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13/11/2008 | FRANCE | N°07/06748

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0135, 13 novembre 2008, 07/06748


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre C

ARRET DU 13 Novembre 2008

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/06748 - MPDL

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Juillet 2007 par le conseil de prud'hommes de PARIS section activités diverses RG no 06/08545

APPELANTE

1o - SAS SECURISPACE ENERGIE

32 rue de Paradis

75010 PARIS

représentée par Me Christine ANTONI, avocat au barreau de PARIS, toque : C 2456

INTIMEE

S

2o - Madame Kadiatou X...

...

93270 SEVRAN

comparant en personne, assistée de M. Bakary Y... (Délégué syndical ouvrier)

3o - Me Gérald...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre C

ARRET DU 13 Novembre 2008

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/06748 - MPDL

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Juillet 2007 par le conseil de prud'hommes de PARIS section activités diverses RG no 06/08545

APPELANTE

1o - SAS SECURISPACE ENERGIE

32 rue de Paradis

75010 PARIS

représentée par Me Christine ANTONI, avocat au barreau de PARIS, toque : C 2456

INTIMEES

2o - Madame Kadiatou X...

...

93270 SEVRAN

comparant en personne, assistée de M. Bakary Y... (Délégué syndical ouvrier)

3o - Me Gérald AYACHE - Mandataire liquidateur de la Société DE CONSEIL ET DE SECURITE

...

94165 SAINT MANDE CEDEX

représenté par Me Emmanuel WEILL, avocat au barreau de PARIS, toque : D1294

PARTIE INTERVENANTE :

4o - UNEDIC AGS-CGEA IDF EST

...

92309 LEVALLOIS-PERRET CEDEX,

représenté par Me Maryse CAUSSIN ZANTE, avocat au barreau de PARIS, toque : R297

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Septembre 2008, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Pierre DE LIEGE, Présidente, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Marie-Pierre DE LIEGE, président

Mme Irène LEBE, conseiller

Mme Hélène IMERGLIK, conseiller

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

- signé par Mme Marie-Pierre DE LIEGE, présidente et par Mlle Chloé FOUGEARD, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LES FAITS ET LA PROCÉDURE :

Mme Kadiatou X... a été engagée par contrat à durée indéterminée par la société Arcade Sécurité le 2 novembre 2004 en qualité d'agent de sécurité.

Le 1er novembre 2005, à la suite de la reprise du marché LSG Sky Chefs, par la SAS Securispace Energie, son contrat de travail a été transféré, en qualité d'agent d'exploitation niveau 2, échelon 2 coefficient 120, tous les salariés travaillant sur le site ayant été repris.

Le 14 mars 2006, la société LSG Sky Chefs envoyait un courrier à la SAS Securispace Energie lui indiquant que faute de conformité à ses différentes demandes, la situation entre elles devenait inacceptable, notamment suite aux manquements constatés par la gendarmerie lors des incidents du 21 février 2006. Dans ce courrier LSG Sky Chefs indiquait qu'elle acceptait la rupture du contrat de travail demandée par la SAS Securispace Energie.

Le 1er avril 2006, le contrat de sécurité du site LSG Sky Chef était attribué à la Société de Conseil de Sécurité, à laquelle la SAS Securispace Energie avait transmis le 28 mars 2006, selon l'accord du 5 février 2002 relatif à la reprise du personnel, les dossiers des salariés concernés par ce transfert.

Le 1er avril 2006, la Société de Conseil de Sécurité convoquait Mme Kadiatou X... à un entretien relatif à la procédure de reprise, entretien fixé au 5 avril 2006.

Le 7 avril 2006 la Société de Conseil de Sécurité adressait à Mme Kadiatou X... une lettre rédigée en ces termes : «...Conformément à la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité, et dans le cadre du transfert, nous ne pouvons procéder à votre reprise et vous affecter ni sur le site LSG Sky Chefs, ni sur le site aéroportuaire, faute d'obtention du double agrément engendré par votre nationalité étrangère. De ce fait nous sommes contraints de vous mettre à disposition de votre entreprise...».

La Société de Conseil de Sécurité opérait de même et pour le même motif pour deux autres salariés concernés par la même reprise.

Le même jour, la Société de Conseil de Sécurité informait la SAS Securispace Energie en ces termes : «ces trois agents (dont Mme X...) ont refusé l'affectation sur le site que nous leur avons proposé».

Le 12 avril 2006 la SAS Securispace Energie convoquait Mme Kadiatou X... à un entretien à licenciement préalable fixé au 19 avril.

