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18/11/2008 | FRANCE | N°07/03264

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0109, 18 novembre 2008, 07/03264


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

3ème Chambre-Section A

ARRÊT DU 18 NOVEMBRE 2008

(no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 03264

Sur renvoi après cassation du 7 Décembre 2006 d'un arrêt rendu le 25 Mars 2005 par la Cour d'Appel de PARIS (3 ème Ch. B) RG : 2004-07565 sur appel d'un jugement rendu le 21 Janvier 2004 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS (5ème Ch. 1ère section) RG : 2000-16623

DEMANDEURS ET DÉFENDEURS A LA

SAISINE

Maître Joseph Jérôme X..., mandataire judiciaire, en son nom personnel,
né le 11 Janvier 1939 à AJA...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

3ème Chambre-Section A

ARRÊT DU 18 NOVEMBRE 2008

(no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 03264

Sur renvoi après cassation du 7 Décembre 2006 d'un arrêt rendu le 25 Mars 2005 par la Cour d'Appel de PARIS (3 ème Ch. B) RG : 2004-07565 sur appel d'un jugement rendu le 21 Janvier 2004 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS (5ème Ch. 1ère section) RG : 2000-16623

DEMANDEURS ET DÉFENDEURS A LA SAISINE

Maître Joseph Jérôme X..., mandataire judiciaire, en son nom personnel,
né le 11 Janvier 1939 à AJACCIO
de nationalité française
demeurant...
BP 126
20177 AJACCIO CEDEX 01

représenté par Me Dominique OLIVIER, avoué à la Cour
assisté de Me Christophe BERARD, avocat au barreau de PARIS, toque : R 44
substituant Me Jean-Pierre FABRE, (Association FABRE-GUEUGNOT-SAVARY)

Maître Joseph Jérôme X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL QUID NOVI
demeurant...
BP 126
20177 AJACCIO CEDEX 01

représenté par Me Dominique OLIVIER, avoué à la Cour
assisté de Me Christophe BERARD, avocat au barreau de PARIS, toque : R 44
substituant Me Jean-Pierre FABRE, (Association FABRE-GUEUGNOT-SAVARY)

DEMANDERESSE ET DÉFENDERESSE A LA SAISINE

S. C. I. POGGIO D'OLMO
prise en la personne de son gérant
ayant son siège ORRENAGGIO
20169 BONIFACIO

représentée par la SCP FANET-SERRA, avoués à la Cour
assistée de Me Gaëtan BALESTRA, avocat au barreau de MARSEILLE

DÉFENDERESSE A LA SAISINE

S. A. BNP PARIBAS
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège 16 Boulevard des Italiens
75009 PARIS

représentée par la SCP GUIZARD, avoués à la Cour
assistée de Me Floriane DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1801
plaidant pour Me Fabrice POMMIER, toque T11
(Association ADER AMIGUES et JOLIBOIS)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 octobre 2008, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame CABAT, Présidente, et Monsieur LE DAUPHIN, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire,

Un rapport a été présenté à l'audience conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Chantal CABAT, présidente
Monsieur Henri LE DAUPHIN, conseiller
Madame Marie-Paule MORACCHINI, conseillère

Greffière, lors des débats : Madame Marie-Claude HOUDIN

MINISTÈRE PUBLIC :
L'affaire a été communiquée au ministère public,

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE
-rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame CABAT, présidente, et par Madame HOUDIN, greffière.

Vu le jugement rendu le 21 / 1 / 2004 par le tribunal de grande instance de Paris qui, dans ses dispositions essentielles et en ordonnant l'exécution provisoire, a
-fixé à 404. 980, 81 € le montant de l'indemnité d'assurance à la charge des souscripteurs du Lloyd's de Londres par application de la règle proportionnelle de prime,
- condamné les souscripteurs du Lloyd's de Londres, représentés par leur mandataire général, la société Lloyd's France, à verser :
o à la BNP Paribas la somme de 348. 037, 25 € portant intérêts au taux légal à compter du 8 / 10 / 2002,
o à la SCI Poggio d'Olmo la somme de 56. 943, 56 € portant intérêts au taux légal à compter de la demande,
- condamné Maître X... à titre personnel à verser à la SCI Poggio d'Olmo la somme de 404. 980, 81 € portant intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement ;

