Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
8ème Chambre - Section B
ARRÊT DU 13 NOVEMBRE 2008
(no ,5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 07/17470
08/01937
Décision déférées à la Cour : Jugements des 02 Octobre 2007 et 15 janvier 2008 rendus par le juge de l'exécution du TGI de BOBIGNY - RG no 07/07182
(Madame X...)
APPELANTE et INTIMÉE
Madame Annie Y... Z...
née le 17 mars 1959 à Léopoldville (Congo Belge)
de nationalité française
demeurant ...
représenté par la SCP Anne-Marie OUDINOTet Pascale FLAURAUD, avoués à la Cour
INTIMÉE et APPELANTE
SOCIÉTÉ CREDIT FONCIER DE FRANCE, SA À DIRECTOIRE etCONSEIL DE SURVEILLANCE
représentée par le Président du Directoire
ayant pour siège ...
représentée par la SCP BASKAL - CHALUT-NATAL, avoués à la Cour
assistée de Maître Vincent A..., avocat plaidant pour la SCP HOCQUARD, avocats au barreau de PARIS, toque : P 87
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 9 octobre 2008, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Annie BALAND, présidente,
Madame Alberte ROINÉ, conseillère
Madame Martine FOREST-HORNECKER, conseillère
qui en ont délibéré
GREFFIÈRE :
lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Sandra B...
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Annie BALAND, présidente, et par Madame Sandra B..., greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Madame Annie Z... a interjeté appel d'un jugement, en date du 2 octobre 2007, par lequel le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bobigny :
- dit que le montant de la créance de la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE est de 214.505,26 euros selon compte arrêté au 5 mars 2007 outre les intérêts au taux de 4,70 %,
- ordonne la vente forcée du bien immobilier lui appartenant sis à Stains à l'audience du 8 janvier 2008 sur la mise à prix de 100.000 euros,
- réserve les dépens jusqu'à la réalisation de la vente.
Par dernières conclusions du 7 février 2008, Madame Annie Z... demande d'infirmer le jugement et de :
- vu le jugement du 15 janvier 2008 du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bobigny qui a déclaré caduc le commandement de payer valant saisie immobilière du 3 avril 2007 ayant servi de fondement à la poursuite de la vente, dire n'y avoir lieu d'ordonner la vente judiciaire du bien.
Par dernières conclusions du 19 juin 2008, la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE demande de :
- confirmer le jugement,
- condamner Madame Annie Z... à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle expose qu'elle a interjeté appel du jugement prononçant la caducité du commandement de payer valant saisie immobilière, que si la Cour y fait droit, elle ordonnera le report de la vente, le commandement n'étant pas caduc.
La société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE a interjeté appel d'un jugement, en date du 15 janvier 2008, par lequel le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bobigny :
- rejette ses prétentions tendant au report de la vente ou à la suspension de l'instance,
- déclare caduc le commandement de payer valant saisie immobilière en date du 3 avril 2007,
- ordonne la radiation du commandement,
- la condamne aux dépens de la procédure de saisie immobilière.
Par dernières conclusions du 4 juillet 2008, la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE demande d'infirmer le jugement et de :
- ordonner le report de la vente à une date ultérieure,
- subsidiairement, dire que les frais de saisie engagés seront supportés par Madame Annie Z... et la condamner à les payer,
- condamner Madame Annie Z... à lui payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que la force majeure au sens de l'article 61 du décret du 27 juillet 2006 est suffisamment caractérisée dès lors que le report de la vente est gouverné ou par l'intérêt supérieur du débiteur ou par celui du créancier, que l'absence de vente au jour fixé était favorable à Madame Annie Z... puisqu'il lui ménageait le plein exercice de la voie de recours exercée, que les conséquences d'une infirmation éventuelle étaient imprévisibles puisque dépendant d'une part d'aléa judiciaire et irrésistibles du fait de la force exécutoire attachée à l'arrêt susceptible d'être rendu, que l'abstention du créancier poursuivant, favorable à la débitrice justifie que celle-ci supporte les frais et dépens déjà exposés.
Par dernières conclusions du 18 septembre 2008, Madame Annie Z... demande de :
- déclarer la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE irrecevable en ses demandes, formalisées tardivement par conclusions du 19 novembre 2007,
- confirmer le jugement,
- condamner la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE à lui payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE a présenté sa demande après le délai de 15 jours prévu à l'article 6 du décret du 27 juillet 2006, alors que son appel date du 16 octobre 2007, que l'exercice de voies de recours n'a aucun caractère d'extériorité nécessaire à la force majeure, que la décision de voir reporter la vente résulte du fait de la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE qui n'a pas fait procéder à l'affichage de la vente, que la caducité du commandement entraîne l'anéantissement de la procédure de saisie immobilière, que le coût de cette procédure doit rester à la charge de la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE qui préservait ses propres intérêts et non ceux de la débitrice en se garantissant des risques d'une éventuelle infirmation.