Le licenciement était ensuite notifié par lettre recommandée avec avis de réception du 21 avril 2006 dans laquelle il était dit : «suite à la perte du site LSG Sky Chefs, vous avez refusé la nouvelle affectation qui vous a été proposée, celle-ci n'étant pas considérée comme une modification substantielle de votre contrat de travail...», faisant ainsi référence aux termes de l'accord du 5 février 2002, qui autorise alors le licenciement.

Devant l'échec d'une solution amiable, Mme Kadiatou X... a saisi le conseil de prud'hommes le 26 juillet 2006, de demandes dirigées contre la SAS Securispace Energie et la Société de Conseil de Sécurité, pour contester son licenciement, solliciter sa réintégration dans l'entreprise ainsi qu'une indemnité compensatrice de préavis et des dommages-intérêts pour rupture abusive.

Par décision du 13 juillet 2007, le conseil de prud'hommes de Paris, section activités diverses, chambre 5, à tout d'abord relevé que la SAS Securispace Energie n'avait pas fait le nécessaire pour obtenir et fournir les documents utiles à LSG Sky Chefs, ce qui lui aurait permis de conserver le marché, se désintéressant ainsi du sort de ses employés, puis étant au courant, lors de l'entretien individuel, que la salariée n'avait pas refusé son transfert, avait tout de même procédé à son licenciement sans chercher la vérité sur les causes du refus de reprise.

Il a également relevé que la Société de Conseil de Sécurité avait indiqué à la salariée ne pouvoir la reprendre du fait de sa nationalité étrangère (Malienne) mais parallèlement écrit à la SAS Securispace Energie que la salariée avait refusé son transfert.

Indiquant que la Société de Conseil de Sécurité n'avait pas rapporté la preuve que le double agrément était nécessaire pour le poste occupé par l'intéressée, celle-ci travaillant en zone aéroportuaire mais en dehors de la zone réservée, mais n'avait pas non plus rapporté la preuve qu'elle avait proposé un autre poste identique ou équivalent, le conseil de prud'hommes a dit le licenciement abusif et, les deux sociétés n'ayant pas respecté les termes de l'accord du 5 mars 2002, les a condamnées solidairement à payer à Mme Kadiatou X... les sommes suivantes :

- 1.300 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 130 euros pour congés payés afférents avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation ;

- 5.500 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive ;

- 600 euros pour frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La SAS Securispace Energie a régulièrement formé le présent appel contre cette décision. La société de Conseil et de Sécurité a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 21 janvier 2008 et l'AGS-CGEA IDF Est a été appelée en la cause.

La SAS Sécurispace Energie indique que la société LSG Sky Chefs, "entreprise connue", ayant pour activité la restauration aérienne est située en zone aéroportuaire, en dehors de la zone réservée, mais livre des biens et des produits dans la zone réservée.

Ces "établissements connus" sont soumis à l'obtention d'un double agrément préfectoral spécifique qui les autorise à fournir leur prestation quand nécessaire en zone réservée.

Elle indique que par courrier du 14 février 2006, LSG Sky Chefs lui a confirmé : «nous tenons à réitérer notre confirmation sur le fait que vous pouvez recruter des salariés de toutes nationalités, quelles qu'elles soient, afin de les mettre en poste sur nos sites», confirmation qui concernait notamment Mme Kadiatou X..., dont, après transfert du contrat de surveillance à la Société de Conseil de Sécurité, elle a remis le dossier pour reprise de son contrat de travail par cette dernière.

La SAS Securispace Energie expose que ce n'est qu'à l'occasion de la procédure introduite devant le conseil de prud'hommes par la salariée, en juillet 2006, qu'elle a appris de la salariée que celle-ci n'avait jamais refusé son transfert, alors que jusqu'à ce moment la Société de Conseil de Sécurité lui avait indiqué que c'était Mme Kadiatou X... qui avait refusé le transfert de son contrat, situation qui l'a amenée à solliciter l'intervention forcée de la Société de Conseil de Sécurité.

En conséquence, la SAS Securispace Energie qui soutient que les salariés de nationalité étrangère sont habilités à travailler sur le site LSG Sky Chefs, en conclut que l'intéressée était parfaitement habilitée à travailler sur le site pour le compte de la Société de Conseil de Sécurité après transfert de son contrat et avait accepté de poursuivre son contrat de travail avec le repreneur la Société de Conseil de Sécurité, devenu son employeur.