Vu l'arrêt rendu le 25 / 3 / 2005 par la cour d'appel de Paris qui a infirmé le jugement susdit, et statuant à nouveau, a dit le bail du 21 / 11 / 1995 régulièrement résilié par Maître X..., liquidateur de la société Quid Novi, avant la survenance du sinistre, a dit la SCI Poggio d'Olmo déchue du bénéfice du contrat d'assurance, en conséquence a débouté la SCI Poggio d'Olmo, la BNP Paribas de l'ensemble de leurs demandes formées à l'encontre de Maître X..., liquidateur de la société Quid novi, et des souscripteurs des Lloyd's de Londres ;

Vu l'arrêt en date du 7 / 12 / 2006 par lequel la Cour de cassation a cassé et annulé en ses seules dispositions déboutant la SCI Poggio d'Olmo et la BNP Paribas de leurs demandes formées à l'encontre de Maître X... pris à titre personnel l'arrêt susdit et a remis en conséquence sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le dit arrêt et pour être fait droit, les a renvoyés devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Vu les conclusions signifiées le 6 / 10 / 2008 par Maître Joseph X..., mandataire judiciaire, pris en son nom personnel, et par Maître Joseph X..., pris en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Quid Novi, appelants et demandeurs à la saisine, qui concluent à l'infirmation du jugement déféré, demandent à la cour de déclarer irrecevables car nouvelles en cause d'appel, les demandes de la SCI Poggio d'Olmo et de la BNP Paribas, de les débouter de toutes leurs demandes, fins et conclusions, de condamner la BNP Paribas à lui " restituer les sommes réglées (par lui) en qualité de tiers saisi en exécution du jugement du juge de l'exécution d'Ajaccio du 6 / 5 / 2008 avec intérêts à compter du règlement, subsidiairement à compter de la signification des conclusions récapitulatives (signifiées le 28 / 8 / 2008) et très subsidiairement à compter de la signification à la BNP Paribas du (présent) arrêt, plus subsidiairement rappeler que cette restitution est de droit en cas d'infirmation, en toutes hypothèses, de condamner in solidum ou l'une à défaut de l'autre, la SCI Poggio d'Olmo et la BNP Paribas à chacune la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile " ;

Vu les conclusions signifiées le 13 / 10 / 2008 par la SCI Poggio d'Olmo (la SCI), intimée et appelante incidente, demanderesse à la saisine, qui demande à la cour de confirmer le jugement entrepris " en ce qu'il a retenu que Maître X... avait personnellement commis une faute génératrice d'un préjudice à (son égard) et débouter ainsi Maître X... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, en l'état de la mise hors de cause de l'assureur, (de) faire droit à l'appel incident et (de) condamner Maître X..., personnellement à (lui) payer... au titre de la réparation de son préjudice, sur la valeur de l'immeuble à reconstruire la somme globale de 1. 100. 000 €, sur les frais de démolition et de déblais la somme de 136. 168, 35 €, sur l'indisponibilité des locaux et la perte de loyers afférentes à la location et les charges depuis le sinistre jusqu'au 30 / 9 / 2008, la somme de 529. 532 € (somme à parfaire) et le remboursement de la taxe foncière depuis le 15 / 4 / 2000 soit la somme de 67. 084 €, sur les produits financiers revendiqués du chef de la perte des loyers précités la somme de 14. 493 €, sur la prise en charge par (elle-même) au titre du prêt consenti par la BNP Paribas à la date du sinistre la somme principal et intérêts de 287. 096, 10 €, sur la prise en charge par Maître X... des sommes revenant à la BNP, soit la somme de 232. 609 € (somme à parfaire), (enfin de) condamner Maître X... personnellement à (lui) payer la somme de 30. 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile " ;

Vu les conclusions signifiées le 9 / 10 / 2008 par la BNP Paribas (la BNP), intimée et appelante incidente, défenderesse à la saisine, qui conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a retenu la responsabilité de Maître X..., à sa condamnation à titre personnel au paiement de la somme de 459. 229, 71 € outre intérêts au taux de 9, 04 % à compter du 27 / 1 / 2007 et de celle de 9. 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE

Considérant que, par acte sous seing privé du 21 / 11 / 1995, la SCI a donné à bail commercial à la société Quid Novi, qui y exploitait une discothèque sous l'enseigne Amnesia, un terrain sur lequel était édifié un centre de loisirs, situé à Bonifacio, moyennant le règlement d'un loyer de 300. 000 FF HT par an ; que le preneur s'est engagé aux termes de l'acte, à faire assurer les lieux contre l'incendie, le dégât des eaux, les explosions et tous les autres risques locatifs, le bailleur et le preneur renonçant réciproquement à tout recours qu'ils seraient en droit d'exercer l'un contre l'autre ;

Considérant que, par acte authentique du 21 / 5 / 1996, la BNP a consenti à la SCI un prêt d'un montant de 228. 673, 53 € pour financer des travaux sur le bâtiment ; que dans l'acte, la SCI s'est engagée à assurer l'immeuble contre tous les risques de destruction assurables pour un montant égal à sa valeur, l'emprunteur déléguant en outre à la banque l'indemnité d'assurance en cas de sinistre ;

Considérant que la société Quid Novi a souscrit le 12 / 5 / 1999 un contrat d'assurances, pour son compte et celui de la société propriétaire, auprès de la compagnie Lloyd's de Londres, par l'intermédiaire de la société de courtage Transconseil assurances, pour une valeur à neuf de 5. 313. 000 FF ; qu'une note de couverture a été établie le 1 / 9 / 1999, aux termes de laquelle le bien immobilier était assuré pour la période du 11 / 5 / 1999 au 10 / 5 / 2000 ;

Considérant que le tribunal de commerce d'Ajaccio a, par jugement en date du 17 / 5 / 1999, ouvert, sur assignation de l'Urssaf de la Corse, une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Quid Novi ; que cette même juridiction a, le 31 / 1 / 2000, prononcé la liquidation judiciaire de la société et désigné Maître X..., jusque là représentant des créanciers, en qualité de liquidateur judiciaire ;

Considérant que le 15 / 4 / 2000, un attentat à l'explosif a détruit la quasi totalité du bien immobilier ; que le liquidateur judiciaire a déclaré le sinistre le 17 / 4 / 2000 ; que l'assureur a refusé de prendre le sinistre en charge, du fait qu'à la suite du licenciement par le liquidateur des gardiens chargés de veiller à la sécurité des lieux, devait s'appliquer la clause de déchéance prévue au contrat en cas de méconnaissance de l'obligation faite à l'assuré de maintenir un gardiennage ininterrompu 24 heures sur 24 ; que la SCI a assigné les souscripteurs du Lloyds de Londres et Maître X..., ès qualités de liquidateur de la société Quid Novi, devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir condamner la compagnie d'assurances à lui verser l'indemnité prévue au contrat ainsi que des dommages-intérêts ; qu'elle a ensuite fait délivrer des assignations à l'assureur et à Maître X... à titre personnel pour obtenir du tribunal la condamnation de Maître X... à lui verser la somme de 5. 313. 000 FF à titre d'indemnisation ; que la jonction des procédures a été ordonnée ; que la BNP est intervenue volontairement à l'instance ; que par le jugement déféré, le tribunal a rejeté les demandes de nullité du contrat d'assurances, a dit que la déchéance du contrat n'était pas encourue, a fait application de la règle proportionnelle de primes et dit que l'assureur devrait verser une indemnité réduite de moitié à celle prévue au contrat, a estimé que Maître X... avait commis une faute en s'abstenant de déclarer l'aggravation du risque résultant du licenciement des deux gardiens à la compagnie d'assurances alors que le bail n'était pas résilié, que cette faute était en relation directe avec le dommage consistant pour la SCI à ne pouvoir prétendre qu'à la moitié de l'indemnisation prévue au contrat et l'a en conséquence condamné à réparer le préjudice, en acquittant la différence entre les sommes versées par l'assureur et celles qui l'auraient été si le contrat avait été normalement exécuté, enfin a condamné l'assureur à payer à la BNP la somme de 348. 037, 25 € ; que la cour d'appel de Paris, par arrêt du 25 / 3 / 2005, a infirmé le jugement, a dit que le bail avait été résilié le 7 / 4 / 2000, a jugé que Maître X... n'avait commis aucune faute et que la compagnie d'assurances était bien fondée à opposer la déchéance du bénéfice du contrat à la SCI ; qu'un pourvoi a été formé par la BNP et la SCI ; que la cour de cassation a censuré la cour d'appel qui, ayant conclu à l'absence de faute de Maître X... et constaté que le bail avait été résilié en application de l'article L 621-28 du code de commerce, alors que les clefs n'avaient pas été remises de sorte qu'il n'était pas établi que la SCI avait recouvré sur son bien la jouissance qui lui aurait permis d'en assurer la sauvegarde, n'avait pas donné de base légale à sa décision ; que la cour est en conséquence saisie de l'action en responsabilité et indemnisation que la SCI et la BNP ont dirigé contre Maître X... à titre personnel ;