SUR CE, LA COUR :
qui se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, à leurs écritures et à la décision déférée,
Sur la procédure :
Considérant que ces appels concernent deux jugements intervenus entre les mêmes parties, ont un lien de connexité tel qu'il apparaît d'une bonne administration de la justice, en l'occurrence, de statuer par un seul et même arrêt, en joignant les procédures ;
Sur la recevabilité de la demande de report de l'audience d'adjudication :
Considérant que Madame Annie Z... soutient que la demande de report de la vente est irrecevable en application des articles 6,7 et 8 du décret du 27 juillet 2006 ; que ces textes régissent les contestations et demandes incidentes qui doivent être formées pour l'audience d'orientation ou qui devraient l'être, ainsi que les contestations et demandes sur les actes postérieurs à celle-ci ; que le délai de 15 jours prévu à l'article 6
pour former la contestation ou demande incidente à compter de la signification de l'acte, s'applique à ces contestations postérieures à l'audience d'orientation ; qu'il ne peut concerner la demande de report de la date d'adjudication qui est fixée par le juge et qui n'est pas un acte de la procédure de saisie immobilière, pas plus que l'appel ; que la demande est recevable ;
Sur la demande de report de la vente :
Considérant que l'article 61 du décret du 27 juillet 2006 dispose que la vente forcée ne peut être reportée que pour un cas de force majeure ou à la demande de la commission de surendettement ; que le texte est clair et modifie expressément la règle en vigueur dans la législation antérieure ; que, si les nouveaux textes ne tiennent pas compte de l'exercice de l'appel et de son caractère non suspensif de l'exécution en application de l'article 37 de la loi du 9 juillet 1991 qui confère au jugement du juge de l'exécution un caractère exécutoire par provision de plein droit, il ne peut être retenu que l'appel, qui n'est pas extérieur aux parties en cause et au litige, aurait des conséquences imprévisibles et irrésistibles en raison de l'aléa judiciaire que représente pour les parties une possibilité d'infirmation de la décision de première instance ; que la décision de justice, prise au regard des textes applicables, des faits et demandes soumis à la juridiction, si elle peut être erronée, et pour cela susceptible de recours, ne saurait être un pur aléa, le pouvoir discrétionnaire du juge étant exclu en la matière ; que l'incertitude du sens de la décision à venir peut naître, pour le créancier, de son appréciation, plus ou moins positive, du bien fondé de la procédure entreprise ; que, si la sanction de l'absence de réquisition de vente, la caducité du commandement de payer valant saisie immobilière, peut paraître lourde au créancier, qui, se prémunissant, certes contre la possibilité d'une infirmation, a laissé à l'appel du débiteur sa valeur en demandant le report de la vente sans même attendre de connaître la date de la décision de la juridiction d'appel, l'appel ne peut être considéré au regard de ses conséquences comme un cas de force majeure ; que la demande de report de la date de l'audience d'adjudication doit être rejetée ; que la caducité du commandement de payer valant saisie immobilière est la conséquence du fait que le créancier poursuivant n'a pas sollicité la vente ;
Considérant que l'article 60 du décret du 27 juillet 2006 dispose qu'en ce cas, le créancier poursuivant défaillant conserve à sa charge l'ensemble des frais de saisie engagés sauf décision du juge spécialement motivée ; que la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE ne fait état d'aucune circonstance particulière qui justifierait de modifier la charge des frais de la saisie, en soutenant qu'elle a ainsi fait une faveur à Madame Z..., alors que celle-ci exerçait un droit et que la banque se préservait des risques de la poursuite de la procédure ;
Considérant qu'à défaut d'autre demande ou contestation formée par Madame Z... sur le jugement d'orientation, il y a lieu de constater que le commandement de payer valant saisie immobilière étant déclaré caduc, il n'y a plus à se prononcer sur sa validité ; qu'en raison de l'évolution du litige, intervenue alors que plusieurs renvois de l'instance d'appel du jugement d'orientation ont été accordés sur demandes de Madame Z..., ce qui a mené à la jonction intervenue, ce jugement ne peut être confirmé en ce qu'il ordonnait la vente forcée du bien immobilier ; qu'il y a lieu de constater que le commandement de payer valant saisie immobilière ayant été déclaré caduc, il n'y a plus lieu d'ordonner la vente forcée ;
Considérant que le jugement du 2 octobre 2007 doit être infirmé et celui du 15 janvier 2008 doit être confirmé ;
Considérant que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
Prononce la jonction des dossiers no07/17470 et 08/01937, sous le premier numéro,
Confirme le jugement du 15 janvier 2008,
Infirme le jugement du 2 octobre 2007,
Et statuant à nouveau,
Constate qu'il n'y a plus lieu d'ordonner la vente forcée du bien immobilier,
Dit que les frais de la saisie immobilière resteront à la charge de la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE,
Condamne la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE aux dépens d'appel dont le montant pourra être recouvré selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,