La SAS Securispace Energie conclut donc principalement à sa mise hors de cause, pour contester à titre subsidiaire les motifs du conseil en ce qu'il lui reproche de ne pas avoir fait «rechercher la vérité sur le refus de transfert de la salariée» et «de s'être mise volontairement en perte de marché» sans se préoccuper du sort des salariés ; elle dénonçe «un procès d'intention» sans fondement alors qu'elle avait parfaitement respecté l'accord du 5 mars 2002.

La SAS Securispace Energie demande donc à la cour :

- d'infirmer le jugement du 13 juillet 2007 pour constater que Mme Kadiatou X... étant devenu salariée de la Société de Conseil de Sécurité, le licenciement opéré par la SAS Securispace Energie est privé d'effet et en conséquence,

- de condamner Mme Kadiatou X... à rembourser à la SAS Securispace Energie la somme de 1270,69 euros au titre de l'exécution provisoire du préavis qu'elle a versé et des congés payés afférents,

- d'autoriser Me Ayache ès qualités et l'Unedic à se libérer de la même somme entre les mains de la SAS Securispace Energie au nom et pour le compte de Mme Kadiatou X...,

- de condamner Me Ayache ès qualités de mandataire liquidateur de la société de Conseil et de Sécurité à payer à la SAS Securispace Energie 2.000 euros pour frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Me Ayache ès qualités de mandataire liquidateur de la Société de Conseil de Sécurité soutient qu'en application de l'article L.282-8 du code de l'aviation civile, la Société de Conseil de Sécurité ne pouvait engager Mme Kadiatou X... sur le site LSG Sky Chefs, ni sur un site aéroportuaire puisqu'elle n'était en avril 2006 ni française ni ressortissante d'un État membre de l'union européenne et ne pouvait donc faire l'objet du double agrément exigé par cet article, ce qui empêchait son transfert.

Me Ayache prétend avoir alors proposé à l'intéressée de travailler sur un autre site de sécurité et non de sûreté, situé à Évry où les obligations fixées par l'article susvisé ne s'appliquaient pas, proposition que Mme Kadiatou X... aurait refusé, avant d'être licenciée par la SAS Securispace Energie.

Soutenant que la SAS Securispace Energie avait précisément perdu le marché à cause de ce problème de double agrément, et rappelant que LSG Sky Chefs avait une activité se déroulant en partie en zone réservée, dans laquelle devait se rendre son personnel livrant les repas, Me Ayache soutient que Mme Kadiatou X... ne pouvait travailler sur le site LSG Sky Chefs, ce qui justifiait la décision de la Société de Conseil de Sécurité de ne pas reprendre son contrat.

Soutenant, que la SAS Securispace Energie avait précisément perdu le marché à cause de ce problème de double agrément, et rappelant que LSG Sky Chefs avait une activité se déroulant en partie en zone réservée, dans laquelle devait se rendre son personnel livrant les repas, Me AYACHE soutient que Mme Kadiatou X... ne pouvait travailler sur le site LSG Sky Chefs, ce qui justifiait la décision de la Société de Conseil de Sécurité de ne pas reprendre son contrat.

La Société de Conseil de Sécurité, par la voix de son mandataire liquidateur, demande donc à la cour d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a condamné solidairement les deux sociétés et de débouter la SAS Securispace Energie de ses demandes fins et les conclusions, sollicitant sa condamnation à lui payer 2.000 euros pour frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'AGS-CGEA Ile-de-France ouest, intimée, demande à la cour de confirmer la décision entreprise et de débouter la SAS Securispace Energie de l'ensemble de ses demandes.

Soulignant que la rupture du contrat LSG Sky Chefs a bien été décidée par la SAS Securispace Energie, ce qui a amené la Société de Conseil de Sécurité, attributaire du marché à envisager la reprise de son personnel, l'AGS soutient que «sauf preuve contraire il semble bien que les agents de sécurité soient amenés à travailler en zone réservée» ce qui obligeait la Société de Conseil de Sécurité à respecter les règles afférentes (article L.282-8 du code de l'aviation civile) et l'empêchait de reprendre le contrat de Mme Kadiatou X....

En conséquence, l'AGS-CGEA, Ile-de-France ouest, demande à la cour d'infirmer le jugement dont appel et de condamner la SAS Securispace Energie au paiement des sommes retenues par ce jugement tout en déboutant la SAS Securispace Energie de l'ensemble de ses demandes.

La salariée a formé appel incident. Elle rappelle que l'accord du 5 mars 2002, relatif à la reprise du personnel en cas de changement de prestataire, prévoit que le salariés qui a six mois d'ancienneté sur le site peut être repris par l'entreprise entrante et doit signer un avenant à son contrat de travail avec celle-ci avant son entrée en service, et que s'il refuse son transfert, il demeure salarié de l'entreprise sortante, qui prendra dans cette hypothèse "une mesure de licenciement pour cause réelle et sérieuse fondée sur le refus d'une modification substantielle de son contrat de travail".