Considérant que la BNP sollicite la condamnation de Maître X... au paiement de dommages-intérêts, dont le montant correspond à sa créance à l'encontre de la SCI, au titre de l'acte de prêt signé par Mademoiselle Thiebaud D..., gérante de la SCI, et
caution ; qu'il est en effet prévu à la page 12 de l'acte que " tant que l'emprunteur et la caution seront susceptibles d'être débiteurs, les biens donnés en gage ainsi que les immeubles par destination devront être assurés contre tous risques de destruction assurables pour un montant égal soit à la valeur de reconstruction à neuf soit à leur valeur de remplacement soit à leur valeur vénale... En cas de sinistre, total ou partiel, les sommes dues par la compagnie d'assurance aux termes de la dite police sont dès maintenant attribuées à la banque qui pourra les encaisser sans recours et hors la présence de l'emprunteur et de la caution et ce jusqu'à due concurrence de la créance en principal, intérêts, frais et accessoires d'après l'évaluation présentée par elle " ; que la BNP estime qu'ayant reçu mission de gérer le patrimoine de son administrée, le liquidateur devait respecter les obligations découlant des deux contrats, de bail et d'assurances, qui n'avaient pas été résiliés, qu'il avait l'obligation d'assurer les lieux loués, la charge des risques résultant de la perte de l'immeuble pesant sur le locataire jusqu'à la restitution des clefs, laquelle n'était pas intervenue avant la survenance du sinistre ; qu'elle ajoute que le liquidateur n'a informé ni la SCI ni la compagnie d'assurances du licenciement des gardiens et a ainsi empêché toute possibilité du maintien du contrat d'assurances jusqu'à la libération effective des locaux, l'empêchant ainsi de bénéficier de la clause de délégation d'assurance prévue au contrat ;

Considérant que la SCI soutient, quant à elle, que le liquidateur n'a pas, entre la date de résiliation du bail et la date du sinistre, spontanément manifesté son intention de restituer les lieux à la SCI ; que l'absence de restitution des lieux par le liquidateur n'a pas permis à la société bailleresse de recouvrer sur son bien la jouissance qui lui aurait permis d'en assurer la sauvegarde ; que Maître X... étant toujours gardien des lieux au moment du sinistre il aurait dû veiller à son obligation de garantir la conservation des biens confiés ; que cette faute justifie qu'il soit condamné à réparer l'entier préjudice subi tant en raison de la dégradation des locaux qu'en raison de leur indisponibilité ;

Considérant que la responsabilité du liquidateur est engagée sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil ; que les demandeurs doivent établir la réunion de trois conditions, l'existence de la faute, d'un dommage, qui ne peut en l'espèce que consister que dans la perte d'une chance, et d'un lien de causalité entre les deux premiers éléments ;

Considérant que le liquidateur a procédé au licenciement des deux gardiens en application de la décision prononçant la liquidation judiciaire ; qu'il a résilié le bail, par lettre du 31 / 3 / 2000 reçue le 7 / 4 / 2000, en application de l'article L 621-28 du code de commerce, étant dans l'impossibilité d'assurer le paiement des loyers ; que Maître X... a ainsi exercé les pouvoirs qui lui sont conférés par la loi ; que compte tenu des dispositions légales, de la totale impécuniosité de la procédure collective et des intérêts en cause, tant le licenciement des salariés que la résiliation du bail s'imposaient ; que ces décisions ne peuvent en elles-mêmes être constitutives d'une faute susceptible d'engager la responsabilité du liquidateur ;

