.
Cette analyse est confortée par les termes du courrier, précité, adressé le 9 septembre 2005 par la SA BAC SECURITE et SCP Laureau-Jeannerot au salarié, dont il ressort que celui-ci était informé " de ce qu'il était susceptible d'être repris par la société Groupe 4 Securicor s'il remplissait les critères posés par l'article 2-4-1 de l'accord précité du 5 mars 2002, soit 6 mois d'ancienneté sur le site concerné,... " et que " s'il était retenu au titre des salariés repris ", il sera informé des modalités de transfert par la société Groupe 4 Securicor, ce dont il se déduit que le transfert allégué n'avait aucun caractère automatique et que le salarié, en l'absence d'application des dispositions de l'article L. 122-12 ancien du code du travail, et quelles soient les modifications apportées à son contrat de travail par l'entreprise entrante, avait en tout état de cause la possibilité de le refuser après un délai de réflexion de 4 jours, non respecté de surcroît en l'espèce.
Ce seul refus ne pouvait en conséquence être invoqué comme motif réel et sérieux de licenciement du salarié alors que l'article 3-3 précité de l'accord conventionnel susvisé précisait que l'entreprise sortante, en l'espèce la SA BAC SECURITE, devait conserver le salarié dans ses effectifs, au besoin en l'affectant à un autre site.
La SA BAC SECURITE était donc restée le seul employeur du salarié, ainsi qu'il résulte d'ailleurs du seul fait que cette dernière a prononcé seule son licenciement, se reconnaissant par là même cette qualité.
Dans ces conditions, c'est en vain que la SA BAC SECURITE prétend que si elle a prononcé le licenciement du salarié, la rupture du contrat de travail de ce dernier doit être déclarée imputable à la seule société Groupe 4 Securicor, société entrante, du fait du non-respect par celle-ci des ses propres obligations de maintenir le contrat de travail de l'intéressé et que son propre licenciement était dès lors inopérant.
La lettre de licenciement n'invoquant dès lors aucun motif imposant la rupture, celle-ci est en conséquence sans cause réelle et sérieuse. Le jugement déféré sera infirmé.
En considération du préjudice subi par le salarié, compte tenu, notamment de son ancienneté, de son salaire, ainsi que du fait que, prononcé dès le 4 novembre 2005, le licenciement du salarié lui a fait perdre une chance de bénéficier des mesures prises dans le PSE mis en place dans l'entreprise, et d'être licencié dans le cadre des licenciements économiques prononcés ultérieurement, notamment le 22 novembre 2005, par la SA BAC SECURITE et SCP Laureau-Jeannerot, après autorisation du juge commissaire, la créance du salarié sur le passif de la SA BAC SECURITE sera fixée à la somme de 25. 000 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en application des dispositions de l'article L. 122-14-4 ancien du code du travail, devenu l'article L. 1235-2 nouveau du même code, dont les conditions sont réunies.

Sur l'indemnité de préavis :
Le salarié sollicite un complément d'indemnité de préavis en faisant valoir que l'employeur lui a versé la somme de 2. 762, 10 Euros à ce titre, outre un rappel de 314, 92 Euros, en ne tenant compte que de son seul salaire de base soit la somme de 1296, 41 Euros, complété par ses primes d'habillage et d'ancienneté alors qu'il convenait de prendre en compte les autres éléments constants de sa rémunération, tels que les heures supplémentaires, programmées en début de cycle, ainsi que les heures majorées de nuit et de dimanche, outre les primes de week end, soit un montant total de 1809, 58 Euros, représentant une indemnité de préavis due pour un montant de 3. 619, 16 Euros.
Il réclame en conséquence la différence.
Alors que le salarié devait percevoir, pendant sa période de préavis, en fut-il dispensé, une rémunération égale à celle qu'il aurait effectivement perçue s'il avait travaillé, ni la SCP Laureau-Jeannerot ni Me Ph. Z..., es qualités, ne contredisent utilement sa demande à laquelle il sera en conséquence fait droit, à titre de fixation de créance sur le passif de la SA BAC SECURITE.

Sur le rappel de salaires :
De même, la SCP Laureau-Jeannerot et Me Ph. Z..., ès qualités, ne font valoir aucun moyen de droit ou de fait de nature à contredire utilement la demande de rappel de salaires formée par le salarié pour les mois d'octobre et novembre 2005 qui réclame un rappel d'un montant de 264, 86 Euros brut, y compris les congés payés incidents.
Il sera en conséquence fait droit à la demande du salarié de ce chef.
Les sommes allouées au salarié à titre de fixation de créance sur le passif de la SA BAC SECURITE seront garanties par l'Unedic Délégation AGS CGEA IDF Est dans les limites du plafond applicable à la date de la rupture du contrat de travail, conformément aux dispositions de l'article 1143-11 ancien du code du travail, à l'exclusion de l'indemnité allouée ci-après à l'intéressé au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Me Ph. Z..., ès qualités de mandataire ad hoc de la SA BAC SECURITE, devra remettre au salarié une attestation Assedic rectifiée conformément à la présente décision,
Les circonstances de la cause et l'équité justifient l'application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile en faveur du salarié auquel il est en conséquence alloué à ce titre la somme de 1. 800 Euros pour l'ensemble de la procédure de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,
Met hors de cause la société D2M,
Donne acte à la SCP Laureau-Jeannerot, de son intervention volontaire en qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA BAC SECURITE, dont le mandataire ad hoc est Me Ph. Z...,
Dit que le licenciement de M. X... par la SA BAC SECURITE est sans cause réelle et sérieuse,
Fixe la créance de M. X... sur le passif de la SA BAC SECURITE aux sommes suivantes :
-25. 000 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-596, 35 Euros à titre de rappel d'indemnité de préavis, y compris les congés payés incidents,
-264, 86 Euros à titre de rappel de salaires pour les mois d'octobre et novembre 2005, y compris les congés payés incidents,
-1. 800 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'ensemble de la procédure de première instance et d'appel,
Ordonne à Me Ph. Z..., ès qualités de mandataire ad hoc de la SA BAC SECURITE, de lui remettre une attestation Assedic rectifiée conformément à la présente décision,

Dit que les sommes allouées au salarié seront garanties par l'Unedic Délégation AGS-CGEA IDF Est dans les limites légales du plafond applicable à la date de la rupture, à l'exclusion de l'indemnité allouée à l'intéressé au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0135
Numéro d'arrêt : 06/10582
Date de la décision : 18/12/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 13 juin 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-12-18;06.10582 ?
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