La salariée, qui indique ne pas avoir refusé d'affectation, demande à la cour de confirmer le jugement rendu, de dire que le licenciement n'a pas de cause réelle et sérieuse et de condamner les deux sociétés qui n'ont pas respecté les termes de l'accord du 5 mars 2002 à lui payer les indemnités qui en découlent, tout en y ajoutant 700 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'entreprise compte plus de 11 salariés.

Le salaire brut moyen mensuel de Mme Kadiatou X... est de 1.300 euros.

La convention collective applicable est celle des entreprises de prévention et de sécurité.

LES MOTIFS DE LA COUR :

Vu le jugement du conseil de prud'hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties, soutenues oralement à l'audience, auxquels il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.

Sur la rupture du contrat de travail de Mme Kadiatou X... :

La lettre du 1er avril 2006 convoquait l'intéressé le 5 avril 2006 à un entretien «conformément à la procédure relative à la reprise du personnel mentionné dans la convention collective...».

La salariée expose que la Société de Conseil de Sécurité, dans une lettre du 7 avril 2006, lui a indiqué : «conformément à la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité et dans le cadre du transfert nous ne pouvons procéder à votre reprise et vous affecter ni sur le site LSG Sky Chefs, ni sur un site aéroportuaire faute d'obtention du double agrément engendré par votre nationalité étrangère. De ce fait nous sommes contraints de vous mettre à la disposition de votre entreprise».

Or, le même jour, la Société de Conseil de Sécurité écrivait à la SAS Securispace Energie : «nous vous informons de l'issue des entretiens que nous avions avec Mme X..., M.B , M.F. Ces trois agents ont refusé l'affectation sur le site que nous leur avons proposé». Elle ne mentionne nullement la difficulté relative à l'agrément et à la nationalité de l'intéressée.

La salariée indique n'avoir cependant pas refusé d'affectation et la cour ne peut que relever qu'aucune proposition d'affectation précise n'est mentionnée dans cette lettre. Au-delà, aucune preuve n'est rapportée par la Société de Conseil de Sécurité de ce qu'une affectation, supposément conforme aux exigences légales, aurait été faite par cette société à Mme Kadiatou X... conformément aux termes de l'article 2.5de l'accord du 5 février 2002, qui prévoit que la proposition de reprise soit jointe au projet d'avenant au contrat de travail, ce qui implique qu'elle soit écrite, et prévoit un délai de quatre jours accordé au salarié pour formuler sa réponse.

Enfin aucune preuve du refus de Mme Kadiatou X... n'est rapportée.

Par ailleurs, la Société de Conseil de Sécurité entretient manifestement une confusion entre l'agrément préfectoral que doivent avoir les «entreprises connues» basées en zone aéroportuaire mais appelées à intervenir en zone réservée, et le double agrément préfet et procureur de la République dont doivent bénéficier les agents chargés de mission de sécurité intervenant en zone réservée, agrément qui ne peut être délivré qu'aux personnes de nationalité française ou ressortissants la communauté européenne.

Or en l'espèce, le contrat de prestation de sûreté conclu entre LSG Sky Chefs et, successivement, Arcade, la SAS Securispace Energie puis la Société de Conseil de Sécurité, dans son article 5 intitulé «mission dans le cadre de la prestation» prévoit que " le prestataire s'engage à assurer la sûreté du site :

- contrôle accès du site : contrôler pendant toute la vacation l'entrée et sortie des personnes et des véhicules» avant de préciser «la prestation dévolue au personnel de la Société de Conseil de Sécurité s'exerce sur le site de la société LSG Sky Chefs France situé en zone technique de Roissy». Il ressort des débats que cette zone correspond en réalité à une zone aéroportuaire et non à la zone réservée et la Société de Conseil de Sécurité ne rapporte pas la preuve de ce que les salariés non repris devaient intervenir pour palpations ou contrôles en zone réservée.

Dès lors, et comme l'indiquait LSG Sky Chefs , par courrier du 14 février 2006 adressé à la SAS Securispace Energie : «après lecture des textes et confirmations de notre service juridique, nous constatons que nous ne sommes pas concernés (par l'article L.282-8 du code de l'aviation civile) puisque nous ne sommes ni une entreprise de transport aérien, ni un exploitant d'aérodromes, ni une entreprise qui leur est liée par contrat. Nous tenons à réitérer notre confirmation sur le fait que vous pouvez recruter des salariés de toutes nationalités, quelles qu'elles soient, afin de les mettre en poste sur nos sites».