Considérant que seuls peuvent être incriminés, le cas échéant, le retard apporté par le liquidateur à la restitution des lieux ainsi que la dissimulation d'informations essentielles qui auraient permis à la bailleresse de conserver le bénéfice du contrat d'assurance ou d'assurer la sauvegarde du bien ;

Considérant qu'il sera tout d'abord relevé que la bailleresse, lorsqu'elle a été informée de la résiliation du bail, n'a effectué aucune démarche pour entrer en possession des lieux, en réclamant les clefs ou en procédant à un changement de serrure ; que surtout, les éléments particuliers de l'espèce doivent être mentionnés ; qu'ils établissent que la SCI et la société Quid Novi étaient des entités juridiques très imbriquées sinon fictives, qui s'articulaient autour d'une seule et même personne, Monsieur Paul E..., qui était d'une part directeur et gérant de fait de la société Quid Novi, et d'autre part porteur de parts majoritaire de la SCI et gérant de fait de la SCI ;

Considérant en effet tout d'abord qu'aux termes du contrat lui-même, et selon la clause " désignation des lieux loués ", la SCI a donné à bail, outre le terrain, un bâtiment à usage de centre de loisirs ; que ce bâtiment était livré à l'état brut, le locataire s'engageant à y réaliser tous les aménagements, notamment l'électricité, la plomberie, les carrelages et cloisonnements, les boiseries, les peintures, les enduits ; que, contrairement à ces dispositions contractuelles et postérieurement au bail, c'est la SCI qui, pour assurer le financement des travaux à réaliser sur l'immeuble, a signé le contrat de prêt avec la BNP ; qu'il résulte du réquisitoire du procureur de la République d'Ajaccio (pièce 20 de Maître X...), qui a requis le renvoi de Monsieur E... devant le tribunal correctionnel du chef de banqueroute par détournement d'une partie des recettes de l'Amnesia, faits qui lui ont valu d'être condamné à la peine d'un an d'emprisonnement avec délivrance d'un mandat d'arrêt, 30. 000 € d'amende ainsi qu'à une interdiction de gérer de 5 ans, que la société Quid Novi supportait des charges incombant à la SCI ; que l'état des créances établi par le liquidateur démontre que la société était redevable d'une somme de 118. 733, 78 € au titre des loyers, pour un passif déclaré de 3. 658. 621, 88 € ; qu'il n'est pas contesté que la SCI n'a engagé aucune action pour obtenir paiement de ce qui lui était dû ; que la confusion est si grande entre les deux entités juridiques qu'un des deux gardiens licenciés, Monsieur Stéphane F..., écrit dans son attestation qu'il a été embauché par M. Paul E... (comme le second gardien) le 1 / 6 / 1995 et a successivement travaillé pour la SCI et puis pour la société Quid Novi (pièce 13 de Maître X...) ;

Considérant ensuite que Monsieur Paul E..., agissant à la fois pour la société Quid Novi et pour la SCI (pièce 9 de Maître X...), a établi et signé tous les documents relatifs au contrat d'assurance ; que c'est ainsi qu'il a, tout d'abord, rempli (pièce 8 de Maître X...) le 23 / 3 / 1999, le questionnaire d'assurance multirisque où il a indiqué, de façon significative, en cochant les cases, que la discothèque était exploitée par une EURL dont le nom était Sarl Quid Novi ; qu ‘ il a signé le 5 / 5 / 1999, engageant ainsi à la fois la SCI et la société Quid Novi, l'ordre ferme exclusif, précédant la note de couverture ; qu'il doit être relevé qu'à l'époque de la conclusion de ce contrat, la société Quid Novi était sous le coup d'une assignation en redressement judiciaire délivrée le 19 / 10 / 1998 par l'Urssaf de la Corse et que non seulement cette situation a été dissimulée à l'assureur mais que Monsieur E... a affirmé dans l'acte, que " l'assuré n'(était) pas et n'(était) pas en situation d'être l'objet d'une procédure de redressement judiciaire " " ; que cette situation n'a été révélée que courant août 1999 et a donné lieu à la signature d'un avenant les 10 et 17 août 1999, la compagnie d'assurance écrivant le 10 / 8 / 1999, qu'elle avait pris acte du redressement judiciaire de la société Quid Novi causé par le non respect d'un accord Urssaf (pièce 2 de la BNP) ; que M. E..., représentant à la fois la société Quid Novi et la SCI, a signé les notes de couvertures successives ainsi que le contrat d'assurance lui-même ; que dès l'origine, figurait à titre de condition particulière que devait être maintenu dans les lieux assurés un gardiennage ininterrompu 24 heures / 24 ;