Dès lors, la Société de Conseil de Sécurité pouvait affecter la salariée sur le site LSG Sky Chefs, auquel elle était déjà précédemment affectée.

En conséquence, le bien-fondé de la remise à disposition de la société sortante la SAS Securispace Energie n'est pas établi et la Société de Conseil de Sécurité porte la responsabilité première de la rupture abusive du contrat de travail.

Sur la base de cette remise à disposition pour des motifs erronés, la SAS Securispace Energie a procédé au licenciement de l'intéressée, après entretien préalable du 17 avril 2006, au motif suivant : «vous avez refusé la nouvelle affectation qui vous a été proposée, celle-ci n'étant pas considérée comme une modification substantielle de votre contrat de travail».

La SAS Securispace Energie lorsqu'elle a procédé à l'entretien préalable, auquel la salariée était présente, et sauf à ce que cet entretien n'ait été considéré et mené que comme une simple formalité sans échanges entre les parties, a nécessairement appris de la salariée elle-même, qu'elle n'avait refusé aucune affectation.

Dès lors la SAS Securispace Energie devait procéder aux vérifications utiles auprès de la société entrante avant de procéder au licenciement et lui faire part du courrier du 14 Février de LSG Sky Chefs qui disait que toutes nationalités étaient possibles.

En ne le faisant pas, la SAS Securispace Energie a donc pris une part active dans la rupture irrégulière et abusive du contrat de travail de Mme Kadiatou X....

Il est toutefois relevé que les salariés ont déclaré à l'audience : «j'étais affectée en zone aéroportuaire et non en zone réservée. J'y contrôlais les passagers et pouvais y opérer des palpations, ce qui n'était pas régulier parce que je n'avais pas la double nationalité mais cela ne nous avait été demandé par notre employeur Arcade puis Securispace ensuite. Nous avions d'ailleurs été formés pour cette mission particulière du temps d'Arcade». Pourtant, cette supposée irrégularité mentionnée par les salariés eux-mêmes, n'est pas confortée par les textes invoqués par les parties, tant que les agents procèdent à des vérifications ou des palpations en zone aéroportuaire.

Cette erreur des salariés ne fait que démontrer la méconnaissance de leurs droits et de leurs limites, dans laquelle ceux-ci ont été laissés par leurs employeurs successifs et qui a facilité leur licenciement.

C'est donc à juste titre que le conseil de prud'hommes a retenu la solidarité entre les deux sociétés quant à l'indemnisation des salariés des conséquences du licenciement.

Compte tenu des circonstances de l'espèce, de l'ancienneté dans son emploi de la salariée lors du licenciement et du préjudice qu'elle établit avoir subi à la suite de celui-ci la cour confirme, dans les limites de la demande, la somme allouée par le conseil de prud'hommes pour ce licenciement abusif.

La cour, confirmera donc la décision entreprise dans toutes ses dispositions.

La Société de Conseil de Sécurité se trouvant en liquidation judiciaire l'AGS-CGEA IDF Est devra garantir les condamnations fixées au passif de celle-ci.

Sur la demande de dommages et intérêts au titre de l'article 700 du Code de procédure civile :

La Cour considère que, compte tenu des circonstances de l'espèce, il apparaît inéquitable de faire supporter par Mme Kadiatou X... la totalité des frais de procédure qu'elle a été contrainte d'exposer. Il sera donc alloué une somme de 700 euros pour frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel.

En revanche, la cour ne fera pas droit à la demande de dommages et intérêts, au même titre formulée par la SAS Securispace Energie, qui gardera la charge de ses frais irréductibles.

PAR CES MOTIFS,

En conséquence, la Cour,

Confirme la décision du Conseil de prud'hommes dans toutes ses dispositions, précisant que s'agissant de la Société de Conseil de Sécurité ces sommes seront fixées au passif de la Société de Conseil de Sécurité, en liquidation judiciaire, représentée par Me Ayache ès qualités de mandataire liquidateur,

Dit que l'AGS devra garantir ces condamnations dans les limites légales,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne solidairement Me Ayache ès qualités de mandataire liquidateur de la Société de Conseil de Sécurité et la SAS Securispace Energie à régler Mme Kadiatou X... somme de 700 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour la procédure d'appel,

Les condamne aux entiers dépens de l'instance.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0135
Numéro d'arrêt : 07/06748
Date de la décision : 13/11/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 13 juillet 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-11-13;07.06748 ?
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