Considérant que l'obligation de gardiennage permanent était connue de la SCI qui était signataire du contrat d'assurances ; que le liquidateur n'a pas failli à une quelconque obligation d'information ; que la SCI, qui avait le même dirigeant de fait que la société Quid Novi, d'une part, a été nécessairement informée en temps réel des décisions prises dans le cadre de la procédure collective et notamment de la décision prise par le liquidateur de licencier les gardiens et d'autre part, n'a jamais été privée de la jouissance des lieux loués auxquels elle a toujours eu accès puisqu'elle disposait des clefs ; que ce fait n'est pas contesté par la SCI qui explique que M. E... les détenait en sa qualité de directeur de la discothèque ; qu'il est confirmé par l'huissier de justice chargé le 7 / 7 / 1999 de faire l'inventaire, lequel (pièce no15 de Maître X...) précise que Monsieur E... qui a assisté à l'acte, détenait les clefs initialement et les a conservées après l'établissement de l'inventaire ; qu'il appartenait donc à la SCI, puisqu'elle connaissait tant le licenciement des gardiens que la décision du liquidateur de ne pas poursuivre le contrat, de prendre immédiatement ses dispositions afin de faire assurer ses locaux comme bon lui semblait ;

Considérant en conséquence qu'aucune faute n'est caractérisée à l'égard de Maître X... ; que le jugement déféré sera donc infirmé et la SCI et la BNP seront déboutées de leurs demandes d'indemnisation ;

Considérant que la BNP a fait pratiquer une saisie attribution, en vertu du jugement déféré qui est revêtu de l'exécution provisoire, sur les sommes dues par Maître X... à la SCI et ce pour obtenir paiement de sa créance constatée par acte notarié du 21 / 5 / 1996 ; que par jugement en date du 6 / 5 / 2008, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Ajaccio a, au visa des articles 24 et 42 de la loi du 9 / 7 / 1991, condamné Maître X... à verser à la BNP la somme de 404. 980, 81 € avec intérêts au taux légal à compter du 24 / 1 / 2004 jusqu'au jour du paiement et à concurrence de la somme de 460. 038, 21 € ; qu'il n'entre pas dans les pouvoirs de la cour devant laquelle le dit jugement n'a pas été déféré, ni d'ordonner la restitution des sommes ni de s'exprimer sur les conséquences du présent arrêt sur cette décision ; que Maître X... sera débouté de ces demandes ;

Considérant que, compte tenu du sort réservé au recours, la SCI et la BNP ne peuvent qu'être déboutées de leur demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure
civile ; qu'il apparaît, au contraire, conforme à l'équité de condamner la SCI au paiement de la somme de 5000 € à Maître X..., pris en son nom personnel ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné Maître X... à titre personnel à verser à la SCI Poggio d'Olmo la somme de 404. 980, 81 € portant intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,

Statuant à nouveau,

Déboute la SCI Poggio d'Olmo et la BNP Paribas de leur demande d'indemnisation dirigée contre Maître X... à titre personnel,

Condamne la SCI Poggio d'Olmo à payer la somme de 5000 € à Maître X... à titre personnel,

Rejette toutes autres demandes des parties,

Condamne la SCI Poggio d'Olmo aux dépens de première instance et d'appel, comprenant ceux de l'arrêt cassé, et admet les avoués concernés au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

M. C HOUDIN C. CABAT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0109
Numéro d'arrêt : 07/03264
Date de la décision : 18/11/2008

Références :

ARRET du 07 avril 2010, Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 7 avril 2010, 08-21.439, Inédit

Décision attaquée : Cour de cassation, 07 décembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-11-18;07.03264 ?
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